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Elargissement de la raie zéro-phonon

4 Couplage aux phonons dans les boîtes quantiques de GaN/AlN plan a

4.2 Couplage de l’exciton aux phonons acoustiques dans les BQs

4.2.5 Elargissement de la raie zéro-phonon

Couplage au continuum des états croisés

Nous allons maintenant nous intéresser plus précisément à l’élargissement de la raie zéro- phonon en fonction de la température (Figure 4.14). Théoriquement, si la boîte est décrite par un système à deux niveaux suffisamment séparés des niveaux excités, l’élargissement de la raie zéro- phonon dû à un déphasage par les phonons acoustiques devrait être impossible (effet phonon bottleneck). Dans la pratique, le paramètre de couplage aux phonons acoustiques a est effectivement souvent plus faible que dans le matériau massif ou dans un puits quantique, mais il n’est jamais nul [Bes01], [Fav03], [Bay02], [Kam02]. Cette absence de phonon bottleneck a été étudiée par Kammerer, Vasanelli et al. dans les références [Kam01], [Kam02] et [Vas02], qui montrent que la description des niveaux énergétiques d’une BQ sous la forme de niveaux discrets est trop simplifiée et qu’il existe en fait un continuum d’états entre la transition fondamentale des boîtes et la couche de mouillage. Les spectres de PLE réalisés sur le niveau fondamental d’une

BQ unique d’InAs présentent, en plus des niveaux excités, une absorption continue et croissante jusqu’à la couche de mouillage. Ce continuum d’états a été interprété comme l’ensemble des états mixtes 2D-0D constitués d’un état lié d’électron et d’un état délocalisé de trou dans la couche de mouillage (ou l’inverse). Une BQ se représente désormais par un ensemble de niveaux discrets superposés à un continuum d’états de plus en plus dense à mesure que la couche de mouillage se rapproche. Sur les niveaux excités de boîtes, qui sont franchement confondus avec le continuum, les auteurs ont observé que le paramètre de couplage a est d’autant plus grand que la densité d’états croisés au niveau de la transition est grande. En effet, dans ce cas, il existe un continuum d’état vers lesquels le fondamental peut relaxer via les phonons acoustiques. Théoriquement, les transitions croisées ne peuvent exister qu’au-delà de la transition fondamentale puisqu’un des états liés appartient à ce fondamental. Cependant, ils ont observé expérimentalement que lorsque la couche de mouillage est proche de la transition, le continuum d’états peut se rapprocher très prés du niveau fondamental et permettre une relaxation par les phonons. Les échantillons pour lesquels la couche de mouillage est fine présentent ainsi un facteur a très faible (0.05-0.1 µeV/K) en accord avec l’effet phonon bottleneck ; mais lorsqu’elle est plus large, le niveau fondamental devient de plus en plus couplé au continuum d’états mixtes, ce qui augmente la valeur de a (0.12- 2.1 µeV/K). C’est certainement une des raisons principales qui explique les valeurs anormalement grandes de a dans les BQs.

Résultats expérimentaux

La Figure 4.14 représente l’élargissement en fonction de la température de la raie zéro- phonon des deux BQs uniques de GaN dont nous avons discuté la forme à basse température à la Figure 4.11. Jusqu’à 50 ou 60 K la largeur des pics est presque constante et contrôlée par la diffusion spectrale. Pour décrire un élargissement homogène de raie convolué à un élargissement inhomogène, on utilise la formule suivant [Tur00], [Seg04] :

2 b 2 diff 2 1 ) T k E exp( b aT             − + + =Γ Γ (4.38)

