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1.5 H2A.Z

1.5.4 H2A.Z et la transcription

H2A.Z aurait des rôles positifs et négatifs sur la régulation de l’expression des gènes. À titre d’exemple, chez la levure, H2A.Z est enrichi à ∼60% des promoteurs des gènes, par- ticulièrement des gènes inductibles non-induits, réprimés ou à leur état basal (Guillemette

et al., 2005;Li et al.,2005; Millar et al., 2006), où il semble préparer la chromatine à la

transcription. En effet, suite à sa suppression, une induction réduite des gènes est observée. Chez l’humain, bien que la présence d’H2A.Z aux promoteurs ait initialement été associée à l’expression des gènes (Barski et al., 2007), des études subséquentes ont révélé la pré- sence d’H2A.Z aux promoteurs de gènes actifs et inactifs (Ernst and Kellis,2010; Gevry

et al., 2007,2009), suggérant un rôle plus complexe et nuancé d’H2A.Z aux promoteurs.

Toutefois, la façon dont H2A.Z pourrait avoir des rôles positifs et négatifs dans la régula- tion de la transcription reste pour l’instant incomprise. Une hypothèse intéressante est celle ou les MPTs d’H2A.Z permettraient de dicter ces fonctions répressives ou activatrices, probablement en attirant des "lecteurs-écrivains ou -effaceurs" répressifs ou actifs. Des ré- sultats supportent cette hypothèse. Ainsi, l’acétylation de H2A.Z, H2A.Zac, est associée spécifiquement aux promoteurs des gènes actifs, alors qu’H2A.Z non acétylé est associé aux gènes inactifs (Valdes-Mora et al., 2012). De plus, H2A.Z est ubiquitiné dans l’hété- rochromatine (Sarcinella et al., 2007). Une hypothèse complémentaire à la précédente est celle où H2A.Z faciliterait la liaison de différentes protéines liant l’ADN ayant une activité répressive ou activatrice selon le cas (Weber and Henikoff,2014). Le fait qu’H2A.Z aide au recrutement de l’ARNPII au promoteur (Adam et al.,2001;Hardy et al.,2009;Gevry et al.,

2009), un phénomène qui sera décrit dans les prochains paragraphes, et interagisse égale- ment avec HP1α, une protéine impliquée dans le silencing (Fan et al., 2004), supportent cette hypothèse. Toutefois, le fait que H2A.Z puisse être localisé dans les nucléosomes bor- dant la RLN aux TSSs (Schones et al.,2008;Jin et al.,2009), mais également à des FT-SLs situés dans le promoteur des gènes (Gevry et al.,2007,2009), où il pourrait avoir des rôles distincts, pourrait également avoir amené une confusion dans l’identification du rôle spéci- fique d’H2A.Z aux promoteurs. Aussi, un des défis dans l’identification du rôle d’H2A.Z dans la transcription est de discerner entre son rôle direct, induit par les propriétés intrin- sèques du nucléosome contenant H2A.Z, ou indirect, induit par les protéines qu’il recrute, qui pourraient être soit activatrice ou répressive, ou par le positionnement des nucléosomes contenant H2A.Z et son effet inhérent, qui pourrait être soit occlusif ou permissif, sur l’ex- position de régions régulatrices. Un mélange de ces effets pourrait également être en jeu. Les connaissances actuelles sur ces divers aspects de l’influence possible d’H2A.Z seront introduites dans les prochains paragraphes.

D’abord, plusieurs évidences montrent qu’un des rôles d’H2A.Z aux promoteurs serait de recruter l’ARNPII. Ainsi, chez la levure, H2A.Z, contrairement à H2A, interagit avec la sous-unité Rpb1 de l’ARNPII (Adam et al., 2001). De plus, l’invalidation de HTZ1 (htz1∆), le gène qui code pour H2A.Z chez la levure, entraîne une diminution du recru- tement de l’ARNPII aux promoteurs de 10/10 gènes testés. Chez l’humain, des résultats de ChIP-chip (chromosomes 19 et 22) montrent une corrélation entre la présence d’H2A.Z

aux TSSs et celle de l’ARNPII, autant à des gènes transcrits que non-transcrits et enrichis en ARNPII en pause (Hardy et al., 2009). De plus, une diminution d’H2A.Z, induite par ARNi, entraîne une diminution du signal moyen de ChIP-chip de l’ARNPII aux TSSs des gènes et une diminution de la quantité totale d’ARNPII associée à la chromatine (Hardy

et al., 2009), et empêche le recrutement de l’ARNPII à 2/2 gènes testés par ChIP-qPCR

(Hardy et al.,2009;Gevry et al.,2009).

