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a) La gérance légale ordinaire : article 101, alinéa 1, ORFI

258. La source principale d’indisponibilité dans la phase de la vente dans la poursuite en réalisation de gage est la gérance légale ordinaire : « Dès la date de la réquisition de vente, l’office pourvoit à la gérance et à la culture de l’immeuble de la manière prévue, en matière de poursuite par voie de saisie, dès la date de la saisie (art. 155, 1er al., et 102, 3e al., LP, art. 16 et s. et 23c ci-dessus)… » (art. 101, al. 1, ORFI).

286 A ce propos, voir l’ATF 126/2000 III 481, M. ; voir également ATF 71/1945 III 56, Schweizerische Volksbank = JT 1945 II 76. SchKG II-BERNHEIM/KÄNZIG, N° 10 ad Art. 153a LP ; GILLIERON II, N° 13 ad Art. 153a LP.

259. La gérance légale ordinaire dans la poursuite en réalisation de gage a la même portée que dans la saisie287. Elle n’est pas limitée au caractère conserva-toire de la gérance légale limitée qui l’aurait précédée, mais s’étend à tous les actes d’administration nécessaires à la perception des loyers et au maintien de l’immeuble en bon état de rendement288. Comme dans la phase préliminaire, la gérance légale opère un transfert exclusif des pouvoirs de gestion à l’office. En conséquence, les actes juridiques accomplis par le propriétaire sont inopposa-bles aux créanciers gagistes poursuivants ; si ces actes consistent en des actes de disposition, ils sont nuls, faute pour le propriétaire de l’immeuble de béné-ficier du pouvoir de disposer289.

260. Cependant, la mise en œuvre de la gérance légale est subordonnée à la réalisation de conditions propres à la poursuite en réalisation de gage (i.). Par ailleurs, nous relevons qu’aucun avis aux locataires n’est prévu pour le verse-ment des loyers pourtant dévolus à l’office (ii.).

i. Les conditions de la mise en œuvre de la gérance légale ordinaire

261. La volonté du créancier gagiste poursuivant, de même que l’avance-ment de la procédure lorsque l’immeuble est propriété d’un tiers, peuvent faire obstacle à la mise en œuvre de la gérance légale ordinaire.

aa. Le créancier gagiste poursuivant n’y renonce pas

262. La gérance légale ordinaire dans la poursuite en réalisation de gage peut faire l’objet d’une renonciation par le créancier gagiste poursuivant.

263. Pour ce faire, il doit déclarer expressément renoncer à ce que l’office pourvoie à la gérance et à la culture de l’immeuble (art. 101, al. 1, ORFI in fine).

La loi exige que cette renonciation soit faite de manière expresse, mais ne pré-voit au surplus pas de forme particulière. Pour d’évidentes raisons de preuve, nous sommes d’avis que l’office exige une déclaration écrite du créancier ga-giste renonçant.

287 ATF du 8 janvier 2003 (7B.234/2002), X ; ATF du 8 mars 2001 (4P.279/2000), Office des poursuites et des faillites Arve-Lac de Genève ; ATF 120/1994 III 138, H. = JT 1997 II 43. GILLIERON II, N° 22 ad Art. 155 LP ; SchKG II-KÄNZIG/BERNHEIM, N° 20 ad Art. 155 LP.

288 ATF 131/2005 III 141, Y. SA.

289 Voir supra § 251–253.

bb. L’opposition faite par le tiers propriétaire a été écartée

264. « Si l’immeuble appartient à un tiers, l’office ne peut en assurer la gé- rance qu’après que l’opposition faite par le tiers a été écartée. » (art. 101, al. 2, LP).

265. L’opposition ainsi désignée est l’opposition tardive faite par le tiers propriétaire du gage après la réquisition de vente (art. 100, al. 1, LP). Il ne peut pas s’agir d’une opposition faite avant la réquisition de vente, dans la mesure où celle-ci ne peut pas être déposée avant que les oppositions au commande-ment de payer aient été levées (voir les articles 154 LP et 98, alinéa 1, ORFI)290. 266. L’article 101, alinéa 2, ORFI désigne l’opposition faite par le tiers, alors que l’article 100, alinéa 1, ORFI, qui règle cette opposition, désigne également l’opposition formée par le conjoint du débiteur ou du tiers. La question est de savoir si l’article 101, alinéa 2, ORFI est lacunaire ou s’il s’agit d’un silence qua-lifié ; en d’autres termes, il s’agit de déterminer si l’opposition du conjoint em-pêche également la mise en place de la gérance légale ordinaire, ou si seule l’opposition du tiers propriétaire a cet effet.

267. La loi confère au tiers propriétaire du gage et au conjoint les mêmes droits dans la poursuite ; en particulier, chacun peut, par la voie de l’opposi-tion, contester la créance et le gage291. Cependant, la mise en place de la gé-rance légale ordinaire n’affecte pas le tiers propriétaire et le conjoint d’une manière identique : par l’instauration de la gérance légale ordinaire, le tiers propriétaire se voit privé de son droit d’administrer l’immeuble et de perce-voir les loyers, alors qu’en cette qualité le conjoint n’est pas concerné sur ce point. Ainsi, la position particulière du tiers propriétaire en cas d’instauration de la gérance légale ordinaire justifie-t-elle un traitement particulier des effets de son opposition. Nous sommes donc d’avis que la disposition n’est pas lacu-naire : seule l’opposition formée par le tiers propriétaire est de nature à faire obstacle à l’instauration de la gérance légale ordinaire dans la poursuite en réalisation de gage.

ii. L’absence d’avis aux locataires

268. Dans le cadre des pouvoirs de gérance qui lui sont attribués par la loi, l’office perçoit les loyers à venir. Or, aucun avis aux locataires n’est prévu pour le versement des loyers en main de l’office, alors qu’une telle mesure s’avère nécessaire pour que la gérance légale leur soit opposable.

290 SchKG II-BERNHEIM/KÄNZIG, N° 31 ad Art. 153 LP ; SCHELLENBERG (1968), p. 153.

291 Voir supra § 211–213 et 217.

269. Il s’agit dans ce cas d’appliquer l’article 15, alinéa 1, litt. b, ORFI par analogie, et d’aviser les locataires de la mise en place de la gérance légale ordi-naire à l’aide du Form. ORFI N° 5. Nous pensons que cet avis n’a pas à être réitéré s’il a déjà été donné par l’office à l’occasion de la mise en place de la gérance légale limitée dans la phase préliminaire (voir l’article 91, alinéa 2, 2ème phrase ORFI).