• Aucun résultat trouvé

Haches à collet, lame rectangulaire ou trapézoïdale, et crête/contrepoids incliné

légèrement vers le bas (10° à 20° par rapport à l’axe du collet). Le collet, comme pour le sous-type précédent, est constitué d’un simple trou cylindrique. La lame, rectangulaire ou à bords divergents, s’inscrit dans la continuité du collet.

On observe une certaine variabilité au niveau des dimensions et de la forme du contrepoids. Celui-ci est généralement étroit à son extrémité, excepté dans un cas où il est plat et pourvu de rebords, comme pour un marteau (841), ce qui permet de reposer la question de cette éventuelle double fonction, soit comme hache-marteau, soit comme hache-pic293.

Une hache unique 4143 se singularise par un contrepoids en forme de crochet.

Ce sous-type est attesté en Anatolie septentrionale et en Transcaucasie (Carte 28).

Si les lieux d’origine sont souvent connus, les contextes des haches de Transcaucasie ne sont pas nets. Ces haches sont généralement datées de la première moitié du IIIe millénaire, en lien avec la culture

Kuro-Araxe, mais la situation n’est pas clarifiée294. Une hache découverte dans un dépôt à Djerachen

est datée de cette période (2700-2500 av. J.-C.)295.

En Anatolie, la situation est meilleure : la hache 841 provient de la tombe de Horoztepe296 et la hache

2089 se trouvait parmi le riche mobilier de la tombe E d’Alaca Höyük. Une hache à tranchant arrondi provient d’une tombe de Resuloğlu297. Une datation située autour du troisième quart du IIIe millénaire

290 KODAN 1987 ; TAY.

291 Certaines haches sont datées du début du Bronze moyen (BILGI 2001 (B), pl. 12.095). 292 SUMMERS 1991, p. 180, fig. 3.

293 SANTROT et al. 1996, p. 45. 294 PICCHELAURI 1997, p. 13.

295 SANTROT et al. 1996, p. 45, fig. 12. 296 ÖZGUÇ et AKOK 1958, pl. 17.10. 297 YILDIRIM 2006, p. 10, fig. 14d.

Les haches

est donc très probable, ce qui permet de supposer que les artisans anatoliens se sont inspirés des formes transcaucasiennes préexistantes.

841, 1883, 2089, 2581, 4066, 4143, 4270, 4271, 4655, 6452, 6459

Les haches à collet : essai de synthèse (cartes 74-77 ; aa. 39 et 49)

Les plus anciennes haches à collet sont issues des premiers outils ou armes doubles (hache-herminette, hache-marteau et hache-hache) apparues dans les Balkans à la fin du Ve millénaire (culture de

Gumelnitsa / Karanovo VI). Cette technique d’emmanchement, résistante et simple, a fort logiquement été adoptée dans les régions orientales, accompagnant les progrès de la métallurgie du cuivre. La première étape a eu lieu dans le nord du Caucase et en Iran, avec la diffusion probable de ces objets à double fonction, conçus en moule d’argile monovalve. La deuxième étape, à partir de 3600 av. J.-C., consiste en l’adaptation du système de collet aux haches les plus simples (H 2.K.a) par les artisans de la culture de Maïkop, qui font figure de précurseurs en matière de métallurgie. Ces haches rectangulaires sont dépourvues de manchon, dans la tradition des outils doubles. Loin de cette région, les métallurgistes de la culture chalcolithique du Ghassoulien conçoivent, parmi le mobilier très varié de Nahal Mishmar, quelques haches à collet coulées à la cire perdue. Un exemplaire unique, décoré de moulures, est de forme simple (H 2.R.d), alors que deux autres sont pourvues d’un manchon (H 2.F.e). Bien que cet essai n’ait pas connu de suite et demeure très simpliste dans sa conception298, il s’agit du

premier exemple de hache à collet et manchon tubulaire.

Le BA I n’est pas le cadre d’une évolution remarquable : le Caucase nord reste la région principale de production et d’utilisation des haches à collet. Elles ne sont plus attestées au Levant.

