• Aucun résultat trouvé

Chapitre VI : La théorie freirienne de l’émancipation

3. La gestion émancipatrice à la lumière de la théorie freirienne

L’entrepreneuriat social brésilien est aujourd’hui envahi par un ensemble de concepts et de pratiques managériales venus tout droit des Etats-Unis (voir chapitre IV). Porté par un discours politique néolibéral, il s’est rapidement imposé durant les années 2000 comme une nouvelle voie de modernisation pour les organisations de la société civile. Prônant l’autosuffisance financière et l’efficacité de l’action sociale, il a d’ailleurs redéfini le travail des acteurs du secteur associatif, en mettant en exergue l’importance de la gestion des bénéficiaires en vue de créer un impact social. Pour les membres de Solitéar, une telle conception de l’action sociale est non seulement réductrice, mais aussi limitante. Selon eux, l’entreprise sociale se doit se générer un changement plus profond, en favorisant l’autonomie et la prise de pouvoir des plus démunis. Leur vision de l’action sociale, fondée sur le dialogue et l’engagement en commun, est d’ailleurs proche de la conception freirienne du travail social, développée dans plusieurs de ses ouvrages (Freire, 1971, 1976 et 1979b). Dans cette partie, nous allons découvrir comment la théorie de Paulo Freire peut s’articuler à notre étude de la gestion émancipatrice de Solitéar, en soulignant tout d’abord les enjeux soulevés par ses écrits sur le travail social (3.1.), puis en dégageant quatre principes d’action permettant de théoriser l’action des travailleurs sociaux (3.2.). Nous pourrons dès lors mieux saisir la nature des pratiques de gestion mises en œuvre par les membres de Solitéar au cours du Soli-lab, en vue d’analyser leurs mécanismes et leurs effets dans la suite de ce travail.

3.1. Le travail social selon Paulo Freire

Dans ses écrits sur le travail social (1971, 1976 et 1979b), Paulo Freire s’est penché sur les actions de ceux qui, se considérant les seuls acteurs du changement social, prétendent apporter leur aide aux plus démunis, afin d’améliorer leurs conditions de vie. Attaquant les pratiques « extensionnistes » de certains travailleurs sociaux (3.1.1.), il a mis en évidence l’importance de la communication (3.1.2.) pour garantir la participation des populations locales au processus de changement social. Dans cette section, nous allons voir comment ces analyses permettent de porter un regard nouveau sur l’entrepreneuriat social, en redéfinissant les actions de ses praticiens.

3.1.1. La critique de l’extension

L’entrepreneuriat social s’est diffusé au Brésil comme dans d’autres pays au travers de discours messianiques faisant des entrepreneurs sociaux des hommes providentiels portés au service des plus démunis. Ceux-ci ont en effet été dépeints comme des agents de changement (change makers) capables d’impulser des transformations radicales, en mettant en œuvre des innovations sociales pour lutter contre la pauvreté (Casaqui, 2015b). De surcroît, les entrepreneurs sociaux ont été présentés comme des gestionnaires du social, pouvant user de plusieurs outils et méthodes de gestion, afin de résoudre des problèmes auxquels l’Etat et les organisations de la société civile n’ont encore trouvé aucune solution (Baggentoss & Donadone, 2013). Ce type de discours a donc présenté l’entrepreneuriat social comme une activité dénuée de tout caractère idéologique, dont l’objectif premier serait de générer efficacement un impact social significatif et mesurable.

175

La théorie freirienne nous permet de dépasser cette vision dépolitisée et techniciste du changement social, en envisageant toute la complexité que revêt l’action des entrepreneurs sociaux lorsqu’ils s’engagent sur un terrain qui ne leur est pas familier. En effet, suite à ses expériences d’alphabétisation au Chili, Paulo Freire a rédigé un ensemble de textes (1971, 1976 et 1979b) portant sur la nature des pratiques « extensionnistes » conduites par des travailleurs sociaux sur le terrain. Dans ses écrits, il a analysé les actions des agronomes faisant de l’extension – la transmission de savoirs et de techniques aux populations locales – l’objectif principal de la réforme agraire. Selon Paulo Freire, ces agronomes, en se considérant les seuls acteurs du changement social, ont considérablement amenuisé le pouvoir d’agir des paysans, en les reléguant au rang d’objets censés intégrer de nouvelles pratiques sans même en comprendre le sens :

