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Comme évoqué précédemment, l’efficacité d’un agent de contraste est exprimée en termes de relaxivité. Cette notion représente la capacité d’un contrastophore à augmenter les vitesses de relaxations longitudinale (1/T1) et

transversale (1/T2) des protons de l’eau environnants, et est définie selon les équations

suivantes : (1 Ti)obs = ( 1 Ti)dia + ( 1 Ti)p avec i = 1,2 [3.6] Riobs = Ridia + Rpi avec i = 1,2 [3.7]

où Robsi est la vitesse de relaxation observée en présence d’un agent de contraste, et où

les indices « dia » et « p » se réfèrent aux contributions diamagnétique et paramagnétique respectivement. En pratique, Rdiai correspond à la valeur déterminée

pour le solvant pur dans les mêmes conditions de pH, de température et de fréquence (Rdia1 = 0,2826 s-1 pour l’eau à 20 MHz et 310 K).

L’augmentation de la relaxivité des protons de l’eau résulte du couplage dipolaire entre le moment magnétique électronique du centre métallique et le moment

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magnétique nucléaire des protons de l’eau. Cette interaction dipolaire met en jeu trois mécanismes distincts : le mécanisme de sphère interne (IS), le mécanisme de sphère externe (OS) et le mécanisme de seconde sphère (SS). Elle peut alors s’écrire :

Rpi = (Rip)IS + (Rpi)OS + (Rpi)SS avec i = 1,2 [3.8]

Le mécanisme de sphère interne implique les molécules d’eau directement liées au centre métallique. Le mécanisme de sphère externe provient, quant à lui, des molécules d’eau qui ne sont pas directement coordinées au centre métallique mais qui diffusent autour de celui-ci, et le mécanisme de seconde sphère est basé sur les molécules d’eau le plus souvent liées au complexe par des liaisons hydrogène avec le ligand (Figure 3.10).

Figure 3.10. Schéma représentatif d’un complexe de Gd(III) et de ses différentes sphères de

coordination

Pour les complexes de gadolinium à faible poids moléculaire, les mécanismes de sphère interne et de sphère externe sont prépondérants. Ce dernier effet étant difficile à appréhender en raison de la diffusion aléatoire des molécules d’eau autour du complexe, la suite de cette introduction théorique sera limitée à l’étude des paramètres permettant d’influencer le mécanisme de sphère interne. De plus, les complexes de Gd(III) agissant principalement sur le temps de relaxation longitudinale T1, seule la description de la relaxivité longitudinale r1 sera présentée. La relation [3.7]

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Robs1 = Rdia1 + (Rp1)IS [3.9]

Le mécanisme de relaxivité de sphère interne permet la propagation de l’effet paramagnétique du centre métallique vers le solvant, et est basé sur l'échange de molécules d'eau de la première sphère de coordination de l'ion gadolinium et les molécules d'eau constituant le milieu environnant. Ce mécanisme est décrit par la théorie de Solomon-Bloembergen-Morgan (SBM)13,14 et est défini, dans le cas des

agents paramagnétiques en solution diluée, par la relation suivante :

(R1p)IS= (1 T1) IS = PM q T1M+ τM = C 55,5 q T1M+ τM [3.10] Avec :

o PM la fraction molaire des molécules de solvant coordinées au centre paramagnétique,

o q le nombre de molécules d’eau en première sphère de coordination,

o T1Mle temps de relaxation longitudinale de la (des) molécule(s) d’eau coordinée(s),

o τM le temps moyen de résidence de la (des) molécule(s) d’eau en première sphère de coordination,

o C la concentration molaire en espèce paramagnétique.

La relaxation longitudinale des protons de la (des) molécule(s) d’eau coordinée(s) T1M est gouvernée par deux types d’interaction : une interaction dipolaire

(DD) et une interaction scalaire ou « de contact » (SC). Cette dernière peut cependant être négligée en raison de la nature ionique de l’interaction entre le centre paramagnétique et la molécule d’eau.15 La variation de T

1M en fonction du champ

magnétique peut être décrite par un ensemble d’équations résultant de la théorie de Solomon-Bloembergen modifiée, où :

1 T1M = 1 T1MDD= 2 15 γH 2 g2 µ B 2 S(S + 1) 1 (rGdH)6 [ 3 τc1 1 + ωH2 τc12 + 7 τc2 1 + ωS2 τc22 ] [3.11] Avec :

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o γH le rapport gyromagnétique de spin électronique,

o g le facteur de Landé pour l’électron libre, o µB le magnéton de Bohr,

o S le nombre quantique de spin électronique

o rGdH la distance effective entre l’ion métallique et le(s) proton(s) de la(des)

molécule(s) d’eau coordinée(s),

o ωH et ωS les fréquences de Larmor du proton et de l’électron respectivement.

o τci avec i = 1 ou 2, le temps de corrélation modulant l’interaction entre les deux

spins.

