• Aucun résultat trouvé

FONCTIONS D'UNE VARIABLE COMPLEXE

Ce chapitre est centré sur la notion d'holomorphie. Au premier abord, la C­ dérivabilité ne paraît pas remarquable : dans le corps C, on s'intéresse à la limite du quotient

f(z) -f(a)

z - a

quand z tend vers a, tout comme la théorie des fonctions d'une variable réelle s'in­ téresse à ces quotients dans le corps IR.. En fait, la géométrie du corps C confère aux fonctions C-dérivables des propriétés remarquables qui n'ont aucune contrepartie dans la théorie des fonctions de la variable réelle.

À L'AGRÉGATION

Les fonctions d'une variable complexe apparaissent souvent lors des épreuves de l'agrégation, et ce fut notamment le cas dans les sujets d'analyse en 2001 et 2002.

A l'oral aussi, on rencontre souvent ce thème : en illustration dans certaines leçons (comme « Utilisation des séries » ou « Intégrales dépendant d'un paramètre ») ou lors de leçons qui lui sont entièrement dédiées. Pour ces leçons, il faut prêter une attention particulière à l'articulation des notions pour éviter les erreurs de logique mais aussi les hors-sujet. Citons en effet le rapport du jury 2001 : « A propos des deux leçons centrées l'une autour de la notion analyticité, l'autre autour de la notion d'holomorphie (et méromorphie) : le jury s'attendait à deux présentations différentes, ce qui n'était pas toujours le cas. »

PRÉLIMINAIRES

Dans tout ce chapitre, le corps C est muni de sa structure d'espace normé par le module. Pour U un ouvert de C, on note .Yé'(U) l'ensemble des fonctions holomorphes sur U, et Jt(U) l'ensemble des fonctions méromorphes sur U. D(a, r) désigne le disque ouvert de centre a et de rayon r, C( a, r) le cercle de centre a et de rayon r, et K(a, ri , r2) la couronne ouverte {z

E

C, r1 < lz -al < r2}.

Rappelons les identifications usuelles qui permettent de comparer l'holomorphie et la différentiation classique dans IR.2 (voir la sous-section 2.3.1) :

- Les complexes sont identifiés aux couples de réels via l'application IR.-linéaire bi­ jective :

JR.2

46 CHAPITRE 2 - FONCTIONS D'UNE VARIABLE COMPLEXE 2.1

- Ils sont aussi identifiés aux similitudes directes de l'espace euclidien

IR.2

via l'iso­ morphisme de groupes :

{

(Cx ' . )

z = x + i y

....::'...+ (Sim+

IR.2,

o)

[ : �

y

]

.

En fait, il y a un isomorphisme de corps entre C et le corps formé par les similitudes directes et la matrice nulle.

C(a,r) D(a,r)

Fig. 2.1 Cercles, disques et couronnes Les définitions des fonctions étudiées sont rassemblées ci-dessous.

Définition 2.1 - Fonctions d'une variable complexe. Soient U un ouvert de C

et f une fonction de U dans C. On dit que f est :

- développable en série entière en un point a E U : s'il existe r > 0 et (an)nelll E C111

une suite de nombres complexes, tels que le disque { z E C, lz - al < r} soit inclus dans U et que sur ce disque, on ait

+oo

f(z) = n=O L an(z - a)n.

On dit alors que f est égale à la somme de la série entière z 1-+ L an(Z -

ar

sur le disque de centre a et de rayon r.

- une fonction analytique sur U : si f est développable en série entière en tout point de U.

- une fonction holomorphe sur U : si, en tout point a E U,

f(z) - f(a)

z - a

admet une limite lorsque z tend vers a. Si elle existe, cette limite est notée f'(a).

- une fonction méromorphe sur U : s'il existe P un ensemble de points isolés de U (appelés pôles de !) tel que f est analytique sur U " P et si, en tout p E P, il existe

n E N* et b E C '-

{O}

vérifiant f(z) ,...., b(z - p)-n. z-+p

- une fonction harmonique sur U : si f est deux fois IR-différentiable sur U et vérifie sur U

Un résultat important est que les notions d'holomorphie et d'analyticité coïn­ cident (ceci est démontré en deux temps par les théorèmes 2.4 et 2.25) . Nous séparons néanmoins l'étude de ces deux notions pour mettre en avant ce qui leur est propre. Nous nous affranchissons de la contrainte d'une présentation linéaire du sujet pour laquelle nous vous renvoyons aux ouvrages de référence tels [cARj et [RuoJ.

