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Pour que ce plan de thèse soit bien compris, précisons qu'il se compose d'une introduction et de trois parties que l'on pourrait résumer de la sorte:

En introduction, il s'agit d'une mise en contexte du projet urbain durable, notre objet de recherche, suivie:

En première partie, de l'explication de notre stratégie de recherche et de la

formulation de deux hypothèses en lien avec les terrains étudiés, puis:

En deuxième partie, de la présentation et l'analyse des résultats dégagés sur les quatre terrains, en continuité avec les hypothèses émises au départ; et enfin:

En troisième partie, d'un essai de montée en généralité afin de dégager les apports de ces travaux et surtout afin de proposer une typologie matricielle des projets durables dans le contexte de nos sociétés urbaines contemporaines.

Ainsi, précisons qu'en première partie, après avoir justifié notre stratégie de recherche (en chapitre n°1), nous émettons deux hypothèses différentes sur la fabrique urbaine durable en supposant:

1/ une gouvernance inédite liée à ces projets;

2/ un travail sur l'image des métropoles que peaufinent les pouvoirs publics (locaux ou nationaux) afin de développer un marketing des territoires au niveau national ou international dans un contexte de mondialisation; afin de pouvoir conclure (ou pas) sur une porosité des pratiques et des normes entre deux pays assez différents a priori - la France et le Danemark1, voire au niveau européen.

Nous cherchons ainsi à répondre aux plusieurs questions qui nous taraudaient au départ: Les acteurs coopèrent-ils de la même façon sur un projet d'écocité que sur un projet urbain classique, étant donné le changement majeur de paradigme que représente le développement durable, même s'il est devenu progressivement un « mot-valise »? Qui gouverne finalement? Sont-ce les fonctionnaires territoriaux, les élus ou bien plutôt les urbanistes et acteurs privés

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Du fait de leur superficie, population et PNB différents, ces deux pays ne sont pas souvent comparés, alors que les comparaisons de la France avec l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie ou l'Espagne sont pléthoriques.

Anne-Marie Thirion – « La gouvernance locale des écocités » - Thèse de doctorat Université de Rennes 1 – Année 2019 50

de poids? Et les citoyens, doivent-ils se contenter de la portion congrue en matière de décisions concrètes, dans la mesure où les programmes électoraux ne dévoilent pas toujours la stratégie urbaine des candidats? Les usages des habitants sont-ils identiques après? C'est ainsi l'objet du chapitre n°2 de la première partie.

En outre, toujours pour la première partie, quelles sont les intentions des pouvoirs publics au travers de ces projets novateurs (en matière sociale et environnementale) ou en matière de visibilité externe pour leur métropole? C'est ce que nous décryptons dans le chapitre n°3, en illustrant toujours notre propos par des exemples variés, et pas seulement européens d'ailleurs. Car si les formes urbaines et la densité donnent une idée des intentions des acteurs, le décalage entre la réalité observée et les discours - ou les phasages prévus initialement - est tout aussi édifiant.

La deuxième partie, quant à elle, présente en détail les quatre terrains d'étude. Chaque analyse de terrain est structurée en deux temps avec en partie:

A/ Une présentation du contexte à l'échelle supranationale, puis nationale et enfin locale; et en:

B/ Une analyse de la carrière du projet par une structuration au prisme du néo-institutionnalisme sociologique, de l'approche par les instruments utilisés, et par les réseaux.

Cette deuxième partie commence, ainsi, par le terrain de recherche ViaSilva à Rennes (France) qui est mis en perspective comparative ensuite avec trois autres terrains: 1 français et 2 danois. Le plus grand détail dans l'analyse empirique permet ainsi de dépasser les généralités dégagées sur les premiers exemples en première partie, mais surtout de rentrer au cœur de la fabrique urbaine d'un territoire métropolitain sous l'angle des discours, des pratiques au quotidien, des valeurs véhiculées, des rapports de force officiels et officieux, des décisions prises ou des non-décisions, de la compétition partisane et électorale, de la prospective, des retards dans les réalisations ou des mises à l'écart d'options privilégiées au départ. Sont donc ainsi présentés à chaque fois le contexte pour une mise en perspective du sujet, puis les résultats des travaux menés.

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Enfin, en chapitre conclusif représenté par le chapitre n°8, propose une typologie de la gouvernance sur les projets durables au prisme des trois piliers du rapport Brundtland - à savoir l'économie, le social et l'environnement - et des différents types d'acteurs impliqués (privés, publics, associatifs). Cette approche synthétique et matricielle a pour objectif d'ouvrir le débat sur la question de la durabilité urbaine, du fonctionnement des institutions et de la démocratie en générale.