À partir des alentours de 3000/2800 av. J.-C., la situation change rapidement. Le concept est adopté par les bronziers de la culture Kuro-Araxe (Transcaucasie et Anatolie orientale), et ceux des Balkans. Depuis les rives occidentales de la mer Caspienne (type H 2.M.a puis H 2.L.a) jusqu’à la Chalcidique (H 2.N), le concept des haches à collet commence à connaître un certain succès. Celles-ci sont désormais toujours fabriquées en moule bivalve, comme ceux retrouvés à Norşuntepe299 (ill. 129) ou Vinkovci (Croatie)300 (ill. 131). Plus au sud, les premières haches font leur apparition en Mésopotamie,

à Tell Asmar (DA I)301 et Suse (« XVIIIe et XXVIIe siècles »)302 (type H 2.B.a).

Toutefois, c’est vers le milieu – et au cours du troisième quart – du IIIe millénaire que les haches à

collet commencent à intégrer l’armement sumérien de façon remarquable, à tel point qu’elles en deviennent une constituante essentielle au même titre que les lances à soie et les poignards. La hache plano-convexe à collet de Sumer (H 2.C) est aussi produite à la même époque au Luristan et à Suse (H 2.C.d-e).

298 Nous parlons ici de sa conception formelle, et non technique. En effet, il s’agit d’une hache plate greffée au

milieu à un manchon tubulaire. Les deux formes sont bien connues par les artisans locaux. Il ne s’agit donc pas encore d’une hache à collet conçue comme un tout, mais de la fusion de deux formes connues.

299 MÜLLER-KARPE 1994, pl. 43.1.

300 BORN et HANSEN 2001, p. 217, fig. 159. 301 MÜLLER-KARPE 2004, p. 6, pl. 7.69. 302 TALLON 1987 (B), p. 149, fig. 69-70

Les haches

À la même époque, on assiste à une diversification des formes et à une multiplication des types dans différentes régions, en particulier l’Anatolie du nord qui est le cadre du développement de plusieurs types distincts (H 2.P, H 2.Q, H 2.R).

Les derniers siècles du IIIe millénaire sont l’un des points culminants du développement des haches à collet. Elles continuent à se développer dans les Balkans et en Transcaucasie (H 2.L.b), et sont adoptées dans plusieurs régions : en Syrie du nord (H 2.O.h-i), en Iran puis jusqu’en Bactriane (types H 2.I et H 2.J). En Mésopotamie, la hache dite « akkadienne » (H 2.F.a) apparaît mais ne remplace pas la hache sumérienne. La zone la plus innovante se situe, désormais et pour longtemps, au Luristan, avec les haches à crête et à digitations (H 2.D), parfois ornées de cannelures, moulures géométriques ou zoomorphes, voire d’animaux en ronde bosse. Les options sont variées, et la grande qualité des armes reflète à la fois un aboutissement artisanal et une grande maîtrise esthétique. De plus la production abondante303 place la région parmi les grands centres de la métallurgie orientale, bien que les lacunes en matière de fouille d’ateliers ne soient pas comblées. Plus loin vers l’est, la région du Dasht-i Lut a livré des haches en forme de double trapèze (H 2.J), que l’on connaît aussi autour de 2000 av. J.-C. en Bactriane. Les artisans de cette dernière région font preuve d’une grande originalité au cours de la période Namazga V, avec le développement d’un type autonome (H 2.I), inspiré en partie de l’Iran occidental pour la conception générale, mais dont les caractéristiques sont purement locales (ailerons, motifs zoomorphes particuliers tels que les chevaux, éléphants, hybrides, et l’œil apotropaïque).

À partir des alentours de 2000 av. J.-C., les principaux types connaissent une évolution morphologique nette, mais restent toutefois en continuité avec les précédents. Les espaces de diffusion changent : bien que certains types du BM I soient très localisés (H 2.H en Susiane, H 2.O.g en Anatolie, H 2.F.b-c au Luristan et dans le Hamrin), d’autres sont attestés dans plusieurs régions (H 2.O.a en Transcaucasie, Mésopotamie du nord et Anatolie centrale, H 2.O.b dans le Hamrin, à Suse et en Anatolie, H 2.F.d dans le Hamrin, à Kültepe et au Levant par exemple).

