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4. Problématique de l’étude : objectifs et aspects méthodologiques

4.3. Présentation des sujets

4.3.1. Sujets à T1

4.3.1.3. Enfants inclus dans l’étude

Finalement, 32 enfants SML ont été définitivement inclus dans l’étude. Parmi eux, dix avaient déjà participé à nos précédents travaux (Delage & Hurel, 2003). Ces 32 sujets (19 garçons, 13 filles) étaient âgés de 6;1 à 11;11 ans (M = 9;2, ET = 1;9) et présentaient une surdité moyenne ou légère comprise entre 29,3 et 68,8 dB (M = 46,7 dB, ET = 10). On dénombre 10 surdités légères (29-40 dB), 15 surdités moyennes de type 1 (41-52 dB) et 7 surdités moyennes de type 2 (59-68 dB). L’âge de dépistage varie de 0;2 à 8;8 ans (M = 4;9, ET = 1;9), l’âge d’appareillage de 0;5 à 9;9 ans (M = 5;6, ET = 2;3). Trois enfants sourds légers (PTM 29- 35 dB) n’étaient pas appareillés ; toutefois, lors de la seconde passation, les parents de deux de ces enfants (avec les PTM les plus élevées : 32 et 35,2 dB) évoquaient l’éventualité d’acquérir des prothèses auditives sur les conseils de leur médecin O.R.L. Une origine génétique était à suspecter pour plus de la moitié des sujets (17 sur 32) pour lesquels on notait une surdité familiale ; l’origine de la surdité était inconnue pour les autres enfants. Par ailleurs, tous les enfants étaient scolarisés en milieu ordinaire, de la grande section de maternelle (1 seul sujet) à la 5ème. 5 sujets présentaient un retard scolaire d’un an, soit 15,6% des sujets. Enfin, 29 avaient bénéficié ou bénéficiaient encore d’une rééducation orthophonique (11 étaient toujours suivis), la durée de la rééducation orthophonique était très variable selon les sujets : de 3 mois à 7 ans144. Il est intéressant de noter que les trois enfants

144 Les durées de suivi orthophonique, généralement estimées par les parents, sont parfois approximatives. Une

marge d’erreur de quelques mois est donc inévitable surtout lorsque la rééducation est ancienne ou quand plusieurs suivis, entrecoupés de pauses, se sont succédé.

n’ayant jamais été suivis pour des difficultés langagières présentaient une surdité légère (entre 35 et 40 dB), et donc que sept enfants sourds légers ont (eu) un suivi.

Comme indiqué dans la section précédente, nous avons proposé une mesure classique de l’intelligence non verbale pour, d’une part, vérifier l’absence de déficit intellectuel chez l’ensemble de nos sujets et, d’autre part, contrôler l’influence éventuelle de ce facteur sur les performances langagières. Les Matrices de Raven (PM 47, Raven et al., 1998), étalonnées chez des enfants de 4 à 11 ans, ont donc été proposées. Ces matrices145 mesurent une composante essentielle de l’intelligence : la capacité inductive. Celle-ci implique l’aptitude à donner un sens à un ensemble d’éléments, à établir des systèmes de pensée non verbaux permettant de manier aisément une donnée complexe. Les notes brutes obtenues par les sujets SML ont été converties en cinq classes, correspondant aux centiles, de la manière suivante : classe 5 pour un score  centile 75 ; classe 4 pour un score  centile 50 (mais < C75) ; classe 3 pour un score  centile 25 (mais < C50) ; classe 2 pour un score  centile 10 (mais < C25) ; classe 1 pour des scores  centile 5 (mais < C10). Les niveaux non verbaux des sujets se répartissaient comme suit : 2 ont obtenu des scores très faibles (entre les centiles 5 et 10), 4 ont obtenu des scores faibles (entre centile 10 et 25), 9 ont obtenu des scores moyens-faibles (entre les centiles 25 et 50), et 17 ont eu des scores correspondant à la moyenne de leur âge (5 scores = centile 50) ou supérieurs à cette moyenne (6 scores entre les centiles 50 et 75 ; 6 scores  centile 75).La situation des deux sujets présentant des scores très faibles (AD et MC) nous a paru problématique car évoquant un éventuel retard intellectuel. Cependant, ces deux sujets étaient scolarisés en cursus ordinaire (en CM2 et 6ème), sans redoublement et apparemment avec un bon niveau scolaire. Aussi avons-nous décidé, comme pour les deux enfants finalement exclus (DZ et TB), de les suivre à deux ans d’intervalle et de re-tester leur niveau non-verbal. Comme ils étaient alors âgés respectivement de 12;1 et 13 ans, nous avons utilisé cette fois les matrices progressives étalonnées pour les adolescents et adultes (PM38, Raven, 1981)146. AD et MC ont alors obtenu des notes brutes qui, converties en centiles, les situent dans la moyenne de leur âge (centiles 10-25 pour les deux sujets). Nous les avons donc maintenus dans la population.

