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La démence de type Alzheimer

Dans le document DEPENDANCE ET STIMULATION DES SENS (Page 22-28)

L’allongement de la durée de vie des populations dans les pays occidentaux est à l’origine d’une augmentation drastique du nombre de personnes atteintes de démence et plus particulièrement de démence de type Alzheimer, posant ainsi un véritable problème de santé publique.

Pour mieux le comprendre et bien mesurer l’ampleur du fléau dans les populations de nos jours, j’ai décidé d’étudier plus en détails dans ce chapitre les différents aspects de la maladie, en commençant par l’historique de sa découverte. Nous aborderons ensuite les diagnostics différentiels, eux-mêmes complétés par des examens complémentaires. L’ensemble des résultats obtenus permet d’aboutir au diagnostic positif de la maladie.

Après avoir examiné la symptomatologie et les troubles caractéristiques de la maladie, nous envisagerons ses causes, et présenterons ses stades d’évolution.

Pour conclure ce chapitre, nous ferons un point sur les traitements connus et appliqués de nos jours pour soulager les souffrances des patients atteints de cette maladie.

3.1- Historique

La démence de type Alzheimer a été découverte par le Docteur Alois Alzheimer, médecin pathologiste allemand. En 1907, il étudia le cas d’une femme âgée de 51ans ayant présenté un délire de jalousie suivi d’une désintégration des fonctions intellectuelles.

Suite à l’autopsie du cerveau de cette femme, il découvrit un lien entre les lésions

cérébrales, en particulier les plaques séniles et la dégénérescence neurofibrillaire, et le comportement anormal de cette femme.

J. TOUCHON et F. PORTET (2000) ajoutent que trois ans plus tard, Kraepelin donna le nom de son élève Alzheimer à une forme particulière de démence survenant chez le sujet relativement jeune.

Récemment l’usage opposait encore une forme de démence présénile*, la maladie d’Alzheimer, aux démences séniles*.

L’existence des mêmes lésions dans ces deux types de démences amena progressivement le corps médical a réunir les deux affections dans une entité unique: la démence de type Alzheimer dite présénile ou sénile, selon son apparition avant ou après 65 ans.

3.2- Epidémiologie

Actuellement, la démence est considérée comme un problème de santé publique du fait de l’importance du nombre de personnes atteintes par cette maladie.

La démence de type Alzheimer est la plus fréquente des démences. En effet, elle représente 50 à 70 % de tous les cas de démences diagnostiqués.

Selon Margot PHANEUF (1998), elle représente dans les pays industrialisés la quatrième cause de décès chez les personnes âgées. De ce fait de nombreuses mesures socio-économiques sont mises en place.

Selon le site Internet de France Alzheimer la maladie frappe, d'après les estimations actuelles, 5 % des personnes de plus de 65 ans et 25 % des plus de 80 ans. Environ 10 % des cas concernent des personnes de moins de 65 ans, "les malades jeunes", la maladie pouvant se manifester dès l'âge de 40 ans. En France une étude récente donne le chiffre de 769.000 personnes de plus de 75 ans atteintes de maladie d’Alzheimer et maladies apparentées. Il y a dix ans, la même étude évaluait leur nombre à 546.000, soit une augmentation de 30%.

3.3- Diagnostic

3.3.1- Les critères de la démence de type Alzheimer

Selon le DSM-IV (LESNIEWSKA H.K, 2003) la démence de type Alzheimer se caractérise par l’apparition de déficits cognitifs multiples dont une altération de la mémoire et une des perturbations cognitives suivantes : aphasie*, apraxie*, agnosie*, perturbations des fonctions exécutives*.

Ces déficits vont entraîner d’une altération significative des activités sociales ou professionnelles. La maladie va évoluer progressivement et présentera un déclin cognitif continu.

3.3.2- Diagnostics différentiels

Les diagnostics différentiels vont permettre d’éliminer les autres diagnostics possibles dans le but de poser le diagnostic de démence de type Alzheimer. En effet, d’autres pathologies peuvent s’y apparenter. Après avoir étudié toutes ces données, le médecin peut établir un diagnostic de démence de type Alzheimer avec une fiabilité de 80 %.

P.S.TIMIRAS (1997) présente ainsi les états à distinguer de la démence de type Alzheimer :

- le delirium, qui est caractérisé par une détérioration de l’état mental du sujet. On observe une amélioration de l’activité mentale après traitement du problème médical sous-jacent.

- la dépression, qui peut précéder ou accompagner la démence.

- les oublis bénins de la vieillesse, qui n’ont pas de conséquences suffisamment graves pour perturber la vie quotidienne de la personne.

