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Gorica en slovène.

Dans le document Ordre ou désordre (Page 183-200)

Des Internationales sportives

CHAPITRE 9. LE « RÉVISIONNISME » ET LES EXPANSIONS

1 Gorica en slovène.

En 1924 l’Italie fasciste annexe Fiume, le « pacte de Rome » de janvier obligeant le pays rival à accepter le fait accompli, c’est-à-dire l’annexion de la ville par les Italiens, les Yougoslaves se contenant de l’hinterland. En 1945, les Yougoslaves chasseront la population italienne de la ville et en feront Rijeka. Surtout, un traité d’amitié prévoit une entente entre les deux pays pour le maintien du statu quo et la promesse de rester neutres en cas de conflit de l’un des deux pays avec un pays tiers. L’accord de janvier est suivi en juillet d’un traité de commerce et de navigation. À la fin de 1925 l’Italie semble donc sur le point de se rallier définitivement à la politique de détente et de sécurité collective dont Briand et Stresemann se sont fait les champions.

Le virage révisionniste se produit en 1925-1926, avec l’idée de « prendre la tête » d’une coalition des mécontents des traités de paix (Hongrie, Bulgarie, Autriche), démission de Contarini en 1926, fascisation progressive du personnel des Affaires étrangères, Dino Grandi (1895-1988) aux Affaires étrangères en 1929. Pour mener à bien sa nouvelle politique extérieure, Mussolini a besoin d’une armée solide et d’un personnel diplomatique docile. Dès 1925, il entreprend de réorganiser les forces militaires italiennes, dont il devient le chef suprême. Mais si la propagande est intense, les progrès militaires sont minimes, sauf dans le domaine de l’aviation, grâce à Italo Balbo (1896-1940). Quant au personnel diplomatique, il connaît entre 1926 et 1928 un profond renouvellement. La carrière diplomatique s’ouvre largement à tous ceux qui, parmi les fascistes, ont une formation ou une faculté d’adaptation qui leur permettent de ne pas se sentir trop mal à l’aise dans le protocole des chancelleries. La mutation est très rapide en termes de personnel.

Deuxième succès après Fiume, en 1926 Mussolini signe avec Ahmed Zogu (1895-1961), qui s'est emparé du pouvoir en Albanie (non concernée par les traités de paix), un pacte d'amitié qui devint un traité d'alliance le 22 novembre 1927, Zogu prenant le titre de roi Zog Ier l'année suivante. Mais en réalité, l’Albanie est devenue un véritable « protectorat » italien. D'autre part, l'Italie encouragea systématiquement le révisionnisme hongrois — en avril 1927 elle signa avec Miklós Horthy (1868-1957) un traité « visiblement dirigé contre la Petite Entente » (P.Milza) — , soutint les revendications de la Bulgarie, subventionna les agitateurs macédoniens et croates de Yougoslavie et développa son influence en Autriche. Elle y entretient de bons rapports avec le régime de Mgr Ignaz Seipel (1876-1932), le mouvement nationaliste anti- allemand et fascisant du prince Ernst Rüdiger Starhemberg (1899-1956), la Heimwehr, que l’Italie aide financièrement. Mussolini parvient même à passer un accord avec le gouvernement roumain en septembre 1926. L’encerclement de la Yougoslavie (« Royaume des Serbes, Croates et Slovènes »), alliée de la France (1927), devint à peu près complet (le seul échec : les relations avec la Tchécoslovaquie). En 1928, Mussolini,

par hostilité au statu quo, déclara au Daily Mail, dans une interview, que « l'éternité d'un traité signifierait qu'à un moment donné l'humanité, par quelque prodige monstrueux, aurait été soumise à la momification, en d'autres termes, serait morte ». Dans le cadre de cette politique, les émigrations jouent un grand rôle : les oustachi croates trouvent refuge en territoire italien, les antifascistes en France, où Joseph Paul- Boncour (1873-1972) traite Mussolini de « César de carnaval ». En 1929 l’arrivée au ministère des Affaires étrangères de Dino Grandi allait renforcer cette tendance, d’autant plus que le début des années trente voit une fascisation accrue du personnel diplomatique italien.

