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L’exercice du projet d’architecture de la grande échelle « Inventer les futurs de la métropole lilloise : une métropole transfrontalière en projet(s) »

I. Les méthodes

3) L’exercice du projet d’architecture de la grande échelle « Inventer les futurs de la métropole lilloise : une métropole transfrontalière en projet(s) »

Il s’agit de réagir par rapport aux directions évoquées précédemment afin de mettre à jour l’analyse de la problématique du « projet transfrontalier » appliqué à la métropole lilloise, ainsi que celle du devenir et de la cohérence, à grande échelle, de l’espace transfrontalier, ceci en regard des documents produits par les étudiants en architecture.

Chacune des équipes a d’abord été invitée à prendre part de la « saisie des données “disciplinaires” (économique, topographique, hydrographique, démographique, etc.) — couche par couche — pour établir une cartographie commune de ce territoire. »124

Ensuite est venue une déclinaison de réponses, de « scénarios » des devenirs possibles d’un territoire dont la représentation politique s’inquiète aujourd’hui de l’identité et de la « visibilité », ainsi qu’Emmanuel Doutriaux le souligne : « ses élus, partagés entre les territoires nationaux et linguistiques qui sont les leurs, formulent en commun le vœu d’une

121 Rebois (Didier), « Jeune Europe », dans Techniques et architecture n°488 « Identité Europe », février-mars

2007, p. 21.

122 Idem.

123 Cf. Sieverts (Thomas), Entre-ville, une lecture de la Zwischenstadt, éditions Parenthèses , [2001], trad. franç.

2004.

représentation nouvelle —symbolique et spatiale— de ce territoire. Comment désormais se le représenter ? Comment le nommer ? Comment en programmer le développement ? Changer l’échelle / changer le cadre »125

. Puis, les étudiants français et belges ont montré, à travers une production de projets architecturaux opérés sur un territoire caractéristique que la frontière franco-belge de la métropole lilloise fait apparaître un certain nombre de problèmes posés par « l’architecture de la grande échelle ». Cette pépinière de projets fait apparaître de multiples représentations de la frontière de cette métropole —collages, plans, coupes, maquettes, photo- montages—, de multiples façons de penser la frontière, ainsi que des concepts et des typologies de formes architecturales et urbaines spécifiques à cette métropole.

Certaines équipes de l’Ecole d’architecture de Lille ont choisi d’expérimenter le projet à grande échelle à partir d’un travail de réflexion sur la frontière : la frontière comme élément signifiant du territoire de la métropole lilloise / la frontière comme élément signifiant d’un territoire européen / la frontière comme élément signifiant de la mondialisation. Les réponses s’appuient notamment sur l’idée que la frontière peut être un élément structurant du territoire urbain. Ainsi, par exemple, Claire Périssin (atelier Louguet) prend en compte ce qu’elle nomme l’«  épaisseur transfrontalière », Pol Le Carluer (atelier Louguet) choisit de traiter « la frontière urbaine » et de « pratiquer, maîtriser et habiter le vide », Constance Pradezynski (atelier Louguet) invente le futur d’une métropole transfrontalière « de la ligne apatride au tracé structurant », Laure-Anne Barbaut (atelier Louguet) saisit la frontière, en tant que «  lieu de rencontre symbolique »… Ainsi, les projets s’appuient sur l’idée que la frontière constitue un élément signifiant d’un grand territoire, l’hypothèse de travail étant alors la suivante : « du fait de la convergence de facteurs nouveaux […], une communauté humaine transfrontalière acquiert soudain la conscience du territoire partagé (plus étendu qu’il n’y paraissait jusqu’alors et) qui est le sien »126

.

Du point de vue méthodologique, l’inventaire des projets permet de saisir rapidement la diversité des orientations choisies en regard de la question de l’architecture de la grande échelle, appliquée au futur de cette métropole transfrontalière.

L’idée de ce travail prospectif est que les hypothèses formulées par les étudiants et les enseignants autour de la « scénarisation des devenirs possibles »127

de ce territoire, peuvent faire apparaître l’espace transfrontalier comme domaine de projet. Si nous avons pu observer précédemment que, de nos jours, « la culture de l’aménagement transfrontalier est encore balbutiante »128

, que « les cultures professionnelles, administratives et politiques divergent sensiblement en France et en Belgique », et que, de toute évidence, « c’est avec ces cultures différentes qu’il faudra composer »129

, le travail expérimental réalisé ici par les enseignants et étudiants des écoles françaises et belges, les chercheurs et les acteurs de l’aménagement urbain de la métropole lilloise, constitue une confrontation transfrontalière et ainsi, en quelque sorte, une forme d’avancée dans le domaine de l’aménagement transfrontalier, voire peut-être, l’avenir le dira, un projet d’anticipation (plutôt qu’un projet utopique).