Mécanisme, technicisme, économicisme sont les dimensions d’une même perception acritique du processus de réforme agraire. Elles impliquent la réduction des paysans à de purs objets de transformation. Selon une telle perspective, de caractère réformiste, l’important serait de produire des changements pour et sur les paysans, en tant qu’objets, et non avec eux, en tant que sujets, eux aussi, de la transformation (Freire, 2015 [1976], pp. 45-46, notre traduction).

En considérant les paysans comme des acteurs passifs, censés subir le changement plutôt que de le générer, les agronomes ont envahi leur monde culturel, dévalorisant de fait leurs croyances et leurs modes de vie (Freire, 1976). Au nom de l’impératif de modernisation des campagnes, ils ont relégué des techniques ancestrales au rang de pratiques archaïques, sans jamais considérer les racines historiques, sociales et culturelles qui en sont la source. Valorisant la connaissance scientifique face à l’opinion populaire, les agronomes ont ainsi voulu faire table rase des savoirs agricoles traditionnels, afin d’imposer de nouvelles pratiques d’agriculture et d’élevage censées impulser la réforme agraire. De la sorte, selon Paulo Freire, l’action extensionniste de ces professionnels de la terre, comme celle de tout travailleur social qui privilégie le transfert de savoirs et de techniques sur l’écoute et le dialogue, est un acte foncièrement oppressif qui vise le contrôle et la manipulation. Il n’est d’ailleurs pas rare, rappelle Freire (1983 [1971], p. 49), que les professionnels de l’extention cherchent à user de divers modes de persuasion (slogans et communiqués), dans le but de convaincre les populations locales des bienfaits de leur action. Le changement social qu’ils tentent d’imposer est si radical qu’ils trouvent le besoin de persuader leurs bénéficiaires, plutôt que de construire avec eux une relation de confiance, d’égal à égal.

Dans son œuvre, Paulo Freire établit une distinction intéressante entre les concepts de « modernisation » et de « développement », afin de cerner les spécificités de l’action extensioniste. Selon lui, la modernisation considère l’action de transformation sociale comme étant purement mécanique et techniciste. Des agents extérieurs cherchent ainsi à moderniser les structures sociales sans faire participer les populations locales au processus de changement. Le développement, au contraire, prend sa source dans les actions transformatrices des populations pour garantir la modernisation des structures sociales. « De cette façon, bien que tout développement soit une modernisation, toutes les formes de modernisation ne conduisent pas au développement » (Freire, 1983 [1971], p. 38, notre traduction). Cette différence conceptuelle est utile pour analyser les actions d’une entreprise sociale. En effet, que penser des produits et

176

des services développés par les entrepreneurs sociaux en vue de garantir la modernisation des communautés les plus démunies ? Sont-ils le fruit des seules actions et décisions des entrepreneurs sociaux ou bien émanent-ils d’une demande des populations locales voulant devenir les acteurs de leur propre développement ? En effet, il n’est pas rare d’observer une véritable dichotomie entre les offres des entreprises sociales et les besoins réels de leurs bénéficiaires, comme dans le cas du microcrédit qui a conduit de nombreuses communautés des pays en développement à l’endettement au lieu de leur permettre de gagner une véritable autonomie financière (Bateman, 2011 ; Khavul, 2010).

