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Haches à collet, talon élargi et lame trapézoïdale

La structure de ces haches est d’une grande simplicité. La lame, dont les bords sont divergents et la section rectangulaire, s’inscrit dans la continuité d’un collet simple, dont le trou d’emmanchement est circulaire, dépourvu de manchon. Le talon est élargi de part et d’autre, conférant à la hache un aspect symétrique de double trapèze. Ce talon est souvent pourvu d’un décor en relief ou en ronde-bosse atteignant parfois un haut degré de complexité.

Malgré cette homogénéité conceptuelle, on observe un certain degré de variabilité, en particulier sur certains exemplaires (lame large, lame à bords très peu divergents, collet peu ou pas élargi par exemple). La relative diversité des options n’influe ni sur la conception, ni sur l’aspect général, ni sur la fonction, ni même sur le mode d’utilisation de l’arme : la largeur du tranchant varie très peu (6,6 cm en moyenne avec un écart-type faible (1,3 cm)175.

Fig. 2.16 : Sous-type H 2.J : variantes.

173 BRENTJES 1987, p. 147, fig. 6.13. 174 AMIET 1986, p. 156.

Les haches

H 2.J.a : Haches à collet, talon élargi non décoré et lame trapézoïdale (pl 84-85)

Cette variante est la plus simple, et correspond au modèle de base décrit précédemment. Elle est attestée en Iran méridional en particulier dans la région de Lut. Elle provient de contextes assez clairs qui permettent de la dater de la seconde moitié du IIIe millénaire. La hache de Tepe Yahya appartient à la période IV B 5, située entre 2400 et 2100 av. J.-C.176, de même que la hache de Damin (fin de la période IV de Bampur)177. Les exemplaires des tombes de Shahdad sont essentiellement attestés dans

le cimetière A (5 exemplaires contre un seul dans le cimetière B), appuyant l’idée d’une forme caractéristique de la région au cours des 3-4 derniers siècles du IIIe millénaire. Les deux haches de Suse, probablement importées, appartiennent à cette période sans davantage de précision178. L’unique exemplaire trouvé à Ur, lui aussi importé, provient de la tombe PG 1846 datée de l’époque néosumérienne. De l’autre côté du monde iranien, on

connaît des haches similaires au Baluchistan (Shahi Tump179). Elles semblent légèrement postérieure, mais furent largement inspirées des modèles iraniens.

Un moule trouvé à Shahdad confirme la production locale de cette variante180 (fig. 2.17).

897, 1147, 1148, 3980, 3989, 3990, 3992, 3996, 4002, 4461, 4462, 4593, 4908

H 2.J.b : Haches à collet, talon élargi décoré et lame trapézoïdale (pl. 86-88)

La seule différence observée avec la variante précédente est la présence, sur le talon, d’un décor souvent exécuté avec un soin remarquable et une grande habileté technique. L’élargissement et l’échancrure de l’arrière du collet varient nettement selon les haches. La forme de la lame est en revanche très standardisée, avec des bords rectilignes très divergents et un tranchant droit ou, plus rarement, arrondi. La seule hache faisant exception (896) possède une lame rectangulaire particulièrement étroite (1,6 cm), de sorte qu’elle aurait presque pu être classée parmi les pics.

Les décors disposés sur le talon sont très variés : il s’agit parfois de simples boutons (2222, 4710), mais les motifs zoomorphes sont plus fréquents. On trouve par exemple un dromadaire bactrien assis (896)181, un suidé (2219)182, des lions183 (4008, 4362) ou un serpent (4472). Certaines scènes sont plus

176 Bien que cette datation fasse toujours débat, les nouvelles datations permettent de préciser que la période IV

B 5 débute aux alentours de 2400 av. J.-C., et s’achève avant 2100 av. J.-C. (LAMBERG-KARLOVSKY 2001, p.

276).