Il s’agit de l’équation ( 4.21), dans laquelle l’élargissement homogène à basse température Γ0 est

négligé devant l’élargissement inhomogène Γdiff, et l’énergie du phonon optique est remplacée par

un paramètre énergétique ∆E [Seg04]. La somme des deux contributions se fait au carré car il s’agit de la largeur d’une convolution [Tur00]. Comme l’énergie du phonon LO dans GaN est de 92 meV, l’élargissement devrait être, au moins jusqu’à 120K, uniquement contrôlé par Γdiff et le

terme en aT (phonons acoustiques). Mais comme le montre la Figure 4.14, la dépendance en température de Γ est mieux décrite par l’équation ( 4.38 ) si nous prenons empiriquement ∆E ≈ 30 meV plutôt que ∆E = 92 meV. L’encart représente les paramètres obtenus pour les deux énergies d’activation. Il est clair que nous ne disposons pas de points à suffisamment haute température pour déterminer de manière fiable ces paramètres. A plus haute température, l’élargissement serait essentiellement contrôlé par le terme exponentiel de la formule ( 4.38 ), et il serait plus facile de découpler a, b et ∆E. Mais dans la gamme de température de nos mesures, les paramètres ne sont pas suffisamment indépendants : si nous en modifions un, les autres peuvent le compenser

facilement pour que la formule ( 4.38 ) continue à très bien s’ajuster aux points expérimentaux. En plus, comme à basse température la diffusion spectrale impose déjà une largeur de raie de plus d’un meV, le couplage aux phonons acoustiques va induire un élargissement relatif très faible qui peut partiellement se perdre dans les incertitudes de mesure.

Les valeurs de a et b trouvées dans la littérature pour du GaN hexagonal massif présentent une grande dispersion selon les techniques utilisées. Des mesures de PL conduisent à une constante a de 21 à 28 µeV/K et des expériences menées à très haute température permettent de déterminer avec une bonne précision une valeur de b égale à 510 meV [Vis98], [Nam04]. Notre paramètre a de la Figure 4.14 est compris entre 8 et 13 µeV/K selon la valeur de ∆E imposée, ce qui est un peu plus faible que dans le matériau massif mais très loin des valeur de 0.05 à 2 µeV/K obtenues dans InAs [Kam02]. Au chapitre 2, nous avons vu que la couche de mouillage semblait être plus épaisse au niveau des BQs que sur le reste de l’échantillon. Les boîtes à haute énergie, étudiées en µPL, sont donc susceptibles d’être fortement couplées au continuum d’états 2D-0D par les phonons acoustiques, ce qui pourrait expliquer les grandes valeurs de a observées. Nous ne chercherons pas à discuter plus précisément de ces effets de déphasages pour plusieurs raisons : d’une part, nous ne connaissons pas la structure des différents niveaux d’énergie dans nos BQs, ni l’écart entre les bandes de trous lourds et de trous légers. La proximité d’autres niveaux pourrait avoir une influence sur le taux de déphasage du niveau fondamental par les phonons (et expliquer, par exemple, des valeurs de ∆E inférieures à 92 meV). Et d’autre part, nous avons fait une hypothèse forte dans le modèle de couplage aux phonons qui consiste à dire que l’élargissement inhomogène ne dépend pas de la température. Cela revient à considérer qu’une augmentation de T change uniquement la fréquence avec laquelle les pièges capturent ou libèrent les porteurs, et que si les temps caractéristiques de ces évènements sont faibles devant le temps d’intégration du spectre, on ne devrait effectivement pas voir de dépendance en température. Mais l’énergie thermique permet aussi de libérer des charges plus profondément piégées ce qui peut avoir une influence sur l’amplitude de la diffusion spectrale.

Figure 4.14 – Evolution en température de la largeur à mi hauteur des deux raies de BQs uniques

de GaN plan a dont les spectres à basse température sont donnés à la Figure 4.11. Nous avons

gardé la correspondance entre les figures (a) et (b). Les ronds correspondent aux points expérimentaux et les courbes en bleu et rouge aux ajustements par la formule ( 4.38 ) pour deux énergies d’activation différentes. La raie correspondant à la courbe (a) est celle dont nous avons simulé les ailes de phonons. L’encart donne la valeur des paramètres correspondant aux courbes.

L’élargissement en température de la raie à zéro phonons de nos spectres est bien plus important que ce qui est attendu pour une BQ dans laquelle le couplage aux phonons acoustiques est sensé être très faible et le couplage au phonon optique n’intervenir qu’à relativement haute température. L’origine de cet élargissement n’est pas encore compris mais pourrait être dû à un couplage de l’état fondamental de l’exciton avec le continuum d’états croisés ou simplement à une dépendance en température de la diffusion spectrale.

(a)