addition oxydante
II.3) Etude du système précurseur {sel de fer; ligand} en présence d’un halogénure aromatique et d’un nucléophile azoté
II.3.a) Précurseur: {[FeIII(acac)3]; phen}
Le précurseur [FeIII(acac)3] s’est avéré incompatible avec les conditions requises par les réactions de couplage: en effet, la présence d’un nucléophile porteur d’un proton acide (imidazole ou pyrazole par exemple) provoque la protonation des ligands acac— relargués en solution lors du processus de formation du complexe [Fe0(phen)2] (schéma 3.17). L’acétylacétone ainsi formée provoque l’oxydation du complexe [Fe0(phen)2] électrogénéré, rendant incompatible l’existence du catalyseur actif avec le nucléophile.
Ceci peut être observé lors de l’ajout de quantités croissantes d’acétylacétone à une solution contenant [FeIII(acac)3] = 4 mmol.L-‐1 et [phen] = 8 mmol.L-‐1, qui provoque l’augmentation du pic PARTIE III - CHAPITRE III
Schéma 3.52: voltammogramme d’une solution contenant [FeIII(acac)3] = 4 mmol.L-1 et [phen] = 8 mmol.L-1 (—); même solution en présence de 20 équiv. d’acétlyacétone (---)
On a donc, au potentiel R2, formation de l’espèce [Fe0(phen)2], qui réagit avec l’acétylacétone et aboutit à la formation d’un complexe de fer (II), lequel est à nouveau réduit en complexe [Fe0(phen)2] au potentiel R2:157
FeII(acac)2(phen) + 2e Fe0(phen)2
O O OH OH [FeII] R2 H+ Schéma 3.53
Ainsi, même s’il promeut l’addition oxydante d’un complexe de fer (0) généré in situ avec un bromure aromatique, le système précurseur {[FeIII(acac)3]; phen} est inopérant car la formation du catalyseur est incompatible avec la présence d’un nucléophile azoté tel qu’une amine hétérocyclique. Il est donc nécessaire que le sel de fer employé comme précurseur ne contienne aucun ligand dont la forme protonnée soit susceptible d’oxyder le fer (0) électrogénéré.
Pour pallier ce problème et étudier la formation du précurseur [Fe0(phen)2], le nucléophile hétérocyclique a été introduit sous forme basique (sel d’imidazolate de sodium).
PARTIE III - CHAPITRE III
157 La réduction de cétones par des complexes métalliques de fer (0) a déjà été reportée; voir notamment l’exemple suivant en série asymétrique: Sonnenberg, J.F.; Coombs, N.; Dube, P.A.; Morris, R.H. J. Am. Chem. Soc. 2012, 134, 5893.
La réduction du complexe [FeIII(acac)3] en présence de deux équivalents de phen et d’un excès d’imidazolate de sodium a été étudiée. Le voltammogramme résultant est donné ci-‐dessous (schéma 3.54):
Schéma 3.54: voltammogramme d’une solution contenant [FeIII(acac)3] = 4 mmol.L-1, [phen] = 8 mmol.L-1; puis 1, 3, 7, et 12 équiv. d’imidazolate de sodium
(voltammogrammes «b» à «e»)
On s’aperçoit qu’en présence d’un excès d’imidazolate de sodium, (voltammogramme «e» sur le schéma précédent), aucun pic de réduction n’est observé jusqu’à -‐2 V, où l’on réduit la phénanthroline. Le pic de réduction du complexe [FeIII(acac)3] diminue, de même que le pic de réduction R2 du complexe [FeII(acac)2(phen)]. Le précurseur [FeIII(acac)3] et l’imidazolate réagissent donc pour fournir un nouveau complexe qui ne présente aucune électroactivité, la formation du complexe [Fe0(phen)2] est donc inhibée en présence du nucléophile imidazolate.
II.3.b) Précurseur: {[FeIIICl3]; dmeda}
L’interaction du système {[FeIIICl3]; dmeda} avec un nucléophile azoté a ensuite été étudiée; ce précurseur de fer (III) ne présente pas de contre-‐anion dont la forme protonnée pourrait oxyder le fer (0) électrogénéré.
Deux études ont été menées:
-‐ la formation in situ du complexe [Fe0(dmeda)2] à partir du mélange réactionnel utilisé dans les PARTIE III - CHAPITRE III
II.3.b.1) Etude de la formation in situ du complexe [Fe0(dmeda)2] à partir du mélange réactionnel
De la même manière que précédemment, le voltammogramme d’une solution contenant le précurseur métallique [FeIIICl3] (= 4 mmol.L-‐1) et le ligand [dmeda] (= 8 mmol.L-‐1) en présence d’un excès d’imidazolate de sodium (12 mmol.L-‐1) ne présente plus aucun pic de réduction dans le domaine d’électroactivité du solvant. 158
L’analyse de la solution par spectrométrie de masse a révélé la présence du complexe [FeIII(imidazolate)3] (m/z = 318 pour le complexe [FeIII(imidazolate)3(AcOH,H+)] révélé en présence d’acétate d’ammonium).
