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Discussion générale et modèle structural 3.7

Les résultats présentés dans cette partie montrent que les régions du haut de M1 et du pré-M1 jouent un rôle critique dans les propriétés fonctionnelles de GLIC.

Les mutants F195A et Q193L/M sont quasiment non-fonctionnels. Q193C voit une cinétique de désensibilisation apparente accélérée, alors que Q193C-P250C est constitutivement activé.

Les doubles mutants P250C-Y194F ou -Y197F provoquent une stabilisation de l’état D, et possiblement une accélération de l’activation. Le simple mutant P250C montrant un profil fonctionnel proche du récepteur sauvage, ces phénotypes sont majoritairement dus aux mutations des deux tyrosines.

La résolution des structures des mutants Q193L/M et Y197F montrent un TMD de type repos et une boucle M2-M3 vers le pore. Or, les structures de GLICpH4 montrent que, dans la conformation active, la boucle M2-M3 est située vers l’arrière et les trois résidus Q193, F195 et Y197 peuvent effectuer trois interactions distinctes avec cette boucle (Figure 16). Notamment pour les couples F195-M252 et Y197-K248, la position des chaines latérales de M252 et K248 indiquent que ces interactions ne sont possibles que lorsque la boucle M2-M3 est vers l’arrière (Figure 16). Dans le cas particulier du couple Q193-P250, l’interaction peut ne pas être directe mais s’effectuer à travers un réseau de molécules d’eau. En effet, la mutation en alanine de la proline 250 a été rapportée comme ayant un phénotype sauvage (Rienzo et al., 2016), comme cela est également montré par la mutation P250C. Toutefois, que cette interaction soit directe

cette position pouvant effectuer des liaisons hydrogènes est nécessaire à l’activation.

Ainsi, l’analyse combinée par électrophysiologie et cristallographie révèle un rôle fort du M1/pré-M1 dans la stabilisation de la boucle M2-M3 vers l’arrière et ainsi la stabilisation de l’état pré-actif et/ou actif (Figure 16).

Figure 16 : Vue structurale des interactions entre le préM1/M1 et la boucle M2-M3. Le zoom de gauche (rouge) a été réalisé à partir de la structure GLICpH7, donc supposée dans l’état de repos. Le zoom de droite (vert) a été réalisé à partir de la structure GLICpH4 supposée de l’état actif. Les deux zooms ont exactement la même orientation et ont été effectués sur les deux structures alignées ; les positions relatives de chaque acide aminé peuvent donc être comparées.

De façon intéressante, une étude de REFER de la position équivalente à Q193 chez le récepteur nicotinique montre que cette position bouge « tard » dans la transition d’activation, approximativement en même temps que les « portes » d’activation du pore (Purohit and Auerbach, 2007). Cette étude renforce l’idée que les interactions identifiées ici ne sont pas nécessaires à la transition vers l’état actif, mais à sa stabilisation.

Notons également que l’interaction Y197-K248 n’est pas non plus nécessaire à l’activation, la mutation K248C présentant un phénotype gain

de fonction important (pH50=6,3) et le mutant (P250C)Y197F étant

fonctionnel (Prevost et al., 2012). Ainsi, on peut aller plus loin dans les conclusions et suggérer que ces interactions jouent sur l’équilibre A-D en stabilisant l’état A devant l’état D.

Ainsi, la rupture de ces interactions, notamment par la mutation Y197F explique le phénotype désensibilisant du mutant.

Cette idée est d’ailleurs soutenue par la structure résolue du récepteur GABAA, supposé dans l’état désensibilisé, où l’on peut voir que les deux résidus équivalents n’interagissent pas entre eux, à l’inverse, la tyrosine se trouve sous la boucle M2-M3 (Figure 17). De plus, les variations de fluorescence enregistrées à la position mBBr250, deux résidus après la lysine 243 (Figure 16 et Figure 9 Chap.2 Résultats), montrent que les deux résidus mBBr250 et de Y197 s’éloignent dans des gammes de temps compatibles avec la désensibilisation de GLIC. Ainsi on peut spéculer que dans la conformation désensibilisée, la boucle M2-M3 adopte une position encore plus extérieure qu’à l’état actif.

Figure 17 : Interactions entre l’hélice M1 et la boucle M2-M3. Pour les deux structures seules les hélices M2 et M3 d’une sous-unité, ainsi que l’hélice M1 de la sous-unité adjacente sont représentées. En haut, les structures de GLICpH7 (rouge) et GLICpH4 (bleu) sont superposées. En bas, la structure du "3-GABAA supposée dans l’état désensibilisé est représentée avec la même orientation que GLIC.

