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B. Poser et résoudre les problèmes

3. Eloge des méthodes composites

C’est également à Lyon que se trouve, depuis 1965, le siège du CIRC, le Centre in‐ ternational  de  recherche  sur  le  cancer  (International  Agency  for  Research  on  Cancer  ‐  IARC). C’est enfin là que se trouve le premier Cancéropôle régional ayant donné dans ses  axes de recherche une visibilité aux traitements et diagnostics issus des nanotechnolo‐ gies. 

3. Eloge des méthodes composites

! Orientation générale

Ce travail de recherche s’inscrit dans une double filiation, qui permet d’articuler  deux échelles d’analyse, le global et le local. D’abord, celle sciences de l’information et de  la communication (SIC), vue originellement par ses fondateurs (Morin, Moles, Barthes et  Escarpit,  pour  ne  citer  qu’eux)  comme  une  inter‐discipline ;  cette  vision  sans  barrière  épistémologique  permet  d’appréhender,  avec  une  pensée  ayant  conscience  de  la  com‐ plexité  des  enjeux  et  une  palette  d’outils  méthodologiques,  les  contextes  globaux  dans  lesquels s’inscrivent les processus communicationnels. Ensuite, celle de l’anthropologie  de  la  communication,  dont  l’esprit  inspiré  d’esprits  libres  et  créatifs  comme  Bateson,  Hall ou Goffman, incite à une démarche ethnographique qui permet d’observer les pra‐ tiques communicationnelles in situ, sans plaquer des a priori  théoriques sur la réalité du  terrain. Le point commun entre tous ces chercheurs aux disciplines et méthodes parfois  antagonistes  est  que  l’héritage  leur  importait  peu :  ils  ont  su  revitaliser  leurs  champs  respectifs en leur greffant des variations génétiques fertiles. 

Chaque  discipline  en  sciences  humaines  et  sociales  possède  sa  propre  grille  d’interprétation  des  évènements :  certaines  vont  les  rapporter  à  la  société,  d’autres  à  l’individu, d’autres aux communications, d’autres aux signes... Ce qui rassemble tous les  chercheurs depuis la nuit des temps est la poursuite des mêmes objectifs : observer, dé‐ crire, comprendre et expliquer une portion de réalité et ce qu’il pourrait y avoir au‐delà  de  ce  qui  est  visible.  Au‐delà  des  marges  de  cette  feuille  et  des  caractères  typogra‐ phiques de ces mots, voilà mon unique horizon. 

! Le regard communicationnel

Il serait vain de tenter de définir un regard communicationnel, aussi multiple que  les  pensées  sociologiques,  anthropologiques  ou  philosophiques.  Même  une  discipline  « dure »  comme  la  physique  possède  trois  visions  radicalement  différentes  du  monde,  selon que l’on se place du point de vue de Newton, d’Einstein ou de Planck. En sciences  de l’information et de la communication (SIC), « on retrouve toujours l’idée selon laquelle  l’extraordinaire  hétérogénéité  de  l’objet  commande  l’adoption  d’approches  plurielles »,  estime Dacheux (2009, p. 17). Il rappelle que les fondateurs des SIC en France ont pris  soin d’utiliser le pluriel dans sa dénomination à dessein. Il cite ces propos de Jean Mey‐ riat,  premier  président  en  1972  du  comité  qui  deviendra  la  Société  française  des  sciences de l’information et de la communication (SFSIC) : « Cette interdiscipline est plu‐ rielle »,  dit‐il  à  Jean  Devèze  en  1992.  « Il y a pluralité d’objets, d’objectifs théoriques, de  finalités professionnelles. »29 

Comme Miège ([49], 1989), l’on ne peut qu’être agacé par les discours bipolaires à  propos  de  communication  qui  persistent  encore.  Côté  pile,  « les théories générales pré‐ tendant tout expliquer à partir du paradigme qu’elles ont choisi », et, côté face, le discours 

