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CHAPITRE 4 RÉSULTATS ET ANALYSE

4.4. Portrait d’Anna

4.4.4. Engagement effectif de l’élève selon les extraits vidéo

compétence et d’engagement mathématique dans lequel les propos de l’enseignante et de l’élève elle-même ont été considérés. Il a ainsi été possible d’identifier de façon générale comment Anna se comporte dans la classe de mathématiques. La prochaine section vise quant à elle à décrire les manifestations de l’engagement d’Anna au cours de l’activité proposée. Un tableau en annexe XII présente des extraits de verbatim tirés des moments captés par vidéo au cours des périodes d’activité.

Observations

À plusieurs reprises dans le déroulement de l’activité (voir annexe XII, sections

Présentation du problème au groupe et Période 4 – présentation du décor et rencontre avec la scénographe, extrait Présentation de la quatrième équipe), il est possible de faire ressortir

des traces de l’engagement d’Anna. Cependant, cet engagement ne semble pas être de longue durée et ne semble pas non plus mener au développement d’un savoir mathématique quelconque. En effet, même si Anna demande des spécifications par rapport à deux termes importants (les solides et les prismes), il n’y a aucune manifestation qui permet de conclure à un engagement mathématique; celui-ci est plutôt comportemental. Il est possible de croire que l’élève souhaite s’engager puisqu’elle accorde une valeur importante à sa réussite en mathématiques, elle est cependant toujours en recherche des moyens qu’elle doit prendre pour y arriver. De plus, lorsqu’elle manifeste son intérêt en faisant une intervention, elle semble ne pas être en mesure de s’engager plus en profondeur dans la discussion amenée. Deux extraits filmés lors de l’expérimentation, permettent de mieux comprendre le processus d’engagement/désengagement décrit précédemment.

Extrait 1 : La définition d’un solide Résumé du moment observé

Lorsque l’enseignante demande aux élèves pourquoi on parle du métier du scénographe dans un cours de mathématiques, un élève dit que c’est parce qu’il y a des formes dans le décor. Puis, Anna ajoute que c’est parce qu’il y a des solides. Alors que les élèves rient de sa réponse, l’enseignante dit plutôt que c’est l’intervention la plus intelligente entendue jusqu’ici. Elle demande ensuite à Anna de donner la définition d’un solide. Anna hésite et n’a pas le temps de répondre quoi que ce soit avant qu’un autre élève dise que c’est quelque chose qui n’est pas liquide. La conversation se poursuit sur cette intervention et il n’y a plus d’intervention de la part d’Anna. La responsabilité de trouver la définition est remise aux élèves (voir annexe XII, section Présentation du problème au groupe, extrait La définition

d’un solide).

Analyse

Le fait qu’Anna fasse une intervention lors de cet échange montre qu’elle déploie des efforts pour faire des liens entre le métier de scénographe et les mathématiques. Il est cependant difficile de savoir si Anna est engagée d’un point de vue mathématique, car elle ne semble pas s’engager vers la progression d’un savoir. En effet, lorsque l’enseignante lui demande de définir les solides, elle ne répond pas et ne semble pas non plus se mobiliser afin de chercher une réponse à la question posée. Il est possible de croire que cette attitude peut se manifester en raison d’une méconnaissance du concept abordé, d’une difficulté communicationnelle ou d’un manque de confiance en ses connaissances causé par la réaction négative des pairs à son intervention.

Extrait 2 : La définition d’un prisme Résumé du moment observé

L’enseignante explique que le décor devra contenir des prismes. Anna demande alors ce qu’est un prisme, ce qui déclenche à nouveau une réaction négative chez les élèves. L’enseignante dit que les élèves devront découvrir la définition recherchée pendant l’activité.

Un échange débute à ce sujet, mais Anna n’y participe pas et ne semble pas à l’écoute; elle fait autre chose pendant la discussion (elle roule son fil d’ordinateur et se lève pour jeter un papier). La discussion est mise en suspens par l’enseignante (voir annexe XII, section

Présentation du problème au groupe, extrait La définition d’un prisme).

Analyse

Il est possible de croire que la volonté de l’élève à s’engager a pu être ébranlée par le fait que la question qu’elle a posée à l’enseignante a été retournée aux élèves afin qu’ils y répondent par eux-mêmes. Pour cette élève qui a des difficultés en mathématiques et qui semble avoir besoin davantage d’appui, cela peut être plus ardu. Étant donné qu’elle préfère les problèmes dont les étapes sont définies, il est possible de penser qu’elle n’est pas portée à aller elle-même rechercher les informations nécessaires à la résolution d’un problème. Par ailleurs, il faut souligner que les autres élèves ont une fois de plus une réaction négative (rires ou commentaires moqueurs) à l’intervention d’Anna, ce qui laisse croire que le jugement des autres a pu également influencer son processus d’engagement/désengagement.

