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Chapitre II : EXTRAITS D’ENDOPHYTES ÉTUDIÉS

I. Généralités sur les endophytes

Parmi les micro-organismes, les endophytes occupent une place à part. Ce sont des bactéries ou des champignons microscopiques commensaux des plantes, c’est-à-dire qu’ils vivent dans les plantes, en position intra ou intercellulaire. La plante fournit à son hôte les nutriments et l’habitat nécessaires à sa survie en échange de ses services, ici la production de métabolites secondaires d’intérêt particulier.

La plupart des plantes hébergent des champignons ou des bactéries endophytes. Chaque plante peut héberger une ou plusieurs espèces d’endophytes et ces derniers ne sont pas hôtes spécifiques (Cohen 2006). Ils peuvent coloniser des plantes non seulement de

81 diverses familles botaniques, mais encore poussant dans des aires géographiques et écologiques totalement différentes.

I.1 Mode de colonisation

Les endophytes et les plantes vivent cette relation mutualiste depuis plus de 400 millions d’années (Krings et al. 2007).

Il existe deux types de transmission des endophytes : la transmission verticale et la transmission horizontale (voir figure 32).

Figure 32: Cycle reproductif des endophytes : reproduction verticale (à gauche) et reproduction horizontale (à droite) (Site : https://www.researchgate.net/figure/251565969_fig1_Fig-1-Asexual-and-sexual-lifecycle-of-epichloae-fungal-endophytes).

Dans le premier cas, le cycle de vie des champignons endophytes est lié à celui de la plante.

Les filaments mycéliens de l’endophyte se développent à l’intérieur des tissus de la plante hôte, y compris dans l’ovule puis la graine. Ainsi, dans la nouvelle plantule, le champignon endophyte sera déjà présent et sera identique à celui de la plante mère.

Le second cas fait intervenir la production de spores qui ont la particularité d’être issues soit d’une mitose (reproduction asexuée) soit d’une méiose (reproduction sexuée).

82 Ce qu’il faut souligner, c’est que quel que soit le mode de reproduction, la production de spores n’endommage généralement pas la plante, contrairement à un champignon pathogène. La spore ainsi produite infecte alors une nouvelle plante (Gillings and Holmes 2013).

I.2 Interaction hôte-endophyte

La relation entre l’hôte et le micro-organisme dépend de divers facteurs et est régulée génétiquement à la fois par les deux génomes et par l’environnement (Moricca and Ragazzi 2008).

Il s’agit cependant d’un équilibre très fin, dans lequel le micro-organisme peut redevenir pathogène si le système immunitaire de défense de l’hôte vient à faiblir. L’endophyte influence aussi la plante de manière directe, en régulant son génome épigénétiquement. C’est le cas par exemple de la germination de certaines variétés de riz, ou encore de la reproduction d’Artemisia tridentata (Rodriguez et al. 2009).

I.3 Production de molécules bioactives

Malgré le fait que certains d’entre eux puissent devenir pathogènes dans le cas où le terrain s’y prête, ils apportent généralement un avantage évolutif à la plante, en produisant certaines molécules d’intérêt du métabolisme secondaire.

Ces molécules, complexes par définition, peuvent être des hormones comme l’auxine ou les gibbérellines, favorisant de ce fait la croissance des plantes hôtes (Waqas et al. 2012). Les endophytes synthétisent aussi des molécules de défense contre d’autres micro-organismes (anti-fongiques, antibiotiques), contre divers herbivores (insecticides etc.), des molécules de résistance au stress environnemental (milieu salin (Waller et al. 2005), hautes températures) (Redman et al. 2002), diverses enzymes etc. Certaines molécules sont connues pour présenter aussi des propriétés anti-cancéreuses.

Les endophytes sont aussi impliqués dans la colonisation de nouveaux terrains par les plantes pionnières.

La palette des molécules synthétisées par les endophytes est très large, ce qui est dû à la grande diversité des voies métaboliques dont elles sont issues. Elle comprend les isoprénoïdes, des polykétides, des dérivés d’acides aminés, etc. (Tan and Zou 2001). La liste des molécules qu’ils sont capables de produire s’allonge chaque jour, cependant nous pouvons aussi citer des molécules de la famille des terpènes, des stéroïdes, des xanthones, des chinones, des phénols, des isocoumarines, des benzopyranones, des tétralones, des cytochalasines et des ennianes.

Ceci est particulièrement intéressant pour les plantes médicinales (Weber et al. 2004; Tejesvi et al. 2008; Aly et al. 2008; Huang et al. 2008; Sappapan et al. 2008). À ce titre, pour illustrer les enjeux de la présence des endophytes, nous citerons le cas du taxol, anti-

83 cancéreux majeur s’il en est. Extrait de l’écorce de Taxus brevifolia (Wani et al. 1971). Malgré la découverte de l’un de ses précurseurs, le taxotère, dans les feuilles et rameaux de

Taxus baccata (Bissery et al. 1991), les coûts d’extraction et de purification du taxol

demeurent importants. Or, Taxmyces andreana, isolé de Taxus baccata, est un endophyte producteur de taxol et de diverses taxanes, des dérivés du taxol (Stierle et al. 1995). Grâce à ces résultats, le taxol peut être produit en grandes quantités et à un coût (autant financier qu’environnemental) très faible.

Il est par ailleurs possible d’induire la production de ces molécules d’intérêt dans les plantes en modifiant les conditions de culture - stress UV, chaleur (Pommerville n.d.)…- ou encore en ajoutant au milieu de culture certaines substances : les acides valproïque et anacardique, par exemple, qui sont des inhibiteurs des histones acétylases. Leur présence dans le milieu de culture lève la répression sur l’expression des gènes.

Il est aussi possible co-cultiver plusieurs souches d’endophytes sur une même boîte de Pétri, ou des endophytes et d’autres micro-organismes (bactéries, champignons par exemple). Ainsi sollicités, les endophytes sont contraints de produire des substances de défense afin de coloniser au mieux la gélose.

En réalité, les combinaisons possibles sont presque infinies.

Cette grande diversité de métabolites peut être obtenue en une seule culture, en quantité très intéressante et facilement purifiable.

Mais malheureusement, la culture des endophytes revêt une difficulté majeure : leur variabilité.