      

des experts en communication. Il pense que « le progrès des connaissances » viendra de  chercheurs  dont  les  travaux  seront  « fondés sur des méthodologies intersciences, et tra‐ versant les champs couvrant la communication ». Ceux‐ci devront « dégager des règles de  fonctionnement »,  qui  vont  contribuer  « à  comprendre  les  évolutions  conjoncturelles,  les  mouvements  apparaissant  comme  erratiques  et  les  tactiques  des  acteurs  sociaux  concer‐ nés » et ce, tout en admettant que ces règles « ne fonctionnent pas de façon déterministe  ou mécanique », mais qu’autour d’elles s’articulent « des stratégies d’acteurs, se dévelop‐ pant  parfois  dans  des  sens  opposés ».  Miège  n’est  pas  allé  au  bout  de  sa  démarche,  puisqu’il propose de nommer ces règles « logiques sociales » (en précisant tout de même  que l’usage de cette expression n’a pas de rapport avec le sens que lui donnent Gabriel  Tarde et Macur Olsen) ; même si le social n’appartient pas qu’à la sociologie, il n’en de‐ meure pas moins que le qualificaticatif peut amener des ambigüités. Par quoi d’autre le  remplacer ?  Aucune  autre  expression  ne  semble  satisfaisante :  logique communication‐ nelle, par exemple, est toute aussi imprécise. 

S’engager  sur  un  territoire  inconnu,  c’est  savoir  qu’on  ne  dispose  pas  de  carte.  Pourquoi y aller, si d’autres explorateurs ont déjà cartographié les lieux ? Je répondrai :  pour vérifier, affiner, préciser, trouver de nouveaux chemins. Même aujourd’hui, malgré  les images par satellite et le système GPS, il arrive encore de se rendre compte que telle  ile  du  pacifique  n’existe  pas30.  Seul  le  travail  de  terrain  peut  permettre  de  s’en  rendre  compte ; y aller et contrôler son existence ou son absence. Cependant, si l’explorateur ne  peut se fier aux cartes, il peut tenter de s’orienter avec une boussole, ou un compas, ou  une longue vue, ou tout instrument qui puisse l’aider à ne pas se perdre.   ! L’idéologie de l’idéologie Dans mes moments de doute, ceux où je me rendais compte que les auteurs que  j’admirais se haïssaient et ne se parlaient pas (un peu comme un enfant découvrant que  son père et sa mère, entièrement en lui, et à la fois hors de lui, ne veulent plus se voir ni  se  parler),  c’est  Edgar  Morin  qui  m’a  aidé  à  garder  le  cap.  Dès  son  second  ouvrage,  L’Homme et la Mort, rédigé entre 1948 et 1950, il appréhendera les phénomènes par le  biais de plusieurs disciplines et sous‐disciplines qui habituellement ne dialoguent pas :  ethnographie, histoire des idées, sociologie, biologie, histoire des religions, histoire des  civilisations,  psychanalyse,  philosophie...  Il  se  souvient  de  ses  débuts  difficiles :  « En  1951, j’ai la chance d’entrer au CNRS, où je deviens institutionnellement ce que j’étais psy‐ chologiquement :  chercheur »  (Morin,  1982,  [111],  p.8).  L’interdisciplinarité  n’était  pas  alors à la mode, l’indiscipline encore moins. Il lui fallait non seulement s’« adapter aux  contraintes de l’institution, mais éviter d’être broyé par des conformismes contraires mais  très puissants ». Loin de la gloire qu’il connaitra plus tard pour les mêmes raisons dans la  même institution, il était alors « rejeté ». Son tort ? Simplement vouloir articuler la socio‐ logie  à  l’anthropologie,  et  ne  pas  suivre  béatement  une  grille  de  lecture  qualifiée  de  « marxiste »,  dominante  à  l’époque.  Qu’importe  son  opinion  politique  (car  il  était  bien  « communiste ») !  Ce  qu’il  voulait,  c’était  s’éloigner  des  « recherches »  qui  s’appuyaient  sur des cartes connues à l’avance du territoire à étudier, même si celui‐ci n’avait jamais  été exploré. C’est ainsi qu’il produisit trois ouvrages fondateurs des études en info‐com,  aujourd’hui  quelque  peu  oubliés :  Le  Cinéma  ou  l’Homme  imaginaire  (1956),  Les  Stars  (1957) et L’Esprit du temps (1962).  