En plus de son rôle dans l’initiation de la transcription, plusieurs évidences montrent qu’H2A.Z serait également impliqué dans l’élongation. En effet, le taux d’élongation de l’ARNPII dans le gène GAL10p-VSP13 est ∼25% plus lent chez la levure htz1∆ (Santisteban et al.,

2011). De plus, chez la drosophile, une anti-corrélation existe à l’échelle du génome entre la présence d’H2A.Z et celle d’ARNPII qualifiée de "stagnante", i.e. une ARNPII qui, ayant rencontré la barrière physique qu’est le nucléosome, recule/arrête jusqu’à ce que le nucléo- some soit suffisamment déstabilisé ou évincé pour permettre la poursuite de l’élongation, suggérant que la présence d’H2A.Z facilite le passage de l’ARNPII à travers le nucléo- some (Weber et al.,2014). Ce type d’ARNPII est surtout enrichi devant le nucléosome +1 situé juste après le TSS, une région fortement enrichie en H2A.Z, mais également dans le corps des gènes où H2A.Z est également détecté. Suite à la diminution de l’incorporation d’H2A.Z, induite par l’utilisation de ARNi contre H2A.Z ou contre une sous-unité de Swr1, un augmentation de l’ARNPII "stagnante" est observée à ces régions. Toutefois, la façon dont H2A.Z contribue à diminuer le phénomène de barrière reste inconnue, mais étonnam- ment, la présence d’H2A.Z corrèle avec une plus grande rétention du tétramère (H3-H4)2.

Les auteurs ont donc proposé le modèle suivant : la présence du dimère H2A.Z-H2B, ou plutôt son éviction plus facile lors du passage de l’ARNPII permettrait à l’ARNPII élonga- trice de surmonter plus rapidement l’effet de barrière, et ce sans démanteler complètement le nucléosome. Ainsi, contrairement aux nucléosomes canoniques, supposés plus stables et qui doivent être complètement évincés, le passage de l’ARNPII à travers des nucléosomes contenant H2A.Z entraînerait la formation de tétrasomes. Le fait qu’H2A.Z soit également enrichi chez l’humain dans le nucléosomes +1 (Schones et al., 2008) et dans le corps des gènes, où il semble évincé par la transcription (Hardy et al., 2009), suggère que le rôle d’H2A.Z comme facilitateur de l’élongation pourrait être conservé chez l’humain. Ainsi, l’étroite collaboration entre H2A.Z et l’ARNPII aux promoteurs fait d’H2A.Z un régula- teur extrêmement important de la transcription, et ce, probablement autant par ses effets

directs que indirects.

La présence d’H2A.Z à des enhancers potentiels et à des FT-SLs (Barski et al.,2007;Gevry et al.,2007;John et al., 2008;Jin et al.,2009;Gevry et al., 2009;Ernst and Kellis,2010;

He et al., 2010) suggère un rôle encore plus large d’H2A.Z dans la transcription. Toute-

fois, celui-ci a été très peu caractérisé. Pour l’instant, et tel que discuté précédemment, le modèle le plus répandu est que l’instabilité engendrée par la présence d’H2A.Z au sein du nucléosomes pourrait faciliter la liaison des FTs aux enhancers. Quelques récentes études abondent dans ce sens. Notamment, la présence d’H2A.Z dans le nucléosome central à 5/5 AR-SLs et son départ supposé lors de la liaison de AR ((Fig. 1.20c) et section 1.4.4) (He

et al., 2010). Toutefois, la généralisation de ce mécanisme à l’ensemble des FT-SLs ou