Ainsi, la complexité de ces projets et la transparence parfois limitée des pratiques liées à la fabrique urbaine ne sont-elles pas le reflet finalement de notre époque marquée par une « post-démocratie1 de la communication » et une « action publique des experts »? Ce terme de

post-démocratie2 serait-il d'ailleurs plus approprié que celui d'hyper-démocratie annoncé notamment par le sociologue Kaufmann3? Le second, en effet, insiste davantage sur la crise des valeurs collectives4 dans nos sociétés, quand Crouch dénonce pour sa part surtout des rapports de force défavorables à la majorité des citoyens, et in fine à l'intérêt général?

Face à ces deux analyses qui reprennent certaines théories du déclin des civilisations5, les plus connues datant d'ailleurs d'un siècle1 exactement, les solutions pour un

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CROUCH Colin, Post-démocratie, Zürich, Diaphanes, coll. « Transpositions », 2013, 140 p.

Colin Crouch a été professeur de gouvernance and management public à la "Business School of Warwick University" et à la "London School of Economics and Political Science" (alias LSE, de 1973 à 1985).

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La post-démocratie constitue la courbe descendante d'une "parabole" démocratique qui culmine entre 1945 et la fin des années 1980: c'est une période marquée par la croissance de la production, la consommation de masse, et une dépense publique forte. Pour Crouch, les sociétés occidentales suivent la courbe « libérale » de la démocratie depuis la fin des années 1990, en respectant ses institutions mais en privant les citoyens de leur rôle actif et de leur capacité à changer les instances politiques. Cette perte de démocratie "réelle" (qui n'est pas automatiquement synonyme de démocratie "participative" ou "directe", mais peut se traduire aussi par un non-cumul des mandats dans le temps et l'espace institutionnel) se réalise au profit de médias adoptant les traits de la publicité ou le registre émotionnel, mais aussi de firmes multinationales contrôlant les instances politiques, ou encore de délégations de service public générant une opacité des affaires d’État.

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KAUFMANN Jean-Claude, La fin de la démocratie, apogée et déclin de la civilisation, Les Liens qui Libèrent, 2019, 300 p.

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A travers la notion d'hyper-démocratie, Kaufmann analyse l'écart croissant entre les notions de "République" et de "Démocratie" pour souligner principalement la crise des valeurs communes propre à nos sociétés; et expliquer un monde marqué par les dérives de l’économie financiarisée, la montée des populismes, des nationalismes ou des communautarismes, ainsi que l’emprise grandissante des GAFA (ou BATX et autres NARU) qui manipulent les données personnelles et le vote des citoyens. 5

SPENGLER, Oswald et TAZEROUT, M (trad.), Le Déclin de l’Occident: esquisse d’une

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ensemble repensé ne peuvent-elles pas venir des élus locaux notamment, à travers une action publique renouvelée - mais concrète et durable - dans la ville? Certes, la tâche est immense car les élus affronteraient désormais les injonctions contradictoires des citoyens. Et il n'est guère aisé aujourd'hui d'être un représentant politique local: la légitimité démocratique prévaut, certes - surtout pour ceux élus au suffrage direct - mais il leur faut gérer des finances publiques en berne; et le pouvoir véritable est peut-être finalement désormais ailleurs - au niveau central, supranational ou dans la sphère privée. Pour autant, la solution ne peut-elle pas venir d'une association véritable des citoyens à la fabrique urbaine (notamment via les TIC) dans la perspective d'une approche systémique de la qualité de vie en ville, d'une relance économique des territoires et d'une plus grande légitimité politique des élus? La question mérite d'être posée.... et tel est l'objet de ce dernier chapitre d'ouverture à la discussion.

Les deux typologies présentées sont proposées en tout cas comme des outils d'aide à la décision pour les praticiens de la fabrique urbaine (durable?) de demain.

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Paul Valéry (1871-1945) écrira lui aussi sur ce sujet du déclin dans La Crise de l’esprit (NRF, 1919, Tome XIII, p. 321-337) en déclarant: "Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous

sommes mortelles (...) Il y a l’illusion perdue d’une culture européenne et la démonstration de l’impuissance de la connaissance à sauver quoi que ce soit ; il y a la science, atteinte mortellement dans ses ambitions morales, et comme déshonorée par la cruauté de ses applications ; il y a l’idéalisme, difficilement vainqueur, profondément meurtri, responsable de ses rêves ; le réalisme déçu, battu, accablé de crimes et de fautes" etc.

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