Chapitre 5 : Récupération du nickel dans le lixiviat d’A. murale par précipitation sélective sous
3.1 Effet du pH
Dans ce système, le soufre peut se trouver en solution sous les formes H2S, HS- et S2-. Les
réactions mises en jeu sont décrites par les équations (5.1) et (5.2).
𝐻𝑆−
(𝑎𝑞)+ 𝐻+
(𝑎𝑞) ⇌ 𝐻2𝑆(𝑎𝑞)
𝑆2−
(𝑎𝑞)+ 𝐻+
(𝑎𝑞) ⇌ 𝐻𝑆−
(𝑎𝑞)
dont les pK1 et pK2 sont exprimés respectivement par les équations (5.3) et (5.4).
𝑝𝐾1 = − log 𝐾1 = − log ( [𝐻2𝑆]
[𝐻𝑆−] [𝐻+])
𝑝𝐾2 = − log 𝐾2 = − log ( [𝐻𝑆−]
[𝑆2−] [𝐻+])
Les pK1 et pK2 sont respectivement de 6,99 et 12,94 à 25 °C et pour une force ionique de 0,
d’après la base de données EQ3/6 (Lawrence Livermore National Laboratory).
Le domaine de prédominance de chacune des espèces est représenté sur la Figure 51.
Pour former du sulfure de Ni, seules les formes anioniques réagissent, les réactions
considérées sont présentées par les équations (5.5) et (5.6).
𝑁𝑖2+
(𝑎𝑞)+ 𝑆2−
(𝑎𝑞) ⇌ 𝑁𝑖𝑆(𝑠)
𝑁𝑖2+
(𝑎𝑞)+ 𝐻𝑆−
(𝑎𝑞) ⇌ 𝑁𝑖𝑆(𝑠)+ 𝐻+
(𝑎𝑞)
dont les logarithmes de constante de formation sont respectivement de 8,53 et 8,03 à 25 °C
pour une force ionique nulle (Martell et al. 2008).
Equation (5.2)
Equation (5.3)
Equation (5.4)
Equation (5.5)
Equation (5.6)
Equation (5.1)
Chapitre 5 : Récupération du nickel dans le lixiviat d’A. murale par précipitation sélective
sous la forme de sulfure de Ni (NiS)
Ainsi pour favoriser la précipitation de NiS, le pH de la solution de sulfures doit être compris
entre 8 et 14. C’est pourquoi celle-ci a été préparée à pH 12, la forme H2S(aq) est inhibée et le
soufre peut précipiter avec Ni. Le risque de former du H2S(g) est ainsi aussi limité.
3.1.2 Précipitation à partir de solutions synthétiques à différents pH
i. Etude théorique
La précipitation a été simulée par Chess à partir des données du Tableau 23 avec un ajout de
S2- en stœchiométrie avec Ni. L’effet du pH a été observé entre 1 et 13 (Figure 52).
D’après les simulations, la précipitation de NiS est totale pour un pH supérieur à 1,7. D’après
les équations (5.1) à (5.6), la présence de Ni déplace fortement les équilibres en faveur de la
déprotonation de H2S. En effet, la précipitation de NiS devrait être favorisée pour un pH > pK1
or la conversion totale de Ni est observée à partir de 1,75. Grâce à la très faible solubilité de
NiS, pKs = 21 (Linke 1958), même à très faible concentration les ions HS- réagissent avec Ni
et permettent la précipitation de NiS. Il faut donc se placer entre pH 1,75 et 9 pour éviter la
précipitation de Mg(OH)2. Ainsi, il est possible de précipiter NiS à pH acide, contrairement à
l’hydroxyde.
ii. Etude expérimentale
L’un des principaux verrous observés lors la précipitation de sulfure métallique est la formation
de fines particules (Wang et al. 1997, Lewis 2006) due à un état de sursaturation (Lewis and
van Hille 2006, Mokone et al. 2010).
Lors d’une réaction de précipitation le système peut être qualifié de :
stable, si les concentrations des ions impliqués dans la réaction sont inférieures aux
limites de solubilité. Aucun précipité ne se forme,
métastable, si les concentrations sont supérieures aux limites de solubilité, le système
est saturé. Les concentrations sont trop faibles pour favoriser l’apparition spontanée
des précipités, seules les particules présentes en solution grossissent (croissance),
instable, les concentrations sont nettement supérieures aux limites de solubilité. Le
système est sursaturé, nucléation et croissance sont favorisées. Plus la saturation est
importante, plus la nucléation est favorisée au détriment de la croissance. La limite
entre la zone métastable et instable est la courbe de sursaturation limite (Figure 53)
(Gerbaud 1996, O’Sullivan et al. 2012).
Lorsque la nucléation est favorisée, de nombreux germes ou nuclei sont formés et ne
s’agglomèrent pas, ce qui aboutit à la formation de particules fines difficiles à filtrer. Dans le
cas des sulfures métalliques, l’état de sursaturation est favorisé par leur très faible solubilité.
Pour étudier les effets du pH sur l’efficacité de la précipitation ainsi que sur la morphologie des
particules formées, la réaction a été effectuée à partir des trois solutions synthétiques à trois
pH initiaux différents : 1,5, 3,5 et 5,5. La première différence observée est visuelle. En effet,
les filtrats n’ont pas tous la même apparence (Figure 54). Celui obtenu à partir de la solution
à pH 1,5 est vert, ce qui indique la présence de NiSO4 en solution et montre clairement que la
réaction n’est pas totale. Celui obtenu à partir de la solution à pH 3,5 est noir, indiquant que
des particules de NiS n’ont pas été retenues par le filtre et qu’elles sont donc de dimensions
inférieures à 0,45 µm. Au contraire, celui obtenu à partir de la solution à pH 5,5 est transparent,
le précipité a bien été retenu par le filtre.
Chapitre 5 : Récupération du nickel dans le lixiviat d’A. murale par précipitation sélective
sous la forme de sulfure de Ni (NiS)
Une analyse ICP-AES a permis d’effectuer un bilan sur la précipitation : est appelé « filtrat »
tout ce qui est passé à travers le filtre, i. e le liquide et les particules de dimensions inférieures
à 0,45 µm, et « précipité » tout ce qui a été retenu par le filtre. Ainsi, le bilan molaire ne
représente pas uniquement le bilan de la réaction, mais il prend en compte aussi les difficultés
rencontrées lors de l’étape de filtration. Il caractérise la quantité de NiS qui a réagi et a pu être
récupérée (Figure 55).
A pH 1,5, comme annoncé par la simulation et observé dans le filtrat, NiS ne précipite pas car
le soufre est sous forme H2S et les HS- sont en quantité trop faible pour réagir avec Ni et
atteindre la limite de solubilité. Pour un pH de 3,5, le rendement de précipitation en Ni est de
71 % contre 87 % pour un pH de 5,5. Or, comme seule la masse retenue par le filtre est prise
en compte, aucune conclusion ne peut être tirée quant à l’efficacité propre de la réaction.
Cependant, d’un point de vue procédé, les meilleurs rendements de précipitation sont obtenus
à pH 5,5.
Figure 55 : Bilan molaire lors de la précipitation de NiS à partir de solutions synthétiques à différents pH (1,5,
3,5 et 5,5) avec un rapport molaire de Ni:S de 1:1
Figure 54 : Photographie des filtrats lors de la précipitation de NiS à partir de solutions synthétiques avec un rapport
molaire Ni:S de 1:1 à pH 1,5 (A), 3,5 (B) et 5,5 (C)
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Procédés innovants pour la valorisation du nickel directement extrait de plantes hyperaccumulatrices
(Page 126-130)