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Les engagements contraignants la CCNUCC, le Protocole de Kyoto et son amendement de Doha

Engagements contraignants de la CCNUCC

En vue de stabiliser la concentration des gaz à effet de serre, les parties sans exception doivent établir des inventaires de leurs émissions de GES et, pour le CO2, de son absorption par les puits de carbone13. Elles doivent en outre élaborer des programmes de mesures d’atténuation. Par ailleurs, elles doivent coopérer par tous moyens appropriés et se coordonner avec les autres Parties, notamment en vue de mesures d’adaptation.

Le texte souligne la situation spéciale des pays en développement, notamment des plus vulnérables, au regard des effets néfastes des changements climatiques. Il appelle également les pays en développement à limiter leurs rejets tout en affirmant leur droit à se développer, « le développement économique étant indispensable pour adopter des mesures destinées à faire face aux changements climatiques » (article 3.4).

Les parties sont classées soit dans l’annexe I, soit hors annexe  I. Celles de l’annexe  I correspondent aux pays membres de l’OCDE en 1992 ainsi qu’à quelques États «  en transition » comme la Russie. Elles ont l’obligation d’adopter des politiques nationales, de fournir des informations à la COP sur ces politiques, « en vue de ramener individuellement ou conjointement à leurs niveaux de 1990 les émissions anthropiques de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre » (article 4.2). Les parties de l’annexe II de la Convention sont les mêmes États que ceux de l’annexe I, sans les pays en transition. Ces États ont pour responsabilité d’aider financièrement les autres parties dans leurs efforts de réduction de leurs émissions.

13 Réservoirs naturels ou artificiels qui absorbent le carbone de l’atmosphère océan, humus, forêt en formation…

Engagements contraignants du protocole de Kyoto14

Le Protocole de Kyoto a été adopté en 1997, pour approfondir et rendre opérationnels les principes d’équité (comparabilité d’effort, responsabilité historique…) actés dans le cadre de la CNUCC. « Le protocole de Kyoto est à ce jour le seul instrument international juridiquement contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre. »15 Il fixe aux quarante pays les plus industrialisés, inscrits à l’annexe B16 du protocole, un objectif collectif de réduction d’au moins 5 % de leurs émissions concernant six GES anthropiques en 2008-2012 par rapport à l’année de référence 1990. Cet objectif global est différencié par pays (8 % pour l’UE à quinze, et la plupart des pays d’Europe centrale et orientale, 7 % pour les États-Unis, 6 % pour le Canada, le Japon, la Pologne, la Hongrie…), la répartition étant effectuée en fonction de leur situation économique et de leur potentiel de développement17. La moyenne de réduction de l’ensemble des pays était de 5,2  % entre 1990 et la première période d’engagement (2008-2012). Les pays non listés à l’annexe B n’ont pas d’engagements de réduction, mais doivent comptabiliser leurs émissions. Ils participent aux autres activités de la Convention : recherche, éducation, etc..

Le protocole de Kyoto n’est entré en vigueur que huit ans plus tard, le 16 février 2005, après que cinquante-cinq pays représentant au moins 55 % des émissions de CO2 des pays de l’annexe B en 1990, l’ont ratifié.

Trois mécanismes « de flexibilité » assortis de règles précises ont été institués par le protocole :

– un marché international de quotas carbone, chaque pays soumis à des objectifs d’émissions recevant des Unités de quantité attribuée (UQA) échangeables en quantité équivalente ;

– deux mécanismes de financement de projet le Mécanisme pour le développement propre (MDP) et le Mécanisme de mise en œuvre conjointe (MOC). Ces deux mécanismes de projet permettent de financer une action ou des projets de réduction des émissions dans un autre pays que celui du financeur, et de rapatrier la valeur des émissions évitées sous forme de crédits carbone. Le MOC concerne les pays qui sont tenus à des engagements de réduction, le MDP ceux qui ne le sont pas.

Le bilan de ces mécanismes est contrasté, des éléments d’évaluation seront évoqués dans la partie du présent rapport consacrée au rôle des acteurs dans le cadre de la mise en œuvre des instruments de marché.

14 Les éléments concernant le protocole empruntent principalement à l’édition 2014 du Panorama Énergie-climat de la DGEC.

15 Exposé des motifs du projet de loi autorisant la ratification de l’amendement au protocole de Kyoto, Assemblée nationale, n° 1880, avril 2014 (Accord de Doha).

