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Etudes par résonance paramagnétique électronique 7.3

L’utilisation de la résonance paramagnétique électronique (RPE) implique la liaison d’une sonde radicalaire, c’est-à-dire portant un électron non apparié qui sera sensible à son environnement. Le plus souvent la sonde est introduite par réaction covalente sur une cystéine, elle-même introduite dans une ou plusieurs régions de la protéine. La sonde agit ainsi comme rapporteur de l’environnement et permet de suivre des réorganisations structurales lors de transitions entre états.

Cette méthode a été largement utilisée pour l’étude des transitions allostériques de GLIC reconstitué en liposomes (Chakrapani, 2015; Dellisanti et al., 2013b; Velisetty and Chakrapani, 2012b; Velisetty et al., 2014, 2012a). Les mesures de RPE étant effectuées à l’équilibre, où les protéines sont en présence d’agoniste pendant parfois plusieurs heures, cette technique ne permet pas d’avoir accès aux états transitoires, tels que l’état actif si l’on admet que GLIC désensibilise, et a fortiori, les intermédiaires de transition. Ainsi, les études de RPE effectuées sur GLIC ont été interprétées dans le cadre de réorganisations structurales entre l’état de repos et l’état désensibilisé. Notons d’ailleurs que dans leurs études, Velisetty et al. affirment que GLIC reconstitué en liposomes ne peut être activé aux concentrations de proton typiquement utilisées en cellules, mais à des pH très acides avec un pH50=2,90 (Velisetty and Chakrapani, 2012b); ils notent également que certaines des sondes radicalaires utilisées sont instables à ces faibles pHs, les résultats de ces analyses doivent donc être interprétés avec précaution (Velisetty et al., 2014).

Au niveau de l’ECD, ces études montrent que, lors de la transition de désensibilisation, les résidus situés sur le corps de la boucle C (encadrant la poche orthostérique du côté externe de la protéine) et les résidus de la boucle β4-β5 (côté vestibule) perdent en mobilité. De même, ils voient que les résidus de la pointe de la boucle C restent immobiles dans les deux conformations (Velisetty and Chakrapani, 2012b). Les auteurs concluent

de ces mesures un mouvement des sous-unités vers l’intérieur de la protéine. Ces mouvements apparaissent également compatibles avec le modèle de transition repos-actif décrit à partir des structures cristallographiques, qui propose une contraction de l’interface entre sous-unités, la pointe de la boucle C suivant le mouvement du feuillet de la sous-unité adjacente.

Figure 7.4 : Réorganisations de GLIC en liposomes suivies par RPE. A : Enregistrements électrophysiologiques par patch-clamp en conformation inside-out, de GLIC reconstitué en liposomes. B, C : Structure de GLIC, seules deux sous-unités sont représentées, vues depuis le vestibule et le pore. B : Les résidus perdant en mobilité lors de la transition vers l’état désensibilisé sont colorés en bleu, ceux dont la mobilité ne change pas en noir, et ceux gagnant en mobilité en rouge. Les résidus sont colorés selon les résultats publiés par Velisetty et al.. C : Zoom sur le pore de GLIC. Les résidus des hélices M2 sont colorés selon la légende, en rouge lorsqu’ils s’éloignent au cours de la transition vers l’état désensibilisé, et en bleu lorsqu’ils se rapprochent. Figure extraite et inspirée de (Velisetty and Chakrapani, 2012b).

Au niveau de l’interface, ils observent que la boucle M2-M3 est plus mobile et plus en contact avec l’environnement lipidique, ce qui peut s’apparenter à un mouvement vers l’arrière. A l’inverse, la boucle F perd en mobilité dans l’état désensibilisé du récepteur. Il doit être noté que la perte de mobilité de la boucle F publiée par Velisetty et al. est en

apparente contradiction avec une autre étude de GLIC utilisant la RPE qui propose un mouvement de 9,2Å de la position T158, à la pointe de la boucle F (Dellisanti et al., 2013b).

Etonnamment, les données décrivent une augmentation de la flexibilité, dans l’état désensibilisé, de la boucle 7 située juste au dessus du cœur des hélices transmembranaires, et de la boucle 2 située au dessus des hélices M2. Au niveau du pré-M1 et de l’hélice M1 il est difficile d’avoir une vue d’ensemble des données car les positions diffèrent beaucoup dans leur mobilité au sein d’un même état, et sont décrites comme peu accessibles aux marqueurs lipidiques utilisés dans l’étude, ce qui peut paraître surprenant pour une hélice transmembranaire située en bordure du récepteur (Velisetty et al., 2014).

Enfin, au niveau du TMD, l’insertion de sondes au sein des hélices M2 sur des résidus pointant vers le pore indique que le haut du pore s’élargit dans la transition de l’état de repos vers l’état désensibilisé, et le bas du pore se rétrécit, les positions en 9’ et 5’ de chaque hélice M2 se rapprochant (Velisetty et al., 2012a). Toutefois, les mêmes auteurs publient une étude deux ans plus tard indiquant notamment que certains résidus du haut du pore ne sont pas en contact avec le solvant dans l’état désensibilisé, indiquant une réelle complexité dans l’interprétation des données de RPE. De même ces données ne sont pas tout à fait en accord avec les structures cristallographiques et les études de mutagenèse qui suggèrent que la « porte » d’activation se trouve en position 9’ et reste ouverte lors de la désensibilisation, la « porte » de désensibilisation se trouvant en 2’. De plus, la fonction des récepteurs marqués par les sondes de RPE n’a pas été publiée, et il est ainsi possible qu’elles impactent fortement leur fonction, se trouvant au sein du pore.

Ainsi, il est difficile de conclure avec un modèle de transition vers l’état désensibilisé dans le détails des positions étudiées, mais on peut proposer un modèle global impliquant une perte de mobilité de l’ECD, une augmentation de mobilité à l’interface entre l’ECD et le TMD et une conformation du pore ouvert en haut et fermé en bas.

8. La fluorescence dans l’étude des réorganisations

structurales des RCPs

La partie suivante décrit certains points théoriques sur la fluorescence et comment ce phénomène physique peut être appliqué à l’étude des transitions allostériques chez les RCPs.

Aspects théoriques