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Les fondements didactiques du Volet mathématique du programme Fluppy

Les études précédemment recensées permettent de saisir comment progresse chez un jeune enfant, l’acquisition de la suite numérique et des pratiques numériques, c’est-à-dire des situations dans lesquelles cette suite numérique est utile à la résolution. Dans la conception de situations didactiques qui visent l’enseignement et l’apprentissage des connaissances sur la suite numérique, il est nécessaire de se doter d’un cadre pour déterminer les conditions didactiques à mettre en place pour favoriser l’apprentissage visé. La Théorie des situations didactiques étant le cadre didactique retenu pour la conception des situations du volet mathématique du programme Fluppy (Giroux & Ste-Marie, 2004), elle est décrite dans la section suivante. Nous décrivons par la suite, les situations numériques développées dans ce volet.

2.1 La théorie des situations didactiques

La Théorie des situations, élaborée par Guy Brousseau (1998) au cours des dernières décennies, est devenue un cadre de référence incontournable en didactique des mathématiques. Une description des principaux concepts de cette théorie permet non seulement d’éclairer les fondements théoriques du volet mathématique Fluppy mais, également, de situer la posture théorique dans laquelle s’inscrit cette recherche.

2.1.1 Milieu et situation adidactique

Le milieu est un système autonome qui se modélise en fonction d’une connaissance, d’un savoir spécifique, d’une notion mathématique, et devient par le fait même un objet central de la théorie des situations. Comme le mentionne Salin (2001a) dans un article dédié à l’évolution du concept de milieu dans la théorie des situations, la notion de milieu est incontournable pour saisir le concept de situation didactique. Définir le milieu revient non seulement à prendre en compte tous les éléments qui interagissent autour de l’élève en situation didactique : la situation elle-même, les autres élèves, l’environnement, l’enseignant, etc.; mais aussi, comme l’a fait Salin (2001a), de revenir à l’étymologie

du mot milieu, entre-deux pour comprendre que le milieu renvoie aux rapports entre ces divers éléments, en se distinguant ainsi de l’environnement.

Une situation d’enseignement est un milieu dans et sur lequel différents acteurs agissent et interagissent afin d’en modifier l’état initial. Les situations d’enseignement font généralement cohabiter milieux didactiques et adidactiques. Les premiers requièrent l’intervention didactique de l’enseignant par l’explication, la démonstration, la théorisation, etc. Les seconds se distinguent par la propriété qu’ils ont de laisser l’élève autonome de prendre des décisions et de les modifier en fonction des rétroactions données par le milieu. La situation adidactique est donc intégrée à la situation didactique. En situation adidactique, l’élève doit faire des choix pour adapter sa conduite mathématique aux contraintes du milieu et ainsi élaborer une stratégie de résolution qui fait appel à la connaissance visée. La théorie des situations met l’accent sur ce deuxième type de situations et considère comme primordial le recours à la situation adidactique et donc, au milieu adidactique dans les rapports enseignement/apprentissage.

Les milieux adidactiques représentent donc une version organisée de la réalité à laquelle l’élève pourrait être éventuellement confronté, en situation non didactique, c’est à dire à l’extérieur du cadre scolaire, comme le souligne Brousseau (1998, p. 93) : « Au fur et à mesure des progrès des élèves, cette représentation culturelle et didactique du milieu sera supposée se rapprocher de la réalité et les relations du sujet avec ce milieu s’appauvrir en intentions didactiques ».

La connaissance visée est celle qui permet d’atteindre la stratégie optimale, un état gagnant du milieu, celle-là et pas une autre. Une connaissance sera pertinente dans une situation donnée si elle permet à l’élève de mettre en œuvre une ou plusieurs stratégies permettant de progresser dans la situation, d’atteindre un état du milieu différent de son état initial. Le savoir est un moyen de répondre aux exigences d’un milieu afin d’atteindre un état favorable, gagnant dans une situation dénuée d’intentionnalité didactique explicite. Ainsi, la considération et l’organisation du milieu sont une nécessité interne à la situation adidactique (Brousseau, 1998). Une situation adidactique se présente donc comme un problème pour l’élève, que ce dernier cherche à résoudre avec toutes ses connaissances. Cette situation a été organisée par l’enseignant et répond donc à une intention didactique - l’enseignant vise un apprentissage. Mais pour l’élève, la situation est adidactique car l’enseignant n’intervient pas en tant que détenteur du savoir pour lui proposer une aide lors de la recherche d’une solution. Le processus d’enseignement par lequel l’enseignant fait accepter, à l’élève, sa responsabilité au regard de ce qu’il produit en situation est la dévolution. Au terme d’une situation didactique, l’enseignant a cependant la responsabilité d’assurer le processus d’institutionnalisation par lequel il vient fixer le statut culturel du savoir mis en œuvre en situation adidactique.

2.1.2 Typologie des situations

Dans une situation adidactique, on prévoit différents fonctionnements des connaissances. Trois dialectiques de situations sont associées à ces fonctionnements. La situation d’action engage l’élève dans une démarche de solution qui appelle des connaissances qui se manifestent de manière instrumentale. L’élève agit de différentes manières sur la situation à l’aide de ses connaissances. Les stratégies à la source de ces actions engagent des connaissances mathématiques que la situation se propose de faire évoluer par un jeu sur les valeurs des variables didactiques. Ces valeurs ont donc un impact important sur les solutions développées (et donc les connaissances) par les élèves. On les appelle variables didactiques dans la mesure où le jeu sur les valeurs de ces variables est utilisé pour favoriser un changement de stratégies chez les élèves. Une variable didactique est donc un élément de la situation qui peut être modifié par le maître et qui affecte la hiérarchie des stratégies.

La deuxième dialectique est la situation de formulation qui sollicite de la part de l’élève l’explicitation des connaissances engagées dans la dialectique de l’action, dans un langage qui doit être compris par les autres. Enfin, la troisième dialectique est la situation de validation qui requiert des élèves la justification de leurs explicitations. Cette dialectique fait donc appel à une validation qui repose sur des arguments mathématiques.