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A. Dimérisation d’alcools

1. Optimisations

Nous avons choisi un alcool aliphatique pour optimiser les conditions réactionnelles et afin de permettre une bonne détection par CPG et par RMN, le 2-phényléthanol 132 a été utilisé comme substrat de référence.

Un premier essai a été réalisé sur cet alcool dans les conditions optimisées pour la réaction de Tishchenko (Schéma D-69 et Partie C.I, p.109), i.e. en présence de 1,25% de [RuCl2(p-cym)]2, de 15% de formiate de sodium et de 2,5% de PCyPh2 mais en utilisant

l’acétone comme cosolvant et en se plaçant à 100°C (Schéma D-71), par analogie avec la réaction tandem oxydation/hydroarylation mise au point précédemment (Partie D.II, p.180).

[a] Déterminée par RMN 1H.

Schéma D-71 : Dimérisation du 2-phényléthanol 132 à partir d’un complexe de ruthénium généré in situ

Dans ces conditions, nous avons eu la satisfaction d’obtenir l’ester attendu 133 avec une conversion de 53%. Ce résultat nous a encouragés à optimiser différents paramètres afin d’augmenter l’efficacité de cette réaction.

Dans un premier temps, l’influence de quelques solvants a été étudiée dans les mêmes conditions que précédemment (Tableau D-8).

133 132

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Tableau D-8 : Influence du solvant sur la réaction de dimérisation de l’alcool 132[a]

Entrée Solvant Conv. (%)[b]

1 Dioxane 52 (53)

2 Cyclohexane 60 (63)

3 Toluène 65 (67)

[a] Réactions conduites sur 1 mmol d’alcool 132 en présence de 1,25% de

[RuCl2(p-cym)]2, de 15% de formiate de sodium et de 2,5% de PCyPh2

dans un mélange solvant/acétone 1 :1 à 100°C pendant 20h. [b] La conversion est déterminée par CPG. Entre parenthèse est indiquée la conversion déterminée par RMN.

L’utilisation de cyclohexane (entrée 2) conduit à une conversion plus élevée (60%) que le dioxane (52%, entrée 1). Le meilleur résultat est néanmoins obtenu dans le toluène (entrée 3) qui permet la formation de 65% de l’ester 133. Nous avons choisi de poursuivre les optimisations avec le toluène, bien qu’il apparaisse que le solvant ait globalement peu d’influence dans cette réaction.

Le rôle du nombre d’équivalent de ligand par rapport au ruthénium a ensuite été examiné en conduisant la réaction à 100°C dans le mélange de solvant toluène/acétone 1:1 (Schéma D-72).

[a]

Déterminée par CPG.

Schéma D-72 : Choix du nombre d’équivalents de ligand par rapport au ruthénium

La conversion dépend fortement de la quantité de ligand introduite par rapport au ruthénium. Ainsi, lorsque la réaction est conduite sans ligand, seulement 4% d’ester 133 sont formés. De même, en présence de 3 équivalents de ligand par rapport au ruthénium, la conversion n’est que de 6% après 20h. En revanche, l’utilisation de 2 équivalents de ligand par rapport au ruthénium permet de convertir 49% d’alcool 132 en ester 133. La quantité optimale de ligand par rapport au ruthénium reste cependant un équivalent (conversion de 65%), ce qui rejoint ce qui avait pu être obtenu pour la réaction de dimérisation des aldéhydes (Figure C-2, p.122).

Différents ligands phosphorés monodentes ou bidentes ont ensuite été évalués pour cette réaction (Tableau D-9). Outre le cyclohexyldiphénylphosphane qui permet d’obtenir 65% d’ester 133, les autres ligands conduisent à des conversions comprises entre 30 et 40% et leurs propriétés électroniques et stériques ont une faible influence sur la réaction. Le dicyclohexylphénylphosphane (entrée 2) qui avait conduit à des résultats similaires au

133 132

133 132

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195 cyclohexyldiphénylphosphane pour la dimérisation d’aldéhydes en esters conduit ici à une conversion beaucoup plus faible de 31%. Le triphénylphosphane (entrée 3) ou le tricyclohexylphosphane (entrée 4) ne permettent pas d’améliorer la conversion puisque l’ester

133 est obtenu avec de faibles conversions. La modulation des propriétés électroniques du

triphénylphosphane en utilisant les analogues P(4-CF3C6H4)3 (entrée 5) et P(4-MeOC6H4)3

(entrée 6) a très peu d’incidence sur la conversion. Les ligands très encombrés, comme le 2-(dicyclohexylphosphino)biphényle331 (entrée 7) et 2-(di-tert-butylphosphino)biphényle332 (entrée 8), ne sont pas efficaces et moins de 4% d’ester 133 sont formés dans les deux cas. L’utilisation de diphosphanes (entrées 9-12) conduit à des conversions moyennes (de 26 à 38%). Ainsi, la meilleure combinaison entre les effets stériques et électroniques est obtenue avec le cyclohexyldiphénylphosphane comme ligand (entrée 1).

