• Aucun résultat trouvé

métaux de transition

D. Fonctionnalisation de liaisons C-H sp 2 d’arènes et d’alcènes

1. Formation de liaisons C-Hétéroatome

La formation de liaisons C-Hétéroatome peut être réalisée par réaction de couplage du complexe organométallique issu de l’activation d’une liaison C-H sp2.

Par exemple, les équipes d’Ishiyama, de Miyaura et d’Hartwig ont conjointement rapporté l’utilisation de complexes d’iridium pour la borylation d’arènes avec le bispinacolborane à une température de 80°C (Schéma A-40).62,63 Dans ces conditions, les deux motifs pinacolborane sont utilisés dans la réaction de borylation, et le seul sous-produit est le dihydrogène. Néanmoins, l’utilisation d’arènes monosubstitués (toluène, anisole) conduit à des mélanges d’isomères.

Schéma A-40 : Borylation du benzène catalysée par l’iridium

Afin de s’affranchir des problèmes de régiosélectivité, différents groupes se sont intéressés à la fonctionnalisation de substrat possédant un groupe directeur. L’activation C-H d’une molécule précomplexée à un complexe métallique conduit à un métallacycle qui peut être diversement fonctionnalisé.12,64 Ce type de réaction a principalement été rapporté avec des

62 T. Ishiyama, J. Takagi, K. Ishida, N. Miyaura, N. R. Anastasi, J. F. Hartwig, J. Am. Chem. Soc. 2002, 124,

390.

63 Revue : I. A. I. Mkhalid, J. H. Barnard, T. B. Marder, J. M. Murphy, J. F. Hartwig, Chem. Rev. 2010, 110,

890.

64

Partie A. Formation de liaisons C-C et C-Hét via la rupture d’une liaison C-H métallocatalysée

41 complexes de palladium qui sont compatibles avec de nombreux oxydants, une large gamme de substrats et permettent la formation d’un grand nombre de liaisons C-Hétéroatome différentes. Par exemple, le groupe de Sanford a montré qu’une quantité catalytique d’acétate de palladium permettait l’acétoxylation de la 2-phénylpyridine par le (diacétoxyiodo)benzène (PhI(OAc)2) dans l’acétonitrile à 100°C (Schéma A-41).65

Schéma A-41 : Acétoxylation de la 2-phénylpyridine

Dans des conditions analogues et en présence de N-halosuccinimides ou d’halogénures de cuivre(II), il est possible de former des liaisons C-Halogène.64 Ce type de réaction implique vraisemblablement l’oxydation du palladium du palladacycle du degré II au degré IV dont l’évolution par élimination réductrice pour conduire au produit est favorisée.

Une autre voie de fonctionnalisation de liaisons C-H sp2 fait intervenir des réactions d’addition. En effet, nous avions vu précédemment que des insaturations π peuvent être activées par des complexes métalliques électrophiles et ainsi réagir avec des nucléophiles oxygénés ou azotés (réaction de Wacker et aza-Wacker) pour conduire à la formation de liaisons C-Hétéroatome par addition/β-H élimination (Partie A.II.B.1, p.31).66 Par exemple, l’amination d’oléfines non activées a pu être réalisée par le groupe de Stahl en présence d’une quantité catalytique d’acétate de palladium et en utilisant le dioxygène comme oxydant (Schéma A-42).67

[a] Rapport isomère représenté/autres isomères

Schéma A-42 : Amination de l’oct-1-ène catalysée par le palladium

2. Formation de liaisons C-C

La formation de liaisons C-C par réaction de deux arènes ou alcènes préfonctionnalisés, catalysée par des métaux de transition (Schéma A-43), a été largement développée au cours de ces dernières dizaines d’années, fournissant aux chimistes des méthodes de synthèse très performantes comme en témoigne l’utilisation tant dans le milieu académique qu’industriel des couplages de Suzuki-Miyaura (M = B), Stille (M = Sn), Kumada-Corriu (M = Mg), Hiyama (M = Si) ou Negishi (M = Zn) par exemple.

