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Les enseignements du terrain : comment renforcer le rôle de la fonction RH dans

PARTIE V : ENSEIGNEMENTS DU TERRAIN ET

1. Les enseignements du terrain : comment renforcer le rôle de la fonction RH dans

Etant donné que nous avons pu interviewer des spécialistes de la fonction RH à la fois chez des donneurs d’ordres et des preneurs d’ordres, nous distinguons les deux cas dans nos enseignements du terrain pour renforcer le rôle de la fonction RH :

a. Cas de la fonction RH du donneur d’ordres Ø créer du lien social entre les salariés internes et externes

Dans le cas de sous-traitance en cohabitation avec les salariés du donneur d’ordres, la fonction RH de ce dernier peut contribuer à créer du lien social afin de favoriser la coopération et le transfert de compétences entre les deux entreprises. Pour cela, les acteurs de l’entreprise doivent se sentir intégrés. Or si l’environnement de travail ne fournit pas le « soutien social » suffisant, alors l’individu n’aura d’autre choix que de se « détacher ».

Alter168propose, sur ce sujet, trois principes d’action pour produire l’efficacité

collective :

– « faire preuve de gratitude, quelles que soient les formes de cette preuve, signifie que le management reconnaît ce que les salariés donnent plus que ce qu’indique le contrat de travail;

– mais reconnaître suppose préalablement de connaitre la réalité du travail fourni et des relations de coopération; une partie du temps consacré à la prescription des tâches et des procédures de coordination, réinvestie dans l’observation et la valorisation des ressources réellement disponibles, devient alors une décision logique et peu coûteuse ;

167ASTREES LAB – L’entreprise « étendue », une réalité sociale émergente – Les enseignements d’AstreesLab – Avril 2013

168Alter Norbert, « Don, ingratitude et management » Suicide et désengagement au travail, Revue

– la dissociation croissante entre le management en aval et le management en amont, qui empêche les directions des entreprises de connaître la valeur réelle des ressources humaines, qui favorise la mise en œuvre de décisions «dogmatiques » et qui détermine le « détachement », doit être réduite par l’appel à la capacité critique, la capacité à faire la clarté sur la réalité de ce qu’engagent les différents acteurs au travail. »

D’autres actions plus concrètes visant à créer du lien, peuvent se traduire par l’accès pour les salariés du sous-traitant aux mêmes avantages en nature (tels que par exemple : l’accès à une salle de sport réservée aux salariés internes, alignement du montant des tickets restaurants, invitation à des pots de départ…).

On peut ainsi noter l’accès aux services de la conciergerie pour l’une des entreprises interogées, ainsi que la bonne pratique de mise en place d’un numéro vert pour les sous- traitants, géré par la fonction RH du donneur d’ordre, qui donne une autre possibilité d’expression de la parole, ainsi que l’existence de comités inter-entreprises sur le site du donneur d’ordre.

Cependant créer du lien social ne doit pas revenir pour le donneur d’ordres à porter les responsabilités du sous-traitant ni à le freiner dans l’exercice de son rôle de gestion et de contrôle des prestations rendues. De plus la fonction RH du donneur d’ordres doit veiller à l’écueil juridique de l’ingérence!

Ø considérer la sous-traitance dans son périmètre de gestion

Nous avons vu, lors de notre enquête terrain, qu’il est important pour la fonction RH du donneur d’ordres de considérer la sous-traitance dans son périmètre de gestion, notamment:

- dans le domaine légal, en prenant en compte le volet juridique associé à la sous- traitance.

- dans le domaine RSE, en co-construisant avec les parties prenantes internes et externes à l’entreprise une démarche RSE en amont et en aval du choix du prestataire qui permette de prévenir les difficultés sociales chez les prestataires et celles économiques pour le donneur d’ordres qui en découlent.

Deux des entreprises interrogées ont intégré à leur organisation des fonctions dédiées – et internes à la DRH dans l’une d’elles -aux relations avec les prestataires. Ces fonctions permettent d’adresser certains des enjeux inhérents au recours à la sous-traitance. La fonction RH peut aussi être force de proposition dans la détection et la sélection des profils aptes à assumer de telles fonctions, ainsi que dans les formations complémentaires à leur offrir.