      

30 « Sandy  Island,  l'île  tellement  mystérieuse  qu'elle  n'existe  pas »,  Sciences  &  Avenir,  23/11/2012,  en  ligne : 

http://sciencesetavenir.nouvelobs.com/nature‐environnement/20121123.OBS0307/sandy‐island‐l‐ile‐tellement‐ mysterieuse‐qu‐elle‐n‐existe‐pas.html  

La recherche pharmaceutique à l’épreuve des pratiques communicationnelles. L’invention d’un médicament issu des  nanotechnologies. 

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Au  début  des  années  1980,  les  concepts  de  Morin  commencent  à  être  écoutés,  mais qui les applique réellement ? On ne retient de lui que la notion de « complexité »,  certains  le  cataloguant  paradoxalement  comme  simpliste  ou  opportuniste.  Sa  réponse  est aussi cinglante que les critiques dont il a fait l’objet : 

Voici  que  ceux  dont  je  dérange  les  habitudes  me  présentent,  niaisement  ou  noiseusement,  comme quelqu’un qui veut être « dans le vent » et s’empare des idées à la mode. Mais, frères noiseux,  en politique, en sociologie, en théorie, en idéologie, en philosophie, j’ai été pendant trente ans soli‐ taire,  marginal,  hors  mode,  pendant  que  régnaient  sartrisme,  althussérisme,  lacanisme,  foucal‐ disme, deleuzisme, sociologisme, marxisme, structuralisme. (Morin, [111], p. 20)  On ne l’a jamais connu aussi virulent, ni avant, ni après. Dans sa diatribe contre la  position idéologique du chercheur, il n’épargnera ni les sciences humaines et sociales, ni  sciences de la nature, sans être dupe du « succès » qui est le sien et des « jalousies » que  cela entraîne :  Oui, aujourd’hui, je bénéficie de la crise des mythologies démentes, des idées simplettes, de la  pensée  unidimensionnelle,  des  conceptions  mutilantes  qui  ont  régné  non  seulement  en  politique,  mais aussi en philosophie, en sciences sociales et dans les sciences exactes. Oui, c’est cette crise qui  empêche le talon du crétinisme universitaire et idéologique de m’écraser. Mais les mécanismes de  rejet propres à la connaissance disciplinaire compartimentée/parcellarisée continuent à fonction‐ ner contre moi. Mon simple cheminement suscite l’irritation, voire la haine du propriétaire qui me  voit pénétrer dans ses terres et croit que je vais y planter ma tente. Détrompez‐vous, vous qui vous  précipitez sur vos tromblons ou qui envoyez vos disciples à mes trousses ; je suis nomade, je ne fais  que traverser vos pelouses. (Morin, [111], p. 20)  Ce n’est pas lui rendre justice que de  reproduire des propos dont il a peut‐être re‐ gretté  la  fureur.  Ils  montrent  à  quel  point  les  châtelains,  tout  consacrés  à  leurs  disci‐ plines, sont difficiles à déloger de leurs fortins ; comme il peut être complexe de rassem‐ bler des territoires voisins sous un même pavillon. Aujourd’hui, Morin avec ses cheveux  blancs  ressemble  à  un  vieux  sage ;  il  est  invité  à  prêcher  de  saintes  paroles  sur  l’interdisciplinarité et la pensée complexe. Et on l’écoute distraitement, comme un aïeul  qui n’est pas encore mort, mais qui ne fait tout de même plus partie de notre temps. Qui  est  moderne ?  Pour  le  comprendre,  faut‐il  lire  le  jeune  Morin ?  Comme  il  l’écrit  lui‐ même :  « si  le  Morin  se  nourrit  de  multiples  affluents,  il  n’en  faut  pas  moins  chercher  la  source de Morin dans Morin » (Morin, 1982, [45], p.12). Et à la source, Morin est en vérité  un révolutionnaire critique, ou un critique révolutionnaire, pour paraphraser la rhéto‐ rique qui fit sa célébrité. Ainsi, dans la revue qu’il fonde avec ses amis en 1957 (nommée  Arguments, déjà tout un programme), il a pour ambition de   réviser sans limite aucune les idées reçues et les idéologies courantes ; exercer une critique  radicale, sans dogmes ni interdits, à l’égard de la réalité et de la pensée dominantes ou prétendues  révolutionnaires ; mettre en question tous les aspects du monde contemporain – sociaux, politiques,  humains, littéraires et artistiques, scientifiques et philosophiques – pour que surgissent leurs pro‐ blèmes et leur crise.  (Cité in Morin, 1982, [111], p. 9‐10) 

