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222. Lorsque la « guerre contre le terrorisme » fait usage de la force armée à

l’intérieur d’un Etat, entre cet Etat et un groupe rebelle, ou encore entre des groupes

rebelles qui s’opposent à l’intérieur de l’Etat, la situation peut alors être qualifiée de

CANI

351

. Dit autrement, lorsque les hostilités atteignent un certain nouveau d’intensité,

et ou, se prolongent au point où l’on pourra plus parler de troubles intérieurs ou

350 A cet égard, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a clairement noté dans ses décisions sur l’adoption de mesures de précaution à l’égard des personnes détenues à Guantanamo Bay que les interrelations entre les droits de l’homme internationaux et le droit international humanitaire en situations de conflits armés sont variables. A certains égards, les protections peuvent se compléter et se renforcer mutuellement, partageant un noyau commun de droits non dérogeables et l’objectif commun de promouvoir la vie humaine et la dignité. A d’autres égards, le critère permettant d’évaluer le respect d’un droit particulier en situation de conflit armé peut différer de celui qui s’applique en temps de paix (voir note au Gouvernement des Etats-Unis, 23 juillet 2002).

d’émeutes sporadiques ; ou encore lorsque les Parties peuvent être définies et

identifiées. Plus encore, lorsque les limites territoriales du conflit armé peuvent être

identifiées et définies. Et enfin, lorsque le début et la fin du conflit peuvent être définis

et identifiés.

223. La qualification juridique d’un conflit est fondamentale en ce sens qu’elle

peut éclairer sur le régime juridique applicable en la matière. C’est dire en effet que, les

règles applicables diffèrent d’une situation à une autre. Ainsi, les régimes juridiques

susceptibles d’être appliqués ne sont pas impérativement identiques, selon que le

conflit en question est qualifié soit de CAI ou non international.

224. Certes, il existe en dehors des types de conflits précédemment cités,

d’autres types de conflits armés qui peuvent être qualifiés de : tensions ou troubles

internes. La différence fondamentale entre eux est que les derniers ne sont pas

couverts par le DIH. En d’autres termes, ils ne rendent pas obligatoire l’applicabilité du

DIH. D’où la nécessité de s’interroger si les règles du DIH s’appliquaient ou pas à la

guerre en Afghanistan. En d’autres termes, dans quelles conditions la guerre

américaine en Afghanistan pourrait être qualifiée de CAI ? Une réponse affirmative à

cette interrogation impliquerait incontestablement l’effectivité de l’applicabilité du

DIH.

225. En effet, le critère fondamental qui permettrait de déterminer l’existence

d’un CAI est l’identité des belligérants impliqués dans le conflit. Pour que celui-ci soit

juridiquement qualifié d’international, il faut qu’il oppose au minimum deux Etats. Dès

lors que ce critère est rempli, on peut cependant parler de CAI.

Cette implication des Etats en conflit armé est accompagnée du recours à la force

armé par le ou plusieurs Etats contre un ou plusieurs autres Etats. C’est d’ailleurs ce

qu’affirme sans détour la CPIY à travers l’une de ses jurisprudences en reconnaissant

l’existence d’un CAI lorsqu’il y a un recours à la force armée entre Etats

352

. Cette

affirmation rejoint par analogie la constatation soutenue par le Professeur Eric DAVID,

« Si l’Etat intervient dans le conflit armé en envoyant des forces aux côtés d’une des

352 Cf. CPIY, Chambre d’appel, Le Procureur c. Tadic, Arrêt relatif à l’appel de la défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 2 octobre 1995.

Parties, il ne fait aucun doute qu’entre les forces de l’Etat tiers et les forces de la Partie

combattue, le rapport conflictuel est international. Chacune de ces forces appartient à un

Etat différent, et il importe peu que l’Etat tiers intervenant ne reconnaisse pas son

adversaire comme représentent l’Etat où à lieu l’intervention »

353

. Dans ce cas de figure,

les Etats-Unis sont dans l’obligation de respecter les lois de l’Etat Afghan et, poursuit

Eric DAVID, « on peut considérer que toutes les relations entre organes de l’occupant et

la population de l’occupé relèvent du droit des conflits armés »

354

.

226. Rappelons que, l’existence d’un CAI est jugée nécessaire pour diligenter

l’application des CG comme le stipule l’une des dispositions de celles-ci : « En dehors

des dispositions qui doivent entrer en vigueur dès le temps de paix, la présence

Convention s’appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé

surgissant entre deux ou plusieurs des Hautes Parties contractantes, même si l’état de

guerre n’est pas reconnu par l’une d’elles. La Convention s’appliquera également dans

tous les cas d’occupation de tout ou partie du territoire d’une Haute Partie contractante,

même si cette occupation ne rencontre aucune résistance militaire »

355

. Le fait que la

guerre en Afghanistan rendre sans difficulté dans le « moule juridique » genevois, la

question relative à la détermination de la nature du sujet n’est plus posée.

227. Certes, Al-Qaïda ne soit pas considérée comme une Partie contractante en

vertu du droit des conflits armés. Il est clair que, ce n’est pas le cas pour le

gouvernement Afghan constitué par les taliban, même si, ce régime particulier n’était

pas reconnu par l’ensemble de la Communauté internationale. Mais, le fait qu’il soit

Partie aux CG change la « donne juridique ». En plus, ce gouvernement taliban était

reconnu par certains pays. Plus encore, la coalition formée autour des Etats-Unis

contre le régime taliban renforçait le caractère international de ce conflit.

228. Le discours du Président BUSH dans lequel il promettait une « guerre

globale » contre l’ « Axe du mal » constitué par les « Etats voyous » et, en particulier

contre les membres d’Al-Qaïda et les taliban; apportait une valeur ajoutée au caractère

353 E. DAVID, Principes de droit des conflits armés, Bruylant, Bruxelles, 1999, p. 129.

354 Idem.

international de ce conflit. En effet, il a été globalement admis qu’une pluralité de

dispositions issues principalement des Conventions tant de La Haye que de Genève

était désormais constitutive de normes de droit international coutumier

356

.

229. Cependant, il est clairement établi par le droit humanitaire conventionnel

que, le CAI est celui qui oppose deux ou plusieurs Etats Parties aux CG. Ainsi, lorsqu’on

est en présence d’une occupation militaire, tel fut le cas de l’Irak

357

. Les règles

applicables aux CAI sont des CG de 1949 et le PA I de 1977, y compris les règles de

droit international humanitaire coutumier, compilées par le CICR et publié en 2005.

Ceci étant, la campagne militaire lancée par la coalition en Afghanistan en octobre

2001 reste sans ambiguïté une guerre au sens premier du terme

358

.

230. Il faut bien comprendre que ce discours belliqueux annonciateur du

déploiement des troupes américaines sur le sol afghan suffisait à qualifier le conflit