- les états paranoïdes et les psychoses.

- le syndrome amnésique, qui est caractérisé par des pertes de mémoire à court terme, sans présence de délire.

3.3.3- Les examens complémentaires

Des examens biologiques sont pratiqués à partir du sang et des urines dans le but d'écarter la possibilité de certaines maladies susceptibles d'être à l'origine d'un syndrome démentiel ou d'être facteur d'aggravation d'une maladie d'Alzheimer.

D.GOVE et coll. (2001) ajoutent que des examens d’imagerie cérébrale seront également pratiqués afin d’écarter les autres causes de démence. Ainsi, un scanner, permettra de constater une atrophie au niveau de certaines zones du cerveau.

Une Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) permettra la comparaison d’images effectuées à intervalle de quelques mois dans le but de surveiller les éventuelles modifications de certaines zones cérébrales à un stade précoce.

Une Tomographie par Emission Monophotonique (SPECT) renseignera sur le débit sanguin qui semblerait réduire au cours de la démence de type Alzheimer.

Une Tomographie par Emission des Positons (PET) est actuellement réservée au domaine de la recherche.

3.3.4- Diagnostic positif

C’est le diagnostic qui résulte des informations données par les diagnostics différentiels et les examens complémentaires.

Cependant, R. FONTAINE (1999) nous apprend que le diagnostic ne peut être certain qu’après le décès de la personne. En effet, l’autopsie du cerveau permet la constatation de lésions anatomiques caractéristiques, de plaques séniles et d’une dégénérescence neurofibrillaire.

De nombreux tests sont cependant utilisés. Entre autres, le Mini Mental Score* et l’échelle de Reisberg. Le Mini Mental Score permet un bilan rapide des aptitudes cognitives de la personne. Il comprend vingt questions appartenant à différentes rubriques qui sont les suivantes : orientation spatio-temporelle, mémoire, attention, calcul, dénomination, lecture, écriture, praxie. Ce test est noté sur 30 points.

3.4- Symptomatologie

Selon R. FONTAINE (1999), les symptômes peuvent être variés et différents selon les sujets atteints de cette maladie.

Au fur et à mesure de l’avancée de la maladie, les symptômes se généralisent à l’ensemble des fonctions cognitives.

Margot PHANEUF (1998) observe des troubles cognitifs ainsi que des troubles non cognitifs que nous allons détailler.

3.4.1- Troubles cognitifs

3.4.1.1- Troubles de la mémoire

Les troubles de la mémoire font partie des premiers signes de la démence de type Alzheimer. Au début, ils se manifestent par des perturbations de la vie quotidienne et particulièrement par des oublis. Ces défaillances augmentent et peu à peu les souvenirs récents puis lointains disparaissent dans la mémoire de la personne.

3.4.1.2- Troubles du langage

Les troubles du langage verbal se manifestent après les troubles de la mémoire. Le plus précoce des troubles du langage est l’impossibilité de trouver les mots, autrement dit l’aphasie amnésique*.

Pour pallier à ses déficits, la personne va utiliser des sous-entendus, des phrases omettant des parties, des répétitions, d’autres mots sans rapports avec la conversation ou encore un mot pour en remplacer un autre.

Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, les phrases sont pauvres, la parole est plus rare, les troubles de la compréhension apparaissent, le sujet devient difficile à comprendre, son expression verbale présente des phénomènes telles que l’écholalie et la palilalie*.

Suite à cela apparaissent l’aphasie ou le mutisme* complet.

3.4.1.3- Troubles praxiques

La gestion du geste est perturbée chez la personne atteinte de démence de type Alzheimer. Celle-ci devient alors dépendante pour exécuter les actes de la vie quotidienne.

E. AUBERT et J.M. ALBARET (2001) expliquent que les troubles praxiques se manifestent progressivement. En général les praxies constructives sont les premières touchées. Puis c’est au tour des praxies idéatoires, nécessitant une combinaison complexe de tâches, et des praxies idéomotrices, qui concernent l’imitation de gestes symboliques, d’être altérées.

En début de maladie, ces troubles ne sont pas forcément visibles. En effet, le sujet cherche à éviter les situations où son entourage se rendrait compte de sa désorganisation gestuelle. Les troubles praxiques concernant l’habillage surviennent progressivement et plus tardivement. La personne superposera d’abord des vêtements similaires, puis se trompera dans l’ordre d’enfilage et enfin commettra des erreurs d’orientation et de position du vêtement.

3.4.1.4- Troubles gnosiques

La personne manifeste fréquemment des difficultés à reconnaître ce qu’elle voit.

