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Caractérisation fonctionnelle des mutants de GLIC marqués 2.6

au bimane

Afin d’estimer le marquage par le bimane de récepteurs exprimés à la membrane d’ovocytes, j’ai utilisé un mutant « rapporteur », GLIC Q193C. En effet, la liaison d’un composé à cette position, aussi petit qu’un methyl-methanethiosulfonate (MMTS), entraine une perte de fonction quasiment totale des récepteurs, permettant ainsi d’estimer qualitativement la réussite du marquage des cystéines libres (Voir méthodes).

Les ovocytes exprimant le mutant Q193C mis en présence de mBBr ne montrent pas de perte de fonction, et ne sont pas protégés du marquage au MMTS indiquant que le fluorophore n’a pas ou peu réagit à cette position. En effet, l’observation par microscopie confocale de cellules mammifères CHO (Chinese Hamster Ovary) exprimant des mutants cystéine de GLIC et marquées au mBBr, montre une entrée massive du fluorophore dans le cytoplasme et ne permet pas l’observation d’un marquage à la membrane. De façon étonnante, le marquage des mêmes cellules par un dérivé du bimane, le qBBr, chargé positivement et commercialisé en tant que fluorophore non perméant à la membrane, montre un résultat identique avec une forte entrée du fluorophore dans le cytoplasme (Figure 13A). Cette observation est particulièrement surprenante car différentes études ont rapporté utiliser le qBBr pour marquer spécifiquement les cystéines libres à la membrane de cellules (Huang et al., 1984; Kosower et al., 1979; Semenova et al., 2009). Toutefois, cette imperméabilité au qBBr semble dépendre du type de cellules utilisées (communication personnelle de B.S. Rothberg).

Afin de diminuer l’hydrophobicité du bimane et empêcher son passage à travers la membrane plasmique, nos collaboratrices D. Joseph et E. Drège ont proposé et synthétisé un nouveau dérivé du fluorophore, le Bimane sel de Bunte (BBs), portant un groupe partant chargé négativement SO3

disulfure, et les produits de réaction du mBBr et du BBs sont quasiment identiques en volume, mais également en fluorescence (Figure 14B).

Figure 13: Marquage au bimane de cellules CHO. A,B : Les images sont celles de cellules positives pour le marqueur de transfection (mCherry) et excitées par laser à 405nm. A : Comparaison entre le marquage de CHO exprimant un mutant cystéine de GLIC marquées par du qBBr (gauche) ou du BBs (droite). B : Projection sur l’axe Z de 12 sections (100nm) prises sur la même cellule marquée au BBs, avant, pendant et après perfusion par une solution de 50mM Trp.

Après marquage par le BBs, les cellules CHO, transfectées avec des mutants cystéine de GLIC, montrent une faible entrée du fluorophore dans le cytoplasme et un marquage robuste à la membrane plasmique (Figure 13A). De plus, la perfusion d’une solution de tryptophane sur ces cellules montre un quenching effectif de la fluorescence à la membrane, indiquant qu’il s’agit bien d’un marquage sur la partie extracellulaire des récepteurs, et non un partionnement du fluorophore au sein de la membrane (Figure 13B).

Figure 14 : Caractéristiques du BBs et fonction des récepteurs marqués. A : Structures du mBBr et BBs (Bimane sel de Bunte). Les flèches indiquent le site de réaction de la cystéine. B : Spectres d’excitation (bleu) et d’émission du BBs (vert). Les spectres du mBBr sont indiqués pour comparaison (gris). Tous les spectres ont été normalisés sur leur intensité maximale. C : Trace électrophysiologique typique pour une courbe dose-réponse après marquage au BBs. D : Courbes dose-dose-réponse des principaux mutants après marquage au BBs, ajustées à l’équation de Hill. Les barres d’erreur représentent l’écart-type.

