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II. Méthodologie expérimentale

2.2. Matériel et procédure

2.2.1. Tâches langagières

2.2.1.2. Evaluation de la morphosyntaxe versant réception

Tâche de compréhension des passives

Nous avons choisi d’intégrer cette tâche à notre recherche car, comme vu précédemment, les enfants TSA ont des difficultés avec les phrases impliquant une structure non-canonique comme par exemple les relatives objets (Durrleman & Franck, 2012), les phrases avec un pronom clitique accusatif ou bien encore les passives (Perovic & al., 2007).

Dans ces situations, la difficulté vient du fait que l’objet précède le verbe alors qu’en français, l’ordre canonique place l'objet après le verbe (sujet – verbe - objet).

La tâche initiale provient du protocole COST Action 3327 et a été créée dans le but d’investiguer l’âge d’acquisition des structures passives chez les enfants au développement typique. Heshmati (2013) l’a adaptée afin d’évaluer la compréhension de ces structures morphosyntaxiques chez les enfants autistes en langue perse. Pour notre recherche, nous avons conservé et traduit en français les items utilisés par Heshmati. De plus, nous avons ajouté une partie comportant des verbes dit “psychologiques” que nous détaillerons plus tard.

Les items expérimentaux (phrases) varient de par leur degré de complexité morphosyntaxique. Comme nous l’avons vu, les phrases passives sont plus complexes que les actives en raison des opérations computationnelles qu’elles nécessitent. Leur ordre de mots n’est pas canonique (patient mis en position d’agent) ce qui engendre une opération de mouvement pour réattribuer correctement les rôles thématiques. Parmi les passives, nous retrouvons les passives longues (avec complément d’agent) et les passives courtes dont le complément d’agent n’est pas spécifié. Les passives courtes sont considérées plus simples car elles peuvent être interprétées de manière adjectivale (Van der Lely, 1996). Les passives

27 http://www.cost.eu/COST_Actions/isch/Actions/A33

peuvent aussi se distinguer en fonction de leur verbe. Lorsque le verbe représente une action (e.g. « pousser ») la passive est dite « actionnelle », et quand il représente un état mental (e.g.

« aimer »), on parle de passive non-actionnelle ou « psychologique ». Les passives contenant un verbe psychologique sont considérées plus complexes car elles ne contiennent pas les liens sémantiques standards des passives actionnelles dans lesquelles l’agent fait l’action et le patient la subit. Effectivement, dans les passives psychologiques, l’agent est considéré comme l’expérimentateur de l’état mental et le patient comme celui à qui l’état mental se réfère (Maratsos & al., 1985). L’épreuve est donc composée de 44 items ; des exemples en sont donnés en [3]. Elle comprend 22 phrases actives (1), 11 phrases passives courtes (2) (sans la préposition “par”) et 11 phrases passives longues (3) (avec la préposition “par”).

L’ensemble des items est présenté dans l’Annexe F.

[3] Exemples d’items de la tâche « Passives » 1) La grande fille pousse la petite fille.

2) La petite fille est poussée.

3) La grande fille est poussée par la petite fille.

L’épreuve est une tâche de désignation d’images qui se présente sur PowerPoint. Avant la présentation des items tests, l’enfant est familiarisé aux différents personnages (le papy, la mamy, le papa, etc.). Pour chaque item, l’enfant voit apparaître quatre images puis entend une phrase déclarative. Sur chacune des images, les trois mêmes personnages sont représentés. L’un d’eux est un observateur neutre, alors que les deux autres sont impliqués dans l’action. L’enfant doit désigner l’image correcte parmi les trois distracteurs suivants : une inaction, une inversion des rôles thématiques (l’agent devient patient et inversement) et une substitution de l’agent (c’est le personnage non-mentionné dans la phrase qui est agent).

Il entend les items sonores, déclenchés par l’expérimentateur, avec un casque audio.

L’illustration d’un item est présenté en [4].

[4] Item test - verbe non-psychologique : “La grande fille est poussée par la petite fille.”

Passives psychologiques

Sachant que les enfants TSA ont des difficultés à se représenter les états émotionnels et psychologiques (Baron-Cohen, Ring, Moriarty, Schmitz, Costa & Ell., 1994), nous avons créé 16 items supplémentaires afin de compléter notre tâche. Ceux-ci comportent des verbes psychologiques tels que « détester », « imaginer », « aimer » et « adorer ». Une phase d’entraînement a permis aux enfants de se familiariser à la représentation imagée de ces verbes. Tous les items sont présentés en F. La passation de cette partie est identique à celle décrite ci-dessus. Un exemple est présenté en [5].

[5] Item test - verbe psychologique : “Le grand garçon est imaginé par le petit garçon.”

Inaction

Inversion Substitution

Rép correcte

Inversion

Inaction Substitution

Rép correcte

L’ensemble de l’épreuve « passives » a été administré à tous les enfants TSA. Cependant, nous ne disposons pas des données des enfants TSL évalués à Tours. Pour la cotation, nous avons calculé le pourcentage de réponses correctes et nous nous sommes intéressées à la nature des erreurs produites (type de distracteur préférentiellement choisi par les enfants selon le type de phrase).