Selon C. DEROUESNE et J. SELMES (2005) l’objet est correctement perçu (l’agnosie n’est pas due à un déficit visuel), mais il n’est pas reconnu ou son utilisation est oubliée. Plus tard le sujet pourra présenter une prosopoagnosie*.

Cette difficulté à reconnaître et à utiliser les objets constitue un handicap majeur pour les activités de la vie quotidienne. Par conséquent les troubles gnoso-praxiques réduisent de façon importante l’autonomie du sujet.

3.4.2- Troubles non cognitifs

3.4.2.1- Les dérèglements de l’état affectif

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, étant donné le vide cognitif qui s’installe, la personne démente de type Alzheimer ne présente pas de vide affectif pour autant.

En effet, malgré son attitude parfois inexpressive, elle reste très sensible à la sphère affective et à l’environnement qui l’entoure.

L’ambivalence est présente c’est à dire que la personne va avoir du mal à faire des choix mais elle va essayer verbalement ou non d’exprimer ses opinions.

3.4.2.2- La perte de l’identité

La perception que la personne a d’elle même est altérée. Elle va, à un certain stade, ne plus se souvenir de son nom et ne même plus se reconnaître en se regardant dans un miroir.

3.4.2.3- Anxiété et angoisse

C. DEROUESNE et J. SELMES (2005) nous disent que l’anxiété et l’angoisse font partie des manifestations les plus fréquentes de la démence de type Alzheimer.

A un stade précoce de la maladie, la personne exprime son angoisse de ne plus pouvoir faire face aux problèmes quotidiens, d’être une charge pour sa famille, de se sentir diminuée sous le regard des autres. Face à ses troubles elle est paniquée et perd confiance en elle.

Elle déclare être incapable d’effectuer telle ou telle tâche, pour maîtriser son angoisse et se protéger d’un éventuel échec.

Elle peut également mettre cet échec sur le compte d’un déficit sensoriel, ou encore déclarer que la tache demandée ne présente aucun intérêt.

Pour éviter de montrer aux autres ses difficultés, la personne va se replier sur elle-même jusqu’à ne plus oser réaliser les choses qu’elle est parfaitement capable de faire.

A un stade plus évolué de la maladie, l’anxiété peut se manifester par un refus de toutes nouveautés, par des plaintes corporelles, par des conduites visant à réaffirmer sa présence (fredonnement, interventions soudaines) ainsi que par des comportements moteurs (déambulations, stéréotypies).

Cette angoisse majeure dans la maladie a pour conséquence une perte de l’estime de soi qui pousse le patient à chercher des réassurances de plus en plus fréquentes auprès de son entourage.

3.4.2.4- L’altération de l’état général

En plus des troubles cognitifs présents, l’état physique de la personne se détériore.

On retrouve l’incontinence, les troubles du sommeil, l’errance nocturne, incapacité de s’asseoir, de se lever, de marcher.

3.5- Causes

Il existe de nombreuses théories concernant l’étiologie de la démence de type Alzheimer. Cependant les causes demeurent actuellement inconnues.

Parmi les différentes théories, P.S. TIMIRAS (1997) émet les hypothèses que la démence de type Alzheimer serait liée à un traumatisme crânien antérieur, ou au syndrome de Down ou encore à une insuffisance thyroïdienne. Actuellement, une des causes les plus probables serait la cause histologique que je vais donc développer ci-dessous.

Pour R. PATENAUDE (1998) la démence de type Alzheimer présente une disparition de nombreux neurones situés dans la matière grise et dans certaines structures sous-corticales. Il y a formation de plaques séniles ainsi que des enchevêtrements neurofibrillaires à l’intérieur des neurones.

Il y a une désintégration du tissu neuronal et mort progressive de certaines parties du cerveau ce qui entraîne une atrophie et donc une diminution du poids du cerveau.

On observe également un déficit de certains neurotransmetteurs, en particulier de l’enzyme assurant la synthèse de l’acétylcholine*, l’acétyltransférase. L’acétylcholine est un neurotransmetteur assurant la transmission d’une information nerveuse d’un neurone à un autre. On observe également une déficience d’autres neurotransmetteurs tels que la dopamine*

et la sérotonine*.

3.6- Evolution

Margot PHANEUF (1998) évoque dans son livre l’échelle de détérioration globale proposée par le Docteur Barry Reisberg en 1982. Cette échelle permet de situer la personne dans la maladie selon sept stades de gravité.