Tous les mutants présentés dans cette étude sont fonctionnels, générant des courants robustes à la membrane plasmique, à l’exception de Q193C,

P250C-W160F, E243C-K33W –I201W –V242W, mentionnés

précédemment (Table 3).

Chaque mutation a été caractérisée par la réalisation d’une courbe dose-réponse avant et après marquage au BBs, et la plupart des mutants montrent des temps d’activation lents, avec un plateau atteint en 30s, typiques de la fonction de GLIC (Figure 14C).

Pour toutes les positions principales, l’insertion de mutations n’a pas d’impact fonctionnel avant marquage au BBs, à l’exception du mutant K33C-W160F qui présente une courbe dose-réponse déplacée vers les

bas pH avec un ΔpH50 de 0,76. Après marquage au BBs, la plupart des positions montrent un léger déplacement de la courbe dose-réponse vers les bas pHs, avec un ΔpH50 maximum de 0,5, à l’exception des deux

doubles-mutants E243C-F238W et E243C-L242W qui montrent un ΔpH50

de 0,9 (Figure 14D et Table 3).

Ces données montrent que le marquage par le petit fluorophore BBs affecte peu la fonction des récepteurs pour la majorité des positions testées.

De façon intéressante, la comparaison des courbes doses-réponses obtenues par mesures électrophysiologiques (ΔI) et par mesures de fluorescence (ΔF), révèle des différences dans la quantité d’agoniste nécessaire pour effectuer un mouvement ou ouvrir le canal et donc stabiliser la conformation active du récepteur (Figure 15). En effet, pour les positions mBBr135 et mBBr250 cette différence s’élève à ΔpH=0,8 et 0,7 respectivement, ainsi que, dans une moindre mesure, ΔpH=0,4 pour la position mBBr136-W101 (Figure 15 et Table 3).

Les liposomes et la membrane plasmique des ovocytes étant deux environnements membranaires distincts, il est difficile de comparer les données de fluorescence obtenue dans l’un avec les données fonctionnelles obtenues dans l’autre. Cependant, les enregistrements électrophysiologiques de GLIC reconstitué en liposomes indiquent que les récepteurs sont activés à une concentration en proton supérieure de plus de deux ordres de grandeur à celle utilisée en cellule (Velisetty and Chakrapani, 2012c). L’ensemble des données suggère ainsi que les mouvements effectués en liposomes décrits par les variations de fluorescence nécessitent une concentration de proton plus faible que celle nécessaire à l’activation des récepteurs.

Figure 15: Comparaison des courbes doses-réponses en fluorescence et en fonction. Dans tous les panels, les données de fluorescence (noire) et d’électrophysiologie (rouge) ont été ajustées suivant l’équation de Hill et superposées pour chaque mutant principal. Les barres d’erreur représentent l’écart-type.

Table 3: Dose dépendance des courants et de la fluorescence. Les valeurs de pH50 et nH sont obtenues par ajustement des courbes dose-réponse à l’équation de Hill. Le Imax représente le courant maximal enregistré. NF: non fonctionnel, indiqué lorsque le courant est inférieur à 500nA à la concentration maximale de proton. NA: non-applicable, indiqué lorsque les variations de fluorescence ne dépassent pas 10% sur la gamme de pHs testés. Toutes les barres d’erreur représentent l’écart-type.

Electrophysiologie Non-marqués Electrophysiologie Marqués au BBs Fluorescence détergent Fluorescence liposomes Mutant pH50 nH Imax n pH50 nH Imax n pH50 nH n pH50 nH n