2. 1 . 1 SÉRIES ENTIÈRES 47

2 .1 SÉRIES ENTIÈRES

Les séries entières sont des séries de fonctions à valeurs complexes aux propriétés remarquables. Elles doivent être, à l'issue de la préparation, familières à l'agrégatif. Nous recommandons la lecture de [RD04, Ch.3) qui présente leur étude accompa­ gnée d'exemples. Nous rappelons dans cette section les propriétés liées au rayon de convergence et présentons quelques résultats sur le comportement au bord du disque de convergence.

2 . 1 . 1 RAYON DE CONVERGENCE

EXPONENTIELLE COMPLEXE

L'exponentielle est un premier exemple important à partir duquel sont définis les fonctions trigonométriques (et les fonctions trigonométriques hyperboliques) ainsi que le nombre 7r. Nous conseillons la lecture du prologue de [RUD) qui expose les propriétés fondamentales de l'exponentielle. Nous utilisons ces propriétés à la sous­ section 2.6.3 et dans l'exercice 2.12.

RAYON D E CONVERGENCE

La forme du terme général d'une série entière

(z

f--+

anzn)

impose une forme particulière au domaine de convergence absolue de la série : c'est un disque dont le rayon est appelé rayon de convergence de la série entière. La notion de rayon de convergence est ainsi propre aux séries entières.

C'est le lemme d'Abel qui justifie à la fois l'existence et la définition de ce rayon de convergence (voir [RD04, 3.1 .2)). Étant donnée la série entière

L:anzn

de rayon de convergence R, on dispose d'une partition du plan complexe en trois parties :

C = D{O, R) U C{O, R) U

{z E

C,

lzl

> R}. - Sur D{O, R), la série L

anzn

est absolument convergente. - Sur

{z E

C,

lzl

> R}, la suite

(anzn)nEN

n'est pas bornée.

- Sur C{O, R), la situation dépend de la suite

(an)nEN

(voir sous-section 2.1 .2).

On retrouve une situation analogue pour les séries de Dirichlet : le domaine de convergence absolue est un demi-plan et on parle alors d'abscisse de convergence absolue (voir [SER, Vl.2.2) et le sujet d'analyse de 1989) .

Soit L

anzn

une série entière de rayon de convergence R

E

[ 0 , +oo J . Récapitulons différentes manières (extraites de [RD04, 3 . 1 .2)) pour déterminer R.

- S'il existe

zo

de module r avec L

anzon

qui converge absolument, alors r � R. - S'il existe

zo

de module r tel que la série L

anzon

diverge grossièrement (c'est-à-dire

que son terme général ne tend pas vers 0) , alors R � r. - La formule d 'Hadamard donne exactement R :

- La règle de d'Alembert

..!_ = ·lim sup

lanl� E

IR+ U {+oo}. R

1 .

lan+il

{ }

R = hm �

E

IR+ U +oo

permet de calculer certains rayons de convergence (notamment lorsque

an

s'exprime avec des factoriels) .

48 CHAPITRE 2 - FONCTIONS D'UNE VARIABLE COMPLEXE 2 . 1 . 1

- On dispose aussi de relations sur les rayons de convergence de la somme et du produit de deux séries entières.

La règle de d'Alembert s'utilise surtout pour les exemples pratiques. Pour les exercices théoriques (comme l'exercice 2.1), elle présente deux défauts : d'une part la suite

(lan+i l/lanDn

peut ne pas avoir de limite, d'autre part le quotient peut ne pas être défini (si

an =

0).

CONVERGENCE UNIFORME

En vue d'appliquer les théorèmes classiques de passage à la limite ou de continuité à sa somme, il est crucial de savoir dans quel domaine une série entière converge uniformément.

Théorème 2.2 - Convergence uniforme. Une série entière converge normalement, donc uniformément, sur tout compact contenu dans son disque ouvert de convergence.

Ce théorème est constamment uti­ lisé. Il entraîne notamment la con­ tinuité de la somme d'une série entière sur son disque ouvert de convergence. Il est démontré dans

[RD04, 3.1 .3] . convergence normale

(anzn)n

non bornée disque de convergence

Contre-exemple 2.3 - Domaine de convergence uniforme. En général, il n'y a pas convergence uniforme sur le disque ouvert tout entier.