Stade 1 : aucun affaiblissement observé - stade clinique : normale

- pas d’atteintes fonctionnelles, pas de plaintes mnésiques

Stade 2 : affaiblissement intellectuel très léger - stade clinique : oublis

- la personne se plaint de troubles de la mémoire. Inquiétude face aux symptômes Stade 3 : affaiblissement intellectuel léger

- stade clinique : état confusionnel léger

- la personne se perd en se rendant dans un endroit peu connu. Elle commence à être handicapée dans sa vie quotidienne. L’entourage prend conscience de la gravité de la situation.

Stade 4 : affaiblissement intellectuel modéré - stade clinique : état confusionnel marqué

- la perte d’autonomie est évidente. La capacité d’apprentissage décline. La personne présente des trous mnésiques en ce qui concerne son histoire personnelle. Cependant, elle reconnaît les lieux ainsi que les visages qui lui sont familiers. La personne nie son problème.

Stade 5 : affaiblissement intellectuel modérément grave - stade clinique : démence précoce

- la dépendance à autrui s’installe. Les trous mnésiques s’aggravent. La personne présente une désorientation spatio-temporelle. Les praxies sont conservées excepté les praxies au niveau de l’habillage.

Stade 6 : affaiblissement intellectuel grave - stade clinique : démence moyenne

- la dépendance augmente. La mémoire est parcellaire et l’intelligence sévèrement déclinante. Il y a une modification de la personnalité, délire, anxiété, agitation, fluctuations de l’humeur, obsessions.

Stade 7 : affaiblissement intellectuel très grave - stade clinique : démence profonde

- la dépendance de la personne est totale. La personne présente une aphasie et a recours à un mutisme et/ou à des grognements. Tous les comportements deviennent incohérents. On observe une perte des fonctions psychomotrices.

3.7- Traitement

Selon R. FONTAINE (1999), l’espérance de vie d’une personne atteinte de démence de type Alzheimer est de dix ans en moyenne.

Il n’existe pas de traitements capables d’empêcher le développement des lésions cérébrales.

Actuellement, les médicaments ne font que maintenir et ralentir l’installation de la maladie mais ils ne visent pas les causes de cette démence qui sont encore floues.

Afin de limiter le déficit en acétylcholine chez les personnes souffrant de démence de type Alzheimer, des inhibiteurs de la cholinestérase sont indiqués.

Actuellement, trois molécules sont disponibles : le Donépézil (Aricept), la Rivastigmine (Exelon) et la Galantamine (Reminyl).

Ces médicaments sont prescrits pour les formes légères à modérées.

HERVY M.P., MOLITOR M.B., BEGUIN V., CHAHBENDERIAN L., FARAH S. (2005) ajoutent que pour les formes sévères, la mémantine est indiquée. Elle agit en régulant l’excès de glutamate dans la synapse* qui est un des facteurs de dégénérescence neuronale. Ce médicament permet essentiellement une amélioration des troubles du comportement ainsi que du fonctionnement global.

Par ailleurs, d’après H.K. LESNIEWSKA (2003), les recherches actuelles s’orientent vers le vaccin thérapeutique. Depuis 2001 une centaine de patients atteints de la maladie d’Alzheimer débutante ont reçu le vaccin synthétique réalisé à partir de plaques amyloïdes. Si les résultats présentés en juillet 2000 apparurent suffisamment prometteurs pour que des essais vaccinaux soient lancés, la campagne expérimentale a été suspendue au début de l’année 2002 suite à la découverte de plusieurs cas de méningite chez des patients vaccinés.

Outre le traitement médicamenteux, la prise en charge de la personne atteinte de démence de type Alzheimer est beaucoup plus large.

Elle doit être globale, s’adapter à chaque patient et être fondée sur la collaboration entre l’entourage familial et les différents intervenants. Les objectifs sont de permettre le maintien de l’autonomie le plus longtemps possible et de maximiser le bien-être chez ce patient.

Ainsi des pratiques telles que la psychomotricité, l’ergothérapie, la kinésithérapie accompagnées d’un suivi psychologique peuvent contribuer à atteindre ces objectifs mais ne pourront en aucun cas guérir la maladie, étant donné le processus régressif qu’elle entraîne.

R. FONTAINE (1999, p.203) évoque « la douleur des proches qui voient un membre de leur famille qu’ils ont connu digne et compétent, perdre progressivement sa dignité et à la douleur du deuil peut alors se surajouter celle de l’image d’un être aimé ayant fini sa vie dans un état de délabrement. »

Ceci m’amène à dire que face à ce diagnostic lourd de conséquences, la mise en place d’un suivi psychologique pour la famille serait vivement nécessaire.

Dans le document DEPENDANCE ET STIMULATION DES SENS (Page 22-28)