331 J. P. Wolfe, S. L. Buchwald, Angew. Chem. Int. Ed. 1999, 38, 2413.

332 A. Aranyos, D. W. Old, A. Kiyomori, J. P. Wolfe, J. P. Sadighi, S. L. Buchwald, J. Am. Chem. Soc. 1999,

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Tableau D-9 : Influence de la nature du ligand sur la réaction de dimérisation de l’alcool 132[a]

Entrée Ligand Conv. (%)[b]

1 PCyPh2 65 2 PCy2Ph 31 3 PPh3 22 4 PCy3 26 5 P(4-CF3C6H4)3 22 6 P(4-MeOC6H4)3 30 7 4 8 3 9 dppe 32 10 dppbenzène 38 11 dppf 26 12 rac-BINAP 38

[a] Réactions conduites sur 1 mmol d’alcool 132en présence de

1,25% de [RuCl2(p-cym)]2, de 15% de formiate de sodium et de

2,5% de ligand dans un mélange toluène/acétone 1:1 à 100°C pendant 20h. [b] La conversion est déterminée par CPG.

Afin de favoriser d’avantage la formation de l’ester 133, l’influence de la température de réaction et du taux catalytique sur la conversion a été examinée (Tableau D-10). L’augmentation du taux catalytique permet une amélioration notable de la conversion, puisque, lorsque la réaction est conduite avec 5% de ruthénium, 89% d’alcool 132 sont convertis en ester 133 (entrée 2), contre 65% dans les conditions précédentes (2,5% de ruthénium, entrée 1). Une augmentation de la température de 100 à 120°C avec 5% de ruthénium entraîne une diminution de la conversion de 89% à 77% (entrée 3). Dans le cyclohexane, qui conduisait à des résultats proches de ceux obtenus dans le toluène (Tableau D-8), l’augmentation du taux catalytique permet également d’améliorer la conversion de 60 à 79% (entrées 4-5), mais celle-ci est néanmoins plus élevée dans le toluène. Les conditions réactionnelles de l’entrée 2 (Tableau D-10) se sont donc révélées les plus efficaces et nous les avons par la suite appliquées à d’autres alcools primaires.

133 132

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Tableau D-10 : Influence de la température et du taux catalytique sur la dimérisation de l’alcool 132[a]

Entrée Température Solvant % [Ru] Conv. (%)[b]

1 100°C toluène 2,5 65

2 100°C toluène 5 89

3 120°C toluène 5 77

4 100°C cyclohexane 2,5 60

5 100°C cyclohexane 5 79

[a] Réactions conduites sur 1 mmol d’alcool 132en présence de [RuCl

2(p-cym)]2, de 6 éq/Ru de

formiate de sodium et de 1 éq/Ru de PCyPh2 dans un mélange solvant/acétone 1:1 pendant 20h. [b] La conversion est déterminée par CPG.

2. Applications

Différents alcools ont donc été engagés dans ces conditions, et les conversions en esters déterminées par RMN 1H (Tableau D-11).

Tableau D-11 : Application à la dimérisation d’alcools primaires[a]

Entrée Substrat Produit Conv. (%)[b]

1 90[c] 2 80 3 74 4 66[d] 5 56 91[e] [a] Réactions conduites sur 1 mmol d’alcool en présence de 2,5% de [RuCl

2(p-cym)]2,

de 30% de formiate de sodium et de 5% de PCyPh2 dans un mélange toluène/acétone

1:1 à 100°C pendant 20h. [b] La conversion est déterminée par RMN 1H.

[c]

Comprenant 8% d’ester isopropylique. [d] Rendements en produit isolé. [e] Réaction conduite avec 10% de ligand.

133 132 133 132 54 55

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L’ester 133 est obtenu avec une conversion de 90%, comprenant 8% d’ester isopropylique provenant de la réaction de l’alcool 132 avec l’isopropanol formé par réduction de l’acétone (entrée 1). D’autres alcools aliphatiques (entrées 2-4) conduisent également efficacement aux esters correspondants avec des conversions comprises entre 66 et 80%. En particulier, l’hexanoate d’hexyle a pu être obtenu avec un rendement isolé de 66% alors qu’il n’avait pu être obtenu à partir de l’hexanal. Lorsque l’alcool benzylique a été engagé dans ces conditions, seulement 56% de benzoate de benzyle ont été obtenus (entrée 5). Néanmoins, l’utilisation de 10% de ligand nous a permis d’obtenir cet ester avec une conversion de 91%.

