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Le groupe de stimulations sensorielles

Dans le document DEPENDANCE ET STIMULATION DES SENS (Page 38-42)

2.1- Naissance du projet

L’idée de créer un groupe de stimulations sensorielles m’est venue en réponse à la question : «quels médiateurs mettre en œuvre auprès de patients déments de type Alzheimer pour maintenir le plus longtemps possible leur autonomie ?»

Rapidement le choix de proposer aux patients un travail sur les stimulations sensorielles s’est imposé à moi comme un moyen bien adapté pour maintenir leurs capacités intellectuelles et physiques et donc retarder leur entrée en dépendance.

Partant de l’idée que les personnes atteintes de la démence de type Alzheimer présentent des altérations mnésiques, il m’a semblé intéressant de baser le travail de ce groupe sur la mémoire sensorielle.

En effet, la mémoire sensorielle est encore efficiente chez ces personnes et j’ai donc pensé qu’un travail sur les stimulations sensorielles permettrait de les mettre en confiance, de ne pas les confronter à l’échec et ainsi agir sur leurs facultés physiques et psychiques afin de retarder leur perte d’autonomie.

Par ailleurs, le travail en groupe m’a semblé approprié car il permet l’installation d’un climat sensoriel

propre à favoriser la lutte contre l’isolement, la communication entre les participants, le

développement de la confiance en soi et le sentiment d’identité.

2.2- Objectif

L’objectif visé par la mise en place de ce groupe est donc de maintenir les capacités intellectuelles et physiques des participants en vue de maintenir le plus longtemps possible leur autonomie, forcément altérée, la démence de type Alzheimer étant une maladie dégénérative. Un travail de stimulation sensorielle permet le maintien d’une bonne perception ainsi qu’une bonne intégration sensorielles, facilitant ainsi la prise de repères indispensable pour le maintien de l’autonomie, mais déficiente chez ces patients.

2.3- Mode de fonctionnement du groupe

C’est un groupe fermé composé de Madame RAPON, Madame MALAIS, Madame MARTIN, Madame WARIN et de moi-même. Ces quatre résidentes souffrent de démence de type Alzheimer et se trouvent à des stades d’évolution différents.

Nous les présenterons individuellement une fois détaillé le déroulement des séances.

Le groupe a été mis en place à partir du 14 novembre 2005 au sein de la maison de retraite, tous les lundis pendant ¾ d’heure environ. La séance se déroule dans un petit salon fermé.

2.4- Les séances

2.4.1- Déroulement initial et évolution des séances

Lors de la mise en place du groupe j’avais décidé de consacrer une séance à un sens et de changer de sens chaque semaine.

Cependant, après les premières séances je me suis rendue compte qu’avec un tel fonctionnement les participantes, du fait de leur pathologie, manquaient de repères et que le changement n’aidait en rien à l’intégration du cadre du groupe.

De plus, il était difficile pour moi d’observer chaque patiente et de me rendre compte de son évolution au sein du groupe.

J’ai donc décidé d’une part de travailler par cycle de trois séances pour un même sens et, d’autre part de diviser chaque séance en deux parties bien distinctes :

- un temps consacré aux stimulations sensorielles

- un temps que j’appelle « parcours moteur » au cours duquel l’autonomie motrice et intellectuelle de chacune des participantes ainsi que leurs sens sont mis en jeu individuellement.

Nous détaillerons ci-dessous ces deux temps.

2.4.2- Les séances aujourd’hui

Après être allée chercher Madame MALAIS, Madame MARTIN, et Madame RAPON dans leur bâtiment, nous nous rendons ensemble dans le bâtiment où a lieu la séance. Là, je propose à Madame WARIN de participer au groupe avant de rejoindre ensemble le salon.

Une fois installées, il est très important de leur resituer le cadre de la séance afin de favoriser la prise de repères spatio-temporaux et d’atténuer d’éventuelles angoisses chez certaines d’entre elles.

Le temps consacré aux stimulations sensorielles est composé de plusieurs activités variées afin de maintenir au maximum l’attention des participantes et de leur proposer plusieurs stimulations différentes. Par exemple, les séances sur l’ouïe consistent à reconnaître différents sons, celles consacrées au goût et à l’odorat permettent aux patientes de sentir et de goûter différents arômes et de les reconnaître. Les activités portant sur la vue proposent de regarder et de créer des tableaux avec différentes formes et différentes couleurs et enfin, les séances sur le toucher proposent différentes stimulations tactiles (massage de main, exploration de différentes matières et différentes formes).

D’une semaine à l’autre les mêmes activités sont proposées, mais je modifie certains éléments afin de pouvoir observer une évolution de leur comportement.

Le temps que j’appelle «parcours moteur» est strictement identique à chaque séance. Je l’ai mis en place d’une part pour favoriser la prise de repères spatio-temporaux chez les participantes, et d’autre part pour me donner à moi-même des repères me permettant de mesurer l’évolution de chacune d’elles à travers cette activité précise.

Le parcours est effectué individuellement et met en jeu deux composantes essentielles, l’autonomie et la stimulation des sens. Les participantes doivent à chaque séance choisir l’un des deux parcours qui leur sont proposés, le bleu ou le rouge.

La consigne donnée à chaque participante avant d’entamer son parcours est de l’effectuer comme elle le souhaite (sauter, contourner, marcher dessus…).