Du serbo-croate ustasa, le « révolutionnaire », les oustachi ont constitué le parti fasciste croate. Fondé en 1929 par un avocat de Zagreb, Ante Pavelic (1889-1959), le mouvement oustacha constituera de 1941 à 1944 le parti unique du royaume fantoche de Croatie, obtenu par le démembrement de la Yougoslavie et placé sous le protectorat allemand. Dès l’origine du royaume de 1919 les Croates revendiquent une plus grande autonomie à l’intérieur d’un État centralisé et administré en grande partie par des Serbes. En 1929, Pavelitch, député croate à l’Assemblée nationale yougoslave, fuit sa patrie au moment où le roi Alexandre prend le pouvoir. Pavelitch est condamné à mort par contumace.

La diplomatie de l'URSS (1921-1927)

Le contexte est d’abord économique, c’est la reprise des affaires dans le monde. Dès 1920, la Russie, qui manque de produits alimentaires et de biens d'équipement, mais peut offrir en échange de l'or et des matières premières, sort de son isolement en ouvrant des négociations commerciales avec certains pays occidentaux. Mais la Russie se retrouve en position délicate : pertes territoriales, isolement, difficultés internes, toutefois son contrôle sur le Caucase est établi au début des années 1920 (voir plus haut). Importante est aussi l’arrivée au pouvoir du Cartel en France et des travaillistes en Grande-Bretagne. Un symbole et acteur est le personnage de Tchitcherine (1872-1936), Commissaire du Peuple aux Affaires étrangères de 1918 à 1928, qui fut le symbole de l'émergence de l'URSS sur la scène internationale (voir plus haut). Il avait commencé sa carrière dans les ambassades du tsar, avant de se rallier au socialisme, d'abord sous sa forme menchevique. « Rallié à la révolution, il devait diriger l'action diplomatique de la Russie et ensuite de l'URSS jusqu'en 1930, apprécié de tous ses maîtres successifs, et traversant les épurations, pour mourir de vraie maladie en 1936. » (Joseph Rovan). L'URSS demeure isolée malgré le maintien de liens cordiaux avec l'Allemagne, qui use de ses bonnes relations avec la Russie soviétique comme moyen de pression sur les Occidentaux. Le 24 avril 1926, un accord d'amitié et

de neutralité est signé à Berlin entre les deux pays (voir plus haut). Mais les rapports avec l'Italie et surtout avec la Grande-Bretagne sont infiniment moins bons. L'adhésion de Moscou au pacte Briand-Kellogg (voir plus loin) marque cependant une amélioration.

Les causes du premier rapprochement avec l'Occident sont simples à énumérer : le reflux des mouvements révolutionnaires, les difficultés économiques, le succès officiel de la thèse du « socialisme dans un seul pays », la nomination de Tchitcherine, la NEP enfin. De plus, le Komintern met fin (congrès de juin-juillet 1921) à la période d'offensive révolutionnaire et insiste sur une politique de consolidation et de renforcement des partis et de leur influence (voir plus haut). C’est la « coexistence pacifique » (Lénine). Enfin, la Russie est le pays des affamés, secouru par l'Occident (cf. l’action de Herbert Hoover, futur président des États-Unis).

Ingénieur, Hoover (1874-1964) s’était trouvé en Chine au moment de la révolte des Boxers (1900) : il secourt les victimes. Après le déclenchement de la Première Guerre Mondiale il est chargé du ravitaillement de la Belgique puis des pays alliés (1917) et enfin des populations d’Europe centrale et orientale (1919-1920). Ministre du Commerce des États-Unis, il met sur pied l’American Relief Administration.

Le commerce avec l'Occident se développe car celui-ci considère l’URSS comme un marché (cf. Lloyd George : « Nous trafiquons bien avec les cannibales ! » ; Lénine lui répond, en quelque sorte : « Ces gens-là vendraient jusqu'aux cordes destinées à les pendre… » ). La NEP provoque un besoin en capitaux, machines et techniciens (les spets). En Occident, on croit que la NEP est un retour au capitalisme, lourde erreur, bien sûr. Commercer avec l’URSS est tout particulièrement la politique de la Grande-Bretagne, qui signe un accord commercial avec l’Union soviétique en mars 1921.