Ainsi, il apparaît que l’af]inité des anions des amines hétérocycliques, telles que l’imidazole, pour le fer (III) est suf]isamment grande pour permettre la formation d’un complexe «empoisonné» par le nucléophile. Ce complexe étant non réductible en un complexe de fer (0) susceptible de donner une réaction d’addition oxydante, le processus de couplage est inhibé à son commencement (schéma 3.55):
FeIIICl2(dmeda)2+
3 ImNa
FeIII(Im)3 [Fe0]
3 e
X
ImNa =N Na N dmeda
[Fe0(dmeda)2] ImNa = N
Na N
Schéma 3.55
Il apparaît donc impossible de générer in situ le complexe [Fe0(dmeda)2] en milieu basique et en présence du nucléophile: ceci explique pourquoi, lorsque le précurseur [FeIIICl3] est d’une grande pureté, la réaction de couplage ne se produit pas (tableau 3.3).
Le problème de l’impossibilité de former in situ le complexe [Fe0(dmeda)2] et donc d’amorcer le cycle catalytique par l’addition oxydante de ce complexe sur l’haloarène peut être contourné. Il suf]it pour cela d’électrosynthétiser le complexe [Fe0(dmeda)2] en présence du bromoarène Ar-‐Br et donc d’accumuler le composé d’insertion [ArFeII(dmeda)2Br]. Ce dernier peut être ensuite mis en présence du nucléophile et de la base dans les conditions décrites par Bolm.137 Les résultats obtenus par cette méthode sont présentés ci-‐après.
II.3.b.2) Réactivité de complexes arylfer (II) synthétisés préalablement
L’électrolyse d’une solution contenant [FeIIICl3] = 0,05 mol.L-‐1 (0,5 mmol) associée au ligand [dmeda] = 0,1 mol.L-‐1 (1 mmol) en présence d’un excès de bromobenzène (0,5 mol.L-‐1, 5 mmol) a été effectuée au potentiel R2 = -‐1,7 V (passage de 3,3 F dans l’électrolyseur pour une charge théorique de 3 F). Le complexe [Fe0(dmeda)2] électrogénéré réagit in situ avec le bromobenzène pour donner 0,05 mol.L-‐1 du complexe [PhFeII(dmeda)2Br].
Le contenu de la cellule est ensuite cannulé sous argon dans un tube de Schlenk contenant le nucléophile (imidazole ou pyrazole, 5 mmol) ainsi que la base (K3PO4, 10 mmol). Le milieu est ensuite chauffé à 130°C pendant 16h.
Aucune trace de produit de couplage n’a été détectée par RMN 1H ou par spectrométrie de masse.
PARTIE III - CHAPITRE III
158 Les résultats sont similaires lorsque l’on emploie 3 équivalents de nucléophile azoté (imidazole ou pyrazole) et un excès de base (K3PO4, 10 équiv.).
L’expérience a été répétée avec différents halogénures aromatiques, sans que le produit de couplage ne soit détecté (tableau 3.56):
Halogénure
aromatique Rendement en produit de couplage (nucléophile = imidazole)
Rendement en produit de couplage (nucléophile = pyrazole) PhBr 0 % 0 % p-‐MePhBr 0 % 0 % PhI (*) 0 % 0 % p-‐MePhI (*) 0 % 0 % p-‐MeOPhI (*) 0 % 0 %
Tableau 3.56: tentatives de réactions de couplage entre divers halogénures aromatiques et une amine hétérocyclique (imidazole ou pyrazole); (*): l’halogénure aromatique a été ajouté après
électrosynthèse du complexe [Fe0(dmeda)2]
Ainsi, même s’il est formé préalablement à partir d’un halogénure aromatique Ar-‐X, le complexe [ArFeII(dmeda)2X] ne conduit pas, en présence d’un nucléophile azoté et d’une base, au produit de couplage escompté (schéma 3.57).
FeIIICl3 + 2 dmeda + Ar-X E = -1,7 V 3 e
Ar-FeII(dmeda)2-X
Nu-H = imidazole, pyrazole
Nu-H 10 équiv. K3PO4 20 équiv. 130°C, 16h Ar-Nu
X
Schéma 3.57Ceci est con]irmé en voltammétrie cyclique: divers complexes [ArFeII(dmeda)2X] ont été accumulés par électrosynthèse (tableau 3.46); l’ajout d’un excès (quatre équivalents) de nucléophile azoté (imidazole ou pyrazole) en présence d’un excès de base (K3PO4, 4 équivalents) ne donne aucune modi]ication du voltammogramme. Le pic de réduction du composé [ArFeII(dmeda)2X] demeure inchangé, ce qui témoigne de l’absence de coordination du nucléophile azoté sur le métal (schéma 3.58).
Ces composés n’ont pas de réactivité électrophile:
K
3PO
4 PARTIE III - CHAPITRE IIIIl a été reporté que des composés diarylfer (II) pouvaient toutefois être obtenus par réaction d’un réactif de Grignard avec un arylfer (II) de type [Ar-‐FeII(N,N)Br].159 Ceci montre que les monoarylfers (II) sont susceptibles de réagir avec des nucléophiles plus forts:
Ar-FeII(tmeda)-X + Ar'-MgBr Ar-FeII(tmeda)-Ar'
-MgBrX tmeda = NMe2
Me2N
Schéma 3.59