Bien que ces résultats soient honorables, il nous est cependant apparu surprenant que les conversions ne soient jamais quantitatives. Or, l’oxydation de l’alcool s’accompagne de la réduction simultanée de l’acétone en isopropanol, et, bien que l’acétone soit introduite en excès (3,4 équivalents relativement au substrat), il est possible que sa disponibilité dans le milieu réactionnel soit limitée à cause de sa volatilité, la réaction étant conduite à 100°C. Nous avons donc par la suite étudié l’influence de la nature et de la quantité de cétone sur la dimérisation d’alcools en choisissant le pentadécan-1-ol comme substrat (Tableau D-12) puisque cet alcool avait conduit à une conversion modérée (entrée 3, Tableau D-11).

Tableau D-12 : Influence du temps de réaction, de la concentration et de la nature de la cétone sur la dimérisation du pentadécan-1-ol[a]

Entrée Concentration Cétone[b] Conv. (%)[c]

1 2M acétone (3,4 éq) 74

2 2M acétone (3,4 éq) 81[d]

3 1,7M acétone (4,1 éq) 79

4 1M acétone (6,8 éq) 48

5 1,5M pinacolone (3,4 éq) 100 (96)

[a] Réactions conduites sur 1 mmol de pentadécan-1-ol en présence de 2,5% de

[RuCl2(p-cym)]2, de 30% de formiate de sodium et de 5% de PCyPh2 dans un

mélange toluène/cétone à 100°C pendant 20h. [b] Le nombre d’équivalents de cétone par rapport au substrat est indiqué entre parenthèses. [c] La conversion est déterminée par RMN 1H. Entre parenthèses est indiqué le rendement en produit isolé. [d] La réaction est conduite à 100°C pendant 63h.

L’augmentation du temps de réaction de 20 à 63h ne permet pas d’améliorer notablement la conversion qui passe de 74 à 81% (entrées 1 et 2). L’utilisation de 4,1 équivalents d’acétone (entrée 3) permet d’obtenir une conversion de 79%, mais lorsque 6,8 équivalents d’acétone sont introduits dans le milieu, la conversion chute à 48% (entrée 4). En effet, bien que l’augmentation de la quantité d’acétone favorise l’oxydation de l’alcool, d’autres étapes du mécanisme peuvent être ralenties (la complexation par exemple). De plus, cette réaction étant intermoléculaire, elle est défavorisée par la dilution du milieu réactionnel, consécutive à l’ajout d’acétone. Ces effets contraires justifient qu’une légère augmentation de

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199 la quantité d’acétone améliore la conversion (entrée 3), tandis qu’en présence d’un large excès d’acétone la conversion baisse fortement (entrée 4). Nous avons par la suite envisagé de réaliser cette réaction en présence d’une autre cétone moins volatile. Ainsi, l’utilisation de la pinacolone s’est révélée particulièrement fructueuse et lorsque la réaction est conduite avec 3,4 équivalents de cette cétone, une conversion quantitative est obtenue et l’ester est isolé avec un excellent rendement de 96% (entrée 5).

D’autres alcools primaires aliphatiques ont ensuite été engagés dans ces conditions optimisées (Tableau D-13).

Tableau D-13 : Dimérisation d’alcools primaires aliphatiques[a]

Entrée Substrat Produit Rdt (%)[b]

1 96 2 95 3 91 4 100 5 99 6 84 7 100 8 73[c] 9 71[d]

[a] Réactions conduites sur 1 mmol d’alcool en présence de 2,5% de [RuCl

2(p-cym)]2, de

30% de formiate de sodium et de 5% de PCyPh2 avec 3,4 éq de pinacolone dans le

toluène à 100°C pendant 20h. [b] Rendements en produit isolé. [c] Accompagné de 14% d’ester pinacolylique. [d] Accompagné de 13% d’ester pinacolylique et de 6% de N-Boc-2- pyrrolidone.

Le 4-méthylbutan-1-ol conduit à l’ester correspondant avec un très bon rendement de 95% (entrée 2). L’hexanoate d’hexyle a également pu être isolé avec un rendement de 91% (entrée 3) ce qui est largement supérieur aux conditions précédentes utilisant l’acétone comme