Soit

E anzn

une série entière de rayon de convergence R

=

1 . Supposons que cette série converge uniformément sur D(O, 1). Le critère de Cauchy uniforme sur D(O, 1)

permet d'écrire

1 n'{! akzkl

::;; € .

k=n+l

'lfé > O , 3 No E N , 'v' n ;;::: No , 'v'p E N , 'v' z E D(0, 1) ,

Cette inégalité étant valable pour tout

z

dans D(O, 1) et les fonctions

z

14

akzk

étant continues sur le disque unité fermé D(O, 1), l'inégalité est aussi valable sur D(O, 1).

Le critère de Cauchy uniforme est donc aussi vérifié sur D(O, 1 ) , ce qui implique la convergence uniforme de la série sur D(O, 1). On en déduit que la somme de la série est continue sur tout le disque fermé. Ceci est faux pour la série

E zn.

Bref, en général, une série entière ne converge pas uniformément sur son disque ouvert de convergence. L'exercice 2.5 donne deux conditions nécessaires équivalentes pour

assurer cette convergence.

Le résultat suivant est une conséquence d'une interversion de limites rendue licite par la convergence uniforme du théorème 2.2 (voir [RD04, 3.2.1 .2°]).

Théorème 2 . 4 - Dérivation complexe d e l a somme d'une série entière. Soient

E anzn

une série entière et

zo

un point du disque ouvert de convergence. La somme f de la série entière est holomorphe en

zo,

et la valeur de sa dérivée en

zo

est la somme de la série

Enanzon-1.

Par ailleurs, la série

E nanzn-l

a le même rayon de convergence que

E anzn

[RD04, 3.1 .2.6°] . On déduit alors du théorème 2.4, par récurrence, que f est indéfini­ ment dérivable sur le disque ouvert de convergence. On obtient aussi une expression des coefficients

an

en fonction des dérivées successives de f :

j(

n

)(O)

2.1.2 SÉRIES ENTIÈRES

2 . 1 . 2 Au BORD D U DISQUE D E CONVERGENCE

49

Soit L:

anzn

une série entière de rayon de convergence

R

E ] 0 , +oo [. Quitte à considérer la série L:

anRn zn,

on peut supposer que

R

= 1 . Soit f la somme de cette série (f est donc définie sur le disque unité ouvert) . Dans cette sous-section, on s'intéresse au comportement de f au bord du disque où, a priori, tous les cas peuvent se produire (voir [RD04, 3.1.2.5°]).

POINTS SINGULIERS

Un point du cercle unité est dit singulier si l'on ne peut pas prolonger f en une fonction holomorphe au voisinage de ce point. La compacité du cercle unité entraîne l'existence de tels points. Les propriétés des points singuliers sont étudiées dans [RUD, Ch. 16) et dans [zQ, p.49) . On y trouve des définitions précises, la nature topologique de l'ensemble des points singuliers et des séries entières pour lesquelles tous les points du cercle sont singuliers. Les exercices 6 et 7 [ZQ, p.59) donnent des exemples concrets intéressants.

CONVERGENCE EN UN POINT

Le théorème d'Abel angulaire est l'archétype du problème d'interversion de li­ mites. Les théorèmes taubériens [GOU2, p.251 et p.284) établissent des réciproques au théorème d'Abel angulaire en imposant des conditions sur la suite

(an)neN·

L'exer­ cice 2.13 traite le cas élémentaire où les

an

sont positifs et donne une application en probabilité.

Théorème 2.5 - Théorème d'Abel angulaire. Soient L:

anzn

une série entière de rayon de convergence 1 de somme f, un réel Bo E [ 0 , 7r /2 [ et le secteur angulaire

D.00 = D(0, 1) n {z = l - pei8, p > O, O E [ -Oo , Oo l } . Si la série L:

an

converge, alors

Z -+ 1 z E Ao0

L'objectif est de passer à la limite quand z

tend vers un point du cercle de conver­ gence en « évitant le reste du cercle » c'est­ à-dire dans un secteur angulaire. Pour cela, l'idée est d'opérer une transformation d'Abel (voir [RD04, 1 .3.2.1°]).

Nous proposons ici une modification de la démonstration donnée dans l'exercice 10 de [GOU2, p.249) pour éviter une transformation d'Abel sur des sommes infinies. En effet, il est souhaitable de revenir aux sommes partielles puis de passer à la limite, plutôt que d'opérer directement la transformation sur les sommes infinies (c'est la même démarche que pour les intégrations par parties infinies). Cela évite d'écrire des quantités qui n'ont pas de sens.