La reconnaissance de l’URSS par la Grande-Bretagne, l’Italie et la France se fit en 1924. Dès mars 1921, la Grande-Bretagne avait accepté de signer un accord commercial anglo-russe. Le gouvernement travailliste de MacDonald prit l'initiative politique le 1er février 1924, en reconnaissant de jure l'URSS et en décidant d'inviter une délégation soviétique à venir régler à Londres les problèmes pendants, de façon à pouvoir développer les relations commerciales et en vertu d'un raisonnement typique des travaillistes : la paix et la détente favoriseraient le relâchement de la dictature en Russie. Mussolini imita le Royaume-Uni le 8 février. Deux traités, l'un commercial, l'autre politique, furent signés par la Grande-Bretagne et l'URSS le 8 août 1924. Le Cartel des Gauches avait promis dans sa campagne électorale de rétablir des relations diplomatiques avec l'URSS. Herriot, président du Conseil, avait fait un voyage en Russie

en 1922, au cours duquel le nouveau régime avait réussi à le séduire. Il était sensible à l'exemple anglais. Il y eut peu de résistances en France, et, grâce à l'influence d'Anatole de Monzie (1876-1947), grand artisan du rapprochement, la France reconnut de jure l'URSS le 28 octobre 1924, tout en réservant la question du remboursement des emprunts russes (des négociations devaient s'ouvrir). Le Japon fit de même en 1925, la Chine et l’Autriche allaient suivre. Seuls, les États-Unis attendirent, jusqu'en 1933. Mais il faut nuancer par les relations tendues avec les conservateurs britanniques revenus au pouvoir et la rupture des relations diplomatiques jusqu’en 1929 (voir plus haut).

Il est nécessaire de rappeler l’accord de Rapallo (16 avril 1922, voir plus haut) : un traité entre la Russie soviétique et l’Allemagne, les premiers contacts ayant été pris dès avril 1921. Cela signe l’entente avec l'Allemagne : reconnaissance du régime soviétique, renonciation aux dettes, clause de la nation la plus favorisée, relations diplomatiques… Ce sont également des accords commerciaux et militaires. Au total, un gros succès pour l'URSS et un choc pour les Occidentaux, d’où la conclusion précipitée du plan Dawes en 1924 (voir plus haut). Au total, l'URSS est donc progressivement reconnue comme une puissance avec laquelle il faut compter, cf. l’évacuation de la Sibérie par le Japon en 1922 (voir plus haut). Mais elle est davantage tolérée que véritablement insérée dans concert des nations.

L’ère stalinienne marqua certes le triomphe de la thèse du socialisme dans un seul pays, après l’élimination de Trotski, l’industrialisation accélérée, mais aussi la crainte que Locarno (1925) ne signifie l'encerclement de l'URSS. Celle-ci, d’autre part, reprocha à la France de soutenir la Roumanie, qui avait annexé la Bessarabie, revendiquée par les Russes (voir plus haut). Le retour de la droite au pouvoir en France envenima tout. Entre la Russie et la Grande-Bretagne, tout vint rapidement compromettre l'évolution pacifique (voir plus haut). Mais l’URSS poursuivit la politique de bon voisinage avec l'Allemagne (cf. le traité d'amitié et neutralité de 1926, voir plus haut). D’une manière générale, la fermeté du Komintern (voir plus haut) impliqua la tactique « classe contre classe », l’aide aux « peuples opprimés » et l’ « attaque de l'Occident par l'Orient » (voir plus haut). La politique soviétique fut très favorable à la Chine (voir plus haut). La politique soviétique fut active dans le reste de l'Orient (voir plus haut).

La politique des États-Unis

En 1919, une vague de grèves (dont celle de la police à Boston, en septembre), accompagnées d’une série d’attentats anarchistes, provoquent une féroce répression et une panique dans l’opinion. L’Attorney General Alexander Mitchell Palmer

(1872-1936) lance des « raids » contre les « radicaux », en emprisonne des milliers, en expulse des centaines. La « Peur (du) rouge » (Red Scare) s’effondre dans le ridicule en 1920 (une insurrection prévue par Palmer pour le 1er mai n’a bien sûr pas lieu !), mais elle brise l’Industrial Workers of the World (IWW) (4 000 arrestations), affaiblit l’American Federation of Labor (AFL) et le Parti socialiste, marginalise les anarchistes et les communistes.

L’AFL avait été fondée en 1886 par un ouvrier cigarier, Samuel Gompers (né en 1850), qui en garde la présidence jusqu’à sa mort en 1924. C’est une fédération de syndicats très autonomes. Les cotisations sont élevées et les membres des ouvriers qualifiés. La fédération est riche et peut soutenir de longues grèves. Ses buts sont concrets (arbitrage, contrats collectifs, législation d’état, etc.). Elle n’est pas socialiste ni révolutionnaire, elle accepte le capitalisme. L’IWW (Industrial Workers of the World), fondé définitivement en 1905, défendait les ouvriers non qualifiés, immigrés de fraîche date, la lutte des classes, son idéal était marxiste, et il avait mené des grèves dures, notamment dans la construction automobile (1912-1914).

