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Etude de l‟affinité entre un CBM et un sucre

Chapitre 2 : Matériels et méthodes

I. Etude de l‟affinité entre un CBM et un sucre

Plusieurs techniques existent pour quantifier l‟affinité entre un CBM et son ligand. Il

est possible d‟utiliser des gels d‟affinité (Tomme et al., 2000), de la RMN (Johnson et al.,

1996; Tomme et al., 1996), de mesurer l‟absorbance (Tomme et al., 2000) ou la fluorescence

du CBM, d‟utiliser la microcalorimétrie (Breslauer et al., 1992) ou encore la thermophorèse

(Baaske et al., 2010) pour des ligands solubles. Dans le cas d‟un ligand insoluble, la seule

méthode possible est la « solid state depletion » (Gilkes et al., 1992). Chacune de ces

approches est expliquée ci-dessous.

Des gels d‟affinité sont préparés en incorporant un polysaccharide soluble dans une

matrice de polyacrylamide. La migration du CBM va être retardée si ce CBM a une affinité

pour le polysaccharide par rapport à un gel de polyacrylamide sans polysaccharide. Le retard

de la migration sera proportionnel à la quantité de ligand. Cette méthode permet de cribler

rapidement et à moindre coût les ligands possibles pour un CBM mais également de quantifier

cette interaction (Abbott and Boraston, 2012). Le premier CBM étudié avec cette technique

est le CBM4-1 de la cellulase 9B produite par C. fimi (Tomme et al., 2000). Une large gamme

de polysaccharides peut ainsi être testée (Abou Hachem et al., 2000).

Les premières études entre un CBM et un ligand par RMN datent de 1996 (Johnson et

al., 1996; Tomme et al., 1996). La méthode est basée sur l‟importance des résidus

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aromatiques (tyrosine, tryptophane et phénylalanine) du site de reconnaissance du CBM pour

l‟interaction avec le ligand. Les déplacements chimiques de ces acides aminés aromatiques

clés sont mesurés pour des concentrations croissantes en ligand (Johnson et al., 1996). Un

spectre du proton (

1

H) à une dimension est obtenu pour chaque concentration en ligand. Il est

également possible de travailler avec le spectre de l‟azote 15 (

15

N) si les protéines ont été

marquées lors de leur expression (Johnson et al., 1996). Le ligand peut être un oligosaccharide

comme du cellohexaose (Johnson et al., 1996) ou un xylooligosaccharide (Simpson et al.,

1999). Il est également possible de travailler avec des polymères tels que la cellulose (Bray et

al., 1996; Din et al., 1994b; Nagy et al., 1998) ou des xylanes (Simpson et al., 2000).

Les premiers travaux ont permis de quantifier l‟affinité entre le CBM nommé CBD

N1

de la

β-(1,4)-glucanase CenC de C. fimi avec du cellotetraose, du cellopentaose et du cellohexaose

grâce au signal de la tyrosine Tyr19 du CBD

N1

(Johnson et al., 1996; Tomme et al., 1996). Un

autre exemple est celui du CBM2b1 de la xylanase de C. fimi dont l‟affinité avec du

cellohexaose ou du xylohexaose a été étudiée. Le système HSQC (heteronuclear single

quantum coherence) permet d‟associer un carbone protoné aux hydrogènes qu‟il porte. Les

spectres

1

H-

15

N HSQC (en deux dimensions), ciblant le Trp259 et le Trp291 du CBM ont

permis de quantifier l‟affinité (Bolam et al., 2001; Simpson et al., 1999).

La reconnaissance d‟un ligand par un CBM implique souvent la chaîne latérale d‟un

acide aminé aromatique comme un tryptophane ou une tyrosine, présent dans le site de liaison

du CBM (Bray et al., 1996; Din et al., 1994b; Nagy et al., 1998). Les propriétés

spectroscopiques de ces chaînes latérales sont sensibles à leur microenvironnement.

Lorsqu‟elles interagissent avec des sucres, ces chaînes latérales sont protégées du solvant ce

qui entraine de petites perturbations dans leur profil spectroscopique. Ces changements dans

les propriétés spectroscopiques sont facilement mesurés pour la liaison entre un CBM et un

polysaccharide soluble (Abbott and Boraston, 2012). Le spectre d‟absorbance peut donc être

réalisé toutes les 0,5 secondes et avec une longueur d‟onde entre 250 et 300 nm (Boraston et

al., 2000).