Il s’agit maintenant de passer en revue les projets architecturaux et urbains transfrontaliers proposés par les étudiants en master de l’ENSAPL, de l’École d’Architecture St Luc de Tournai (Belgique), et de l’Institut d’Aménagement et Urbanisme de Lille (Université des Sciences et Technologies de Lille). Ces travaux cités ci-dessous ont été

125 Idem.

126 Doutriaux (Emmanuel), « Éléments de réflexion sur le S9 », 1ère note sur le programme, ENSAPL, juin 2007. 127 Selon les termes d’Emmanuel Doutriaux.

128 Tetra & Wim De Jaeger, Dossier de l’atelier transfrontalier n° 6 « Mode d’emploi pour la planification locale

transfrontalière », op. cit.

129 Voir la partie « De l’ ADULM au GECT en passant par la COPIT : réseaux, structures, acteurs de la métropole

développés d’octobre 2007 à février 2008 dans les ateliers de Philippe Louguet, Emmanuel Doutriaux, Bénédicte Grosjean et Maryvonne Prévot.

• « La frontière, lieu de rencontre symbolique », Laure-Anne Barbaut

L’idée de ce travail est, d’une part, de « lier symboliquement et visuellement » les territoires français et belges au moyen d’« un alignement de tours dont l’axe de symétrie est la frontière », d’autre part, de révéler le « paysage existant » et, pour ce faire, de réaliser un espace public de promenade pouvant donner « de nouveaux possibles à un lieu qui a besoin d’être révélé ». En suivant les éléments proposés dans la « charte chromatique » du paysage existant, ce projet transfrontalier fait apparaître un parc linéaire situé sur la frontière, devenue « frontière verte ». La « charte chromatique » constitue un outil utilisable à toutes les échelles, de la grande échelle à l’échelle du mobilier urbain.

Le renforcement de la dimension européenne de la métropole apparaît notamment dans le projet d’agrandissement du réseau ferroviaire de la métropole, avec notamment la création d’une nouvelle gare TGV.

• « Une métropole “durable” » - « Un parc territorial », Morgane Capet 

La frontière est comprise ici en tant que « filtre entre deux pays », « passage », « lieu de rencontre ». L’idée de « canyon urbain » est ainsi évoquée. Transposée dans le projet, celle-ci apparaît avec la création d’un réseau de places menant à la frontière, mais aussi d’un parc projeté à l’échelle territoriale —de « tranches végétales »—, mais aussi d’une nouvelle ligne de tramway envisagée comme « colonne vertébrale » du projet urbain. Cette nouvelle ligne de tramway longe une partie de la frontière, et relie l’actuelle zone de l’Union à une zone considérée en tant que « ville durable ». Le projet met l’accent sur le développement d’un pôle « ville durable », à l’échelle du territoire métropolitain ainsi qu’à l’échelle locale (un quartier bâti sur les notions de villes durables).

• « Mouscron - Tourcoing, la frontière urbanisée. Un territoire exemplaire », Caroline Chweudura

Le projet part du constat que la frontière entre Tourcoing et Mouscron a fait apparaître un no man’s land. La proposition part de l’idée qu’il est possible de créer un nouveau « morceau de ville » dans l’épaisseur de l’espace transfrontalier.

La cohérence spatiale du projet apparaît à différentes échelles —échelle européenne, échelle métropolitaine, échelle locale. Ainsi, le projet tient compte des infrastructures à l’échelle européenne (voies de chemin de fer et réseau autoroutier) et des infrastructures à l’échelle locale (anciens passages douaniers). Il met en évidence la création de « zones vertes » tant à l’échelle de la métropole qu’à l’échelle du site choisi.

Cette proposition s’appuie sur l’idée que la frontière peut être un élément structurant du territoire urbain. Elle part du principe que structurer c’est à la fois « coudre » l’espace transfrontalier, « marquer » ou signaler la frontière à l’échelle du quartier, de la ville, de la métropole, « longer » en améliorant les « connexions » entre les réseaux de transports belges et français. De nouvelles voies routières, pistes cyclables, voies piétonnes, lignes de transports en commun sont proposées (prolongation de la ligne de métro en Belgique, ligne de tramway sur la frontière).

Le projet intègre également la création d’une « zone verte » le long de la frontière —le terme « végétaliser » a été utilisé pour qualifier le travail à accomplir—, ainsi que de quartiers « écologiques ».

