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3.1 Les mesures de compensation

3.2.1. Quelques généralités sur les marchés

3.2.1.1. Qu’est-ce qu’un marché, au sens strict du terme ?

Un marché vise à réunir un acheteur et un vendeur afin qu’ils puissent échanger des produits, qu’il s’agisse de services ou de biens. Il s’agit de déterminer des droits de propriétés sur l’objet de l’échange, qu’il s’agisse d’une ressource ou de ses usages (droits d’aménagement, droits sur l’eau, quotas individuels de pêche…) et de les rendre négociables. Les droits de propriétés garantissent et définissent les modalités suivant lesquelles le propriétaire d’une ressource peut l’utiliser, la transformer ou la transférer.

Théoriquement, un marché permet d’être en situation d’efficience économique (obtenue par la flexibilité du marché, contrairement aux réglementations qui imposent des restrictions aux activités ou aux modalités de celles-ci) et d’efficacité environnementale (en spécifiant une limite quantitative aux droits de propriétés).

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- les droits de propriétés peuvent être clairement définis ; - les coûts de transaction sont suffisamment faibles ;

- les personnes intéressées sont en nombre suffisant pour assurer la fluidité des échanges.

Par ailleurs, un marché fonctionne parfaitement si (OCDE, 2003) : - Il y a de nombreux petits acheteurs et vendeurs ;

- Le produit est homogène (le même produit est vendu par tous les vendeurs) ; - L’information circule parfaitement entre les acheteurs et les vendeurs ; - Il n’y a pas de collusion entre acheteurs et vendeurs ;

- Il est possible d’y entrer et d’en sortir librement ;

- Les acheteurs maximisent leurs préférences et les vendeurs optimisent le bénéfice total ;

- Le produit est transférable.

3.2.1.2. Rôle limité des marchés « réels » pour les services environnementaux

Il n’existe à l’heure actuelle de grands marchés que pour les produits forestiers directement consommables, comme les produits-bois. Les marchés pour les services environnementaux proprement dits sont rares (à l’exception des échanges de titres compensatoires de carbone). Ces services, comme la protection des bassins versants et la conservation de la biodiversité, ne peuvent être normalement échangés sur le marché, du fait notamment que, dans la plupart des cas, ils sont souvent considérés comme des biens publics.

Ainsi, dans la plupart des cas, les marchés des services environnementaux dépendent fortement des politiques gouvernementales et débutent rarement par des actions spontanées du secteur privé.

La capacité des services environnementaux à être objets de marchés peut être influencée par différents facteurs :

- le dynamisme de la demande et de l’offre ; - la valeur du service ;

- l’emplacement géographique du marché ;

- la possibilité de transformer le service en produit ;

- la facilité de définir et de mettre en application un droit de propriété ;

- la force du pouvoir d’exclusion (capacité du propriétaire d’une ressource d’exclure les autres de son exploitation ou utilisation) et la rivalité vis-à-vis du service fourni ; - les coûts de transaction ;

- l’incertitude scientifique, les possibilités de contrôle.

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De manière très générale, et sur un plan internationale, l’Etat peut recourir à différentes formes de gestion pour conserver la biodiversité sur son territoire selon qu’il affecte aux terres sur lesquelles se trouve la ressource et aux avantages de cette dernière un droit de propriété privé ou public (ce choix dépend de la nature des ressources et des objectifs à atteindre) :

- Un régime d’accès libre est mis en place lorsque les terres sur lesquelles se trouve la ressource ET les avantages de cette dernière sont publiques (on ne confondra pas par exemple les forêts publiques et les forêts du domaine privé de l’Etat) ;

- Un régime de propriété privée est instauré lorsque les terres sur lesquelles se trouve la ressource ET les avantages de cette dernière sont privés ;

- Différentes formes de gestion sont possibles, telles que les franchises et les régimes de contingents transférables, lorsque les terres sont publiques mais les avantages procurés par la ressource sont privés ou considérés comme tels ;

- L’Etat peut enfin accorder des droits privés sur les terres tout en imposant une servitude obligeant le propriétaire à procurer, à des fins publiques, des compensations liées à l’utilisation.

Tableau récapitulatif

Source : OCDE, 2005

3.2.1.4. Objectifs des marchés pour les services environnementaux

La création de marchés peut avoir deux objectifs principaux qui font alors appel à deux types d’instruments économiques :

1. Limiter les régimes d’accès libre, en établissant des droits de propriétés

Cet objectif peut être atteint par l’instauration de Contingents Individuels Transférables (CIT). Les CIT sont principalement utilisés dans le domaine de la pêche où ils permettent d’atténuer les incidences des pêcheries commerciales sur les ressources halieutiques et les écosystèmes marins.

Il s’agit de définir un contingent global pour la pêcherie et de le répartir en allouant aux différents pêcheurs des contingents individuels qui leur accordent le droit de pêcher une

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Ces contingents sont transférables afin de permettre une mise en commun des ressources qui optimise l’efficience des captures.

L’unité de mesure des contingents la plus courante est un pourcentage du total admissible des captures (TAC51) exprimé en unités de poids au cours d’une campagne de pêche. Toutefois, les CIT fondés sur des TAC peuvent entraîner la sélection du premier choix (les pêcheurs éliminent les poissons de petites tailles, souvent jeunes, moins rentables d’un point de vue commercial). Pour limiter ce phénomène, il peut être nécessaire de faire appel à des mesures complémentaires (observateurs, débarquements obligatoires, interdictions).

Des CIT sont mis en place en Nouvelle-Zélande, Etats-Unis, Australie, Pays-Bas et Islande. Ces mécanismes ont réussi à soulager les pressions subies par les ressources naturelles ; le rôle des autorités locales a été essentiel pour motiver les échanges et injecter des subventions. Les CIT ne sont pas seulement utilisés dans le domaine de la pêche ; le Mexique a mis en place des CIT pour la chasse au mouflon d’Amérique en terrain ouvert (l’accès à ces espaces n’étant pas réglementé, il a fallu gérer l’exploitation de la ressource). Les contingents sont attribués aux collectivités locales qui peuvent les vendre sur des marchés internationaux.

2. Limiter les incidences négatives des activités sur les écosystèmes

Cet objectif peut être atteint à travers divers dispositifs tels que les droits de développement, les banques de zones humides, les mesures de compensation (voir section précédente)… En effet, le principe des contingents négociables ne doit pas nécessairement se limiter aux espèces. Les activités industrielles et agricoles occasionnent elles aussi des incidences sur la biodiversité ; il s’agit donc de diminuer l’incidence du développement économique sur l’utilisation des terres.

Après avoir fait quelques rappels sur la notion de marché, il s’agit à présent d’analyser plus en détail la notion de Paiements pour Services Environnementaux (PSE).