enhancerset le rôle d’H2A.Z, à savoir si H2A.Z est requis pour le recrutement des FTs, n’ont pas été établis. Par ailleurs, au cours de la différentiation des cellules souches em- bryonnaires murines (SEm) en progéniteurs hépatiques (PHm), 16% des régions acquérant le facteur pionnier FoxA2 dans les PHm sont pré-enrichies en H2A.Z dans les SEm, mais pas dans les PHm, et 84% de ces régions sont libres de nucléosome dans les PHm, mais pas dans les SEm (Li et al.,2012). De façon intéressante, une augmentation du taux d’occupa- tion des nucléosomes aux FoxA2-SL testés est observée suite à la diminution d’H2A.Z par ARNi, suggérant que la présence d’H2A.Z précède et participe à la perte des nucléosomes, ce qui faciliterait la liaison de FoxA2. Malheureusement, l’effet sur la liaison de FoxA2 n’a pas été étudié, empêchant de conclure sur le rôle possible d’H2A.Z comme facilitateur de la liaison des FTs. Finalement, le fait qu’à certains FT-SLs, H2A.Z soit présent avant et après l’activation, alors qu’à d’autres H2A.Z serait seulement présent avant la liaison du

FT (John et al., 2008; Gevry et al., 2009), suggère que plusieurs mécanismes pourraient

être en jeu.

Finalement, H2A.Z pourrait influencer la transcription en régulant le positionnement des nucléosomes aux éléments régulateurs. En effet, des études initiales montrent que des nu- cléosomes contenant H2A.Z adoptent une position différente des nucléosomes canoniques in vitro(Fan et al., 2002; Thakar et al., 2009). De plus, chez la levure, 90% des nucléo- somes contenant H2A.Z sont considérés bien positionnés (Albert et al.,2007), H2A.Z est présent, entre autres, dans les nucléosomes -1 et +1, les deux nucléosomes bien positionnés bordant la RLN aux TSSs (Raisner et al., 2005; Guillemette et al., 2005) et la présence

d’H2A.Z corrèle positivement avec l’organisation canonique aux TSSs (Guillemette et al.,

2005). Aussi, le nucléosome +1 des htz1∆ montre une modification de son positionnement en translation de 20 pb à 1/1 gène testé (Guillemette et al.,2005). Par ailleurs, chez l’hu- main la présence d’H2A.Z aux TSSs serait beaucoup plus étendue. Le profil moyen des nucléosomes contenant H2A.Z montre un enrichissement aux nucléosomes bien position- nés -3, -2, +1, +2 et +3 des gènes actifs, mais pas au nucléosome -1 (Schones et al.,2008). Toutefois, et tel qu’expliqué précédemment à la section 1.4.5, l’absence d’H2A.Z immé- diatement devant le TSS (nucléosome -1) pourrait être un artefact dû à l’extrême instabilité du nucléosome contenant à la fois H2A.Z et H3.3, absents de la plupart des études (Jin

et al., 2009). Le même phénomène biaiserait également le profil des nucléosomes aux en-

hancers. Ainsi, quel serait le positionnement des nucléosomes aux TSSs et aux FT-SLs si ces nucléosomes instables étaient pris en considération ? Il est pour l’instant difficile de répondre à cette question car des profils moyens ont été utilisés lors de leur description. Néanmoins, un positionnement aléatoire des nucléosomes enrichis en H2A.Z-H3.3 a été décrit aux TSSs et à des enhancers potentiels (Jin et al., 2009) et peut être interprété de deux façons. Premièrement, que dans l’ensemble de la population, les nucléosomes à ces régions d’∼400 pb n’occuperaient jamais une position préférentielle. Deuxièmement, des positions préférentielles existerait, mais elles ne pourraient être visualisées par des analyses de signal moyen. De façon intéressante, Gévry et al. (2009) ont observé que l’incorporation d’H2A.Z au promoteur de TFF1 lors de son induction est essentielle à la stabilisation des nucléosomes NucE et NucT (Fig. 1.9 et section 1.2.3) dans une position préférentielle fa- vorisant la liaison de ERα et de la machinerie transcriptionnelle, et permettant l’expression du gène. Ainsi des questions demeurent concernant l’impact de H2A.Z sur le positionne- ment des nucléosomes aux régions régulatrices, particulièrement aux enhancers, sa relation avec la liaison des FTs aux FT-SLs ainsi que son effet sur l’activité de la région.