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2. L’éducation au développement durable, une clarification conceptuelle, institutionnelle et didactique

2.3 Vers une éducation à la durabilité ?

2.3.1 Education et apprentissage au prisme de la durabilité

Si l’éducation vise la mise en œuvre de moyens propres à assurer la formation et le développement d’un être humain tout au long de sa vie, elle reste fondée sur « quatre

(Delors, 1996). Notre acquisition de compétences, nos apprentissages et nos expériences se relayent et s’imbriquent, de manière permanente durant tout le processus. Ce qui fait dire à Durdel (2002), que « toute éducation développe premièrement

les compétences permettant à une personne de se situer dans le monde de manière autonome et de prendre des responsabilités dans la société. Deuxièmement, l’éducation signifie une lutte pour dégager l’évidence dans un monde de plus en plus complexe et touffu. Troisièmement, l’éducation vise le maintien et le développement d’une conscience critique sans la perte d’un sentiment positif, ni la disposition à l’action ».

Dans la compréhension onusienne du développement durable, « certains axes de

politiques sociales apparaissent sous forme de visions de société comme c’est le cas ici pour l’idée de durabilité » (Bertschy et al, 2004). Toutefois ceci nécessite certains préalables : « pour que de telles finalités donnent lieu à des visions fécondes du point de vue pédagogique, elles doivent être travaillées sous certaines conditions » (Oelkers, 1990).

Oelkers nous expose ici ces conditions :

1 « l’éducation touche à l'espérance, et donc à des sentiments forts et existentiels portés sur

l’avenir. Une vision pédagogique doit donc assurer de l’optimisme en dépit des mouvances sociétales opposées. Elle doit montrer que tout ne s'en va pas à vau-l'eau et, parallèlement à cela, que tout ne se développe pas toujours dans la direction souhaitée. Elle ne peut pas réellement donner une orientation pour l'avenir, mais doit pourtant prétendre pouvoir le faire ». (Ibid.)

2 « La réalité est plurielle et différenciée dans sa systémique. Lorsqu'une vision pédagogique

propose une unité, elle perd sa crédibilité et devient dogmatique. La "pédagogisation" d'une finalité doit de ce fait prévoir un aménagement ouvert de l'avenir. La mise en œuvre de l'idée politique ne doit pas être mal comprise, comme si elle constituait une éducation vers un comportement correct » (ibid.). Claussen soutient aussi cette idée : « pour savoir ce qui sera correct à l'avenir, on ne dispose ni d'un consensus de société, ni de prévisions sûres dans le domaine des sciences sociales » (Claussen, 1996).

3 « La pédagogisation d'une finalité relevant de la politique sociale ne doit pas constituer sa

seule mesure de transposition. La transmission de compétences correspondantes peut y contribuer d'une certaine manière, en particulier en présence d'un milieu social favorable, mais la pédagogie ne peut et ne doit pas anticiper sur le processus et imposer ainsi des décisions politiques » (Oelkers, 2004).

D’après cette analyse, l’éducation et le développement durable ne se contredisent pas dans leurs prémisses, l’idée de durabilité recèle même un potentiel pour étayer et stimuler des processus d'apprentissage. En effet, lorsqu’il s’agit de décrire des objectifs, des contenus et des principes de transmission en matière d'éducation au développement durable, le processus d’apprentissage constitue un moment fort. Selon Jonnaert (1999), l’apprentissage au sens large « est un processus inscrit dans une

du sujet aux représentations qu’il se fait des exigences des situations auxquelles il est confronté ». Giordan (1998) va plus loin en affirmant que : « Apprendre n’est pas un processus scolaire uniquement, auquel se soumettent les élèves afin d’acquérir un savoir défini et prescrit », c’est également « une dynamique personnelle, ou sociale, d’élaboration et de mobilisation ».

Au travers des progrès des théories cognitives (Künzli, 2006), la notion d’apprentissage s’est muée en un processus actif, d’autodétermination, constructif, en situation et en interaction sociale. Certains principes de ce processus d’apprentissage peuvent être exposés.

- « Apprendre est un processus actif : c’est une suite d’actions intériorisées et leurs interactions

sur et avec les structures cognitives de l’apprenant » (Piaget, in Giordan, 1998). Ici toutes

les interactions entre les influences réciproques (intérieures et extérieures) sont guidées par l’homme. « L’action stimule puissamment l’intérêt de l’élève et le place dans une

situation telle, qu’en retour, il éprouve le désir d’exécuter une tâche » (Bertschy et al, 2007).

Par conséquent, « l’action doit être fortement contextualisée et couplée à d’autres relations

(d’expression, d’écoute, d’échange) propres à l’apprentissage et passer par des phases de confrontation » (Giordan, 1998).

- « Apprendre est un processus d’autodétermination : l’apprenant décide ce qu’il apprend, car

c’est un processus qui le concerne et qui se déroule en lui-même en tenant compte des influences externes. Ce sont ses propres structures existantes qui déroulent les processus d’appropriation, soit l’assimilation et l’accommodation » (Künzli, 2006). Ces structures se forgent par

confrontation active avec l’environnement et ces structures ne présentent aucun vide qui puisse être rempli de l’extérieur.

- « Apprendre est un processus constructif : l’apprentissage s’élabore sur les structures

cognitives existantes, aux contenus différents et en échange avec l’environnement social. A partir de là, de nouvelles structures se construisent, voire s’intègrent. La qualité de l’apprentissage est déterminée par les conceptions et connaissances préalables qu’il faut prendre en compte pour construire les nouvelles structures cognitives des apprenants » (Bertschy et

al, 2007).

« Apprendre en situation : la situation d’apprentissage est conçue de telle manière que les

connaissances de l’apprenant puissent entrer en interaction avec les savoirs. Cette dimension interactive de l’apprentissage est définie comme une interaction entre savoirs et connaissances »

(Jonnaert, 1999). Ici, le travail réflexif de l’apprenant sur ses propres connaissances est concrétisé en interaction avec le savoir mis en situation.

En somme, les principes d’apprentissage décrits ci-dessus doivent déterminer nos choix didactiques en matière d’éducation au développement durable. Toutefois ces critères méritent une ouverture, c’est-à-dire un élargissement aux démarches constructives proposées par les enseignants et qui permettre à l’apprenant de s’approprier des savoirs. Dans cette perspective constructiviste, « les connaissances de

de l’enseignant consiste à créer des situations qui favorisent justement ces apprentissages actifs, autodéterminés, constructifs, sociaux et en situation » (Künzli, 2006). Cette interaction

permet : la prise en compte des conceptions des élèves, la création consciente du processus de transfert (« des compétences pour d’autres contextes », Devalay 1992), la facilitation d’un processus autonome et responsable, l’usage optimale « des formes

directes et indirectes d’enseignement » par les enseignants (Meyer, 2004), la prise en

compte de la subjectivité et l’adaptation de l’évaluation aux objectifs du contexte d’apprentissage (Pike et Selby, 1999).