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1.4 Magnétohydrodynamique et effet dynamo

1.4.1 Equations de la magnétohydrodynamique

La magnétohydrodynamique (Gilbert, 2003; Moffatt, 1978) décrit la dynamique des fluides conducteurs, sensibles aux champs magnétiques. Elle couple donc les lois classiques de Maxwell de l’électromagnétisme aux équations de Navier-Stokes.

L’équation d’induction

Nous rappelons ici les équations de Maxwell décrivant l’évolution des champs d’induction magnétique ~B et électrique ~E, pour un milieu non ferromagnétique de permittivité électrique ǫ et de perméabilité magnétique µ uniformes :

~ ∇. ~E = η ǫ (1.1) ~ ∇. ~B = 0 (1.2) ~ ∇ × ~B = µ~j + µǫ∂ ~E ∂t (1.3) ~ ∇ × ~E = −∂ ~B ∂t (1.4)

Nous avons introduit la densité de charges η et la densité de courants ~j. Le signe « × » désigne le produit vectoriel. Rappelons également que la célérité c des ondes électromagnétiques dans le milieu considéré est donnée par c2 = (ǫµ)−1. Des équations 1.1 et 1.3, on retrouve l’équation qui

exprime la conservation de la charge : ∂η

∂t + ~∇.~j = 0 (1.5)

(1.6) A ce stade, il manque toujours une relation constitutive permettant de relier la densité de courant ~j au champ électromagnétique. Nous considérons pour notre part des fluides conducteurs qui obéissent à la loi d’Ohm pour des milieux de conductivité électrique σ. La loi d’Ohm s’obtient dans le référentiel où le milieu considéré est au repos.

~j = σ ~E (1.7)

Nous considérons des systèmes où les échelles de variations temporelles sont lentes vis-à- vis des phénomènes électromagnétiques. Cela revient à négliger la finitude de la vitesse de la

1.4. Magnétohydrodynamique et effet dynamo 143 lumière, et à se placer dans l’approximation quasi-statique où le champ magnétique domine. On élimine ainsi la contribution des courants de déplacement µǫ∂ ~E

∂t dans l’équation 1.3, introduite

par Maxwell pour satisfaire la conservation de la charge dans les régimes dépendants du temps. Nous utilisons donc le jeu d’équations « pré-maxwelliennes », et la conservation de la charge (équation 1.6) devient simplement ~∇.~j = 0.

Nous allons maintenant considérer les mouvements du conducteur, sous la forme du champ de vitesse ~v. Les équations de Maxwell sont invariantes par les transformations de Lorentz, et le champ électromagnétique n’obéit pas aux formules classiques de changement de référentiel galiléennes. Dans l’approximation quasi-statique magnétique qui nous concerne ici, le passage à la limite des formules de changement de référentiel conduit aux relations suivantes :

~ E′ = E + (~v × ~~ B) ~ B′ = B~ ~ j′ = ~j

Les primes désignent les quantités exprimées dans le référentiel en mouvement à la vitesse ~v par rapport au référentiel du laboratoire où l’on observe les quantités ~E, ~B et ~j. Cela nous permet donc d’exprimer la loi d’Ohm (équation 1.7) dans le référentiel du laboratoire. On peut maintenant remplacer ~j par son expression dans l’équation (1.4). On prend ensuite le rotationnel de cette équation, puis on utilise l’équation de Faraday 1.2 et l’identité ~∇ × (~∇×) = ~∇(~∇.) − ∆ pour enfin obtenir l’équation d’induction, qui explicite le couplage entre le champ magnétique et l’écoulement du fluide conducteur :

µσ ∂ ~B

∂t = µσ ~∇ × (~v × ~B) + ∆ ~B (1.8) On prend maintenant une échelle des longueurs L, une échelle des vitesses V, une échelle des inductions magnétiques B et une échelle des temps T afin d’adimensionner nos équations. On obtient :

µσL2

T ∂ ~B

∂t = µσVL ~∇ × (~v × ~B) + ∆ ~B (1.9) L’équation est linéaire en ~B et l’échelle caractéristique B n’a plus cours. Les conditions expérimentales nous donnerons une vitesse et une longueurs caractéristiques V et L. Le choix de l’échelle de temps reste libre. On pourrait choisir :

– T = L/V — temps d’advection d’une perturbation du champ magnétique.

– T = µσL2 — temps de diffusion du champ magnétique dans le fluide conducteur.

C’est cette dernière échelle de temps, la plus « lente » de manière générale, que nous utilise- rons pour étudier le comportement à grande échelle du champ magnétique dans l’écoulement. L’équation 1.9 prend la forme suivante :

∂ ~B

∂t = µσVL ~∇ × (~v × ~B) + ∆ ~B (1.10) L’équation est une équation différentielle du premier ordre en temps, avec un seul paramètre adimensionnel égal à µσLV. Ce nombre sans dimension « mesure » le poids de l’advection du champ magnétique par rapport au poids de la diffusion. Nous l’appelerons «nombre de Reynolds

magnétique», le noterons Rm, et écrirons donc pour notre cas l’équation d’induction sous la forme

suivante :

∂ ~B

∂t = Rm∇ × (~v × ~~ B) + ∆ ~B (1.11) sous la contrainte de l’équation 1.1 de non divergence de ~B qui traduit l’inexistence de monopoles magnétiques. L’évolution du champ d’induction magnétique va être gouvernée par deux termes :

– un terme de diffusion ∆ ~B qui va tendre à dissiper le champ.