Les caractéristiques de la population sont résumées dans le tableau 4.2. Nous souhaitons par ailleurs souligner un élément important : étant donné la sélection de la population, suivant

145 Ces matrices sont constituées de 3 séries de 12 problèmes de difficulté croissante où le sujet a pour tâche de

compléter le morceau manquant dans une figure ou suite de figures sans signification, en faisant un choix parmi 6 dessins proposés pour chaque item. La passation dure 5-10 minutes.

les dossiers O.R.L., nous n’avons pas spécifiquement recherché des enfants SML en échec scolaire ou suivis pour des troubles langagiers. Or, 90,6% de ces enfants ont été suivis en orthophonie, ce qui, avant même qu’on ne décrive leurs performances langagières, présuppose de réelles difficultés linguistiques. Les remarques des cliniciens concernant les raisons initiales des prises en charge orthophoniques et le comportement des enfants sont présentées en annexe D.

Tableau 4.2. Caractéristiques cliniques de la population à T1.

Sujets Age Genre PTM

(dB) Age de dépistage Age d’appareillage Durée du suivi classe Retard scolaire Raven code AP 6;1 M 59,2 3;0 3;5 3;6 GSM 0 3 FB 6;3 M 64,3 0;2 0;5 4;6 CP 0 5 EG 6;6 F 43,5 5;7 5;9 1;6 CP 0 4 KP 6;7 M 47,6 0;9 2;0 2;0 CP 0 4 DA 6;9 M 68,8 1;8 2;1 4;0 CP 0 5 LD 7;4 F 45,2 5;10 6;1 2;6 CE1 0 3 AL 7;8 F 51,5 5;11 6;3 3;0 CP 1 4 NO 7;11 M 29,3 3;8 Aucun 3;5 CE1 0 3 ZL 8;2 M 59,3 2;9 3;3 4;8 CE1 0 4 JR 8;2 M 39,5 4;5 4;10 3;6 CE1 1 4 BA 8;3 M 41,3 5;10 6;0 2;0 CE2 0 4 JF 8;6 M 52,1 4;0 5;2 3;4 CE2 0 2 AK 8;11 M 64,2 5;6 5;7 2;0 CE2 0 5 GB 9;3 F 44,4 5;7 7;1 1;0 CM1 0 4 BT 9;3 M 43,6 5;9 5;11 1;10 CM1 0 4 AB 9;4 M 37,5 3;11 4;3 3;6 CE2 1 2 JB 9;6 M 61 3;3 3;5 6;3 CM1 0 3 MO 9;7 F 60 6;3 6;6 4;0 CE2 1 3 FM 9;10 M 44,2 4;9 5;0 2;0 CM1 0 3 ML 9;11 F 35,2 6;1 Aucun 0 CM1 0 4 CC 10;0 F 47,8 4;4 5;0 1;0 CM1 0 4 MB 10;0 F 32,9 8;6 9;9 0;9 CM1 0 3 AD 10;3 M 32 6;3 Aucun 2;6 CM2 0 1 (2) NH 10;8 F 44,5 4;0 5;0 0;10 CM2 0 2 TC 10;9 M 42,1 4;6 5;1 4;6 CM1 1 4 TA 10;10 M 39,3 5;6 5;10 1;0 CM2 0 3 MC 11;2 F 51,6 7;0 9;8 3;0 6 0 1 (2) HP 11;3 F 44,1 4;6 5;2 1;7 6 0 5 KD 11;5 M 40,6 4;8 9;0 0 6 0 5 CT 11;10 F 46,7 4;7 5;0 7;3 6 0 2 AC 11;11 M 39,9 7;11 8;2 0 6 0 3 CH 11;11 F 40,6 6;0 9;9 3;0 5 0 5 Moy 9;2 46,7 4;9 5;6 2;7 3,5 ET 1;9 10 1;9 2;3 1;9 1,1