Morin  a  regretté  que  certains  des  intellectuels  qu’il  estimait  l’aient  mal  compris.  Parmi eux, Jean‐Marc Lévy‐Leblond, le philosophe‐physicien. Leur point commun est la  révolution qu’ils entendent mener contre la doxa de leur époque sur la manière de pen‐ ser la science. D’abord en guerre contre l’idéologie, dont la « plus grande ruse est de faire  croire à son inexistence », analyse Lévy‐Leblond (1977, [111], p. 112), qui trouve difficile  de la « mettre en évidence » et ce, « même quand elle est tenue pour certaine ». Il pense en  particulier  à  celle(s)  qui  prétend  que  l’activité  scientifique  est  « exemplairement  a‐ idéologique ».   Dès  le  départ,  son  propos  porte  sur  « le discours de la recherche et de la  découverte, plus souvent d’ailleurs sous une forme dégradée (la soi‐disant « vulgarisation »  scientifique,  fut‐elle  l’œuvre  de  scientifiques  eux‐mêmes)  que  sous  sa  forme  originelle  (le  texte même des rapports de recherche) » (ibid., p. 113‐114), mais il se rend vite compte 

que qu’on ne peut, pour répondre au mieux à cette problématique, « séparer ainsi le pro‐ duit fini d’une pratique scientifique et les conditions de sa production ».  

Ce  fut  mon  cheminement :  quand  je  suis  entré  à  l’Ecole  Normale  Supérieure  en  2009, je pensais étudier la vulgarisation scientifique ; j’ai mis un an à me rendre compte  que je ne pouvais séparer les énoncés produits dans l’espace médiatique de ses condi‐ tions  de  production,  c’est‐à‐dire  des  pratiques  des  chercheurs  eux‐mêmes.  Pour  Lévy‐ Leblond, il faut d’abord « comprendre les mécanismes qui président aux choix des priorités  et des directions du développement scientifique » (ibid., p. 116) : « Suivant quels critères les  organismes spécialisés de la classe dirigeante (privés ou « publics ») décident‐ils de soute‐ nir matériellement telle ou telle discipline ? ».   ! La posture du chercheur L’une des questions fondamentales que se pose un jeune chercheur est sa légitimi‐ té dans l’engrenage universitaire. Il m’a fallu longtemps avant de pouvoir parler, long‐ temps avant de pouvoir montrer une ligne à mon directeur de thèse, longtemps avant de  commencer à prendre confiance dans la différence. Comparé à mes jeunes collègues, je  manquais d’élocution et d’assurance. Mon premier problème est que j’étais tétanisé par  ma  capacité  continuelle  à  débiter  des  stupidités,  en  particulier  devant  les  normaliens.  C’est alors que j’eus la chance de lire Mills, qui me libéra de mes traumatismes :  

Vous  êtes  prêts  à  m’accorder  qu’il  faut  écrire  votre  livre  aussi  clairement  et  aussi  simple‐ ment que le sujet et votre propre pensée l’autorisent. Mais vous n’êtes pas sans avoir remarqué que  les  sciences  sociales  affectionnent  la  boursouflure  et  les  mots  compliqués.  […]  Ce  manque  d’intelligibilité n’a rien à voir avec la complexité du sujet, ni avec la profondeur de la pensée. C’est  simplement une question de statut universitaire.  

Dans  l’université  d’aujourd’hui,  celui  qui  écrit  des  choses  que  tout  le  monde  peut  com‐ prendre se verra traiter de « littéraire » ou de « journaliste ». Vous savez peut‐être déjà ce que cela  veut dire : on est superficiel parce qu’on est lisible. […]  Pour vous sortir de la prose universitaire, il  vous faut sortir de la pose universitaire. Au lieu d’étudier la grammaire et les racines du vieil an‐ glais, essayez de répondre aux questions suivantes : 1) Quel est le degré de difficulté et de complexi‐ té de mon projet ? 2) Lorsque j’écris, que est le statut auquel je prétends ? 3) Pour qui est‐ce que je  tente d’écrire ? » (Mills,  2006 [1959], p. 221‐222) 