– un terme en ~∇ × (~v × ~B), dont l’importance relative est mesurée par Rm, et dont nous

allons expliciter les effets en remarquant que cette équation est du même type que celle de la vorticité en hydrodynamique (Rieutord, 1997; Saffman, 1992). On peut alors écrire l’équation sous une forme équivalente, valable pour un écoulement incompressible.

∂ ~B

∂t + Rm (~v · ~∇) ~B = Rm ( ~B · ~∇)~v + ∆ ~B (1.12) Les deux premiers termes du membre de gauche correspondent à l’advection d’un vecteur passif par un écoulement, et le dernier terme représente la diffusion. Le terme en Rm ( ~B · ~∇)~v quant-à lui montre que le vecteur induction magnétique peut être « étiré » par les gradients de vitesse. Le terme de diffusion, lui, tend toujours à dissiper l’énergie magnétique. La solution triviale de cette équation est ~B = ~0. Son analyse de stabilité linéaire pour une topologie de champ de vitesse prescrite peut conduire à l’existence d’un seuil Rc

m à partir duquel l’advection

est suffisante pour que l’étirement d’une petite perturbation du champ ~B provoque la croissance du champ induit. Cette instabilité linéaire de la solution triviale ~B = ~0 pour un champ de vitesse donné est ce que l’on nomme «effet dynamo cinématique». Nous reviendrons par la suite sur des exemples de mécanismes permettant l’effet dynamo, et sur des théorêmes interdisant l’effet dynamo pour certaines symétries, notamment du champ de vitesse.

Cette équation étant linéaire en ~B, l’instabilité ne peut saturer. Nous trouverons en fait une réponse à ce problème en considérant la rétroaction du champ magnétique sur le champ de vitesse du fluide conducteur.

Prise en compte de l’action d’un champ magnétique sur l’écoulement d’un fluide conducteur Nous ne considérerons dans la suite que des fluides newtoniens en écoulement incompressible. Les équations descriptives du mouvement sont les équations de Navier-Stokes, écrites en page 19 (Eqs. 1.1 et 1.2). Dans ces équations nous avions écrit la résultante des forces de volume par unité de masse sous la forme ~f . Nous allons expliciter ce terme, en supposant notre fluide non pesant. L’expression de la force exercée par le champ magnétique est donnée par la loi de Laplace : ρ ~f = ~j × ~B. En utilisant l’équation 1.3, on remplace ~f par son expression dans l’équation de conservation du moment, et on obtient la formulation suivante :

∂~v ∂t + (~v · ~∇)~v = − 1 ρ∇(p +~ B2 2µ) + 1 ρµ( ~B · ~∇) ~B + ν∆~v (1.13) On choisit maintenant de travailler avec Π = Rm(p + B2

2µ) au lieu de p, c’est-à-dire que l’on

inclut un nouveau terme d’origine magnétique dans la pression, et on écrit les équations dans les variables adimensionnelles choisies plus haut. On prend pour échelle de pression P = ρV2, et

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∂~v

∂t + Rm (~v · ~∇)~v = Rm ( ~B · ~∇) ~B − ~∇Π + Pm∆~v (1.14) Pm est le nombre de Prandtl magnétique du milieu considéré, et exprime le rapport des

coefficients de diffusion du champ magnétique et de la quantité de mouvement : Pm = µ0σν. On

remarque alors que Rm= RePm, avec Re = LUν le nombre de Reynolds cinétique de l’écoulement.

Dans la plupart des cas, un ordre de grandeur du seuil de la dynamo est Rc

m ≃ 100. Dans

le cas du sodium liquide, Pm est de l’ordre de 10−5, ce qui signifie que les perturbations du

champ magnétique diffusent dans l’écoulement beaucoup plus rapidement que les perturbations du champ de vitesse. On déduit aussi de ces ordres de grandeur que le nombre de Reynolds cinétique au seuil de la dynamo est de l’ordre de 106 à 107. L’écoulement est donc en général

fortement turbulent au seuil de la dynamo.

Le rôle des forces de Laplace qui apparaissent en présence de champ magnétique est d’assurer la saturation d’un éventuel effet dynamo.

En conclusion, on peut rappeler les quatre équations de la magnéto-hydrodynamique sous forme adimensionnelle. On n’oubliera pas d’y adjoindre les conditions aux limites de non glisse- ment pour le fluide visqueux, et les conditions aux limites pour le champ ~B qui dépendront de la conductivité électrique et de la perméabilité magnétique de l’enveloppe et du milieu extérieur :

~ ∇. ~B = 0 ∂tB~ = Rm ∇ × (~v × ~~ B) + ∆ ~B ~ ∇.~v = 0 ∂t~v + Rm (~v · ~∇)~v = Rm( ~B · ~∇) ~B + Pm∆~v − ~∇Π

Notons que si le couple {~v, ~B} est solution de ce problème, le couple {~v, − ~B} est également solution. La théorie de l’effet dynamo est donc bien compatible avec les inversions de polarité observées pour le champ magnétique de la Terre.