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Engagement occupationnel dans des activités signifiantes

Dans le document Une ergothérapie préventive (Page 21-24)

2 Problématique : cadre exploratoire et théorique

2.3 Engagement occupationnel dans des activités signifiantes

Rappelons à nouveau les résultats des études de Jonsson et ses collaborateurs ayant mis en corrélation un sentiment de satisfaction à l’égard de la vie à la retraite avec la présence d’« engaging occupations ». Ce terme désigne des occupations très investies, soit des occupations que la personne réalise avec un haut niveau d’engagement (Jonsson, Josephsson et Kielhofner, 2001). Parmi les différents facteurs caractérisant les occupations très investies, Jonsson a également identifié le fait que celles-ci soient « vécues comme positives et hautement signifiantes ». Les autres particularités des occupations très investies selon Jonsson sont les suivantes :

- Une participation intense en durée et régularité - Un ensemble cohérent d’activités

- L’implication d’une communauté de personnes partageant un intérêt comun - Donnent une identité à l’individu

- Souvent relatées comme analogues au travail

- Evoluent vers un engagement ou une responsabilité (Pierce, 2016, p.231).

Le psychosociologue Elian Djaoui associe le « signifiant » au psycho-affectif et définit une activité signifiante à travers le sens que lui attribue la personne, « dans la mesure où un certain nombre de ses « besoins » psychiques trouvent satisfaction (sécurité, maîtrise de l’environnement, autonomie, reconnaissance, épanouissement de soi, estime de soi, créativité…) » (Morel-Bracq et al., 2015, p.211). Meyer a quant à elle rassemblé les éléments retrouvés dans divers écrits ergothérapiques pour proposer cette définition de l’engagement occupationnel : « le sentiment de participer, de choisir, de trouver un sens positif et de s’impliquer tout au long de la réalisation d’une activité ou d’une occupation »(2013, p.155).

De nombreuses études ont permis de mettre en lumière le lien entre l’engagement occupationnel et la santé. Selon Eric Trouvé, « il est démontré que l’engagement dans des occupations est un facteur de bien vieillir, de santé et de qualité de vie » (2011). Selon les études recensées par Lacroix et ses collaboratrices, la perception d’un meilleur engagement dans des activités signifiantes est associé à une estime de soi et une qualité de vie supérieures, à une maîtrise de sa vie, au bonheur, à une satisfaction envers la vie et la participation sociale, à un vieillissement réussi et à une meilleure santé physique et mentale (Lacroix et al., 2018). Les mêmes auteures conçoivent la notion d’activité signifiante comme partie intégrante du concept d’engagement (2018, p.12).

Un autre concept peut être connecté à celui de l’engagement, il s’agit du « flow » ou expérience optimale (Csikszentmihalyi, 1975). L’expérience optimale se produirait lorsque la personne s'engage dans une activité avec des objectifs clairs et des défis au niveau de ses compétences. Son attention est alors portée sur des éléments extérieurs plutôt que sur elle-même. Si le défi se situe au-delà des capacités de la personne, il pourra générer de l’anxiété ou de la frustration. Il pourra au contraire procurer de l’ennui s’il est jugé trop facile. Le flow, aussi nommé jouissance autotélique, est défini par certaines personnes comme le plus haut niveau de bien-être (Emerson, 1998). Selon cette théorie, « les personnes qui vivent des expériences optimales dans leurs activités quotidiennes se déclareraient plus heureuses » (Csikszentmihalyi et Patton, 1997, p.169).

Les expériences optimales peuvent être considérées comme une partie importante de l’occupation très investie [Traduction personnelle](Jonsson, Josephsson et Kielhofner, 2001, p.430). L’atteinte du flow pourrait s’inscrire comme un objectif lors de la transition emploi-retraite.

La forme de l’occupation est aussi à considérer. Nelson la définit comme un ensemble de circonstances objectives, physiques et socioculturelles externes à la personne et qui influencent sa performance occupationnelle [Traduction personnelle] (1996, p.776). Par exemple, la forme

de l’activité « préparer un repas » fait référence à la réalisation de ses différentes étapes (lire la recette, etc). La forme de l’occupation est indissociable du sens que lui donne la personne qui constitue, selon Nelson, une construction active, un processus d’interprétation. La même activité

« préparer un repas » pourra alors être pratiquée pour sa forme mais aussi pour le sens qu’elle lui confère (faire plaisir à ses proches). La signification donnée par une personne à une activité dépend à la fois de la forme occupationnelle et de la structure de développement de la personne, soit son expérience perceptuelle, symbolique et affective [Traduction personnelle] (1996, p.776).

Ainsi, une personne retraitée pourrait souhaiter reprendre une activité pratiquée antérieurement pour sa forme et/ou pour sa signifiance. Prenons l’exemple du football. Si un retraité veut jouer au football comme dans sa jeunesse afin d’activer son corps, celui-ci va renouer avec cette activité pour la forme. Toutefois, selon la signification personnelle qu’il donne à cette occupation, ce retraité peut vouloir reprendre cette occupation uniquement pour le sens qu’il lui attribue. Par exemple, s’il désire renouer avec la pratique du football parce que ce sport était une occasion de retrouver ses amis, mais qu’il ne peut plus le faire actuellement en raison de son état de santé, ce dernier pourra alors décider d’organiser des rencontres avec ses amis dans un autre contexte afin de retrouver le caractère signifiant de cette ancienne occupation. Il renouera ainsi avec le sens de l’occupation « football » et non avec la forme de celle-ci.

Lors de l’étude phénoménologique de Pettican et Prior, les participants mentionnent également l’importance de l’engagement dans des occupations signifiantes en lien avec l’augmentation de leur bien-être ressenti. À la retraite, certains d’entre eux veulent développer des activités capables de remplacer les aspects positifs de leur travail. Il s’agit alors de transposer le sens attribué à leur activité professionnelle dans d’autres occupations à la retraite. Il est donc essentiel de déterminer le sens accordé par les pré-retraités à leur travail (2011). Une personne retraitée pourra par exemple s’engager dans des activités de bénévolat pour maintenir ou retrouver le sentiment d’utilité sociale qui attribuait auparavant un caractère signifiant à son activité professionnelle.

Aussi, le défi du maintien de l’engagement à la retraite pourra se situer à la mesure du niveau d’engagement professionnel antérieur.

Il semble finalement que plus l’engagement occupationnel d’une personne est important, plus la perception que celle-ci a de sa santé et de son bien-être est positive. A contrario, le désengagement occupationnel favoriserait le mal-être et la dépression.

Le maintien de cet engagement occupationnel constitue donc un enjeu de santé lors de la retraite.

L’utilisation d’un modèle ergothérapique doit permettre de structurer notre mobilisation des différents concepts pré-cités pour aborder la transition vers la retraite.

2.4 Cadre conceptuel : le modèle « Do-Live-Well » ou «

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