Selon Paulo Freire, les problèmes sociaux ne peuvent être résolus par des solutions purement techniques qui ne viendraient que réparer les failles des structures sociales. En vérité, toute transformation structurelle induite par la technique provoque des modifications socio- culturelles relatives aux modes de penser et d’agir des populations. Les travailleurs sociaux accordent pourtant rarement de l’importance au cadre contextuel de leurs actions, se focalisant sur une réalité partielle et souvent partiale au lieu d’envisager la totalité :

Ceci est, au passage, l’erreur de plusieurs tentatives du secteur social, du développement des communautés et de ladite « formation de leaders ». L’erreur de ne pas voir la réalité comme une totalité. Erreur qui se répète, par exemple, quand on tente de former les paysans en adoptant une vision ingénue de la question de la technique. Autrement dit, quand on ne perçoit pas que la technique ne surgit pas au hasard ; que la technique bien finie et « élaborée », comme la science dont elle est une application pratique, se trouve, comme nous l’avons dit, historiquement et socialement conditionnée. Il n’existe pas de technique neutre, asexuée (1983 [1971], p. 21, notre traduction).

Il est nécessaire selon Freire de dépasser la vision réductionniste de l’extension pour embrasser une conception de l’action sociale qui place les populations locales au centre du processus de changement social. Ce type de dépassement requiert toutefois la mise en œuvre d’une véritable communication entre les travailleurs sociaux et les populations bénéficiaires, afin que les premiers puissent réellement s’immerger dans la réalité des seconds.

3.1.2. La valorisation de la communication

Les incubateurs et les accélérateurs d’entreprises sociales recommandent souvent aux entrepreneurs sociaux d’analyser les attentes de leurs futurs bénéficiaires, en vue de développer des produits ou des services qui satisfassent leurs besoins réels. Au Brésil, ces organisations font usage des méthodes du Design Thinking, centrées sur la promotion de l’empathie, pour que surgissent de nouveaux modèles d’entreprises sociales pouvant résoudre les problèmes rencontrés par les populations locales (Lira, 2015). Les entrepreneurs sociaux sont ainsi amenés à définir un « persona » – une figure archétypique de leur bénéficiaire – et à imaginer quels pourraient être ses problèmes, objectifs, motivations, préoccupations, et même ses frustrations. L’enjeu est « d’entrer dans la peau » des bénéficiaires, dans le but de projeter leurs sentiments et leurs réflexions au quotidien. Ce type de pratiques, parfois supplémentées par des visites et des entretiens auprès des populations locales, est souvent considéré comme un préalable à la mise en œuvre d’une entreprise sociale. En connaissant les nécessités réelles de ses futurs bénéficiaires, l’entrepreneur social pourrait donc mettre en œuvre des solutions à la fois

177

lucratives et socialement impactantes qui permettent de lutter contre la pauvreté et de combattre les inégalités.

Ce type de méthodologie semble ainsi vouloir substituer à l’immersion et au dialogue la pratique distante de l’empathie. En effet, au lieu de passer un temps considérable auprès des populations locales qu’ils prétendent servir, les entrepreneurs sociaux sont invités à se projeter dans leur corps et dans leurs esprits, afin d’imaginer ce qu’elles pensent et ce qu’elles ressentent. Une distance considérable tend ainsi à se créer entre les entrepreneurs sociaux et leurs bénéficiaires, distance qui bannit toute possibilité d’échange et de connaissance réciproque. Selon Paulo Freire, la communication doit être au contraire au centre de l’action sociale (1971). Fondée sur le dialogue et le questionnement, elle seule permet de créer un signifié commun entre le travailleur social (ici l’agronome) et les populations locales (les paysans), qui appartiennent à des univers souvent très différents :

Ainsi, le dialogue problématisateur [...] [réduit] la distance entre l’expression significative de la technique et la perception de son signifié par les paysans. De cette façon, le signifié acquiert la même signification pour [les paysans et les agronomes]. Et cela ne se fait qu’à travers la communication et l’intercommunication entre sujets pensants à propos de ce qui est pensé, et jamais à travers l’extension du pensé d’un sujet vers un autre. [...] La communication véritable ne réside pas selon nous dans le transfert exclusif ou dans la transmission de connaissance d’un sujet à un autre, mais dans la co-participation à l’acte de comprendre la signification du signifié. Cette comunication-là se fait de façon critique (Freire, 1983 [1971], pp. 46-47, notre traduction)

