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Le canton de Fribourg affronte, comme le reste de la Suisse, le vent de la mondialisation. Son économie étant tournée vers l’exportation, il est sensible aux fluctuations de l’activité économie dans le monde. Fribourg affronte donc une série de défis dans le domaine de la démographie, de l’aménagement du territoire, du positionnement en Suisse occidentale, de l’économie, de la formation et de l’énergie. Ces défis vont nécessiter l’entente des principales forces politiques, dans un canton aux finances saines (une fortune de un milliard de francs à moitié attribuée à de futurs investissements).

La population du canton atteint, au début de 2016, 307'276 habitants dont 67'377 étrangers (21%). C’est essentiellement l’immigration de confédérés et d’étrangers qui expliquent la croissance fribourgeoise, l’une des plus fortes de Suisse par canton. Si cette évolution est réjouissante quant on songe aux nombreux Fribourgeois qui ont dû quitter leur canton par le passé, elle n’est pas sans poser des défis. Il faut créer des habitations, des infrastructures, des écoles et des emplois pour les nouveaux venus. La croissance est forte dans les marges du canton : la Veveyse, le sud de la Glâne et la Gruyère deviennent l’hinterland du dynamique arc lémanique. La Broye progresse grâce à l’autoroute A 1. L’agglomération fribourgeoise, la Singine et le Lac profitent du dynamisme de Berne. Bulle, fusionnée avec La Tour-de-Trême est devenue la deuxième agglomération du canton après celle de la capitale. Bulle fait preuve d’un grand dynamisme qui pose des problèmes d’aménagement du territoire.

L’arrivée importante de populations dans les marges du canton pose un problème de maîtrise du sol. Des quartiers de villas surgissent dans les communes, pour le bien futur de leurs finances. Les collectivités locales doivent dans un premier temps multiplier les infrastructures pour accueillir et intégrer leurs nouveaux habitants. Dans un deuxième temps, elles peuvent espérer une manne financière accrue. Des problèmes de transports se posent rapidement car les lignes publiques ne peuvent suivre l’accroissement des nouveaux quartiers. Cela fait exploser le taux de motorisation en transports privés motorisés et crée, plus loin, des bouchons. En 2016, le Grand Conseil a voté une modification de la loi sur l’aménagement du territoire. Il a donné au canton le droit de préemption sur des terrains stratégiques mais a refusé celui-ci aux communes, ce qui les empêche de mener une politique foncière active. Les mêmes problèmes se posent pour l’agglomération de la capitale. Les communes doivent gérer de multiples projets en commun, notamment la mobilité. La réalisation du Pont de la Poya a déplacé le trafic du centre-ville vers d’autres quartiers, mais pas résolu le problème dû à un manque de transports publics et de parkings d’échange. Que penser de la non utilisation des magnifiques terrains situés entre Fribourg et Villars-sur-Glâne, proches de l’autoroute, et qui pourraient abriter de nouvelles entreprises ? Depuis l’échec du projet « Gottéron-Village », fort mal nommé car éloigné du dit cours d’eau, rien ne vient !

Le canton de Fribourg occupe une position intéressante en Suisse occidentale : il est un trait d’union entre le Léman et le Plateau alémanique, entre le monde latin et germanique. Berne a grandement perdu son rôle de canton pont depuis le départ du nord du Jura et l’allégement de plus en plus considérable du poids du Jura bernois dans les affaires politiques. Fribourg essaie de jouer un peu mieux cette partition de l’unité dans la diversité en veillant, sans disposition constitutionnelle, à ce que la minorité alémanique ait deux sièges au Conseil d’Etat et un siège au Conseil des Etats. Plus délicate est la question de l’appartenance linguistiques des communes à la frontière des langues. Les