Pour pouvoir passer à la limite (grâce au théorème d'interversion de limites [RD04, 2.2. 1.1°]), on démontre que les sommes partielles vérifient un critère de Cau­ chy uniforme sur un voisinage de 1 dans le domaine D.00 •

50 CHAPITRE 2

-

FONCTIONS D'UNE VARIABLE COMPLEXE 2.1.2 Comme la série

E an

est convergente, on peut définir

De plus, la suite

(Rn)n

des restes tend vers O. L'écriture

an = Rn-1 - Rn

permet d'effectuer une transformation d'Abel pour obtenir pour

z

E b..90 et (n, p) EN x N*

n+p E akzk = R,,,zn+l

+

n+p-1 E Rk(zk+l - zk) - Rn+pzn+p.

k=n+l k=n+l

Fixons à présent ê > O. Comme

E an

converge, on peut écrire

3 No E N, V n ;;;:: No ,

IRnl

� e.

On en déduit que, pour tout

z

E b..90 , tout n ;;;:: No et tout p E N* ,

1 k=n+ 1 nf akzn[

ê

lzn+ll

+

/Ë-1 lzk+l - zkl

+ ê

lzn+pl·

·

k=n+ 1

Comme

lzl

< 1, on obtient :

'l:/ z E b..e0 , 'l:/ n ;;;:: No , 'l:/p E N* ,

1 k=n+l n+p E akzn 1

1 lz - 1 1

-

Z

Pour majorer la quantité lz - 1 1/(1 - l

zl)

, [aou2, p.249) propose de restreindre z à un ensemble de la forme

Di. =

b..90 n D(l, 8). On a alors

V z E b.., V n ;;;:: No , Vp E N* ,

1 k=n+l E akzn[

(

2 + �COS (e )O

)

e . Cette dernière majoration étant aussi valable pour z

=

1, on en déduit que la série entière vérifie un critère de Cauchy uniforme sur

Di.

U

{

1}, et donc que

f

est continue sur

Di.

U

{

1 } . Ainsi, on peut passer à la limite et le théorème 2.5 est démontré.

COMPARAISONS

Les résultats de comparaison permettent de trouver des équivalents de

f

au voi­ sinage d'un point au bord du disque de convergence. L'exercice 4 de [aou2, p.243) donne deux résultats de ce type et les illustre. En pratique, le principe est de compa­ rer une série entière dont les coefficients sont compliqués avec une série entière plus simple dont on sait calculer la somme. Cette méthode est détaillée dans l'exemple ci-dessous.

Exemple 2.6 Considérons la série entière

Eln(n)zn.

Avec la règle de d'Alembert, on trouve que son rayon de convergence est 1 . On s'intéresse à sa restriction aux réels

E

ln( n

)xn

et notamment à la limite de la somme quand

x

tend vers 1. Appliquons la première méthode de l'exercice 4 [Gou2, p.243) avec

n

1

an =

ln n et

bn = E k=l

-k •

La série

E

ln n diverge grossièrement et les suites (

an)n

et

(bn)n

sont équivalentes lorsque n tend vers +oo (voir [Gou2, p.205)). On en déduit que :

+oo

E lnn xn

2.2.2 FONCTIONS ANALYTIQUES 51

On remarque alors que I:

bn

est le produit de Cauchy (ou produit de convolution) de la série de terme général égal à 1 et de la série harmonique (avec la convention que le terme d'indice 0 est nul). On obtient alors

V ix! < 1,

Et finalement, f (x) ln(l - x) 1 - x

·

2.2 FONCTIONS ANALYTIQUES

Les fonctions analytiques sont les fonctions complexes qui sont sommes de sé­ ries entières autour de chaque point (voir la définition 2.1). Comme les sommes de séries entières sont « presque » des fonctions polynomiales, les fonctions analytiques jouissent localement de propriétés « ressemblant » à celles des fonctions polynomiales. La plus importante de ces propriétés concerne les zéros des fonctions analytiques (voir sous-section 2.2.3) .

2 . 2 . 1 FONCTIONS DÉVELOPPABLES EN SÉRIE ENTIÈRE

Soient U un ouvert de C, a E U et f une fonction définie sur U. On cherche une série entière dont la somme coïncide avec f sur un disque ouvert centré en a et inclus dans U. Le principe est opposé à celui de la section 2.1 où l'on part d'une série pour trouver les propriétés de sa somme.