Alors que dans le cas de l’extension un ensemble de signifiés est transmis aux paysans sans qu’ils puissent leur donner un sens, avec la communication les signifiés sont créés et recréés au cours du dialogue pour qu’une entente réelle puisse s’installer. Ceci implique toutefois que le travailleur social explore l’univers linguistique et culturel des populations locales, en vue de saisir les modes de penser et d’agir qui le caractérisent. Il ne peut alors considérer ces formes comme l’expression d’un savoir pré-logique qui devrait être dépassé par la connaissance scientifique (1983 [1971], p. 19). Il doit au contraire s’appuyer sur elles, dans le but d’identifier les thèmes centraux qui doivent être discutés et débattus avec les populations locales, avant même d’élaborer un projet de développement. De la sorte, la communication permet d’engager une action culturelle au cours de laquelle les participants du dialogue deviennent capables d’analyser les structures sociales et d’envisager les moyens de les modifier. Le rôle du travailleur social est donc foncièrement transformateur. Il ne peut se positionner en faveur de l’immobilisme, sous peine de défendre un programme réactionnaire et non humaniste, qui vise à renforcer la situation d’oppression au lieu de la combattre :

Ainsi, si le choix du travailleur social est contre le changement, son action et ses méthodes viseront à freiner les transformations. Au lieu de mettre en œuvre un travail qui permette de dévoiler progressivement la réalité objective et la structure sociale à ses yeux et à ceux des hommes qui travaillent avec lui dans un commun effort critique, celui-ci s’emploiera à mythifier la réalité. Au lieu de tenir compte de cette situation problématique qui le met au défi, lui et les autres hommes avec qui il devrait dialoguer, il choisit au contraire des solutions de caractère assistancialiste. Au lieu de se sentir, en tant que travailleur social, comme un homme au service de la libération, de l’humanisation, de la vocation fondamentale de l’homme, il chemine dans la

178

direction de la paralysie, ayant peur de la libération dans laquelle il voit une menace à ce qu’il considère être la paix (Freire, 1979b, p. 27, notre traduction).

Nous comprenons ainsi que le travailleur social humaniste, selon Paulo Freire, est avant tout un être porté au service de l’émancipation. Car, poursuivre le changement social et la transformation, c’est finalement vouloir favoriser la quête des hommes et des femmes en faveur de leur humanisation.

3.2. La gestion émancipatrice en question

La théorie freirienne bâtit l’action des travailleurs sociaux autour de quatre principes d’action : l’immersion, la communication, le développement et l’engagement humaniste. En explorant chacun de ces principes, nous pouvons dès lors saisir la manière dont les éducateurs humanistes sont susceptibles de favoriser l’émancipation des populations locales à travers un ensemble de pratiques concrètes.

Immersion

Au commencement de leur projet, les travailleurs sociaux peuvent faire le choix de s’immerger dans le monde de l’oppression, en pénétrant l’univers des populations démunies et marginalisées du système. Ils vont alors non seulement se familiariser avec les conditions de vie et de travail de ces populations, mais aussi tenter de comprendre leur univers culturel, afin de cerner leurs modes de penser et d’agir, et leur vision du monde. S’immerger dans l’environnement des opprimés n’est pas une action superficielle ; il s’agit plutôt d’une pratique ethnographique. Le travailleur social, tel un anthropologue, cherche à comprendre leur culture en relevant un ensemble d’informations relatives au langage, aux expressions artistiques, aux mœurs et coutumes des populations locales.

Communication

A travers l’immersion, les travailleurs sociaux peuvent bâtir une relation de confiance avec les populations locales, fondée sur l’amour, l’humilité, la foi et l’espoir. Ce rapport affectif permet d’engager une communication véritable d’où un sens commun et partagé peut émerger. Par la pratique du dialogue, les travailleurs sociaux vont ainsi conduire les opprimés à identifier les problèmes centraux de leur existence, afin d’en découvrir les causes et les conséquences. Les opprimés peuvent alors mettre ces questions à distance en les replaçant dans le contexte socio- historique qui explique leur émergence. Ce travail de contextualisation permet ainsi aux plus démunis d’exercer une distance critique vis-à-vis de leurs conditions d’existence, dans le but de prendre conscience des sources de leurs difficultés quotidiennes et d’envisager des solutions concrètes à leurs problèmes. Il s’agit là de la conscientisation.