65 Revue : A. R. Dick, K. L. Hull, M. S. Sanford, J. Am. Chem. Soc. 2004, 126, 2300.

66 a) T. Punniyamurthy, S. Velusamy, J. Iqbal, Chem. Rev. 2005, 105, 2329. b) E. M. Beccalli, G. Broggini, M.

Martinelli, S. Sottocornola, Chem. Rev. 2007, 107, 5318.

67

Partie A. Formation de liaisons C-C et C-Hét via la rupture d’une liaison C-H métallocatalysée

42

Devant la nécessité de préfonctionnaliser chacun des deux partenaires de couplage, de nouvelles réactions ont été mises point en faisant intervenir des substrats dans lesquelles la liaison C-M ou la liaison C-X est remplacée par une liaison C-H (Schéma A-43), le but ultime étant de coupler directement deux liaisons C-H (couplage oxydant).

Schéma A-43 : Réactions de couplage métallocatalysées

La réaction de couplage direct d’un alcène et d’un aromatique constitue une perspective attrayante pour la vinylation d’arènes à la fois comme alternative synthétique à la réaction de Heck (Partie A.II.B.1, p.31) mais également industriellement puisqu’elle permettrait par exemple la synthèse directe de styrène à partir de benzène et d’éthylène. Le premier exemple d’une telle réaction a été initialement décrit par Fujiwara et Moritani en 1967,68 et les conditions réactionnelles ont par la suite pu être optimisées afin d’améliorer les rendements, d’utiliser un excès moindre d’aromatique et surtout de rendre le processus global catalytique grâce à l’utilisation de réactifs capables de réoxyder le palladium (Schéma A-16, p.30 et Schéma A-44).31

Schéma A-44 : Réaction de Fujiwara-Moritani

Afin d’améliorer la régiosélectivité obtenue dans la réaction d’arènes substitués, il est possible d’utiliser des groupes complexants sur l’aromatique pour diriger la fonctionnalisation. Ainsi Shi a décrit l’alcènylation régiosélective de

N,N-diméthylbenzylamines par divers acrylates ou acrylamides en présence d’une quantité

catalytique de palladium(II) et d’acétate de cuivre comme oxydant stœchiométrique, à 85°C dans une mélange acide acétique/trifluoroéthanol.69

Schéma A-45 : Couplage oxydant dirigé par un groupe N,N-diméthylamine

La construction de motifs biaryles, omniprésents dans les domaines pharmaceutiques et des matériaux, constitue un enjeu important en synthèse organique moderne, notamment en ce qui concerne l’hétérocouplage.70

Leur formation à partir des arènes non fonctionnalisés

68 I. Moritani, Y. Fujiwara, Tetrahedron Lett. 1967, 8, 1119.

69 G. Cai, Y. Fu, Y. Li, X. Wan, Z. Shi, J. Am. Chem. Soc. 2007, 129, 7666.

70 a) J. Hassan, M. Sevignon, C. Gozzi, E. Schulz, M. Lemaire, Chem. Rev. 2002, 102, 1359. b) D. Alberico, M.

E. Scott, M. Lautens, Chem. Rev. 2007, 107, 174. c) G. P. McGlacken, L. M. Bateman, Chem. Soc. Rev. 2009,

Partie A. Formation de liaisons C-C et C-Hét via la rupture d’une liaison C-H métallocatalysée

43 correspondants reste encore un défi majeur.70c,71 En effet, la conception de conditions réactionnelles pour effectuer une telle transformation nécessite un excellent contrôle à la fois de la réactivité de chaque arène qui doit intervenir au bon moment dans le cycle afin d’éviter la formation des produits d’homocouplage mais également de la régiosélectivité pour ne former qu’un seul des nombreux régioisomères possibles. Une avancée importante a été réalisée indépendamment par les groupes de Fagnou71a (Schéma A-46) et DeBoef.71b En utilisant des indoles ou des benzofuranes comme partenaires de couplage et par un choix judicieux des conditions réactionnelles, les produits d’hétérocouplage ont pu être obtenus avec de très bons rendements et sélectivités.