La réalité du travail étant complexe, les personnes qui ont la charge des relations interentreprises ont besoin, pour les appréhender au mieux, d’une approche à caractère pluridisciplinaire avec des préoccupations liées à la régulation sociale. Ce n’est pas uniquement une affaire d’experts techniques.

Ø gérer les compétences des interfaces

Les interfaces avec les salariés des preneurs d’ordres sont des personnes clés. Il est important que la fonction RH s’assure de la formation, voire du coaching de ces « hommes – orchestres » afin de favoriser la bonne coopération avec le preneur d’ordres. Nous avons vu également que, dans le cas de sous-traitance dans des pays de cultures différentes, il est essentiel que ces interfaces aient des compétences interculturelles afin de faciliter la mise en place de la démarche RSE et le transfert de compétences chez les sous-traitants.

Ø s’assurer de la formation du personnel sous-traitant

En effet, si l’entreprise donneuse d’ordres veut se prémunir des accidents du travail du personnel sous-traitant - avec toutes les conséquences que cela peut engendrer : conséquences humaines, sur la réputation du DO, conflits sociaux….-, mais aussi se prémunir des problèmes liés à la qualité, la fonction RH doit s’assurer que les sous- traitants suivent bien les formations requises, et éventuellement mettre à disposition une partie de son personnel à ce dessein, voire ses équipements de formation, et peut également contribuer à un dispositif de formation par alternance en partenariat avec son sous-traitant.

Ø agir en tant que partenaire stratégique du dirigeant

La fonction RH, en tant que « Business Partner » selon la matrice de Dave Ulrich, doit participer à la stratégie de « socialisation »169 (Wathne et Heide, 2000) qui vise à lutter

contre l’opportunisme du preneur d’ordres en promouvant des objectifs convergents entre les différentes parties et en évitant de se mettre en relation avec un prestataire qui n’a pas la même conception de l’action. Il est important que la fonction RH soit en mesure de communiquer auprès de son dirigeant – selon son niveau de maturité RH - mais aussi auprès des opérationnels sur les conséquences sociales possibles du choix de tel prestataire, et soit bien sûr entendue !

b. Cas de la fonction RH du preneur d’ordres

Certains des enseignements que nous avons retirés pour que la fonction RH joue un rôle plus important dans la gestion de la relation DO-ST sont symétriques, ou en liaison, avec ceux de la fonction RH du preneur d’ordres :

169BOISSINOT Aline, « Le management des prestataires : vers une approche personnalisée de la relation ? », 2008, Université de la Méditerranée (Aix-Marseille II)

Ø contribuer à l’établissement d’un climat de confiance

En liaison avec notre premier enseignement pour la fonction RH du donneur d’ordres, il s’agit pour le preneur d’ordres de renforcer le lien commercial avec le donneur d’ordres via le développement de relations interpersonnelles (on revient à la création de lien social précédemment développée) et l’instauration d’un climat de confiance qui favorisera la collaboration à tous les niveaux de fonctions. Ceci est également valable au niveau de la fonction RH qui peut être amenée à collaborer avec la fonction RH du donneur d’ordres en la conseillant par exemple sur l’impact d’une externalisation, comme nous l’avons vu au cours de l’enquête terrain.

Ø gérer les compétences pour satisfaire les exigences du client

Symétrique du troisième enseignement du paragraphe précédent, il s’agit pour la fonction RH du preneur d’ordres de recruter les compétences nécessaires et s’assurer que ses salariés sont correctement et suffisamment formés afin de satisfaire aux exigences du client en matière de qualité, d’environnement mais aussi de santé et de sécurité au travail.

Ø agir en tant que partenaire stratégique du dirigeant

Symétrique du cinquième enseignement du paragraphe précédent, la DRH du preneur d’ordres doit anticiper l’acquisition de nouveaux marchés ou la perte de certains contrats clients en collaborant d’une part avec le donneur d’ordres et en s’impliquant dans la stratégie de son entreprise pour ensuite la décliner en enjeux RH tels que le recrutement ou le redéploiement de personnel selon les situations.