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Caractéristiques morphologiques

1.4.4. Formation et évolution d’un seuil rocheu

Un seuil peut être vu comme une forme transitoire définissant une limite mobile entre un processus d’ajustement du chenal (i.e. partie évolutive) et le vestige d’une topographie initiale du chenal (Crosby et Whipple, 2006). Un seuil se décrit comme un changement abrupt de la pente du chenal (Gardner, 1983 ; Whipple et Tucker, 1999) créant localement une convexité dans un profil

48 d’équilibre de forme générale concave (Crosby et Whipple, 2006). Ces formes peuvent variées de rapides à forte pente à des chutes d’eau de plusieurs mètres de dénivelé. Ils résultent d’une incision localisée du lit liée à une augmentation de la force tractrice ou à une diminution de la résistance du substrat au cisaillement mais être aussi une réponse à une lithologie plus résistante ou à une baisse du niveau de base (Gardner, 1983 ; Bishop et al, 2005).

Plusieurs mécanismes de formation et d’évolution ont été suggérés selon différents contextes. Pour Gilbert (1896), le retrait d’un seuil peut se produire lorsque le substrat présente une stratification horizontale ou un faciès sommital résistant qui empêche l’érosion du rebord du seuil, mais dont la base (i.e. faciès tendre) va être érodée par la circulation de l’eau et des sédiments. Le sapement de la base du seuil entraîne l’effondrement du rebord (i.e. faciès résistant) induisant le retrait du seuil. La migration d’un seuil peut également être initié lorsque l’infiltration d’eau souterraine se fait dans un matériau à la perméabilité contrastée accélérant l’altération et facilitant l’érosion du rebord du seuil (Laity et Malin, 1985 ; Dunne, 1990). D’autres auteurs suggèrent que l’impact de l’eau et des sédiments sur la base et la face du seuil sont à l’origine de son retrait (Miller, 1991 ; Hayakawa et Matsukura, 2003). Le rôle important des propriétés mécaniques d’un substrat (i.e. homogène, stratifié, cohésif ou non cohésif, etc.) sur le développement d’un seuil a également été mis en évidence (Gardner, 1983).

Au travers d’une expérimentation en canal sur le développement d’un seuil rocheux sur substrat cohésif et homogène, Gardner (1983) a mis en évidence plusieurs phases dans l’évolution de ce type de forme (Fig. 1.15). La formation d’un seuil par suite d’un abaissement du niveau de base entraîne un rabattement de la lame d’eau dans la zone (i.e. zone de rabattement) située en amont du point de rupture de pente (i.e. rebord de seuil). Ce rabattement provoque une augmentation de la pente de la ligne d’eau et une diminution de la hauteur d’eau. Ainsi, la vitesse d’écoulement devient plus importante au niveau du rebord de seuil favorisant l’érosion du substrat qui s’incise tout en augmentant la pente du chenal et en diminuant son rapport profondeur/largeur. La vitesse et la profondeur augmentent rapidement en direction du rebord de seuil tandis que la largeur diminue. C’est au niveau du rebord de seuil que la vitesse d’écoulement et la profondeur sont les plus importantes et que la largeur est la plus faible. Dans la partie située à l’aval du rebord de seuil (i.e. face

de seuil), la vitesse et la profondeur diminuent tandis que la largeur augmente. L’érosion maximale

observée au niveau du rebord de seuil se voit diminuer graduellement vers l’aval et l’amont en s’éloignant de cette zone (i.e. rebord de seuil). Ce différentiel d’intensité dans l’érosion le long du seuil se maintient jusqu’à ce que la pente du profil tende vers une inclinaison uniforme. La zone de rabattement migre rapidement vers l’amont et voit sa pente augmenter graduellement. L’angle initial du rebord de seuil diminue par rotation de la face de seuil à sa base. Ainsi, la face de seuil migre

49 lentement vers l’amont et voit son inclinaison diminuer tandis que la zone de rabattement opère un retrait plus rapide avec une augmentation graduelle de sa pente.

Figure 1.15 : Profil longitudinal

d’un seuil (modifié d’après Gardner, 1983).

L’évolution d’un seuil dépend de l’importance des processus d’érosion et de dépôts le long de son profil, processus qui varieront selon le taux de sédiments transportés. Ainsi, la relation entre la contrainte de cisaillement de fond (Ƭo) et la contrainte de cisaillement critique pour la mise en

mouvement de particules (Ƭc) est un facteur essentiel dans l’ajustement d’un seuil. Toujours d’après

l’expérimentation menée par Gardner (1983), la contrainte de cisaillement de fond est la plus importante au niveau du rebord de seuil dépassant la contrainte de cisaillement critique nécessaire pour amorcer l’érosion du substratum (Fig. 1.16). C’est donc au niveau du rebord de seuil que l’érosion est maximale et que la pente dans la zone de rabattement augmente dans le temps tandis que la face du seuil voit sa pente diminuer (Fig. 1.15 - 1.16). D’après Pickup (1975), le transport par charriage présente deux discontinuités le long d’un seuil : (1) en amont à l’approche du rebord de seuil la charge solide diminue, augmentant le potentiel érosif de l’écoulement, et (2) à l’aval du rebord de seuil où la charge solide est excédentaire favorisant le dépôt de matériaux. L’effet de ces discontinuités dépend d’une part de la relation entre Ƭo et Ƭc et d’autre part du taux de diminution de la taille des particules

érodées (Pickup, 1975). Gardner (1983) définit ainsi trois modèles d’évolution selon la résistance du substrat dans lequel s’inscrit un seuil (Fig. 1.17) et qui sont basés sur : (1) la relation entre Ƭo et Ƭc, (2)

la nature des discontinuités dans le transport par charriage et (3) la variabilité spatiale de la résistance du substratum à l’érosion.

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Figure 1.16 : (A) Evolution de la contrainte

de cisaillement de fond (Ƭo) et de la contrainte de cisaillement critique pour la mise en de particules (Ƭc). (B) Profil en long d’un seuil (modifié d’après Gardner, 1983).

Figure 1.17 : Modèles d’évolution d’un seuil

selon la résistance du substrat (modifié d’après Gardner, 1983). Ƭo : contrainte de cisaillement, Ƭc : contrainte de cisaillement critique pour initier une érosion.

Sur la question du caractère persistant ou transitoire de ce type de forme, les observations menées par Gardner (1983) tendent à montrer que les seuils générés par des baisses du niveau de base dans un substrat homogène (i.e. évolution par rotation/inclinaison et remplacement), se réduisent graduellement dans le temps à une pente homogène (Fig. 1.17) et cela de manière indépendante du changement du niveau de base ou de la structure du substratum.

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Chapitre 2. Cadre géographique

Ce chapitre a pour but de présenter le secteur d’étude traité dans le présent travail. Il s’agit (1) d’exposer les caractéristiques physiques du bassin versant de la Garonne et (2) de montrer la diversité du terrain d’étude qu’est la moyenne Garonne toulousaine, au travers de ses caractéristiques hydromorphologiques et d’une description des activités humaines et des aménagements qui s’y rapportent.