Schéma A-46 : Couplage oxydant d’indoles et d’aromatiques

Le couplage oxydant intermoléculaire de deux alcènes est une réaction très peu décrite dans la littérature,72,73 en général plus connue dans sa version de dimérisation. Récemment, certaines équipes ont néanmoins mis au point des conditions permettant de coupler deux alcènes différents (Schéma A-47) sur lesquelles nous reviendrons (Partie C.I.C.1.b), p.141).

Schéma A-47 : Couplage oxydant de deux alcènes

Bien qu’utilisant des substrats très peu fonctionnalisés, ces réactions de couplage nécessitent une quantité stœchiométrique d’oxydant ce qui génère des déchets à éliminer augmentant ainsi l’impact environnemental du procédé (lorsque l’oxydant n’est pas le dioxygène). Une alternative intéressante serait d’utiliser des réactions d’addition sur un dérivé insaturé (alcène, alcyne ou monoxyde de carbone) ce qui constituerait une approche synthétique totalement économique en atomes.

Ainsi, les réactions d’hydroarylation et d’hydroalcénylation d’alcènes ou d’alcynes (Schéma A-48), qui consistent en l’addition-1,2 d’un aryle ou d’un alcène activé sur une insaturation, sont des méthodes de choix pour la construction de molécules complexes et seront détaillées par la suite (Partie B.I, p.51 et Partie C.II, p.132).20g,i,o

Schéma A-48 : Hydroarylation et hydroalcénylation d’alcènes

71 a) D. R. Stuart, K. Fagnou, Science 2007, 316, 1172. b) T. A. Dwight, N. R. Rue, D. Charyk, R. Josselyn, B.

DeBoef, Org. Lett. 2007, 9, 3137 et références citées.

72 M. J. Da Silva, J. A. Gonçalves, R. B. Alves, O. W. Howarth, E. V. Gusevskaya, J. Organomet. Chem. 2004,

689, 302 et références citées.

73

Partie A. Formation de liaisons C-C et C-Hét via la rupture d’une liaison C-H métallocatalysée

44

Le monoxyde de carbone est également un substrat insaturé intéressant pour l’addition de substrats activés par des métaux de transition. La réaction de carbonylation, qui permet de former des aldéhydes, a été décrite avec différents complexes de rhodium, d’iridium et de ruthénium. Néanmoins, cette réaction conduit généralement à de faibles rendements car elle est endothermique,74 et les complexes utilisés catalysent également la réaction inverse de décarbonylation.20g,i,o Malgré la formation de nombreux sous-produits, le benzaldéhyde peut ainsi être formé à partir de benzène sous atmosphère de CO en présence de RhCl(CO)(PPh3)3

et sous irradiation, mais l’application à des aromatiques substitués n’est pas régiosélective, ce qui restreint son utilisation. La réaction d’acylation (Schéma A-49) est quant à elle exothermique, donc plus facile à mettre en œuvre.20i Elle présente de plus un intérêt synthétique évident puisqu’elle permet le couplage d’un aromatique, de CO et d’une oléfine pour former la cétone correspondante avec une économie d’atome totale.

Schéma A-49 : Réaction d’acylation d’aryles catalytique

Le groupe de Murai a permis l’extension de cette réaction à de nombreux alcènes avec un très bon contrôle de la régiosélectivité en fonction du substrat grâce à l’utilisation de groupes directeurs azotés.75 Par exemple, l’acylation en position β d’hétérocycles catalysée par un complexe de ruthénium a pu être réalisée avec de très bons rendements (Schéma A-50).

Schéma A-50 : Acylation d’un hétérocycle azoté