Les principaux résultats sur ces fonctions se trouvent dans IRD04, 3.2.2). Insis­ tons sur le fait que les coefficients du développement de f en a sont uniques car ils s'expriment en fonction des dérivées successives de f en a (voir théorème 2.4).

Application 2.7 Ce résultat d'unicité s'utilise ainsi : on calcule de deux manières différentes les coefficients du développement, puis on les identifie.

- Cette méthode permet par exemple de trouver des solutions de certaines équations différentielles : évoquons les équations de Bessel (voir IRD04, p.196) et IMVT, p.93)) et les équations différentielles dont les coefficients sont des séries entières lzQ, p.400). - On peut utiliser les séries entières dans des problèmes de combinatoire. Elles évitent l'emploi, plus algébrique, des séries formelles, mais nécessitent plus de soin .pour s'assurer de la convergence. Voir l'exercice 7 de laou2, p.247) et les exercices

IMVT, E-6 et E-7) par exemple.

2 . 2 . 2 FACTORISATION

Dans cette sous-section, nous mettons en avant la méthode qui consiste à factoriser la plus petite puissance dans une somme de puissances successives de (z - zo). Elle généralise la situation bien connue pour les fonctions polynomiales : une fonction polynomiale non nulle peut s'écrire comme le produit d'une puissance de (z - zo) et d'une fonction polynomiale non nulle en zo .

52 CHAPITRE 2 - FONCTIONS D'UNE VARIABLE COMPLEXE 2.2.2

Une factorisation similaire est encore valide (dans un voisinage de zo) pour une fonction analytique f non nulle. En effet, écrivons, pour z proche de zo ,

+oo

f(z) = L ak (z - zo)k

k=O

et considérons m = inf

{

k E N, ak :;if 0 } .

Comme minimum d'une partie non vide de N , l'entier m est bien défini et s'appelle la multiplicité de zo . On peut alors écrire

f(z) = (z - zorg(z)

g est une fonction analytique telle que g(zo) :;if O. L'écriture ( *) est aussi valable lorsque

f

est une fonction méromorphe et zo un pôle de f. L'entier m est alors négatif et c'est l'opposé de la multiplicité du pôle z0 .

Cette écriture ( *) est notamment utilisée dans la démonstration du théorème des zéros isolés et à la sous-section 2.6. 1 . Nous présentons ci-dessous d'autres propriétés locales révélées par cette écriture.

APPLICATION OUVERTE

On a déjà vu à la section 1 .2 qu'une application de classe '"6'1 dont la différentielle en tout point est bijective est une application ouverte. On va voir maintenant que l'hypothèse sur la différentielle n'est pas nécessaire pour les fonctions analytiques. L'idée est qu'une fonction analytique « se comporte localement comme une fonction puissance » . En effet, si f n'est pas constante dans un voisinage de zo , on peut montrer que l'écriture {globale) de f(z) - f(zo) sous la forme (*) se transforme autour de zo en

f(z) - f(zo) = ip(z)m,

où 'P est un difféomorphisme d'un voisinage de zo dans un voisinage de O.

Détaillons la preuve de ce résultat. On écrit f(z) - f(zo) = (z - zorh(z) avec h(zo) :;if O. h est en particulier continue donc h(z) :;if 0 dans un voisinage de zo (ceci est possible puisque f - f(zo) n'est pas la fonction nulle). Montrons que h est la puissance m-ièmes d'une fonction analytique dans un voisinage de z0 {en suivant la méthode exposée dans [CAR, VI. 1 .21) . On écrit

h(z) = h{zo){l + h1 (z)) avec h1(z) ---+ O. z�zo

En particulier, pour z suffisamment proche de zo , on a

l

h1 {z)

I

< 1 c'est-à-dire 1 + h1(z) E D{l, 1). Sur ce disque, la racine m-ième admet une détermination analy­ tique 'ljJ (cf. sous-section 2.6.3) . En écrivant h(zo) = am (a :;if 0) , on obtient alors

f(z) - f(zo) = ((z - zo)g(z))m avec g(z) = a 'ljJ{l + h1(z)).

La dérivée en zo de 'P : z 1-+ (z - zo)g(z) est g(zo) :;if O. Le théorème 1 .20 d'inversion locale montre alors que l'application z 1-+ (z - z0)g(z) est un difféomorphisme d'un voisinage de zo dans un voisinage de O.