L’interaction entre le spin nucléaire du proton et le spin électronique de l’ion paramagnétique est influencée par plusieurs facteurs : le temps de corrélation rotationnelle du complexe τR, le temps moyen de résidence des molécules d’eau dans

la première sphère de coordination τM, et le temps de relaxation électronique Tie. Ces

différents termes sont liés par la relation 3.12 : 1 τci = 1 τR + 1 τM + 1 Tie avec i = 1,2 [3.12]

Chacun des termes relatifs au temps de relaxation électronique longitudinale T1e et au temps de relaxation électronique transversale T2e peut être exprimé sous la

forme d’une équation : 1 T1e = 2B [ 1 1 + ωS2 τV2 + 4 1 + 4 ωS2 τV2] avec B = 1 10 τS0 [3.13] 1 T2e= B [ 5 1 + ωS2 τV2 + 2 1 + 4ωS2 τV2 + 3] avec B = 1 10 τS0 [3.14] Avec :

o B le terme relatif à l’amplitude du « Zero Field Splitting » (ZFS) responsable de la levée de dégénérescence des niveaux électroniques de spin de l’ion Gd(III) occupés par les électrons célibataires,

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o τV le temps de corrélation relatif aux temps de relaxation électronique.

La contribution paramagnétique de sphère interne (R1p

)IS dépend donc, d’une part, du champ magnétique, mais également de plusieurs paramètres importants à contrôler en vue de maximiser la relaxivité globale d’un agent de contraste, parmi lesquels :

o q le nombre d’hydratation du complexe,

o τM le temps moyen de résidence des molécules d’eau dans la première sphère de coordination du complexe,

o τR le temps de corrélation rotationnelle du complexe,

o Tie les temps de relaxation électronique,

o rGdH la distance spin nucléaire - spin électronique.

Si la contribution des trois premiers paramètres sur la relaxivité d’un agent de contraste sera détaillée dans les paragraphes suivants, une brève description de l’influence du temps de relaxation électronique ainsi que de la distance Gd(III)-proton sur la relaxivité d’un agent de contraste sera développée ici.

L’équation 3.11 montre, en effet, que la relaxivité de sphère interne est une fonction de (rGdH)−6. Si la distance rGdH semble avoir une forte influence sur la

relaxivité, elle reste cependant difficile à contrôler expérimentalement. Ce paramètre est souvent déduit de la distance Gd(III)-O, dont une bonne estimation peut être déterminée à l'état solide par l’examen des structures cristallographiques. De plus, une étude réalisée par spectrométrie ENDOR (Electron Nuclear Double Resonance) sur l’ion Gd-aqua et sur une série de quatre agents de contraste commerciaux dérivés de ligands polyamino-carboxylates montre que les cinq complexes possèdent une distance rGdH identique égale à 3,1 ± 0,1 Å.16,17 En première approximation, ce

paramètre peut donc être considéré comme étant indépendant de la structure du complexe, et fixé à une valeur de 0,31 nm.

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Le temps de relaxation électronique Tie gouverne, quant à lui, la relaxivité à

champ faible (0,01 – 1 MHz). Il faut que ce temps soit le plus long possible pour avoir une relaxivité élevée. La compréhension des termes de relaxation électronique τS0 et

τV est cependant difficile en raison du manque de représentations théoriques valides

quelles que soient les conditions expérimentales. Leur détermination est la plus souvent réalisée par ajustement théorique des profils de dispersion de relaxation magnétique nucléaire (NMRD) (§ 3.2.3), mais des précautions quant aux résultats doivent être prises compte tenu du nombre de paramètres ajustés simultanément. Il est donc important d’en déterminer le plus grand nombre indépendamment par des techniques d’analyse complémentaires. Le temps de relaxation électronique Tie peut

également être calculé à partir de la relaxation électronique transversale obtenue par des mesures de résonance paramagnétique électronique (RPE).