• « Un parc linéaire » pour « une métropole transfrontalière », Quentin Desplechin

[dossier incomplet]

• « Un stade transfrontalier au nord de la métropole », Lucie Desquiens

Ce travail tente de prendre en compte l’espace et le temps à l’ « échelle territoriale » et à l’ « échelle urbaine ». Certains parcours sont étudiés en temps (Lens-Lille ; Lille Courtrai ; Lens-Courtrai).

Le projet s’articule autour de la création d’un stade transfrontalier implanté sur la frontière franco-belge.

• « Un nouveau quartier. Ecolo, mixité, boulevard, tramway, parc transfrontalier », Achraf Elkhou

Ce projet propose le prolongement de la ligne de tramway Lille-Tourcoing, jusque Mouscron et l’aménagement des abords de cette ligne, avec la création d’un parc transfrontalier, ainsi qu’un nouveau quartier aux abords de la frontière.

• « Demain, j’habiterai la frontière…  projet pour une métropole transfrontalière  », Loïc Landry

Ce travail part de l’idée que le renouvellement urbain doit s’inscrire dans une logique écologique. Le modèle germanique de Fribourg est évoqué. Ce projet pour la "métropole transfrontalière" lilloise  met en place un système de ceinture verte autour de la métropole lilloise, en même temps que celui d’un système de portes périphériques :

« Les "portes" comme par exemple Quesnoy sur Deûle, Aalbeke, Seclin ou Gruson deviendraient des pôles d'inter modalité et accueilleraient des parkings silos stockant les automobiles hors des villes. Les automobilistes désirant entrer en ville avec leur voiture devraient s'acquitter d'une taxe sur le modèle de villes comme Londres ou Stockholm. Un tramway périphérique à grande vitesse prendrait le relais et lierait ces portes à la métropole. Cette ligne de tramway serait alors un élément structurant de l'aménagement paysager de cette sorte de ceinture verte. L'application la plus concrète d'une volonté de lier Lille, Roubaix et Tourcoing fut la construction des grands boulevards. Ceux ci seraient prolongés jusque Mouscron et la ligne de tramway doublée d'une ligne de tramway à grande vitesse permettant de relier Mouscron à Euralille en dix minutes. Ainsi les grands boulevards complétés du TramGV périphérique et du métro offriraient un réseau de transports en commun plus complet capable d’accueillir la nouvelle population. » « L'utopie était alors un moyen d'appliquer certaines idées à ce territoire en se libérant d'un certain fardeau idéologique » (extrait du texte de l’étudiant Loïc Landry).

Au risque de tomber dans les problèmes posés par le système centre-ville / périphérie, ce projet fait apparaître une métropole ceinturée, définissant « une enceinte délimitant un territoire qu’il est important de renouveler avant d’investir des territoires périphériques vierges » : « une ceinture non-aedificandi prendrait place entre les pôles définis comme appartenant au territoire métropolitain et ceux définis comme des pôles d'entrée de ville, des portes métropolitaines. »

On peut remarquer que le modèle urbain de la ville de Fribourg évoqué dans ce travail en tant que référence est toutefois relativement loin du système en couronne annoncé ci-dessus pour la métropole lilloise…

• « La frontière urbaine : pratiquer, maîtriser et habiter le vide », Pol Le Carluer

Le constat de départ est celui d’un manque de transports en commun susceptibles de traverser la frontière et d’emprunter les nombreuses rues transfrontalières et les anciennes rues en impasses le long de la frontière franco-belge. La frontière est considérée ici en tant qu’« élément fédérateur du territoire ». Le projet s’articule autour de la création d’une ligne de tramway reliant le métro français au réseau de transports en commun belge, notamment une ligne de tramway aérienne faisant signe dans le paysage. Le projet fait apparaître un quartier mixte sur la « frontière urbaine », un quartier constitué de logements, de commerces, d’un pôle sportif, d’un pôle de loisirs…

• « World Architecture Shipping School », Mathieu Martin

Ce travail part d’une réflexion sur la notion de frontière et sur la notion d’ouverture : « l’ouverture d’esprit entraîne l’ouverture des frontières ». Il fait apparaître l’idée que les rencontres internationales et les échanges d’étudiants constituent un apport pédagogique et culturel qu’il faudrait envisager dans l’enseignement afin d’appréhender la culture à l’échelle de la planète —une « culture planétaire ».

