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1.4 Le positionnement des nucléosomes

1.4.5 Des alternatives aux modèles classiques

En 2012, les modèles d’organisation canonique des nucléosomes aux promoteurs et aux FT-SLs ont été remis en question grâce à l’utilisation d’une nouvelle méthode, CAGT (Clustered AGgretation Tool) (Kundaje et al., 2012). Celle-ci permet de séparer le signal associé au taux d’occupation par les nucléosomes en sous-groupes distincts partageant un même positionnement des nucléosomes, et ce, indépendamment de l’intensité du signal. Ces analyses font appel aux méthodes de clustering non-supervisé, afin d’isoler les dif- férents profils, et de clustering hiérarchique agglomératif, afin de combiner ensemble les profils similaires. Ainsi, une vingtaine de profils différents ont été identifiés autour d’un ensemble de TSS (Fig. 1.21a) dans les cellules K562 et GM12878 et aucun ne correspond à l’organisation canonique identifiée à partir du profil moyen des nucléosomes aux promo- teurs des gènes actifs (Fig. 1.19), où des nucléosomes bien positionnés émanent de part et d’autre de la RLN. Au contraire, les différents positionnements des nucléosome iden- tifiés sont asymétriques, i.e. les nucléosomes bien positionnés sont situés soit avant, soit après le TSS. Le modèle canonique serait donc un artefact des méthodes usuelles fondées sur l’analyse du signal moyen. Par ailleurs, une nuance est également apportée à la rela- tion entre l’expression génique et l’organisation des nucléosomes aux promoteurs. En effet, bien que les sous-groupes qui présentent le plus fort positionnement soient ceux les plus

exprimés, tel que observé précédemment (Schones et al.,2008), il ne semble pas y avoir de relation claire entre le taux d’expression génique et la topologie avant/après ou l’asymétrie. D’autres études sont toutefois nécessaires afin de déterminer la signification biologique de ces différents profils d’organisation des nucléosomes et d’approfondir si un lien existe entre eux et la transcription des gènes associés ou la liaison des protéines impliquées dans la transcription.

100%

Distance par rapport au TSS (pb)

Signal

(a)

Distance par rapport au FT-SL Signal

(b)

FIGURE 1.21 –Les principaux profils du positionnement des nucléosomes autour des TSSs

(a) ou des FT-SLs (b) dans les cellules K562. Figure adaptée de (Kundaje et al.,2012).

Une vingtaine de profils différents ont également été identifiés autour d’un ensemble de FT-SLs, et plus de 90% sont asymétriques (Fig. 1.21b) (Kundaje et al., 2012). Ainsi, bien

que le profil symétrique (modèle classique, Fig. 1.20) existe, il ne serait qu’une exception observée à certains FTs, tel que CTCF où il avait déjà été identifié (Fu et al.,2008) et où il représenterait ∼60% des sites (Kundaje et al.,2012). En outre, la structure asymétrique de la chromatine autour des FT-SLs sous-entend que ces régions possèderaient une orientation spécifique, tel le sens de la transcription pour les TSSs, dont l’établissement et la fonction demeurent inconnus jusqu’à ce jour. Ainsi, la structure locale de la chromatine aux FT-SLs seraient plutôt hétérogènes et asymétriques. Toutefois, comme ce modèle remet en ques- tion les conclusions de la majorité des études effectuées jusqu’à maintenant, notamment celle de He et al. (2010) parue dans la revue Nature Genetics et amplement citée et reprise comme modèle général par la suite (Ong and Corces, 2011), où une modélisation fondée sur le profil symétrique de H3K4me2 permet d’identifier des enhancers connus liés par le récepteur des androgènes (AR) et de prédire d’autres enhancers, d’autres analyses sont nécessaires afin d’éclaircir la nature artificielle du profil symétrique.

Une autre étude publiée en 2012, cette fois chez la levure, a également montré la perti- nence de s’attarder au positionnement des nucléosomes sans recourir à des analyses du signal moyen du taux d’occupation (Zaugg and Luscombe, 2012). D’abord, les promo- teurs peuvent être classés en "fermés" et "ouverts" selon la taille de leur RLN. Les promo- teurs "ouverts" sont enrichis en gènes exprimés ("ON", indépendamment du niveau d’ex- pression), contrairement aux promoteurs fermés qui sont enrichis en gènes non-exprimés ("OFF"). De plus, les promoteurs "ouverts" et "ON" ont des nucléosomes -1 et +1 mieux positionnés et plus occupés que les promoteurs "ouverts" et "OFF". En revanche, pour les promoteurs "fermés", le nucléosome +1 est bien positionné que dans la catégorie "ON" et le positionnement du nucléosome -1 reste toujours aléatoire peu importe l’état trans- criptionnel "ON" ou "OFF". De façon intéressante, les promoteurs "fermés" ont davantage de FT-SLs, chevauchant majoritairement le nucléosome -1, que ceux "ouverts", suggérant qu’une compétition transitoire entre FTs et nucléosomes pourrait contribuer au position- nement aléatoire de ce nucléosome et expliquant comment ces promoteurs "fermés" pour- raient quand même permettent une transcription "ON".

Une des plus importantes remises en question des modèles canoniques de positionnement des nucléosomes aux régions régulatrice provient des récentes études où il a été démontré que les régions accessibles peuvent en fait être associées à un fort taux d’occupation par

les nucléosomes (Tillo et al.,2010;Nili et al.,2010) et un fort degré de renouvellement des histones (Mito et al., 2007), mais également être occupées par des nucléosomes instables contenant les variants d’histones H3.3 et H2A.Z (section 1.5) (Jin and Felsenfeld, 2007;

Jin et al.,2009;Henikoff et al.,2009). Cette réalité serait passée inaperçue car ces nucléo-

somes présents aux régions accessibles seraient, soit plus sensibles à la sur-digestion par la MNase(Weiner et al.,2010;Xi et al.,2011), soit plus sensibles aux concentrations de sels habituellement utilisées (Jin and Felsenfeld,2007;Jin et al.,2009;Henikoff et al.,2009) et auraient tendance à être perdus durant la préparation de la chromatine si cette dernière n’a pas subi un pontage au formaldéhyde. Ces résultats suggèrent que, plutôt que d’être libres de nucléosome, les régions régulatrices pourraient être le théâtre d’un processus continu où la composition particulière de la chromatine, permettant une structure locale dynamique, et où l’instabilité des nucléosomes présents seraient essentielles au maintien de l’accessibilité de la chromatine.