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Bien que le concept de bioréacteur soit aujourd’hui internationalement reconnu comme l’une des principales alternatives pour le traitement "durable" des OM, la mise en appli- cation à l’échelle industrielle est encore jeune et le retour d’expérience encore faible. Dans son état de l’art sur les techniques de stockage de type bioréacteurs, Reinhart et al. (2002) mentionnent par exemple que quelques 130 sites pratiquent la recirculation de lixiviats aux Etats-Unis. L’ensemble de ces sites fait l’objet d’études et les données collectées sont uti- lisées par l’Agence de Protection de l’Environnement américaine (US EPA) pour orienter les programmes de recherche et tenter de donner une certaine normalisation aux procé- dés et techniques utilisées (US EPA, 2002) . Néanmoins, comme le mentionnent Benson et al. (2005, 2007), le suivi et l’instrumentation des sites restent encore trop aléatoire ou insuffisant. Hormis quelques sites comme celui de Yolo County, très peu de ISD bioréac- teurs font l’objet d’un suivi poussé. De même en Europe, et en particulier en France, le concept de ISD bioréacteur devient petit à petit une alternative aux méthodes classiques de traitement des OM, et le cadre législatif encadrant les pratiques de type bioréacteur prend forme. Ainsi, l’arrêté ministériel du 19 janvier 2006 complétant l’arrêté de 1997 mentionne la possibilité d’utiliser "la re-circulation de lixiviats destinée à accroître la cinétique de production de biogaz". A l’échelle industrielle quelques sites de type bio- réacteur (La Vergne, Sydom du Jura) sont en fonctionnement en France. Néanmoins, le manque de retour d’expérience à l’échelle des sites en post-exploitation ne permet pas d’apporter la confirmation des résultats obtenus en laboratoire et de fournir une norma- lisation concernant les pratiques à mettre en œuvre sur site de façon à obtenir le résultat escompté.

Prenons l’exemple des bioréacteurs anaérobies qui utilisent le principe de réinjection de lixiviats comme "catalyseur" des procédés de biodégradation. Dans ce type d’installation, la gestion optimisée des processus de réinjection est primordiale pour le bon fonction- nement du site. Un nombre de paramètres important permet de gérer les procédés de réinjection, mais le débit, la fréquence et le type de dispositif utilisé sont les principaux. En ce qui concerne les dispositifs de réinjection, aucune normalisation n’existe et diffé- rents systèmes sont utilisés. Nous pouvons distinguer trois grands types de systèmes de réinjection.

Aux Etats-Unis, par exemple, la majorité des ISD pratiquant la recirculation de lixi- viats utilisent un réseau de drains horizontaux, qui permet en théorie d’obtenir une ré- partition plus homogène des quantités réinjectées dans le plan horizontal (Reinhart et al., 2002). Néanmoins, ce type de dispositif, suivant la façon dont il a été conçu, peut po- ser un certain nombre de problèmes pendant l’exploitation des ISD bioréacteurs. Le plus important de ces problèmes est le risque de détérioration du réseau au cours du temps, du fait des tassements différentiels parfois importants que l’on peut observer sur site. Ces différences de tassements locales peuvent être liées à la modification structurelle du déchet du fait de l’addition d’eau dans les zones de réinjection ou du fait de l’action de la bio- dégradation (US EPA, 2002; Olivier, 2003). De plus, dans le cas où l’on utilise des drains de réinjections horizontaux, il est nécessaire d’installer le dispositif à la conception même de l’ISD, ce qui peut s’avérer contraignant. Comme le signalent Benson et al. (2005), sous l’impulsion de l’US EPA, l’ensemble des ISD bioréacteurs américains bénéficie d’une certaine normalisation des pratiques, excepté pour le dimensionnement et l’exploitation des réseaux de réinjection de lixiviat.

Afin de s’affranchir du risque de dégradation par tassements des réseaux de réinjection, il est possible d’utiliser un réseau de recirculation vertical. Cette technique est moins populaire que la précédente, mais quelques sites en sont équipés aux Etats-Unis ou en Europe (comme sur le site de La Vergne par exemple). Le principal avantage de ce type de dispositif est qu’il est moins sensible à l’influence des tassements. Néanmoins, l’utilisation de puits de réinjection verticaux peut favoriser l’entrée d’air et donc d’oxygène dans le massif de déchet. Ceci peut donc engendrer l’apparition de zones de dégradation aérobie et, dans le pire des cas, favoriser l’apparition de feux de décharge (US EPA, 2002). De plus, même si les résultats expérimentaux ne permettent pas encore de porter des conclusions définitives, il semble que la réinjection de lixiviats via un réseau de puits verticaux localise la biodégradation des déchets dans les zones voisines des puits. Ceci pourrait à terme expliquer la diminution rapide de la perméabilité au voisinage du système et l’apparition de chemins préférentiels (US EPA, 2002).

Enfin, les recherches récentes tendent à développer de nouveaux dispositifs de réinjec- tion qui combinent les avantages des systèmes de recirculation verticaux et horizontaux. Parmi ces dispositifs, on peut citer le système de "blanket" testé par Khire and Haydar (2005). Ces "blankets" sont composés d’un drain de réinjection cylindrique perforé sur toute sa longueur et connecté à une couche drainante d’épaisseur 5 mm et de dimension 12 × 34 m2. Ces dispositifs sont placés quasi-horizontalement dans le massif de déchet

et permettent en théorie d’obtenir une zone de réinjection minimale d’une surface de 12 × 34 m2. Les tests menés par Khire and Haydar (2005) confirment l’intérêt de ce type

vanche, compte tenu de l’épaisseur du dispositif (5 mm), l’obstruction rapide et complète du dispositif est à craindre.

L’objectif de l’ensemble de ces techniques est bien entendu d’obtenir une répartition la plus homogène possible de la teneur en eau au sein du massif de déchets. Néanmoins, peu d’études expérimentales sur site ou en laboratoire permettent de conclure quant à l’efficacité de l’une ou l’autre techniques. De plus, comme le signalent Reinhart et al. (2002), le choix des paramètres de réinjection, comme la quantité de lixiviats réinjectée, sont fonction de la qualité du déchet (teneur en eau initiale, capacité au champ, propriétés de transport, etc...).

Finalement, les ISD bioréacteurs nécessitent une mise au point technique de qualité afin d’être efficaces et de répondre au cahier des charges économique et environnemental souhaité. En effet, le dimensionnement de l’ensemble des dispositifs techniques mis en œuvre et l’optimisation globale de l’installation nécessitent de comprendre en détail les mécanismes complexes et couplés mis en jeu lors de la vie d’un bioréacteur. Tel est l’enjeu du travail de modélisation que nous nous proposons de mettre en place.