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Nous allons exposer ici deux exp´eriences r´ealis´ees dans le but d’´etudier les propri´et´es optiques des plasmas de hautes densit´es. Elles nous permettront d’expliciter les d´ependances en angle d’incidence et intensit´e de l’absorption. Elles ont l’originalit´e, par rapport `a la majorit´e des ex´eriences plus r´ecentes sur le sujet, d’avoir ´et´e effectu´ees avec des impulsions dans l’Ultra-Violet (248 nm et 308 nm) et des intensit´es plus ´elev´ees. Leur simulation n´ecessite tout de mˆeme une description pr´ecise des propri´et´es solides lors du front de mont´ee de l’impulsion ainsi qu’un mod`ele d’absorption plasma `a la fin de l’impulsion.

8.2.1 D´ependance angulaire de l’effet de la polarisation

Fedosejevs et al ont mesur´e l’absorption d’impulsions laser Kr*F incidentes de 250 fs sur des cibles solides d’aluminium et d’or en fonction de la polarisation et de l’angle d’incidence pour des intensit´es de 1014 W cm−2et de 2.5×1015W cm−2 [42]. Pour cela, la r´eflectivit´e totale a ´et´e

mesur´ee en utilisant une sph`ere de Ulbricht pour mesurer la partie diffus´ee du faisceau r´efract´e, un calorim`etre pour la composante r´efl´echie et des photodiodes pour les ´energies incidentes et r´etrodiffus´ees. Il est apparu un maximum d’absorption d’environ 60% pour les polarisations p `

a (54± 3) pour l’aluminium et `a (57± 3) pour l’or `a 1014 W cm−2. La pr´e-impulsion ´etait

suffisante pour cr´eer un pr´e-plasma en surface `a 2.5× 1015W cm−2, nous ne comparerons donc

pas les donn´ees exp´erimentales `a nos simulations. En effet, l’absorption de l’impulsion principale est accrue par la pr´esence de ce plasma sous-dense pr´eform´e. Dans ces exp´eriences et dans les simulations que nous avons r´ealis´ees, le faisceau incident a une composition de polarisation compliqu´ee : 93 % de polarisation p et 7 % de polaristion s dans le cas d’une polarisation dite « p », ou en proportion inverse pour un faisceau de polarisation dite « s ».

La figure (8.1) montre la r´eflectivit´e en fonction de l’angle d’incidence pour des polarisations s et p. Les r´eflectivit´es simul´ees ont ´et´e calcul´ees grˆace `a l’expression (8.3), o`u la valeur moyenne s’applique sur la dur´ee de l’impulsion laser. La polarisation s augmente avec l’angle d’incidence alors que la polarisation p admet un angle d’incidence o`u la r´eflectivit´e est minimale. Cette dif-f´erence de comportement s’explique par le fait que l’onde p poss`ede une composante colin´eaire au gradient de densit´e plasma. Fedosejevs et al ont effectu´e des calculs de r´eflectivit´e bas´es sur les formules de Fresnel-Drude [17]. Un mod`ele de variation de densit´e en marche d’escalier ne leur a pas permis de reproduire la valeur de l’angle minimum, alors que des gradients lin´eaires ou exponentiels de densit´e se sont montr´es plus appropri´es. Ils ont ainsi mis en ´evidence que la valeur de cet angle de r´eflectivit´e minimale d´ependait essentiellement du profil de densit´e ´ elec-tronique. Il est n´eanmoins apparu que l’angle maximum d’absorption, lorsque la r´eflectivit´e est minimale, correspond `a l’obtention de la densit´e critique du plasma. Aux plus fortes intensit´es, ce m´ecanisme s’accompage d’une absorption r´esonnante, provoquant un pic d’absorption mar-qu´e. Il est caus´e par l’oscillation plasma produite par la composante longitudinale du champ.

Chapitre 8 : Application à l’interprétation de résultats expérimentaux

Mˆeme si des ondes plasma peuvent ˆetre excit´ees, la quantit´e d’´energie d´epos´ee est suppos´ee ˆetre ind´ependante du m´ecanisme de dissipation [37, 82].

Fig. 8.1 – D´ependance de la r´eflectivit´e en fonction de l’angle d’incidence pour une impulsion de 248 nm polaris´ee s et p sur une cible d’Aluminium `a 1014 W cm−2 (250 fs). Le minimum de

r´eflectivit´e est obtenu `a (54± 3).

La r´eflexion minimale se produit `a un angle calcul´e `a 57. Eidmann et al avaient compar´e

ces r´esultats exp´erimentaux `a leurs simulations hydrodynamiques [37]. Toutefois, ils avaient d´etermin´e un angle correspondant `a l’absorption maximale `a environ 70 dans leurs calculs. Ils

avaient alors attribu´e ce d´esaccord au fait qu’ils ne tenaient pas compte de la d´epolarisation dans leur expression du champ ´electromagn´etique. Nous avons, nous aussi, pu observer cette tendance `

a surestimer l’incidence d’absorption maximale avec une impulsion purement polaris´ee p. Cette surestimation est corrig´ee par l’introduction de la d´epolarisation de l’onde p par l’adjonction d’une faible portion d’onde s (7 %).