Toutefois, la Peur du Rouge s’effondre dans le drame aussi, en provoquant l’arrestation début mai 1920 de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, anarchistes d’origine italienne, ritals (en américain wops), condamnés de façon fort peu régulière le 14 juillet 1921 pour un braquage de banque. La réaction est également raciale, contre les Africains-Américains qui quittent le Sud dans le cadre de la Grande Migration, contre les quartiers noirs pendant « l’été rouge » (1919), contre les immigrants, suspectés d’être tous des « radicaux ». La réaction est aussi l’entrée en vigueur en 1920 de la prohibition de l’alcool, que les protestants partisans de la « tempérance » accusaient depuis longtemps d’être à l’origine des maux des pauvres : le XVIIIe amendement (1919) interdit la fabrication, le transport et la vente (mais non la consommation) d’alcool, défini par la loi Volstead de 1919 comme une boisson titrant plus d’un demi-degré ! Seule exception dans cette vague : le XIXe amendement (1920) accorde le droit de vote aux femmes. Au total, les États-Unis sont possédés par un « conservatisme » du « retour à la normale » (1918-1921).

Le repli nord-américain de l' « ère du Nationalisme » est célèbre, mais à nuancer car il se manifeste en fait par un grand opportunisme. Les causes en étaient la victoire des républicains (les secrétaires d'État furent Charles Evans Hughes de 1921 à 1925, puis Frank B.Kellogg de 1925 à 1929), les déceptions nées de la Conférence de la Paix (voir plus haut), la révolution d'Octobre (et les idées bolcheviques qui gagnaient le reste de l'Europe) et enfin les réticences des anciens « associés » à payer leurs dettes de guerre. Le programme du président Warren Gamaliel Harding (1865-1923, très opportuniste, en réalité) était America First et Back to Normalcy. Ce fut la victoire d'une

vague d'américanisme submergeant les États-Unis, les mots-clefs étant nationalisme (en fait l’idée de la supériorité du pays), et non-entanglement (non-intervention), en référence à Washington. Car c'était une vieille tradition, qui n'avait jamais exclu les alliances, qui n'avait jamais été l'isolement, et qui s'était accompagnée de l'idée de l' « hémisphère américain ».

Le rôle économique et financier des États-Unis fut très important. Comme dit Hughes, « la prospérité des États-Unis dépend largement des arrangements économiques qui peuvent être faits en Europe ». Non seulement les États-Unis étaient redevenus créanciers (10 milliards de dollars, 4,2 vis-à-vis de la Grande-Bretagne, 3,4 pour la France) à cause de la guerre, mais ils participèrent largement au problème du règlement des réparations allemandes (cf. les plans Dawes, 1924, et Young, 1929), se prononçant constamment pour un adoucissement des réparations, car ils avaient besoin de tous les marchés européens, donc de l'allemand. De plus, ils jouèrent un rôle de premier plan dans l'économie de l'Allemagne de Weimar et lui fournirent des prêts et des investissements très importants, ce qui amena les États-Unis à défendre les positions allemandes contre la France. Les États-Unis prêtèrent à court terme à de nombreux pays étrangers, après que les débiteurs des dettes de guerre eurent accepté un plan de paiement des dettes (cas de la Grande-Bretagne en janvier 1923, de la France en 1926 : accords Mellon-Bérenger, ratifiés seulement en 1929, voir plus loin). Les États-Unis refusèrent d'investir ou de prêter des dollars dans des pays qui n'avaient pas accepté un plan de paiement des dettes. Dans l'ensemble, présidents, Congrès et opinion furent inflexibles. L'Amérique eut une politique de soutien des monnaies européennes, le franc en 1924, la livre en 1931, le but étant de rendre solvable le client européen. Au total, il s'établit un réseau de courants financiers, des prêteurs américains aux banques, puis aux Allemands, qui payèrent les réparations à la France et à la Grande-Bretagne, lesquelles remboursèrent les dettes de guerre au Trésor américain ! Les banques américaines, attirées par des perspectives de gains rapides et substantiels, comportant un minimum de risques, développèrent une extraordinaire technique de placements, suscitant même à l'étranger des demandes inconsidérées, suggérant par tous les moyens aux gouvernements, aux municipalités, aux services publics, de recourir à des emprunts. Ainsi, un hameau bavarois qui désirait emprunter 125 000 $ fut convaincu qu'un emprunt de 3 millions de $ lui serait nécessaire ! Les États-Unis jouèrent donc un rôle primordial dans cette réinsertion de l’Allemagne dans le concert des nations. L’Europe absorba pendant les années 1920 plus de 50 % des exportations des États-Unis, qui ne s’isolaient donc pas ! Le tarif commercial nord-américain Fordney-McCumber (1922) éleva les droits du tarif démocrate précédent (en moyenne de 21 %) à 38 % (en moyenne).