autorités n’ont pas osé légiférer sur le sujet, car la question est sensible. Les francophones sont attachés à la territorialité des langues qui a amené une stabilité des rapports de force depuis 200 ans : un tiers d’Alémaniques et deux tiers de Romands. Au 21ème siècle, le canton subit une autre pression, celles des pôles lémaniques et bernois. Il risque d’être déchiré entre ces deux fortes régions qui attirent des pendulaires fribourgeois et déversent leurs surplus de population vers Fribourg, créant de nouveaux pendulaires. La seule réponse serait de créer un centre cantonal fort et également une dynamique agglomération bulloise. Pour le centre cantonal fort, alors que Fribourg était pionnier dans le domaine des agglomérations, on en est à un point mort. L’Agglomération fribourgeoise, existante, depuis 2008 est une coquille vide qui ne peut prélever d’impôts et dont les compétences sont réduites. Elle a son utilité pour quérir des subventions fédérales pour des « projets d’agglomération ». L’idée d’une fusion est dans l’air depuis dix ans. Une initiative a même été lancée puis retirée devant les promesses de certains syndics qui s’empressent ensuite de l’oublier pour essayer de faire fusionner quatre communes riches de l’agglomération. Ce projet échoue à cause du vote négatif de la plus riche d’entre elles. Bref, toute avance est bloquée par une classe politique plus proche des querelles de clocher que de l’intérêt général. Récemment un comité constitué de personnalités de la société civile a relancé le projet. Vu les disparités fiscales entre la commune centre (Fribourg), il faudrait que le canton s’engage à verser davantage que prévu dans la loi, pour une telle fusion, à l’instar de Lucerne et du Tessin. Il manque encore la volonté politique de le faire, alors que beaucoup de magistrats se gargarisent du « Centre cantonal fort ». Les fusions de communes ont fait passer le nombre de collectivités locales de 284 en 1923 à 136 en 2014.

L’économie fribourgeoise a continué à se développer et ressemble fort à celle des autres cantons suisses avec une grande majorité d’actifs dans le tertiaire. La proportion de personnes actives dans le tertiaire reste plus élevée qu’ailleurs en Suisse. La situation n’est pas toujours facile pour le secteur secondaire, certains fleurons de l’industrie (Cardinal, Tetra Pak) ayant fermé leurs portes. D’autres nouvelles sont plus réjouissantes : arrivée de Farchim ou de Nespresso. Le franc fort pèse sur les entreprises fribourgeoises dont beaucoup sont exportatrices à l’étranger. Le canton essaie toujours d’attirer de nouvelles entreprises à forte valeur ajoutée, car il doit résoudre un problème majeur : le revenu par tête des Fribourgeois est inférieur à la moyenne suisse. Les efforts entrepris depuis 1950 ont surtout servi à empêcher à ce que se creuse encore l’écart entre Fribourg et ses voisins. Dans cette course à la croissance, la Suisse a notablement amélioré son niveau de vie et Fribourg, qui a suivi en partant de plus bas, l’a fait aussi quoique dans une moindre mesure. Des mesures ont été prises comme la constitution d’un parc technologique nommé « Blue Factory », en gestation dans la capitale. Fribourg vend à l’extérieur ses paysages magnifiques et sa technologie sous le terme de

« Hightech in the green ».

Cette volonté de développement pose la question de la qualité de la formation. Le canton dispose d’une université et participe à plusieurs hautes écoles spécialisées, disposant donc du savoir théorique et des applications pratiques. L’Université de Fribourg a réussi à ouvrir une troisième année de médecine et il a y la volonté de réaliser le cycle complet des études de médecine, chose favorisée par le manque de médecins généralistes. C’est précisément sur ce genre de formation (médecin de famille) que les autorités fribourgeoises veulent mettre l’accent. Une collaboration a été mise en place avec l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne dans le cadre de la politique de décentralisation de celle-ci. Fribourg a hérité du « Smart Living Lab » ou habitat intelligent et économe en énergie. Fribourg a tenté une collaboration avec les université de Berne et de Neuchâtel (accords BENEFRI) mais l’affaire n’est pas allée très loin, car les autorités du canton horloger ont

décidé de se rapprocher de l’Université de Lausanne, quitte à perdre certains de ses atouts stratégiques.

L’énergie est une question importante pour le canton. Les Entreprises électriques fribourgeoises ont fusionné en 2005 avec Electricité Neuchâtel, donnant naissance au Groupe E. En 2015, celui-ci a créé la filiale Groupe E Celsius qui s’occupe de la distribution du gaz naturel ainsi que du chauffage à distance. Le Groupe E possède plusieurs barrages et il n’a pas intérêt à ce que le marché de l’électricité se libéralise, vu le coût artificiellement bas du courant européen, résultat de subventions massives. Le Groupe E a favorisé l’équipement d’immeubles avec des panneaux solaires, facilement acceptés par les Fribourgeois, beaucoup mieux en tout cas que certains projets d’éoliennes. Le Groupe E a présenté un projet intéressant : dévier l’eau du barrage de Schiffenen vers le lac de Morat, par une conduite souterraine munie de turbines. Il est évident que le canton favorise aussi les économies d’énergie et aussi l’utilisation du bois comme combustible, une source d’énergie indigène et abondante.

Bibliographie

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