La  catharsis  n’est  pas  totale,  il  m’arrive  de  rechuter.  Mon  second  problème  était  l’indécision, l’hésitation et le scepticisme, qui me conduisaient au tâtonnement, à la véri‐ fication continuelle, à la compilation des données, et au syndrôme des notes de bas de  page. C’est Pierre Larousse qui m’encouragea à ne pas voir dans ce caractère un aspect  pathologique. Dans la préface à son premier Grand dictionnaire universel du XIXe siècle,  égrenant les encyclopédies qui l’ont précédé, il en est une seule qu’il qualifie d’« œuvre  de génie qui a marqué dans l’histoire de l’esprit humain et qui a exercé une immense in‐ fluence  dans  la  direction  des  idées  au  XVIIIe  siècle ».  C’est  le  dictionnaire  historique  et  critique de Bayle. Pourquoi  l’a‐t‐il impressionné : pour son immense connaissance des  choses, pour son esprit encyclopédiste, pour sa manière de simplifier ou complexifier les  données ? Non : « pourvu qu’un nom se rattache d’une manière quelconque à un système, à  une théorie, cela lui suffit pour asseoir une série de raisonnements qui conduisent tous au  même  terme,  le  doute.  »31 Ce  qui  a  marqué  ce  grand  organisateur  du  savoir  qu’est  La‐ rousse n’est point la certitude mais le doute. Au‐delà des marges de cette feuille et des  caractères typographiques de ces mots, voilà le cœur de ma raison. 

      

31 Pierre Larousse, Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, éd. Lacour, 1990, réimpression de l’édition de 1866‐ 1876, p. XVIII 

La recherche pharmaceutique à l’épreuve des pratiques communicationnelles. L’invention d’un médicament issu des  nanotechnologies. 

 

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REMIERE PARTIE

– I

DEOSCOPIE DE

L

ECUME COMMUNICATIONNELLE

         

Nommons  « idéoscopie »32 la  méthode  que  nous  allons  utiliser  pour  l’observation  et  l’examen des « idées » en circulation et leur critique.   Idéo‐ : préfixe dérivé du grec « idea », qui signifie « idée ».  ‐Scopie : suffixe tiré du grec skopos « observateur », dérivé de skopein, qui signifie « obser‐ ver, examiner »   Idée : 1) Représentation abstraite et générale d’un être, d’une manière d’être ou d’un rap‐ port, qui est formée par l’entendement. 2) Représentation élaborée par la pensée individuelle,  qu’elle soit générale ou particulière, qu’il existe ou non un objet qui lui corresponde. 3) Vue élémen‐ taire, approximative, sommaire. 4) Conception imaginaire, fausse ou irréalisable. 5) Vue plus ou  moins originale, que l’intelligence élabore dans le domaine de la connaissance, de l’action ou de la  création artistique. 6) Façon particulière de se représenter le réel, de voir les choses, d’envisager ou  de résoudre les problèmes.    [Alain Rey (dir.), Dictionnaire culturel en langue française, Paris : Le Robert, 2005]                       32 J’ai forgé ce néologisme sans savoir que Peirce (1839‐1914) avait ainsi nommé ce qui deviendra la sémiotique. Pour  lui,  l’idéoscopie  consistait  « à décrire et à classer les idées qui appartiennent à l'expérience ordinaire ou qui surgissent 

naturellement  en  liaison  avec  la  vie  ordinaire  »  (Charles  Sanders  Peirce,  Écrits  sur  le  signe,  rassemblés  par  Gérard 

Deledalle, Paris : Le Seuil, 1978, 1ère p. 22, cité in Veron, [74], p. 61). Même si je suis heureux de cette coïncidence, ma  manière de décrire et de mettre en relation les « idées » n’a rien de comparable à la tripartition de Peirce, qui exhorte  à  « ouvrir nos yeux mentaux et de bien regarder le phénomène, et de dire quelles sont les caractéristiques qui n’y man‐

quent  jamais,  que  ce  phénomène  soit  quelque  chose  que  l’expérience  externe  impose  à  notre  considération,  ou  qu’il  s’agisse du plus fou des rêves, ou de la conclusion la plus abstraite et générale de la science » (ibid., p. 64).  

                                                     

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CHAPITRE 1 – LES MYTHES DE LA RECHERCHE