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Matériels et méthodes

1 .RAPPELS DE PHYSIOPATHOLOGIE :

4. DISCUSSION DES RESULTATS :

4.3 Epidémiologie microbienne :

Dans notre série, 51,9% des cultures étaient polymicrobiennes. Les cultures des prélèvements profonds et superficiels étaient polymicrobiennes respectivement dans 56% et 49,1% des cas. Une étude algérienne portant sur 183 cas d’IPD a également rapporté que l’infection était polymicrobienne dans 92 cas [45].

En effet, la majorité des infections aigues du pied diabétique sont monomicrobiennes, tandis que les infections chroniques, ou traitées au préalable par des antibiotiques s’avèrent souvent polymicrobiennes, associant des bactéries à Gram positif et négatif , aérobies et anaérobies [46-48].

En effet, nous avons noté que parmi les cultures polymicrobiennes 46,8% associaient les bacilles à Gram négatif et les cocci à Gram positif. Le nombre moyen d’isolats par culture était de 1.54 ± 0,9. Ce taux se rapproche de celui de l’étude rétrospective d’Al Benwan et al (1,8) [34].

La littérature médicale rapporte que les IPD sont dominées par les bactéries à Gram positif. Ces bactéries représentaient respectivement 57,2% et 66% des isolats dans l’étude de Citron et al et Mendes et al [49, 33].

Dans notre étude, les bactéries à Gram négatif et celles à Gram positif ont été isolées à des taux relativement égaux (48,4% vs 49,2%). De même, une revue systématique des études épidémiologiques réalisées pendant 20 ans en Turquie a également mis en évidence l’isolement des bactéries à Gram positif et à Gram négatif à des fréquences équivalentes [50].

En effet, les études des infections du pied diabétique réalisées dans des pays tels que la France, les Etats Unis et le Royaume Uni ont affirmé une large prédominance des bactéries à Gram positif, en particulier de l’espèce

Staphylococcus aureus. A l’opposé, dans certains pays en développement

notamment l’Inde , la Turquie , le Koweit , la Malaisie et l’Algérie , de nombreuses enquêtes épidémiologiques récentes ont rapporté la prépondérance des bactéries à Gram négatif (les entérobactéries et Pseudomonas aeruginosa) dans les IPD [34,45,51-54] .

Cette disparité géographique n’est pas encore expliquée. Elle serait liée à des facteurs environnementaux climatiques, à la prise préalable d’antibiotiques ou aux pratiques d’hygiène personnelle ou de chaussage. Des facteurs techniques de prélèvements ou de culture pourraient également être à l’origine de cette différence [12 ,47].

Le tableau suivant représente l’épidémiologie bactérienne des infections du pied diabétique rapportée par les auteurs dans certains pays.

Tableau VII : Epidémiologie bactérienne des IPD dans différents pays

Auteurs (année) Pays BGN (%) BGP(%) Espèce prédominante (Taux)

Shankar et al(2005) Inde 57,6 42,3 Pseudomonas aeruginosa (29.8%) Gadepalli et al (2006) Inde 51 33 Staphylococcus aureus (13,3%) Raja et al (2007) Malaisie 52 45 Staphylococcus aureus (17%) Mendes et al (2011) Portugal 19 66 Staphylococcus aureus (36,7%) Al Benwan et al (2012) Koweit 51,2 32,3 Staphylococcus aureus (18,5%) Notre étude (2014) Maroc 48,4 49,2 Staphylococcus aureus (13.3%)

BGN : Bactéries à Gram négatif ; BGP : Bactéries à Gram positif

Staphylococcus aureus était l’espèce la plus fréquemment isolée dans

notre série, représentant 13,3% des isolats. Un résultat similaire a été rapporté par Gadepalli et al, Citron et al [35,49]. En effet, S. aureus est le pathogène le plus fréquent et le plus virulent dans les IPD, seul ou au sein d’une population polymicrobienne [27].

Néanmoins, le taux de S .aureus dans notre étude reste relativement faible, comparé à ceux notés par Richard et al (32,5%) et Mendes et al (36 ,7%). Cette différence serait liée à la proportion importante des bactéries à Gram négatif dans les IPD dans notre série [32,33].

Les streptocoques ont constitué 11,5% de l’ensemble des isolats. Richard et al ont également rapporté que les streptocoques représentaient 14% des isolats [32]. Les streptocoques ont été isolés chez 41% des patients dans l’étude de Citron et al, Streptococcus agalactiae représentant près de la moitié de ces bactéries [49].

