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Interpolation de la table

4.2. L'image orographique : caractéristiques et essai de détermination

4.3.3. Le Triton flumen et le mont Ousalaiton : principales contradictions

4.3.3.1. Etymologie et essai d'identification du mont Ousalaiton

Pour identifier et localiser le mont Ousalaiton, il faut examiner certains indices étymologiques. La recherche étymologique de Desanges n'a pas abouti à des résultats convaincants. Le défaut de base semble le choix même de la langue de formation du nom de Ousalaiton : la racine sémitique SLT. Ce qui importe dans ce toponyme est la séquence consonantique SLT. Or, selon Desanges, SLT est une racine pan-berbère assez répandue dans l'onomastique géographique, et le OU n'est qu'une marque de détermination du nom (Rouire A., 1884). Il se réfère à Pline qui signale les Selatiti après les Gétules Autololes près des côtes marocaines. Desanges a tenté aussi, à partir de la racine voisine ZLT de trouver une solution.

Tableau n°6. Table astronomique de Ptolémée le long de la Petite Syrte.

Réalisation : A. Saada, 2014 C. Ptolémée, Claude (0100 ?-0170 ?)

Traité de géographie de Claude Ptolémée,

Traduit pour la première fois du grec en français par M. l'abbé Halma, Paris, 1828, BnF, Tolbiac, 910.01 PTOL t

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Il rapproche la racine ZLT au nom moderne de Zliten ou Béni Zelten au nord de Matmata (Desanges J., 1967). Les éléments de sa présomption planent sur cette montagne dont la silhouette massive est un des hauts-lieux du sud tunisien.

De ce qui précède, nous confirmons que la racine SLT justifie les différentes variantes du toponyme. Il est clair que toutes les formes et les variantes d’Ousalaiton semblent se référer au radical SLT. Nous constatons des variations de la véritable racine. Les variations touchent la lettre initiale, tantôt voyelle ou tantôt consonne Gu/ Y/V. Nous estimons que ces variations sont légères. Afin d’éviter ce genre de manipulation de l'essai étymologique, nous insistons sur l'équivalence de toutes les formes de Ousselet qui sont issues de la racine de base SLT. Cette racine reproduit tant de formes diverses en relation très étroite avec les particularités linguistique des auteurs dans les sources textuelles. Toutes les formes : Guesslet, Vasselet, Ysolet, Ousalaiton, Ouesslet signifient le même nom. Bref, nous affirmons l’unité étymologique des différentes variétés du nom. Toutes les formes, ainsi que les multiples dérivés peuvent être rapprochées à Djebel Ousselet dans la région de Kairouan.

De même aujourd'hui, nul autre massif montagneux que celui qui se trouve aux environs de Kairouan ne porte le nom d'Ousselet. Plusieurs géographes modernes, admettent l'identité de l'Ousalaiton et du mont Ousselet actuel. Tissot aussi a réfuté l'existence d'un mont Ousselet ailleurs de l'espace tunisien central. « II n'existe pas aujourd'hui, quoi qu'on ait dit, de montagne de ce nom dans le voisinage du chott Djérid. M. Ragot a été sur ce point complètement induit en erreur ; l'étude toute spéciale que nous avons faite sur place du bassin de Djérid nous permet de l'affirmer » (Tissot Ch., Vol I, 1884-1888). Nous partageons avec Rouire l'opinion d’Elisée Reclus dans son ouvrage Géographie universelle qui affirme à propos du fleuve Triton :

C’est le seul qui naisse dans les ravins des monts Ousselet, l'Ousalaiton du géographe alexandrin. C'est aussi le seul de toute la côte orientale de la Tunisie qui, provenant d'une assez grande distance dans l'intérieur des terres, se continue par un lit reconnaissable jusqu'à une Petite Syrte et lui apporte parfois une certaine quantité d'eau. C'est enfin le seul sur le parcours duquel s'échelonnent trois lacs (Rouire A., 1884).

Les textes des historiens et des géographes arabes mentionnent aussi une montagne à l'ouest de Kairouan qui s'est toujours appelée Ousselet, et qui est la seule de ce nom en Tunisie. Ainsi El-Idrissi nomme le massif Esalat, et Aboulfida l’appelle Oueslat (Chelli Z., 1996). Bref, le test étymologique d’Ousalaiton de Ptolémée montre que les formes littérales sont multiples et peuvent être toutes rapprochées au Djebel Ousselet dans la région de

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Kairouan. D’ailleurs, de Djebel Ousselet sort une rivière se dirigeant vers le golfe de Hammamet, et qui présente toutes les particularités géographiques signalées à propos du Triton fl.

Ptolémée ajoute une autre indication en faisant du mont Ousalaiton la limite septentrionale du désert de Libye et du Triton fl. le commencement de la Libye désertique. Les indications géographiques données par Ptolémée sur le fleuve Triton correspondent-elles au cours du fleuve de la Tunisie centrale ?

Le commencement de la Libye désertique est donc fixé non seulement par Ptolémée mais aussi par Hérodote aux environs du mont Ousselet où ce fleuve prend sa source. Nous savons qu'Hérodote, ainsi que d'autres historiens et des géographes distinguent la région des terres boisées, fertiles et cultivées s'étendant au couchant, et celle des terres pauvres, sablonneuses et incultes situées à l'Orient. Nous comprenons que le fleuve Triton forme la ligne de démarcation entre deux régions de nature et d’aspect différents. En outre, Ptolémée qualifie le Triton fl. avec ses lacs de Libye, Pallas et Tritonitis (IV, 3, 6) de « favorables ». Cette expression correspond entièrement au caractère fertile des terres qui les entourent.

Les auteurs modernes ne cessent pas de mentionner une montagne et un cours d'eau aux environs de Kairouan. L'aspect désertique et géographique de cette montagne, cité par Ptolémée, est aussi souligné par plusieurs auteurs modernes dans le cadre de la description de Kairouan. Au XVIe siècle, Léon l’Africain affirme que «l'assiette de Cairaron [Kairouen] est en une campagne aréneuse et déserte, ne produisant ni arbre ni grain ; mais en défaut de ce, il s'en apporte dessus la rivière de la mer de Susa, Monastère ou Mahdia, cités qui sont toutes distantes par l'espace de cent quarante milles de celle-ci, auprès de laquelle, environ douze milles, y a une montagne appelée Gueslat [Ousselet]» (Léon, 1550, II : 64). Plus loin, Léon parlant de la contrée avoisinant Kairouan, atteste aussi que « Cairaron [Kairouen] est situé au milieu d'une plaine sablonneuse et déserte ne possédant ni arbres ni graines. Non loin de cette cité, à environ 12 milles, il y a une montagne nommée Gueslet [Ousselet] : là se trouvent des ruines romaines, et des sources auprès de ces ruines. » (Léon, 1550, II : 168)

La donnée géographique est digne de remarque puis qu'elle fait la base des idées sur l'identification du bassin hydrographique central avec le Triton fl.. Le test étymologique et la donnée géographique nous laisse assimiler le mont Ousalaiton de Ptolémée à la montagne de Ousselet dans la Tunisie actuelle. Toutefois, l'expression « Petite Syrte » peut-elle être source d'erreur dans la cartographie du Triton fl. ?

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4.3.3.2. Pluralisme des Syrtes dans les sources anciennes responsables des erreurs