C27S 5,31±0,07 1,6±0,2 7,0±0,4 5 5,3±0,1 1,7±0,2 7±2 3 NA NA NA NA NA NA

R133C 5,3±0,2 1,8±0,1 7±3 4 5,1±0,2 2,14±0,05 8±3 3 5,4±0,3 1,7±0,6 5 5,5±0,1 1,3±0,2 3

R133C

L103W 5,1±0,1 2,2±0,4 6,8±0,8 3 5,23±0,09 1,7±0,2 6±2 3 5,2±0,3 0,7±0,2 4 5,50±0,04 0,78±0,07 3

R133C

Y23W 5,2±0,4 2,0±0,3 9,2±0,8 3 5,1±0,2 2,50±0,07 6±1 3 NA NA NA NA NA NA R133C

Q101W 4,81 2,26 2,71 2 4,87 2,47 4,05 1 NA NA NA NA NA NA

V135C

W72 5,6±0,2 1,7±0,3 7,0±0,9 4 5,29±0,08 2,0±0,1 7,2±0,7 3 6,31±0,09 1,7±0,2 7 6,05±0,02 3±1 4

V135C H+ 5,1 1,8 7,3 1 5,1±0,2 2,0±0,4 6,5±1,0 3 6,14±0,03 1,8±0,2 3 - - -

D136C 5,3±0,1 1,9±0,2 7,0±0,9 4 5,29±0,04 2,0±0,3 8,3±0,9 3 NA NA NA NA NA NA

D136C

Q101W 5,17±0,08 2,3±0,1 8±2 3 5,4±0,2 2,2±0,3 9±3 3 5,85±0,08 0,96±0,08 4 5,8±0,1 1,3±0,6 3

D136C

S93W 4,50±0,05 2,1±0,4 3±1 3 4,60±0,06 1,5±0,1 2,1±0, 9 3 NA NA NA NA NA NA D136C

D178W 5,0 1,8 6,2 1 5,3 1,8 6,6 1 NA NA NA NA NA NA

K33C

W160 5,88±0,03 1,8±0,1 9±2 3 5,6±0,2 1,8±0,4 8±2 3 6,22±0,03 2,0±0,4 4 5,95±0,07 1,25±0,09 6 K33C

W160F 4,55±0,03 2,6±0,2 3,0±0,1 3 4,4±0,1 2,2±0,6 1±1 4 NA NA NA NA NA NA

A34C 5,3±0,3 1,8±0,1 6±1 4 4,7 1,8 5 1 NA NA NA NA NA NA

A34C

W160F 4,5 3,3 2,7 2 NF NF NF 3 NA NA NA NA NA NA

P250C 5,1±0,1 1,54±0,09 7,0±1,2 3 4,8±0,2 2,3±0,4 4,3±0,8 3 5,9±0,1 1,8±0,6 4 5,5±0,3 2,2±0,6 4

P250C

Y197F 5,2±0,1 1,3±0,3 4,1±0,1 5 4,73±0,09 1,2±0,2 1,5±0,9 3 NA NA NA NA NA NA

P250C

Y119F 4,6±0,2 2±1 3,0±0,3 3 4,5±0,3 2,1±0,7 2,2±0,3 3 NA NA NA NA NA NA P250C

W160F NF NF NF 3 NF NF NF 4 NA NA NA NA NA NA

P250C

Y194F 5,1±0,2 1,7±0,4 6,4±0,8 3 4,5±0,2 1,8±0,2 2±1 3 NA NA NA NA NA NA

E243C 5,1±0,1 1,7±0,3 8±1 4 4,7±0,2 1,7±0,3 5±4 3 4,5±0,2 2,0±0,2 4 4,8±0,1 0,9±0,3 6

E243C

K33W NF NF NF 4 NF NF NF 3 NA NA NA NA NA NA

E243C

I201W NF NF NF 10 NF NF NF 2 NA NA NA NA NA NA

E243C

F238W 5,3±0,1 1,3±0,1 7,9±0,7 3 4,56 1,28 4,65 2 NA NA NA NA NA NA E243C

L241W 5,7±0,2 0,69±0,06 5,09±0,08 3 4,8±0,1 0,61±0,03 2±1 3 NA NA NA NA NA NA E243C

V242W NF NF NF 4 NF NF NF 5 NA NA NA NA NA NA

Enregistrements des variations de fluorescence en temps