De façon remarquable, différentes mutations de la lysine 248 à la position équivalente chez le récepteur à la glycine entraînent la maladie hyperekplexia (Bode and Lynch, 2014; Poon et al., 2006). Le mécanisme par lequel ces mutations perturbent la fonction des récepteurs n’est pas encore établi mais souligne l’importance de cette région, et la probable conservation des interactions à travers les différents sous-types de RCPs.

Le cas de la mutation Y194F est plus difficile à interpréter, étant donné que sa chaine latérale pointe vers les lipides. La structure GLICpH4 permet d’observer un lipide co-purifié avec GLIC, assez proche du pré-M1 pour une interaction directe. Cependant, la mutation simple de cet acide aminé (Y194A) n’a pas révélé de phénotype particulier et il est probable que les effets décrits ici ne soient pas le résultat d’une interaction directe avec un résidu mais plutôt d’une réorganisation des interactions de cette région.

Il serait donc très intéressant de poursuivre les études des mutants F195A et Q193L/M par des applications de picrotoxine afin d’identifier si la rupture des interactions à ces positions facilite également la désensibilisation du récepteur.

On pourra alors confirmer l’hypothèse selon laquelle les interactions entre le préM1/M1 et la boucle M2-M3 stabilisent la conformation active, et par extension défavorisent toute autre conformation, telles que les états désensibilisés.

Ainsi, afin de caractériser plus profondément la participation à l’activation et à la désensibilisation de cette région du pré-M1, il serait intéressant d’utiliser les senseurs fluorescents développés dans la partie 1. En effet, la position mBBr250 se situant à proximité du pré-M1, elle est idéale pour étudier l’impact de cette région dans les réorganisations allostériques, et notamment l’impact de la glutamine 193. Cependant, l’étude de la position Y197 n’est pas possible directement, la présence d’une tyrosine à cette position étant nécessaire pour observer des changements de quenching de fluorescence du mBBr250. Néanmoins, une étude plus détaillée, par mutagenèse de cette région sera intéressante afin de mieux caractériser

les positions impliquées dans la stabilisation des états actif et désensibilisé de GLIC.

4. Projet 3 : Crible par électrophysiologie de composés

ciblant la poche intra-sandwich de GLIC

Préface

4.1

Les travaux présentés dans cette partie ont été effectués au sein d’une collaboration entre les laboratoires de Marc Delarue, Arnaud Blondel et Pierre-Jean Corringer, à l’institut Pasteur.

Plus particulièrement, Nathan Desdouits, de l’équipe de A. Blondel, a généré les structures de GLIC permettant d’identifier les quatre cavités ciblées dans cette étude, et a réalisé les cribles virtuels.

Le crible électrophysiologique présenté ici a permis de révéler de nouveaux modulateurs de GLIC, et un second crible est en cours. Les conclusions de l’étude sont donc encore préliminaires.

Introduction

4.2

Les récepteurs-canaux participant à de nombreuses fonctions biologiques, ils sont au coeur d’une recherche active de nouveaux composés modulant leur fonction, notamment pour leurs intérêts thérapeutiques, comme cela peut être le cas avec les anesthésiques généraux ou les composés de sevrage à la nicotine.

La résolution de la structure de GLIC à pH7 a permis d’identifier une nouvelle cavité au sein de l’ECD (Sauguet et al., 2014). En effet, à pH7,

les deux feuillets β formant l’ECD d’une sous-unité apparaissent

« détachés » générant ainsi une cavité hydrophobe en leur sein. En comparant avec la structure à pH4, il apparaît que les deux feuillets sont plus proches dans la conformation active, et la taille de la cavité réduite. Ainsi, nous avons exploré la possibilité que cette cavité représente une nouvelle cible pharmacologique pour GLIC, et par extension pour les RCPs.

Cette cavité ne se superposant pas au site orthostérique, les molécules s’y liant et impactant la fonction du récepteur seront donc classifiées comme des modulateurs (Christopoulos et al., 2014). Notons toutefois que le récepteur GLIC n’est pas activé par un ligand traditionnel dont le site se trouve au sein de la poche orthostérique, et que le/les sites de liaison de l’agoniste (le proton) ne sont pas encore clairement identifiés (Duret et al., 2011; Rienzo et al., 2014; Wang et al., 2012). Néanmoins, la cavité ciblée étant très hydrophobe, il est peu probable qu’elle porte le/les sites de liaison des protons activant GLIC.

Réactifs ciblant les cystéines