Regard sur l’engagement effectif d’Anna

En analysant ces derniers extraits, il est possible d’observer un engagement de la part d’Anna, ou du moins, une volonté de s’engager. Cependant, à d’autres moments où il était possible de s’attendre à ce qu’elle soit engagée, cela ne s’est pas produit. En effet, il a été mentionné plus tôt qu’Anna trouvait les proportions faciles. Ainsi, il était envisagé qu’Anna réinvestisse ses connaissances dans la résolution du problème proposé et qu’elle démontre une certaine aise à utiliser ce concept. Or, lorsque l’observatrice pose des questions à son équipe à propos de la grandeur des éléments de décor par rapport à une personne réelle, elle n’intervient pas (voir annexe XII, section Période 3 – travail en équipe). Elle ne semble pas se sentir concernée par l’échange; elle tente plutôt de s’engager dans une autre tâche. Pourtant, l’observatrice fait appel au raisonnement proportionnel des élèves, qui n’est pas un facteur de désengagement, a priori, selon les propos d’Anna. Tel qu’il a été a soupçonné plus tôt, Anna éprouve possiblement de la difficulté à mobiliser ses connaissances à propos des

proportions afin de mettre en œuvre un raisonnement proportionnel. Or, même si elle est à l’aise avec l’application des proportions; elle n’est pas nécessairement en mesure de s’engager dans un échange faisant appel à la compréhension de celles-ci. Il est aussi possible de penser que, comme Anna trouve les proportions faciles, elle ne sent pas le besoin de s’impliquer dans cette situation. En fait, tel qu’elle le mentionne dans son entrevue post- expérimentation, elle s’engage davantage lorsque le sujet est difficile.

Aux moments où l’élève avait un potentiel d’engagement qui ne s’est pas manifesté s’ajoutent les moments où l’élève n’était effectivement pas engagée en raison de facteurs dont la chercheure avait prévu l’impact négatif. Les extraits du travail en équipe de la période 2 et du début de la période 3 (voir annexe XII, sections Période 2 – début du projet et Période

3 – travail en équipe) démontrent que l’élève est confuse sur ce qu’elle doit faire; elle ne sait

pas comment s’intégrer dans l’équipe et ne semble pas avoir d’idée de la contribution qu’elle pourra fournir au projet. Il est envisageable de penser que, comme elle n’avait jamais eu à concevoir un décor pour une pièce de théâtre auparavant et que les élèves avaient beaucoup de latitude lors de la conception de celui-ci, elle n’est pas parvenue à se figurer les étapes à suivre pour remplir le mandat. Cet extrait de l’entrevue post-expérimentation avec l’élève confirme ce sentiment :

E1 : […] Au début, je savais pas trop par où commencer […] I : Ok, parce que…

E1 : Fallait faire un graphique avec des choses qui rendraient quelqu’un géant dedans. Puis, ça me disait pas grand chose là.

I : C’était trop large pour toi? E1 : Ouin, c’est ça.

Tel qu'en témoigne cet autre extrait, Anna aime retrouver des étapes précises lorsqu’un problème lui est proposé :

I : Puis là t’as un mandat…Donc il y a plusieurs étapes…

E1 : Ouin c’est ça, surtout des étapes à faire parce que sinon tu sais pas trop par où commencer, puis, par où te lancer en premier.

I : Ok, donc, pour toi, c’est mieux quand il y a des étapes? E1 : Ouin, c’est ça, des étapes à suivre, c’est plus facile.

Or, le problème proposé ne remplissant pas cette condition, il est possible de comprendre l’attitude d’Anna et de penser que cela a contribué à son engagement variable tout au long de l’activité.

Enfin, lors de la dernière période du projet, où la scénographe a commenté les projets des élèves, il est possible de constater, encore une fois, que les manifestations de l’engagement d’Anna sont variables et qu’elles s’expriment sur une courte durée. Les différents extraits vidéo (voir annexe XII, section Période 4 – présentation du décor et

rencontre avec la scénographe) ont permis de remarquer qu’elle ne posait pas de question à

la scénographe et qu’elle n’interagissait pas avec les autres élèves lorsqu’ils présentaient. Sa seule interaction, qui démontre la prise en compte d’un élément technique lors de la construction d’un décor (construction d’une colonne cylindrique), ne démontre pas nécessairement un engagement mathématique profond; elle n’a pas justifié son intervention par une explication mathématique se référant à la définition d’un prisme. De plus, elle n’écoute que partiellement les explications de la scénographe à ce sujet. Puis, même si elle semble à l’écoute des présentations et de ce que la scénographe montre à la fin de la période, des signes de rupture dans son attention (jouer avec ses ongles, parler avec ses collègues, regarder ailleurs, etc.) sont fréquemment dénotés.

4.4.5. ENGAGEMENT EFFECTIF D’ANNA SELON LES PROPOS DE