179 Développement

Par l’action dialogique, les travailleurs sociaux et les populations locales peuvent mettre en œuvre un programme d’action leur permettant de résoudre les problèmes identifiés lors de l’étape précédente. Ces initiatives, aussi bien productives, commerciales que culturelles, visent non seulement à pallier les difficultés des opprimés, mais aussi à leur permettre de transformer leurs conditions d’existence. Les opprimés deviennent alors, aux côtés des travailleurs sociaux, des agents à part entière du changement social, étant désormais acteurs de leur propre développement.

Engagement humaniste

Les travailleurs sociaux, selon Paulo Freire, sont des travailleurs humanistes ; ils poursuivent avant tout l’humanisation des opprimés. De la sorte, ils ne peuvent à aucun moment s’opposer à la quête constante des opprimés en faveur de leur autonomie et de l’augmentation de leur pouvoir d’agir. Si les travailleurs sociaux mettent en œuvre des pratiques anti-dialogiques dont le but est de limiter la liberté et l’autodétermination des populations, en usant par exemple de méthodes de contrôle et de persuasion, ils deviennent de nouveaux oppresseurs et font obstacle au processus d’émancipation.

Les quatre principes d’action du travail social freirien sont en fait au cœur du projet émancipatoire de Solitéar. Portés par plusieurs membres de l’entreprise sociale, ils ont orienté les pratiques de gestion des entrepreneurs sociaux tout au long du Soli-lab. Pour saisir leurs mécanismes et leurs effets sur les bénéficiaires de Solitéar, il convient de mettre en évidence les questionnements associés à chacun de ces principes d’action, et ce, en vue d’analyser les apports et les limites de la gestion émancipatrice de l’entreprise sociale qui constitue le centre de notre recherche (voir le Tableau 15 ci-contre).

180

Principes d’action Questionnements

Immersion

Quelles sont les pratiques de gestion mises en œuvre par les entrepreneurs sociaux en vue d’explorer l’univers culturel de leurs bénéficiaires ?

Des méthodes de gestion spécifiques permettent- elles aux membres de Solitéar de mieux

appréhender les conditions de vie et de travail des couturières et des artisans, de manière à comprendre leurs manières de voir le monde ?

Communication

Quels types de nouveaux savoirs gestionnaires surgissent du dialogue entre les entrepreneurs sociaux et leurs bénéficiaires ?

Ces derniers, analysant les problèmes de leur quotidien, peuvent-il décider d’adopter à leur tour de nouveaux dispositifs de gestion et méthodes de production pour sortir de l’impasse de la pauvreté ?

Ce type d’appropriation favorise-t-il leur émancipation ou génère-t-il au contraire de nouvelles situations d’oppression ?

Développement

Quels produits et services les entrepreneurs sociaux choisissent-ils de mettre en œuvre aux côtés de leurs bénéficiaires ?

Le développement de ces activités productives et commerciales favorise-t-il la prise de pouvoir et le gain d’autonomie des couturières et des artisans ? Ou doit-on au contraire conclure que l’intégration au marché est un facteur

d’oppression ?

Engagement humaniste

Les entrepreneurs sociaux ont-ils finalement intérêt à favoriser l’émancipation totale de leurs bénéficiaires ?

Cherchent-ils, à travers leurs pratiques de gestion, à les garder sous leur contrôle de manière à perpétuer leur statut de bénéficiaires, ou au contraire à favoriser leur prise

d’indépendance ?

181 ***

La théorie freirienne de l’émancipation nous offre donc une grille de lecture propice à l’analyse des pratiques de gestion des entrepreneurs sociaux de Solitéar. Etant l’une des sources d’inspiration du projet Soli-lab, elle se décline en plusieurs principes d’action, à l’aune desquels il est possible d’appréhender les effets concrets de ces pratiques sur les bénéficiaires de l’entreprise sociale. Les questionnements mis en avant dans cette partie orienteront en effet