La période se caractérise par l’emploi récurrent du collet décalé. De plus, deux options de tranchants prédominent, correspondant à deux modes d’utilisation : le tranchant très épanoui adapté à la taille d’une part, et le tranchant étroit adapté au choc et à la perforation d’autre part. Cette deuxième option est choisie au Levant méridional, qui adopte la hache à collet très tardivement, vers 1900/1850 av. J.- C., légèrement après les haches fenestrées H 4. Les haches étroites à encoche H 2.E.a sont typiques de la seconde moitié du BM I. Elles sont remplacées au BM II par des modèles plus élaborés, qui sont même diffusés à Chypre après 1700 av. J.-C.

En résumé, de l’origine de l’emmanchement à collet dans les Balkans vers 4500-4000 av. J.-C à son adoption au Levant méridional vers 1850 av. J.-C, les vingt siècles d’histoire de l’armement et de l’artisanat oriental ont vu l’adoption progressive puis rapide des haches à collet dans la plupart des aires culturelles. Les principales exceptions sont l’Égypte, qui a fait preuve de conservatisme en gardant la traditionnelle hache plate semi-circulaire ou angulaire H 1, le sud de l’aire égéenne, où les

303 L’important pillage mis en œuvre au Luristan a évidemment contribué à livrer une grande quantité d’armes et

d’autres objets en métal, ce qui conduit à relativiser en partie ces données quantitatives. Toutefois, ce fait ne remet pas en cause l’abondance du mobilier produit et la diversité des décors.

Les haches

haches doubles sont préférées et l’Arabie orientale, où les haches restent rares avant la fin du IIe

millénaire (Carte 30).

Ces éléments essentiels de l’armement oriental continuent d’évoluer jusqu’au premier millénaire. La documentation devient cependant sporadique à partir du Bronze récent, excepté au Levant, en Anatolie, en Urartu / Transcaucasie et surtout au Luristan. Cette région demeure la plus avancée dans la conception et la fabrication des haches à collet, avec une technique parfaitement maîtrisée et un incontestable aboutissement morphologique et esthétique.

Les haches

TYPE H3 :LES HACHES EN EPSILON

La forme bien spécifique de ces haches les a fait connaître depuis longtemps déjà. Elles ont reçu divers noms liés à cette morphologie et à ses variantes (haches en epsilon, crescentic axes ou haches en croissant de lune par exemple). Reconnues de longue date, elles ont aussi fait l’objet de plusieurs synthèses304.

Il s’agit d’une arme à emmanchement latéral et tranchant transversal. Le tranchant est allongé (jusqu’à 53 cm) et courbe. Trois éléments, situés aux deux extrémités et au centre, servent à fixer l’armature métallique au bois du manche.

À la différence des autres haches, pour lesquelles la combinaison du poids et d’une zone d’impact limitée sont recherchées en vue d’une optimisation des coups portés, l’accent est mis ici sur le tranchant. Leur longueur, leur légèreté et leur finesse montrent qu’elles sont utilisées avant tout comme armes de taille, à un seul tranchant. Par la préhension et le mode d’action (percussion lancée), elles s’apparentent donc aux haches, et par leur forme aux armes de taille : cette mixité, rare en matière d’armement, est tout à fait remarquable, et caractérise peut-être un certain archaïsme de cette forme.

L’apparente homogénéité de la forme masque en réalité la multiplicité des options morphologiques, dimensionnelles et d’emmanchement. La lame peut en effet être large ou fine, régulière ou carénée, plate ou pentagonale, longue (53 cm) ou courte (14 cm). Les modes d’emmanchement varient : il peut s’agir de trois talons ou de trois languettes bien définies, insérées dans le manche, ou enroulées autour de celui-ci. Une fois emmanchée, la hache se présente comme une arme courbe dont les ouvertures formées par la présence des languettes sont à peine visibles, excepté pour certaines variantes. La longueur totale ne peut être restituée qu’à partir des représentations iconographiques, et semble se situer entre 50 cm et 80 cm305.

La classification proposée se base avant tout sur l’emmanchement, puis sur la forme de la lame. La pertinence de ces critères tant au niveau chronologique que géographique a déjà été remarquée par C. Hillen306 et J. N. Tubb307.