Age et durée du suivi (orthophonique): années ; mois ; PTM = Perte Tonale Moyenne ; Durée du suivi - âges soulignés : toujours suivis ; retard scolaire : nombre d’années de redoublement ; Raven code - entre parenthèses : score obtenu à T2 avec les PM 38.

Par ailleurs, nous disposions d’audiogrammes, les plus récents possibles, pour tous les enfants, ce qui nous a permis de calculer leur degré de surdité (PTM) sur la base de

l’audiométrie tonale. Nous aurions pu ajouter une mesure issue de l’audiométrie vocale, à savoir l’évaluation de la perception de la parole. En pratique, le test d'intelligibilité consiste à faire répéter à l'enfant les mots d'une liste présentée à une intensité donnée et à noter le pourcentage de mots répétés sans erreur. Après examen des audiogrammes, il nous est apparu qu’il serait très difficile de travailler sur ces données du fait de leur grande hétérogénéité. Ainsi, certains audiogrammes vocaux étaient très anciens (et dataient alors du dépistage initial), les uns avaient testé l’intelligibilité au casque, oreille par oreille, alors que les autres étaient en champ libre, et surtout les listes de mots utilisées différaient en fonction de l’âge de l’enfant lors du test et aussi, probablement, en fonction de l’O.R.L. qui avait pratiqué le test. Parfois encore les listes utilisées n’étaient pas indiquées. Les mots inclus dans les listes sont censés être adaptés à l’âge de l’enfant et/ou à ses compétences linguistiques. En comparant plusieurs courbes vocales chez le même enfant, nous nous sommes aperçus que les seuils d’intelligibilité différaient suivant les listes, alors même que le degré de surdité était resté stable. Par ailleurs, dans notre population, le degré de surdité est très fortement corrélé à l’audiométrie vocale (rs = 0,6, p < .001) ; les deux mesures seraient donc redondantes.

Enfin, l’étendue d’âge observée chez les enfants SML étant importante (à savoir une étendue de 5;10 ans), il nous a paru intéressant de scinder la population en deux groupes d’âges distincts afin de mieux percevoir les différences selon l’âge des enfants. Nous avons alors constitué deux groupes de 16 enfants : les « SML jeunes » âgés de 6;1 à 9;4 ans (M = 7;9, ET = 1;0) et les « SML âgés » qui ont entre 9;6 à 11;11 ans (M = 10;8, ET = 0;10). Ces deux groupes ne diffèrent pas de façon significative au niveau de leurs scores aux matrices progressives (U = 93, p = 0.2), ni au niveau de leur perte auditive (U = 90, p = 0.2). Toutefois, lorsqu’on regarde les moyennes des degrés de surdité pour les deux groupes (PTM = 49,4 dB pour les SML 6-9 ; PTM = 43,9 dB pour les SML 9-11), les plus jeunes ont tendance à être globalement plus sourds. Par ailleurs, les « SML jeunes » et les « SML âgés » diffèrent quant à l’âge de dépistage (U = 69, p < .05), les plus jeunes ayant été dépistés plus tôt147.