En effet, les streptocoques béta hémolytiques et S.aureus sont reconnus comme étant les principaux pathogènes des infections aigues du pied diabétique [27].

Les staphylocoques à coagulase négative (SCN) représentaient 9% de nos isolats. Dans la série de Citron et al, ces bactéries représentant 15,3 % des isolats ont été les plus fréquemment isolées après Stapyhlococcus aureus tandis qu’elles n’ont représenté que 4,6 % des isolats dans l’étude prospective de Richard et al. La variabilité des taux des isolats de SCN serait liée aux modalités de prélèvements dans les études, ces microorganismes étant de la flore commensale de la peau, contaminant souvent les prélèvements [32,49].

Dans notre série, les entérocoques ont représenté 8,9% des isolats. Ce taux est en accord avec ceux rapportés par Mendes et al (8%), Richard et al (8%) et Citron et al (9,6%) [32, 33, 49]. Une étude réalisée sur les IPD en Iran auprès de 149 patients a rapporté la prédominance du genre Enterococcus représentant 21,4% des isolats [55]. Ces bactéries sont fréquemment isolées dans les IPD chez les patients traités préalablement aux céphalosporines. Néanmoins, selon une étude clinique, elles sont considérées comme des contaminants d’une importance clinique secondaire [56].

Nous avons également relevé la présence de Corynebacterium spp constituant 5% des isolats. Ces bactéries ont été isolées par Mendes et al dans 8,2% des cas et par Richard et al seulement dans 2,3% des cas. Dans la série d’Al Benwan et al, aucun isolat de Corybacterium spp n’a été rapporté [32-34].

Parmi les bactéries à Gram négatif, nous avons noté la prédominance des entérobactéries représentant 35,1% des isolats .Enterobacter spp , Proteus spp et

E.coli étaient majoritaires représentant respectivement 24,7% , 21,6% et 21,6%

des entérobacteries et 8,7%, 7,6% ,7,6% de l’ensemble des isolats .

Nos résultats corroborent ceux rapportés dans les études de Ozer et al et Al Benwan et al où les entérobactéries représentaient respectivement 36,7% et 28,5% des isolats [34,57]. Dans une étude algérienne récente, les entérobactéries étaient également les principaux pathogènes représentant 43,7% des isolats [45]. Ces études ont aussi noté une forte proportion de Klebsiella spp, Proteus spp et Escherichia coli.

Dans notre série, Pseudomonas aeruginosa a représenté 8,2% des isolats. Néanmoins, les données microbiologiques révèlent sa fréquence élevée dans les IPD en Inde. L’étude récente de Ramakant et al portant sur 447 cas d’IPD a mis en évidence la prédominance de Pseudomonas aeruginosa avec un taux de 16,9% [53]. De même, Turhan et al étudiant les plaies infectées du pied diabétique ont rapporté que 61,3% des isolats étaient des bactéries à Gram négatif, Pseudomonas aeruginosa étant l’espèce prédominante (29,8%) [54]. Cette bactérie est fréquemment isolée des plaies du pied diabétique, en particulier dans les pays à climat chaud favorisant la macération des plaies, ou en cas d’application de pansements humides ou de bains de pieds [47,13].

Nous avons également noté la présence de onze souches d’Acinetobacter

baumanii représentant 3,9% des isolats. Des taux similaires ont été rapportés par

l’étude de Ramakant et al (3,7%), Djahmi et al (2,9%) et Turhan et al (2,6%) [45, 53,54].

La prédominance des entérobactéries notamment Enterobacter spp, et des bacilles à Gram négatif non fermentants souvent incriminés dans les infections nosocomiales, serait liée à un séjour hospitalier, et ou un traitement antimicrobien antérieurs chez les patients inclus dans notre étude.

Les anaérobies stricts sont plus fréquents dans les plaies avec une nécrose ischémique ou atteignant les tissus profonds. Ils sont rarement les seuls pathogènes et le plus souvent font partie d'une infection mixte avec des aérobies [12,13]. Les études rapportent que Peptostreptococcus spp et Bacteroides

fragilis sont les agents anaérobies prédominants dans les IPD [58]. Bien que

l’examen direct ait été en faveur d’une infection anaérobie dans 20,4 % des prélèvements, aucune bactérie anaérobie stricte n’a été mise en évidence dans notre série. Ceci est du à la difficulté d’isolement de ces bactéries nécessitant des conditions particulières de prélèvement, de transport et de culture.