16 Les pays cités dans l’annexe I de la CCNUCC, sont d’une part, les pays développés et riches, et d’autre part les « pays en transition vers une économie de marché ». Les pays de l’annexe B, c’est-à-dire cités dans l’annexe B du protocole, sont en très large majorité les mêmes que ceux de l’annexe I. Cette annexe a pour but d’énoncer les engagements chiffrés auxquels doivent se conformer les pays de l’annexe I, auxquels se sont joints la Croatie, le Liechtenstein, Monaco et la Slovénie. En revanche, la Biélorussie et la Turquie sont absents de l’annexe B.

17 De multiples règles et critères de différenciation basés sur les volumes de réduction des émissions ont été utilisés plafond d’émissions par habitant, objectif de réduction par rapport au PIB par habitant, quotas d’émissions en fonction des émissions actuelles ou cumulées et leur part dans le réchauffement global, etc.

L’amendement de Doha

À Copenhague, en 2009, lors de la COP 15, un accord permettant de donner une suite au protocole de Kyoto a été présenté, mais il n’a pas été adopté par les 193 pays présents.

En décembre 2012, la conférence de Doha a instauré une seconde phase au protocole de Kyoto, dans l’attente d’un nouvel accord. Cela a permis de sauvegarder les dispositifs et institutions mis en place par le protocole de Kyoto, en particulier le mécanisme de développement propre, auquel sont attachés les pays en développement. Elle a également permis à l’Union européenne de réaffirmer son engagement, comme un message volontariste adressé aux autres États de la planète.

La deuxième phase du Protocole de Kyoto a donc été mise provisoirement en vigueur le 1er janvier 2013. Il s’agit en fait d’un accord de transition en vue du futur accord mondial attendu pour 2015.

La loi autorisant la France à ratifier cet amendement a été adoptée au Parlement en décembre 2014. Une proposition de décision du Conseil européen relative à la ratification de l’amendement de Doha au Protocole de Kyoto et une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les aspects techniques de sa mise en œuvre ont été présentées par la Commission européenne à la fin de l’année 2013. Cette dernière demande aux États d’achever leur ratification d’ici à février 2015. Le Conseil européen a adopté la décision visant à ratifier l’accord en janvier 2015.

Outre les vingt-huit membres de l’UE, l’amendement concerne donc l’Australie mais aussi la Biélorussie, le Kazakhstan, le Liechtenstein, Monaco, la Norvège, la Suisse, l’Ukraine et l’Islande. Le Canada, la Russie, le Japon et la Nouvelle-Zélande ne figurent plus sur l’annexe B qu’au titre de leurs engagements pour la période 2008-2012.

L’objectif pour chaque État de l’UE ainsi que pour l’Islande est fixé à 20 % pour l’ensemble de la période 2013-2020, l’Europe renouvelant en note « son offre d’opter pour une réduction de 30 % des émissions » dans le cadre d’un accord global et sous réserve des contributions

« comparables » des pays développés et « adéquates » des pays en développement.

Le texte du protocole est également modifié pour indiquer que l’objectif de la deuxième période d’engagement est de réduire les émissions globales des GES de l’ensemble des parties concernées par l’annexe B d’au moins 18 %, chacun des pays pouvant ajuster ses objectifs pour les rendre plus ambitieux.

Au total, comme le souligne Pierre-Yves Le Borgn’, « En raison de l’absence des États-Unis et du Canada, ainsi que de la Russie, du Japon et de la Nouvelle-Zélande, la deuxième période d’engagement ne concerne donc que 15 % des émissions mondiales de CO2. L’effet de la simple réduction du nombre des pays concernés est en outre accru par deux éléments :

d’abord, l’apparition depuis 1990 des pays émergents, qui représentent l’essentiel de l’ancien Tiers monde jusqu’à en faire disparaître la notion même, a mécaniquement réduit le poids des pays de l’annexe 1 de la CNUCC, du seul fait du rééquilibrage vers le Sud de l’économie mondiale ;

ensuite, seuls les pays de l’Union européenne ayant mené une politique volontariste, coordonnée, à grande échelle et par conséquent efficace, de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, leur part tend à décroître (…).

En outre, il ne faut pas méconnaître qu’au total soixante pays ont pris des mesures d’atténuation, dont les États-Unis, l’Afrique du Sud, l’Inde et le Brésil. »18