Le parcours bleu

L’objectif est de lancer le ballon de leur choix (un ballon de baudruche ou un de mousse) dans un des cartons de tailles différentes, situés plus ou moins loin d’elles. C’est le plus facile mais elles ne le savent pas.

Le parcours rouge

Il a pour objectif d’atteindre le bout du parcours en ayant trouvé le maximum de balles cachées dans ou sous les accessoires disposés sur le parcours (cartons, foulards, briques).

Il est donc plus difficile car il comporte plus d’éléments, demande plus d’habileté et nécessite une concentration soutenue jusqu’à la fin.

La stimulation des sens est mise en jeu par le toucher, la vue et l’ouïe qui sont l’objet de sensations différentes dans les deux parcours.

La vue est stimulée par la couleur et les formes des différents éléments qui composent le parcours : cerceaux, bâtons, briques… qui sont selon les parcours de couleur dominante rouge ou bleue.

Le toucher est stimulé par les différentes textures des éléments du parcours (baudruche, mousse, caoutchouc), et leur taille (ballon ou balle).

L’ouïe quant à elle est stimulée par l’écoute d’une musique spécifique à chaque parcours.

Toutes ces différences permettent au participant de comprendre qu’il s’agit de deux parcours bien distincts. C’est l’élément visuel qui va être déterminant chez le sujet au moment où un choix de parcours lui est demandé.

Plusieurs objectifs sont attachés à ce temps de parcours. Tout d’abord, il s’agit de permettre aux participantes d’exprimer un choix. Cette notion de choix est capitale, car elle rompt avec la vie quotidienne à la Maison de retraite où les occasions de donner leur avis sont relativement rares. Elles peuvent ainsi jouir d’un sentiment de liberté d’expression, d’autonomie dans une décision à prendre et d’affirmation personnelle de cette décision.

D’autre part, l’accomplissement du parcours permet le maintien de l’autonomie motrice chez les participantes, en mettant en jeu coordination dynamique générale, capacité de dissociation, équilibre, coordination occulo-manuelle, praxies et régulation tonique.

Enfin, l’évaluation personnelle qu’elles font de leur propre performance stimule leur faculté de jugement. Ainsi, en évaluant chacune des difficultés auxquelles elles sont confrontées, elles auront l’opportunité de s’adapter et mettre en action des stratégies pour réussir au mieux leur prestation.

2.5- Présentation des participantes au groupe

Madame MALAIS est une résidente âgée de 77 ans. Elle a été diagnostiquée Démence de type Alzheimer et a obtenu un résultat de 18/30 au Mini Mental Score passé en octobre 2004. Elle appartient au groupe 5 Iso-Resources. Elle réside à la Maison de retraite depuis octobre 2004.

Elle a participé, pour le moment, à toutes les séances. Elle participe activement à tout ce qui lui est proposé et semble y prendre plaisir. Elle parvient la plupart du temps à exprimer ses choix et semble avoir relativement bien conservé ses facultés de jugement. Cependant elle souffre de difficultés mnésiques, qui la rendent moins autonome dans les activités de la vie quotidienne et perturbent ses repères spatio-temporaux. Par exemple, elle est incapable de se rendre seule aux activités et aux repas. En revanche Madame MALAIS garde une bonne autonomie physique.

En ce qui la concerne, l’intérêt thérapeutique de participer à ce groupe réside essentiellement dans l’opportunité d’entretenir une certaine activité cognitive et motrice et ainsi de conserver une relative autonomie.

Madame RAPON est une femme âgée de 91 ans. Elle a été diagnostiquée Démence de type Alzheimer et a obtenu un résultat de 18/30 au Mini Mental Score passé en juin 2005. Elle appartient au groupe 2 Iso-Resources. Elle réside à la Maison de retraite depuis juin 2005.

Elle participe irrégulièrement aux séances de psychomotricité soit parce qu’elle se déclare trop fatiguée soit en raison de visites à ce moment-là. Lorsque je lui propose de participer à une séance elle refuse parfois, prétextant qu’elle risque de manquer une visite. Lorsqu’elle accepte, elle manifeste certaines angoisses, surtout lors du trajet de son bâtiment jusqu’au salon où se déroule la séance, qui se traduisent par des questions récurrentes sur ce que nous allons faire, le lieu où nous nous rendons, le but du déplacement etc. Mes réponses la rassurent momentanément jusqu’à la prochaine question…De même elle ne manque pas de vérifier que Madame MARTIN, avec qui elle semble proche, fait partie du groupe.

Son autonomie physique est altérée et elle marche difficilement. Au sein de la maison de retraite ses déplacements sont très limités, et sont souvent laissés à l’initiative d’autrui. Ainsi préfère-t-elle que je l’emmène en fauteuil roulant.

Lors des séances, elle n’est pratiquement jamais en interaction avec les autres résidentes.

Du fait des ses problèmes auditifs et du peu d’échanges qu’elle a avec les autres, j’ai donc décidé de la placer à côté de moi et au centre du groupe.

Son aptitude à faire un choix ainsi que ses facultés de jugement sont réduites.

La présence de Madame RAPON à notre groupe de stimulations sensorielles, est d’autant plus importante qu’en raison de sa relative dépendance physique, elle participe peu aux autres activités proposées. Outre un moment d’échange social, les séances lui permettent de maintenir ses capacités physiques et intellectuelles.

Je présenterai Madame MARTIN et Madame WARIN dans le cadre des études de cas que nous abordons maintenant.

Dans le document DEPENDANCE ET STIMULATION DES SENS (Page 38-42)