Une variante de cette méthode est basée sur la fluorescence intrinsèque des résidus

aromatiques du CBM si ces résidus sont impliqués dans l‟interaction du CBM avec le ligand.

Le spectre d‟absorbance est réalisé pour chacune des concentrations en ligand entre 300 et

400 nm (F). En parallèle la fluorescence d‟une solution contenant seulement le CBM est

dosée afin de tenir compte du bruit de fond causé notamment par les protéines et le tampon

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(F

0

). La courbe de la fluorescence relative (F/Fo) en fonction de la concentration en ligand

permet de définir la constante d‟association (Abbott and Boraston, 2012).

La méthode « solid state depletion » permet de déterminer les interactions entre un

CBM et des polysaccharides insolubles. L‟adsorption d‟un CBM est observée après une

incubation en présence du ligand puis en mesurant l‟absorbance à 280 nm (Gilkes et al.,

1992). La détermination de l‟adsorption peut également être réalisée par gel d‟électrophorèse

SDS-PAGE. Des réactions sont réalisées avec la même concentration en ligand et des

concentrations en CBM variables. De plus, des échantillons de concentration croissante en

CBM sont préparés mais sans le ligand afin de retirer l‟adsorption des protéines sur le tube ou

leur précipitation (Abbott and Boraston, 2012).

Il existe également une variante de cette méthode, renommée ici solid state depletion basée

sur la fluorescence. Il s‟agit d‟incuber différentes concentrations de CBM en présence d‟une

concentration fixe en ligand. La mesure de la quantité de CBM libre après incubation est

déterminée par fluorescence dans ce cas alors que pour la méthode classique, l‟absorbance à

280 nm est mesurée (McLean et al., 2002).

La microcalorimétrie mesure l‟augmentation (réaction exothermique) ou la diminution

(réaction endothermique) de la température dans une solution régulée lors de l‟ajout du ligand

(Freire et al., 1990). En effet, l‟instrument fournit de l‟énergie pour revenir à la température

de travail. Cette méthode est l‟une des plus anciennes, datant des années 1760 (Breslauer et

al., 1992). Ceci permet de déterminer l‟énergie libre de Gibbs (ΔG), l‟enthalpie (ΔH),

l‟entropie (ΔS) et la stœchiométrie (n) de l‟interaction. Cette technique est utilisée depuis les

années 1980 pour caractériser des protéines (Spokane and Gill, 1981). Le CBM de la

glucanase Cenc de C. fimi a ainsi été testé avec différents cellooligosaccharides et des

glucanes (Tomme et al., 1996). En parallèle, l‟affinité entre le CBM de l‟endoglucanase Cex

de C. fimi et de la cellulose cristalline a été déterminée (Creagh et al., 1996).

La thermophorèse a été utilisée pour la première fois en 1856 d‟après

Jerabek-Willemsen et collaborateurs (Jerabek-Jerabek-Willemsen et al., 2014). La miniaturisation de cette

technique a été mise en place par l‟entreprise Nanotemper (Wienken et al., 2010). La

thermophorèse permet de mesurer le mouvement de molécules lors d‟un gradient de

température. Celui-ci dépend de différentes propriétés comme la taille des molécules, leur

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charge, leur conformation et la couche d‟hydratation (Jerabek-Willemsen et al., 2014). Selon

les molécules étudiées, la source de fluorescence peut être intrinsèque (la chaîne latérale d‟un

tryptophane) ou peut provenir du marqueur attaché à la molécule d‟intérêt comme du

AlexaFluor ou de la molécule en elle-même s‟il s‟agit d‟une molécule fluorescente comme la

GFP (Wienken et al., 2010). Des solutions avec des concentrations en ligand et une

concentration fixe en protéine fluorescente sont préparées pour mesurer à chaque fois la

fluorescente lors du gradient de température (Jerabek-Willemsen et al., 2014). Des

interactions entre des oligonucléotides (Baaske et al., 2010; Wienken et al., 2011), entre ADN

et protéine (Doetsch et al., 2013; Schubert et al., 2012), entre protéines (Arbel et al., 2012; Lin

et al., 2012; Wilson et al., 2012) ou entre une protéine et une petite molécule (Seidel et al.,

2012; Wienken et al., 2010) peuvent être analysées par thermophorèse. Le premier travail

concenrnant l‟affinité entre un CBM et un sucre provient de notre équipe (Wu et al., 2017). Il

est ainsi possible de déterminer une constante d‟affinité ou un EC

50

selon le modèle de Hill.