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Matériels et méthodes

1 .RAPPELS DE PHYSIOPATHOLOGIE :

4. DISCUSSION DES RESULTATS :

4.4 Épidémiologie microbienne selon le type de prélèvement :

De façon globale , la différence de la répartition des isolats entre les deux types de prélèvements n’était pas statistiquement significative (p=0,141).

Les entérobactéries étaient plus prédominantes dans les prélèvements superficiels que dans les prélèvements profonds représentant respectivement 37,2% et 28,8% des isolats. La prédominance de l’espèce Staphylococcus

aureus a été notée aussi bien dans les prélèvements profonds (12%) que ceux

superficiels (14,3%).

Les taux d’isolement des staphylocoques à coagulase négative dans les deux groupes de prélèvements étaient relativement similaires (8, 3% vs 9,6 %). Le même fait a été noté pour les corynébactéries représentant 4,5 % des isolats dans les prélèvements superficiels et 5,6% de ceux des prélèvements profonds. Le rôle pathogène de ces bactéries commensales dans les IPD est controversé.

Néanmoins, dans leur étude, Citron et al ont noté que certains staphylocoques à coagulase négative (S.haemolyticus, S.lugdunensis et S.

simulans) et Corynebacterium striatum ont été plus fréquemment isolés sur des

biopsies tissulaires que sur des écouvillons [49].

Récemment, ces bactéries ont été incriminées dans l’ostéite du pied diabétique. Senneville et al ont retrouvé que les staphylocoques à coagulase négative étaient largement plus fréquemment isolés à partir de prélèvements osseux que dans les écouvillons (25.6% vs. 4.6%; p<0.001) [39]. Un travail récent a montré à l’aide de données microbiologiques confrontées à l’analyse histologique que Staphylococcus epidermidis pouvait être un pathogène authentique au cours de l’OPD [59]. Cette bactérie est en effet reconnue comme étant un véritable pathogène dans les infections osseuses du pied diabétique [29]. Cet agent est aussi incriminé dans les infections des plaies par la production de protéases, de peptidases et par formation de biofilms permettant son adhésion aux tissus lésés [49].

Les corynébactéries ont également été isolées sur des prélèvements osseux peropératoires dans des cas d’OPD rapportés par certains auteurs [49]. Une étude génétique récente a démontré que ces bactéries constituent une part importante du biofilm formé au niveau des plaies chroniques du pied diabétique [60].

Ces bactéries commensales appartenant à la flore cutanée résidente, sont souvent considérées comme des agents colonisants, dénués de virulence. Or, leur présence sur des prélèvements profonds reconnus plus fiables, ferait évoquer leur implication dans les infections du pied diabétique [61].

De même, les bactéries moins virulentes notamment Enterococcus spp et

Pseudomonas aeruginosa posent un problème lors de la documentation des

IPD. Selon les recommandations de l’IDSA et de l’IWGDF, elles ne devraient pas être visées d’emblée dans l’antibiothérapie de première intention des IPD, étant fréquemment isolées dans des cultures polymicrobiennes [12,13].

Dans notre série, parmi 23 isolats d’Enterococcus spp, deux souches ont été isolées sur des cultures monomicrobiennes. Néanmoins, ces bactéries représentaient 12% des isolats dans les prélèvements profonds et seulement 6% dans ceux superficiels.

Concernant Pseudomonas aeruginosa, celui-ci a été plus fréquemment isolé dans les prélèvements superficiels que dans les prélèvements profonds (9,7% vs 6,4%). Parmi les 23 isolats de cette bactérie, six ont été retrouvés dans des cultures pures.

L’intérêt pathologique de cette bactérie dans les IPD est discutable. D’ une part, une étude récente a démontré qu’elle était plus prévalente dans les plaies chez les sujets diabétiques que chez les sujets non-diabétiques [62]. D’autre part, des études cliniques ont rapporté que des sujets atteints d’IPD répondaient favorablement à des traitements antibiotiques inactifs sur P. aeruginosa bien que cette bactérie ait été isolée [63,64].