Ces simulations num´eriques nous permettent de r´ev´eler de s´erieuses diff´erences dans la na-ture de l’absorption des composantes s et p par la mati`ere chauff´ee. Lors de la cr´eation d’un fort gradient de densit´e ´electronique en surface, les mod`eles simples de calcul des champs ´ elec-tromagn´etiques entre deux interfaces ou dans l’´epaisseur de peau ne sont plus r´ealistes et il est indispensable de r´esoudre l’´equation de Helmholtz pour acc´eder `a l’´energie effectivement d´epos´ee. Nous voyons qu’une mod´elisation monodimensionelle du m´etal peut s’av´erer suffisante pour tenir compte des effets d’angle et de polarisation de l’impulsion. De plus, le fait que nous retrouvions le bon angle d’absorption maximale montre que l’hydrodynamique du syst`eme est bien reproduite par nos simulations. Nous allons maintenant ´evaluer la d´ependance en intensit´e de ces deux types de polarisation en fixant l’angle d’incidence.

8.2.2 D´ependance en intensit´e de la r´eflectivit´e

La d´ependance en intensit´e de la r´eflectivit´e mesur´ee a fait l’objet d’une ´etude particuli`ere par Milchberg et al pour en d´eduire l’´evolution de la r´esistivit´e de l’aluminium lors de la transi-tion solide-plasma [100]. Il s’agit d’une des premi`eres tentatives pour d´eterminer la d´ependance de la r´esistivit´e en fonction de la temp´erature ´electronique. Celle-ci a ´et´e ´etudi´ee pour une cible d’aluminium d’une densit´e proche de celle solide pour une intensit´e variant sur une gamme de quatre ordres de grandeur, de 5× 1011 `a 1014 W cm−2. La r´eflectivit´e a ´et´e mesur´ee apr`es

r´eflexion d’impulsions laser de 308 nm polaris´ees lin´eairement et focalis´ees sur la cible avec une lentille de 200 nm (f/10) avec une orientation de 45 par rapport `a la cible. Des impulsions

d’une dur´ee d’environ 400 fs ´etaient d´elivr´ees `a une fr´equence de 10 Hz.

La cible a ´et´e confectionn´ee par un d´epˆot d’aluminium de 400 ˚A sur un substrat de verre. L’´epaisseur choisie provient du fait que pour des d´epˆots plus importants, la r´eflectivit´e reste constante en fonction de l’´epaisseur. Les auteurs font remarquer que la surface oxyd´ee des cibles n’est pas cens´ee jouer un rˆole puisque l’´epaisseur de l’oxyde (≤ 20 ˚A) ne repr´esente pas plus de 10 % de la profondeur d’absorption optique.

Fig. 8.2 – Mesure et simulation de r´eflectivit´e en fonction de l’intensit´e dans une cible d’Alu-minium pour une polarisation s et p. La longueur d’onde incidente est de 308 nm et la dur´ee d’impulsion de 400 fs.

La figure (8.2) montre la r´eflectivit´e associ´ee `a des impulsions laser polaris´ees s et p pour des fluences comprises entre 20 mJ cm−2 et 2 kJ cm−2. Les simulations r´ealis´ees avec Delpor

sont en bon accord avec ces mesures. Elles fournissent l’´evolution des r´eflectivit´es `a travers

Chapitre 8 : Application à l’interprétation de résultats expérimentaux

l’expression (8.3) moyenn´ees sur la dur´ee de l’impulsion, pour chacune des intensit´es. Trois r´egions se discernent distinctement en fonction de l’intensit´e. Pour les faibles intensit´es, jusqu’`a 1012W cm−2, la r´eflectivit´e est `a peu pr`es constante. Elle diminue tr`es faiblement et correspond

sans doute au premier r´egime de r´eflectivit´e que nous avions discern´e dans la premi`ere section de ce chapitre. En effet, la temp´erature ´electronique n’est pas suffisamment ´elev´ee pour induire des fr´equences de collisions tr`es importantes. Ensuite aux intensit´es comprises entre 1012 et 1014 W cm−2, la r´eflectivit´e chute avec l’augmentation de la temp´erature ´electronique et donc

de la fr´equence de collisions. La pente de chute correspond au second r´egime pr´ealablement envisag´e, o`u ωτ devient sup´erieur `a l’unit´e, ce qui correspond `a une fr´equence de collisions de 6.12× 1015 s−1 `a cette longueur d’onde. Enfin pour les intensit´es plus ´elev´ees, sup´erieures `a

1014 W cm−2, la r´eflectivit´e augmente. Nous pouvons attribuer ce d´esaccord observ´e pour ces

hautes intensit´es au fait qu’exp´erimentalement la pr´e-impulsion est suffisamment importante pour produire une vapeur ou un plasma avant l’arriv´ee de l’impulsion principale.

Le bon accord observ´e entre les facteurs de r´eflexion th´eorique et exp´erimentaux illustrent les possibilit´es du mod`ele `a reproduire les indices optiques pour une intensit´e permettant la formation d’un plasma pendant le temps de l’impulsion. Ceci laisse supposer qu’il nous est possible de simuler l’absorption de l’onde incidente dans ce r´egime de d´es´equilibre ´electron-ion, et ceci pour des dur´ees d’irradiations plus longues ou pour une seconde impulsion cons´ecutive `

a une premi`ere dans un intervalle de temps inf´erieur au temps de relaxation ´electron-ion. Nous avons vu les propri´et´es de r´eflexion induites par une cible ´epaisse, dont la couche de mati`ere chauff´ee en surface pouvait ˆetre compos´ee de diff´erents ´etats thermodynamiques ´

evoluant sur le temps de l’impulsion. Nous allons voir comment des exp´eriences sp´ecifiques peuvent nous permettre de suivre l’´evolution d’un ´etat thermodynamique unique sur des ´echelles de temps bien plus courtes. Nos simulations pourront ainsi fournir des informations quantitatives sur l’´etat du syst`eme.