Cette idée se concrétise autour d’un projet urbain linéaire et un projet d’école d’expédition mondiale (World Shipping School ) :

« Dans la métropole lilloise, l’urbanisation s’est effectuée de part et d’autre de la voie ferrée qui passe par les gares de Lille, Roubaix, Tourcoing, Mouscron et Courtrai. Cette colonne vertébrale représente l’axe du futur développement de la Métropole Transfrontalière. Le site qui se trouve sur la frontière entre Tourcoing et Mouscron est un lieu où la croissance de la ville s’est interrompue contre le chemin de fer. De plus, la présence de la frontière et des possibilités administratives qu’elle offre a entraîné le développement d’une zone industrielle qui empêche à présent le déploiement de Mouscron au sud de la voie ferrée. C’est à cet endroit précis que l’antenne franco-belge de la World Architecture Shipping School crée une nouvelle station participant au développement du territoire transfrontalier vers le sud. Le réseau prévoit des partenariats avec un pôle de recherche et un pôle entreprise en rapport avec les sociétés locales pour augmenter les échanges culturels et économiques. Ces deux pôles s’installeront de chaque côté de l’école dans les parcelles agricoles et créeront deux nouveaux arrêts. Tel un mur que l'on franchit, le projet crée un entre-deux : l'école. » (extrait du texte de Mathieu Martin).

• « Meta urbain et post industriel », Svetlin PEEV

Il s’agit là d’un travail réalisé à l’échelle du quartier : la réflexion sur la thématique de la grande échelle apparaît à l’échelle du quartier. Ce projet répond au principe de mixité typologique et programmatique, selon des

principes de découpages d’îlots, d’intégration d’objets architecturaux et urbains dans le tissu urbain existant, de composition d’éléments de programme, d’implantation d’éléments programmatiques fonctionnant notamment selon des horaires différents.

• «  Épaisseur transfrontalière » « Week-ends en région transfrontalière »« Evaluation of the thickness of the border », Claire PERRISSIN

Le projet utopique proposé ici est celui d’une « métropole transfrontalière en opposition à la métropole lilloise en termes d’équipements culturels et de loisirs » : la zone frontière constitue un espace habitable notamment le week-end. Le territoire d’étude est appréhendé en tant qu’entité régionale, en tant que région

transfrontalière.

• « Une métropole transfrontalière. De la ligne apatride au tracé structurant », Constance PRADEZYNSKI

Le territoire d’étude apparaît à deux échelles :

- celle de la « métropole transfrontalière » s’étendant du bassin minier aux villes belges de Tournai, Courtrai, Ypres

- celle du site transfrontalier situé entre Tourcoing et Mouscron. La notion de « frontière urbanisée » est mise en évidence pour caractériser la nature de ce territoire.

Le projet vise à assurer le rayonnement international de la métropole transfrontalière. La proposition est celle d’une « cité apatride », bande habitée relativement longitudinale située sur la frontière, disposant d’un programme expérimental prévu pour accueillir les « apatrides du monde », notamment d’un « grand centre social européen » et de logements le long d’un cours d’eau, résurgence de l’ancien ruisseau marquant l’actuelle frontière.

Trois « scénarios » formulés à l’échelle du projet urbain pour expliciter la création : - d’un boulevard transfrontalier reprenant le tracé de la frontière,

- d’un « réseau vert » transfrontalier entre Tourcoing et Mouscron, actuellement en déficit d’espaces verts - de quartiers multiples suivant la logique du « peigne »

L’idée est que cette « cité apatride » se déploierait dans l’épaisseur de l’espace transfrontalier situé entre Tourcoing et Mouscron.

• « Un projet de cohérence territoriale », Céline DUSSOSSOY, Gaëtan FRISCOURT, Adeline HILAIRE,

Gaëtan LECART, étudiants master 2 de l’Institut d’Aménagement et Urbanisme de Lille, Université des Sciences et Technologies de Lille

Ce projet part de l’idée que le territoire de la métropole lilloise —territoire d’entre-deux au positionnement stratégique (Londres-Paris-Bruxelles-Amsterdam)— manque de cohérence, cohérence liée à l’écart existant entre les projets souhaités par les habitants et les projets développés par les décideurs. Ainsi, en résonance avec la géographie et les données du paysage existant, ce projet fait apparaître qu’à l’heure où la métropole lilloise devient leader de l’Eurométropole de l’Europe du Nord, ce territoire doit se doter de maillages structurants, cohérents à l’échelle de la métropole transfrontalière, et notamment d’un réseau de véloroutes et de voies vertes.

• « Métropole transfrontalière », étudiants de l’École d’architecture de St Luc Tournai

[dossier incomplet]

• « Mise en lumière d’une nouvelle enceinte », étudiants de St Luc Tournai

Ce travail fait apparaître la structure d’une enceinte formée autour de la métropole transfrontalière, lieu de projets inattendus.