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1. LES POINTS TOURNANTS ET LES TRANSITIONS

1.1 Emmanuel, 35 ans, Europe de l’Ouest/Afrique de l’Ouest

Emmanuel est né en Europe de l’Ouest, a grandi en Afrique de l’Ouest et est revenu en Europe de l’Ouest en 1998. Lorsque la question lui a été posée sur son sentiment d’appartenance, Emmanuel a nommé qu’il est « citoyen du monde ». Emmanuel a voulu faire des études au Québec en 2007, mais il a décidé d’annuler son projet, car celui-ci n’était pas partagé par sa conjointe du moment. Cette idée semble être le début de son parcours migratoire, puisque par la suite, à quelques reprises l’idée de partir pour un autre pays que l’Europe de l’Ouest a refait surface. Une tension entre deux sphères de vie est présente :

2007, en Europe de l’Ouest, je devais venir au Canada faire mes études à Sherbrooke en plus à l’époque, l’Université de Sherbrooke que j’avais choisie. J’avais fait toutes les démarches, tout ça et tout, tout ça signifiait

la fin de notre [couple], la fin de notre relation. Et j’ai choisi de rester pour elle. Donc, ça, c’était tournant. (Emmanuel)

En 2008, Emmanuel termine son master et est à la recherche d’un emploi. Cette transition a été teintée de remises en question:

Quand on est en recherche et qu’on ne trouve pas, on commence par poser des questions sur soi-même, sur son niveau, sur plein de choses, sur le niveau de la vie, sur la société, sur l’acceptation groupale. Les critères sont si difficiles pour ceux qui sont certes français, mais avec des origines différentes. Voilà, les questions sont restées variées. Donc du coup, voilà, ce sont ces périodes-là où on commence à magasiner des questions. (Emmanuel)

Lorsqu’il réussit à trouver un emploi lié à ses études la même année, il en tire profit de différentes façons. En effet, il se fait valoir en étant présent beaucoup d’heures, alors qu’il le fait pour passer le moins de temps avec sa conjointe avec qui il vit une relation qu’il nomme malsaine depuis 2005. Aussi, il fait des apprentissages autant professionnels que personnels, car il apprend sur les gens, mais surtout sur les femmes et leurs attentes face à la personne avec laquelle elle partage leur vie. L’année suivante, en 2009, Emmanuel vit la rupture amoureuse finale de cette relation, un point tournant dans sa vie puisque cette relation a été pendant quatre années une source d’instabilité entre autres due aux multiples séparations et a eu selon lui un impact sur d’autres sphères dont le travail, bien que cela ait été parfois bénéfique.

En 2014, Emmanuel débute une nouvelle relation amoureuse, relation encore actuelle au moment de l’entrevue. Le début de la relation est une transition, toutefois, cela change par la suite. En 2016, la conjointe d’Emmanuel immigre au Québec, mais il ne l’accompagne pas puisqu’il ne pense pas à quitter l’Europe de l’Ouest à ce moment-là et que s’il le faisait, ce serait pour un pays moins similaire à l’Europe de l’Ouest que le Canada. En 2017, il sent qu’il ne se réalise plus dans sa vie professionnelle, alors il vient rejoindre sa conjointe, même s’il aurait préféré opter pour l’Espagne ou l’Italie pour l’intérêt qu’il a envers leur langue officielle. Avec la mondialisation des entreprises, il a pu conserver le même emploi qu’en Europe de l’Ouest, alors il n’y a eu que peu de changements:

Et finalement, ça a été le Canada par rapport à ma conjointe, ça, ça a vraiment joué énormément. […] Donc, le Canada en fait, répondait à un certain nombre de critères. Pas totalement, mais un certain nombre de critères dans mes choix. Donc, j’ai envie de dire, culturellement, le dépaysement, même le côté culinaire. Et puis, moi personnellement, quand je suis venu en vacances, c'est la population, on va dire québécoise qui a fait basculer mon choix, cette proximité, cette facilité de conversation. (Emmanuel)

Environ un an après son arrivée au Québec, Emmanuel nomme son expérience canadienne comme un projet possiblement temporaire, une transition, bien que tout se

déroule bien. Il explique que la vie à deux nécessite des choix partagés si on veut construire quelque chose en couple:

Mais on vit à deux, on comprend le choix qui correspond aux deux, mais sans pour autant remettre en cause ce qu’on veut faire soi-même, ce qu’on veut accomplir. Donc, voilà, on essaie de trouver un équilibre là. Donc, aujourd’hui, il est là. On se donne le temps, mais il va sans dire que dans ma tête, c’est une étape. J’ai envie d’autres choses, de machin truc. Mais j’apprécie le moment, l’instant. (Emmanuel)

Pour Emmanuel, la découverte du monde est un outil de réalisation personnelle, son parcours migratoire est donc pour le moment vécu comme étant parsemé de transitions, dont celle de sa vie au Québec, bien qu’elle diffère du choix qu’Emmanuel aurait fait s’il n’avait pas été en couple au moment de son besoin de vivre une nouvelle expérience. Des points tournants ont été recensés également dans son parcours dont l’abandon du projet de venir étudier à Sherbrooke en 2007 en priorisant sa vie amoureuse, ainsi que la fin de cette même relation amoureuse, en 2009. En ce qui concerne les transitions, il y a eu la fin de ses études qui l’a mené vers la recherche d’emploi en 2008, puis son emploi dans la même année, ainsi que le début de sa relation amoureuse en 2014. Le principe des vies liées d’Elder et al. (2003) illustre bien l’influence des deux relations amoureuses d’Emmanuel sur son parcours migratoire, autant en 2007 pour son projet migratoire qui a été abandonné pour maintenir sa relation de couple, qu’en 2017, moment où il a pris la décision de venir rejoindre sa conjointe au Canada.