Population contrôle

Les enfants au développement langagier typique ont été recrutés dans les écoles primaires genevoises et à l’école Jeanne d’Arc de Chamonix (France). Les passations ont été effectuées par des étudiantes en Baccalauréat Universitaire de Psychologie à l’Université de Genève. Afin de pouvoir comparer les enfants TSA et les contrôles, nous les avons apparié par niveau de raisonnement non-verbal. Ainsi, en fonction de leur score aux Matrices de Raven28, nous avons sélectionné un à un les enfants contrôles ayant le même âge mental que les enfants TSA. Comme, parmi les enfants TSA, nous distinguons les G-TSA des NG-TSA, nous avons un groupe d’enfants contrôles appariés en age mental au groupe G-TSA, et un groupe contrôle apparié de la même façon au groupe NG-TSA. Le groupe contrôle ainsi apparié aux G-TSA comporte 13 enfants (7 garçons et 6 filles) âgés de 5;1 à 10;6 ans (M = 7;5 ans,ET = 18 mois). Le groupe contrôle apparié auxenfants NG-TSA comporte quant à lui 7 enfants (4 garçons et 3 filles) âgés de 5;0 à 10;8 ans (M = 8;7 ans, ET = 24 mois).

Tâche standardisée d’évaluation de la compréhension morphosyntaxique (N-EEL)

Il s’agit de la liste A de l’épreuve “Compréhension-Morphosyntaxe” tirée de la batterie “Nouvelles Epreuves pour l’Examen du Langage” (N-EEL, Chevrie-Muller & Plaza, 2001). Nous avons sélectionné cette épreuve car elle a été administrée à notre groupe de TSL par le Centre Référence Langage de Tours. Ainsi nous pourrons comparer les scores obtenus à cette tâche par les enfants TSL à ceux qu’obtiendront les enfants TSA. Cela nous apporte une mesure supplémentaire pour l’évaluation de la compréhension morphosyntaxique chez les différents groupes que nous étudions (G-TSA, NG-TSA et TSL).

Cette épreuve évalue la compréhension d’oppositions morphosyntaxiques à travers une tâche

28 Test mesurant le niveau de raisonnement non-verbal.

de désignation à choix multiples. Elle est composée de 8 items expérimentaux et d’un item pré-test. Une planche de 4 images est présentée pour chaque item composé de deux phrases ne différant que morphosyntaxiquement. L’enfant les entend tour à tour et il doit, pour chacune, désigner l’image correspondante (exemple en [6]). Pour cette épreuve nous avons comptabilisé le nombre de bonnes réponses des enfants et calculé leur écart à la norme.

[6] Item test: “Le clown leur lance des bonbons.” + “Le clown lui lance des bonbons.”

2.2.1.3. Evaluation de la phonologie

Tâche de répétition de non-mots

Comme la tâche de répétition de phrases, cette tâche est issue du protocole COST Action IS0804. Dans les épreuves de répétition de non-mots, l’impact de la mémoire verbale à court-terme peut être conséquent et influencer les résultats des enfants TSL ; leur nombre de répétitions correctes décroît avec l’augmentation du nombre de syllabes des non-mots.

Effectivement, Whitehouse & al (2008) constatent une baisse importante des performances chez les enfants TSL dès lors que les non-mots comprennent plus de trois syllabes. C’est afin d’éviter cet impact de la mémoire verbale à court-terme que les items de cette épreuve ne comportent, au maximum, que trois syllabes. Evitant ainsi un impact de la mémoire verbale à

court-terme, cette épreuve évalue spécifiquement les représentations phonologiques des enfants. Elle est donc pertinente dans le cadre de notre recherche car les difficultés en phonologie sont avérées chez les enfants TSL (Maillart & Parisse, 2006), et la répétition de non-mots en est un fort marqueur clinique (Conti-Ramsden & Botting, 2001).

L’épreuve est composée de 71 items expérimentaux et de 2 items d’entraînement ; des exemples d’items sont présentés en [7] (la liste détaillée est en Annexe F). Les items d’entraînement permettent à l’enfant de se familiariser avec la tâche et d’adapter le volume sonore des stimuli. Les items expérimentaux varient de par leur complexité phonologique (zéro (1), un (2) ou deux clusters (3)) et leur structure syllabique (mono (1), bi (2) ou trisyllabique (4)). Pour cette épreuve, nous avons coté le nombre de répétitions correctes sur la base de l’enregistrement audio de la passation.

[7] Exemples d’items de la tâche de répétition de non-mots

1) Kip

2) Skafu 3) Pliks

4) Kifapu

La tâche est présentée à l’enfant sur ordinateur, sous forme d’un diaporama PowerPoint. Un extra-terrestre apparaît et il est expliqué à l’enfant que celui-ci ne parle pas notre langue. Il va alors entendre des mots de cette langue inconnue (non-mots) qu’il va devoir répéter. Les stimuli préenregistrés sont déclenchés par l’expérimentateur ; l’enfant les entend dans un casque audio afin d’assurer une bonne qualité sonore et de renforcer l’immersion dans la tâche. Quelle que soit sa production (correcte ou non), l’enfant est encouragé positivement par l’expérimentateur.

Population contrôle

La population contrôle comprend 12 enfants au développement langagier typique (9 garçons et 3 filles), monolingues, âgés de 5;6 à 6;5 ans (M = 5;10 ans, ET = 4 mois). Ils ont été testés dans des écoles primaires à Tours et leurs résultats nous ont été fournis par Sandrine Ferré (phonologue appartenant à l’Université de Tours). Afin de comparer leurs performances avec celles de nos groupes cliniques (TSA et TSL), les enfants contrôles devaient être âgés de

5 à 10 ans. Cependant, en répétition de non-mots, les sujets contrôles plafonnent aux alentours de 6 ans, c’est-à-dire qu’ils ont un taux de réussite très élevé (90%) et qu’il y a peu de variabilité dans leurs performances (Ferré, communication personnelle). Nous pouvons donc comparer les performances de nos groupes TSL et TSA à celles de ces enfants contrôles, même s’ils sont plus jeunes.

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