Finalement f - f(zo) est localement la composée de deux applications ouvertes à savoir un difféomorphisme et une application puissance. On en déduit qu'il existe un voisinage Uo de zo tel que fi : U0 Uo --+ C est une application ouverte. On conclut alors grâce à l'exercice 1 .6 que f est ouverte.

Ajoutons enfin que l'écriture de f sur U0 sous la forme f(z) = f(zo) + ip(zr

implique la propriété importante suivante :

2.2.3 FONCTIONS ANALYTIQUES 53

En effet, comme

z

1-7

zm

n'est injective dans aucun voisinage de O si m > 1, l'injecti­ vité de f impose m = 1 . Un calcul élémentaire montre alors que

f'(zo)

=

g(zo)

=f O.

Ce résultat est faux pour une fonction simplement de classe

�1(JR.2),

comme le montre le contre-exemple f : (

x, y)

1-7 (

x3, y3).

En effet, f est injective sur

JR.2

mais

df(O, O) = O.

2 . 2 . 3 THÉORÈME DES ZÉROS ISOLÉS

ZÉROS D 'UNE FONCTION ANALYTIQUE

Sur <C, une fonction polynomiale qui admet une infinité de zéros est nulle. Même si ce n'est plus vrai pour une fonction analytique, l'existence d'une infinité de zéros

« suffisamment regroupés » conduit au même résultat.

Théorème 2.8 - Théorème des zéros isolés. Si f est une fonction analytique dans un ouvert connexe U et si f n'est pas identiquement nulle, alors l'ensemble des zéros de f n'admet pas de point d'accumulation dans U.

Ce théorème résulte de l'écriture sous la forme factorisée ( *) de la sous-section pré­ cédente. En effet, l'écriture (*) assure qu'au voisinage de

zo

EU,

f

(

z

) est équivalent à (

z - zorg(zo)

et ne s'annule donc qu'en

zo.

Remarque 2.9 - Points isolés. Le mot « isolé » porte parfois à confusion : nous vous conseillons de vous reporter à la définition qu'en donne [RD03, 2.1 .4.4°] . Rappelons qu'un ensemble X est dit discret si sa topologie est la topologie discrète (c'est-à-dire si tout sous-ensemble de X est ouvert) . Un sous-ensemble Y d'un espace topologique X est discret si, et seulement si, il est formé de points isolés dans X. Ainsi, le théorème des zéros isolés établit que l'ensemble des zéros de f est discret ou, de manière équivalente, que les zéros de f sont isolés dans U.

À ce propos, un sous-ensemble discret d'un compact n'est pas nécessairement fini. Considérons en effet le contre-exemple suivant : le sous-ensemble

V =

{�

, n E N , {O, l}

}

c [ 0 , 1 ]

est formé de points isolés, puisque

] [

n V =

{ � }

·

En fait, il manque une hypothèse de fermeture : dans un compact, un sous-ensemble Z

fermé et formé de points isolés est fini (Z est discret et compact donc fini).

Remarque 2.10 - Dénombrabilité des zéros. La remarque précédente assure le résultat suivant : une fonction analytique f non nulle admet un nombre fini de zéros dans tout compact K de U. En effet, l'ensemble des zéros est formé de points isolés, et il est aussi fermé (comme l'image réciproque de {O} par !).

On en déduit que l'ensemble des zéros d'une fonction f analytique non nulle sur U est au plus dénombrable. En effet, U est une réunion dénombrable de compacts (voir [zQ, V.III.2] , on dit que U est O'-compact) . Sur chacun de ces compacts, f admet un nombre fini de zéros. L'ensemble des zéros de f sur U est une union dénombrable d'ensembles finis, donc est au plus dénombrable.

54 CHAPITRE 2 - FONCTIONS D'UNE VARIABLE COMPLEXE 2.2.4

PROLONGEMENT D E S FONCTIONS ANALYTIQUES

Le principe du prolongement analytique est une reformulation du théorème des zéros isolés. C'est cette forme que l'on utilise le plus fréquemment.

Théorème 2.11 - Principe du prolongement analytique. Soit U un ouvert connexe. Si deux fonctions analytiques coïncident sur un sous-ensemble D C U ayant un point d'accumulation dans U, alors elles sont égales sur U.

Il est essentiel que le point d'accumulation soit dans U (voir l'exercice 2.2). Par ailleurs, si U n'est pas connexe, on a seulement l'égalité sur chacune des compo­