L’immigration est un aspect très important de ce repli. Les théories racistes se banalisent au début du XXe siècle aux États-Unis, au point d’être presque universellement acceptées. Elles ont leurs propagandistes, comme l’eugéniste racialiste Madison Grant (1865-1937, La fin de la Grande race, 1916, réédité pendant toute la décennie). Elles dominent les Universités ; les « eugénistes », partisans d’une élimination physique des êtres « inférieurs », sont parfaitement admis parmi les psychologues, les anthropologues et les sociologues ; les « eugénistes » feront des ravages jusque dans les années 60 dans tous les hôpitaux psychiatriques du pays (lobotomies, castrations, électrochocs, etc.). Les théories racistes justifient aussi la limitation de l’immigration, atteignant un record mondial, qui ne sera battu que par l’Allemagne nazie. Le National Quota Act de 1921 autorise chaque année pour chaque pays l’entrée d’un quota d’immigrants égal à 3 % du nombre des ressortissants de ce pays déjà présents aux États-Unis en 1910. Le National Origins Act de 1924 abaisse ce pourcentage à 2 % et l’année de référence est ramenée à 1890, tout simplement parce que très peu de « Méditerranéens » d’Europe du Sud et autres « Slaves » d’Europe de l’Est (ces catégories sont officielles depuis les recensements des années 1870) étaient alors entrés sur le territoire américain. Canadiens et Mexicains sont exclus des quotas. Peur du ghetto, du bolchevisme, de la « petite Pologne », etc. Mais la mise en œuvre de la nouvelle politique d’immigration fut longue et difficile, car l’administration n’était pas préparée à cette tâche, si bien que le nouveau régime d’immigration ne fonctionna qu’à partir de 1930 : les États-Unis ne purent donc s’ouvrir à l’afflux des victimes du nazisme, du communisme et du fascisme, accueillant Albert Einstein, refusé par le Collège de France, à Princeton, mais non les masses ! D’autre part l’interdiction d’immigrer faite aux Chinois en 1882 s’étend à tous les Asiatiques en 1924, au grand dam des Japonais (voir plus haut). L’exécution en 1927 de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti (voir plus haut) s’inscrit dans ce climat. À l’élection présidentielle de 1928, Herbert Hoover est le candidat des classes moyennes protestantes, Al Smith (un vieux briscard catholique, 1873-1944) celui des immigrés catholiques.

Un cas particulier du repli américain fut la conférence de Washington (voir plus haut). Le secrétaire d'État Charles Evans Hughes (1862-1948), avec habileté, profita de la situation solide des États-Unis, banquiers du monde, pour résoudre à l'avantage de son pays certains problèmes pendants. Il convoqua à Washington, en novembre 1921, une conférence internationale sur le désarmement naval et l'Extrême- Orient, qui aboutit à plusieurs traités après avoir duré jusqu’en février 1922. Pressé par l'opinion publique, lasse des gros budgets navals, Hughes préférait un accord sur le désarmement à une course aux armements que les États-Unis étaient en mesure de gagner. La conférence de Washington est une preuve de l’activité mondiale des États- Unis, pour atteindre des buts résolument américains.

Juge à la Cour suprême, Hughes avait été désigné comme secrétaire d’État par le président Harding le 10 décembre 1920. Conservant son poste sous John Calvin Coolidge Jr (1872-1933), président entre 1923 et 1929, il devait démissionner en 1925. Jusqu’à cette date, il tient en mains les rênes de la politique étrangère américaine avec compétence et talent, au point que les historiens ont parlé d’ « ère Hughes ». C’est lui qui négocia la paix avec l’Allemagne, insista pour envoyer des « observateurs » américains à la SDN. Surtout il fut à l’origine de l’idée de règlement des réparations par la voie des experts qui devait aboutir au plan Dawes de 1924.

Finalement, l'ère républicaine fut essentiellement opportuniste en politique extérieure : rien de comparable à l'attitude de Wilson, lequel avait su se forger un système de pensée cohérent, une doctrine, la New Diplomacy ; le « retour à la normale » , c'est ici… l'absence de doctrine ! La fondation du FBI (Federal Bureau of Investigation) fut elle aussi très opportuniste. Il fut créé en 1924 dans le contexte d’une

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