177 TOSI 1970, p. 46-47. 178 TALLON 1987 (A), p. 96. 179 DESHAYES 1960, p. 193-194. 180 HAKEMI 1997, p. 707.Wa.1

181 MAXWELL-HYSLOP 1955, p. 161, fig. 1. 182 POTTIER 1984, p. 147, fig. 13.81.

Fig. 2.17 – Moule de hache H.J.a. (D’après Hakemi 1997, p. 707).

Les haches

complexes : l’une représente deux animaux (dromadaires ?) enlacés184 (2673), une autre montre un

loup poursuivant un bouquetin185 (2132). Plusieurs animaux (caprinés ?) se suivent sur la hache 953186. Les représentations humaines sont aussi attestées. On peut voir un homme assis sur la hache 4361, un autre prostré sur la hache 4363187, et un conducteur de char sur le talon de la hache 2676188.

La datation de ces haches est sensiblement la même que pour la variante précédente, si l’on prend en considération les contextes les plus clairs : la hache de Khurab fut trouvée dans une tombe associée à de la céramique de Bampur V et un mobilier présentant quelques similitudes avec des objets de Hissar III189 ; elle peut donc dater des alentours de 2200-2000 av. J.-C., comme celle de Shahdad, qui peut aussi être plus ancienne. La hache trouvée à Togolok 21 (Salle 180) est datée de la période Namazga V (2200-1800 av. J.-C.)190.

Les autres exemplaires sont de provenance moins claire ou inconnue, essentiellement la Bactriane et la Margiane, le Dasht-e Lut et l’Azerbaïdjan (Saqqiz191). Un exemplaire à bouton trouvé à Chanhu Daro est très probablement importé192.

896, 920, 953, 2132, 2219, 2222, 2673, 2676, 4008, 4361, 4362, 4363, 4463, 4472, 4710

Origine, répartition et datation (Carte 24)

Cette production, caractéristique du dernier tiers du IIIe millénaire au plus tard, semble répondre à un

choix culturel qui comprend un degré d’arbitraire dont le niveau ne nous est pas connu. Il est probable que les artisans des régions concernées (Séistan, Dasht-e Lut, vallée de Bampur, Makran puis Baluchistan et Margiane/Bactriane) ont choisi cette forme en partie pour la simplicité de son concept et ses potentialités offensives. Le savoir-faire ne fut que le développement de la métallurgie du Zagros et de ses piémonts (Tall-i Iblis, Tepe Sialk et Suse), et la forme s’inspire peut-être de modèles anciens d’outils lourds à collet, comme la hache 1146 de Suse193.

D’après la répartition et l’homogénéité des dates, nous supposons qu’il s’agit d’un sous-type caractéristique des zones les plus orientales, occasionnellement exporté vers la Mésopotamie et l’Elam. Les motifs anthropomorphes et zoomorphes, de même que le bouton à l’arrière du talon, présentent une parenté avec des exemplaires du Luristan, mais celle-ci reste lointaine : le style diffère nettement.

183 HAKEMI 1997, p. 638, Gp. 9 et LIGABUE et SALVATORI 1989, p. 235, fig. 103d. 184 CALMEYER 1969, p. 184, fig. 156.

185 NAGEL 1963, pl. 55.121.

186 BOISGIRARD et HEECKEREN 1980 (C), fig. 106.

187 LIGABUE et SALVATORI 1989, p. 229 et 234-235, fig. 98g et 102. 188 CALMEYER 1969, pl. 1.3.

189 MAXWELL-HYSLOP 1955, p. 161. Certains ont proposé une datation bien plus haute, au début du IIIe

millénaire, mais sans argument convaincant (DURING CASPERS 1972, p. 63).

190 VALLÉE-RAEWSKY 2002, p. 61, pl. 6.6. 191 Son origine exacte n’est pas certaine. 192 DESHAYES 1960, p. 194.

Les haches

H 2.K : Haches à collet, sans manchon et lame large rectangulaire ou trapézoïdale non inclinée