Globalement, l’incrimination des bactéries commensales de la peau ou peu virulentes telles que les staphylocoques à coagulase négative, les corynébactéries, les entérocoques et P. aeruginosa dans les IPD est débattue. Leur isolement pose un problème d’interprétation, car il peut s’agir d’agents

Ces bactéries considérées souvent comme non pathogènes sont des opportunistes possédant un potentiel de virulence qu’elles pourraient éventuellement manifester chez les patients dont les défenses immunitaires sont compromises en l’occurrence, les sujets diabétiques. Selon les experts, leur pathogénie est évoquée si elles sont isolées à partir de prélèvements fiables, à plusieurs reprises ou si l’état septique du patient est inquiétant [12, 13, 49, 27].

En effet, l’interprétation des résultats de culture doit tenir compte des modalités de prélèvement et de l’évolution clinique après l’instauration de l’antibiothérapie empirique. Les prélèvements profonds effectués à distance d’une antibiothérapie, conditionnés et transportés dans les conditions adéquates faciliteraient la détermination du (des) véritable(s) agent(s) pathogène(s)[11-12].

Dans une étude réalisée au centre hospitalier universitaire de Nîmes , évaluant l’impact de la mise en place de protocoles diagnostiques et thérapeutiques en 2003 dans le cadre d’une approche multidisciplinaire de la prise en charge des IPD , des changements quantitatifs et qualitatifs ont été notés sur le plan microbiologique . En privilégiant les prélèvements profonds, le nombre moyen de bactéries isolées par prélèvement a diminué de 4,1 à 1,9 de 2003 à 2007. Le taux des bactéries de la flore commensale ou à faible potentiel de virulence est également passé de 40,1% en 2003 à 16,4 % en 2007. Parallèlement, le taux de bacilles à Gram négatif a diminué régulièrement durant cette période alors que le taux des cocci à Gram positif a augmenté [65].

Les plaies chroniques étant souvent colonisées par un groupe varié de microorganismes, il est possible que les agents isolés sur des prélèvements superficiels ne représentent pas les pathogènes à l’origine de l’infection. A ce jour, il n’existe pas de méthode microbiologique permettant de distinguer les

Récemment, le recours aux techniques moléculaires dans l’étude des IPD a amélioré la connaissance de leur écologie microbienne. Les méthodes récentes étudiant le gène codant pour l’ARNr 16S des microorganismes ont mis en évidence la biodiversité bactérienne des plaies du pied diabétique. Ces techniques ont révélé des communautés bactériennes plus complexes que celles identifiées par les techniques conventionnelles de culture [66,67].

L’avènement de la métagénomique a également révolutionné la microbiologie clinique. Cette nouvelle approche permet le séquençage de l’ensemble du contenu génétique d’échantillon provenant directement d’un environnement complexe, en l’occurrence la flore des plaies du pied diabétique [68].

Les études génétiques ont permis de conclure que les bactéries forment souvent un biofilm au niveau des plaies chroniques du pied diabétique. Actuellement deux hypothèses concernant le rôle pathogène des bactéries isolées au niveau des plaies du pied diabétique sont discutées. La première suggère que seules quelques espèces bactériennes du biofilm sont impliquées dans le processus infectieux. A l’opposé, la deuxième hypothèse considère que la flore microbienne du biofilm forme une unité fonctionnelle. Ce concept a conduit à l’usage du terme « functionnally equivalent pathogroups » FEP. Cette théorie postule que certaines espèces bactériennes habituellement non pathogènes ou incapables de causer une infection individuellement pourraient former un biofilm et agir en synergie occasionnant une infection chronique [69].

L’étude moléculaire a également permis d’évaluer la virulence des bactéries isolées au niveau des plaies du pied diabétique. En effet, le profil de virulence de Staphylococcus aureus au niveau des ulcères du pied diabétique a été étudié en utilisant une technique innovante de biopuces à ADN [70]. Récemment, une étude similaire de Sotto et al a montré l’existence de souches colonisantes de S.aureus appartenant au complexe clonal CC5/ CC8. Ces souches ont été isolées plus fréquemment à partir de plaies non infectées du pied diabétique. Ces données suggèrent que les techniques de biologie moléculaire serraient un outil avantageux dans la documentation des IPD, permettant de distinguer les plaies infectées de celles colonisées [71].