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La dynamique des produits et des marchés .1 Les cycles de vie évoluent

Contexte de recherche et champ d’investigation

2.3 La dynamique des produits et des marchés .1 Les cycles de vie évoluent

Si le cycle de vie des entreprises évoluent, celui des produits est lui aussi modifié. La di-mension humaine a une place prépondérante. [Perez, 2002] l’analyse du point de vue financier (figure 2.2 page 16) et le Gartner Group en donne une vision plus sociologique (figure 2.3 page 17) : les produits et les services évoluent dans le temps. Les types de consommateurs ne sont pas les mêmes dans toutes les phases de vie et, corollaire financier, les types de profits changent. Bien souvent, les analystes portent toute leur attention sur les phases amont des cycles de vie (déclenchement et pic de l’espoir), il faut survivre au plancher de la désillusion pour vivre dans le temps.

FIG. 2.2 – Évolution des bulles technologiques, d’après [Perez, 2002]

FIG. 2.3 – Le cycle de vie d’un produit, d’après le Gartner Group

Ces cycles de vie, dont l’étude est assez récente ont été d’abord vus sous les angles tech-niques et financiers mais de plus en plus le marketing s’en empare et utilise une variable dont l’importance est de plus en plus importante : le temps.

2.3.2 Le temps s’accélère

Comme nous venons de le voir, les TIC ont permis l’émergence de services dont les cycles de vies sont plus courts et plus souples que ceux des produits purement industriels. Comme le montre [Boly, 2004] : l’environnement économique est marqué par un phénomène de réduction de la durée de vie des produits. Ainsi, le cycle de vie des produits s’accélère et, en schématisant, on voit l’émergence de structures de consommationen cloche(voir figure 2.4, page 18). les quatre phases de vie d’un produit (lancement, croissance, maturité, obsolescence) sont de plus en plus courtes. Si les entreprises veulent survivre, elles doivent améliorer leurs organisations et leurs méthodes de gestion de projets.

De même, la durée nécessaire à la valorisation d’une découverte sous forme d’activité indus-trielle s’est énormément raccourcie. Il serait passé de 50 ans à 25 ans en moyenne. Ainsi le temps (ou les temps : de recherche, de développement, de vies) se sont pour ainsi dire, accélérés, avec une conséquence sociologique notable : la durée moyenne d’une carrière professionnelle est dé-sormais plus longue que le délais d’émergence des technologies, ce qui impose l’adaptation et la gestion des changements.

FIG. 2.4 – Raccourcissement du cycle de vie des produits, d’après [Boly, 2004]

2.4 Une dialectique de changement

De nombreux produits (et entreprises) ont du mal à passer ce que [Moore, 1999] appelle le gouffre du marché de masse (voir figure 2.5 page 18) qui permet à un produit de devenir rentable.

FIG. 2.5 – le gouffre entre le marché de niche et le marché de masse, d’après [Moore, 1999]

On peut rapprocher la figure 2.3, qui est centrée sur les produits (page 17) et la vision de Geoffrey MOOREqui, elle est concerne plutôt les marchés. Ce que G. MOOREa montré c’est qu’il existe un gouffre entre le marché des technophiles et des visionnaires (ce qu’on appelle parfois lesearly adopters) et le marché de masse, celui du grand public qui permet de faire jouer les

mécanismes de l’économie libérale de marché.

2.4.1 Technique, marché et co-conception

Un produit peut être conçu en se fondant sur des techniques, c’est le mode habituel de créa-tion de produits dans l’industrie : une technologie est disponible, on l’adapte, puis on en fait un produit qu’on propose au marché. C’est le techno push (2.4.1.1). On peut aussi, en particulier dans le monde des services, se mettre à l’écoute du marché afin d’adapter une offre. C’est le mar-ket pull (2.4.1.2) mais ces deux approches sont maintenant supplantées par une méthode plus consensuelle, qui met le client au centre de la réflexion, c’est laco-conception(2.4.1.3). Définis par de nombreux auteurs, nous empruntons notre présentation de ces concepts à [Soudoplatoff, 2004]. Le tableau 2.1 page 20 en donne une vision synthétique.

2.4.1.1 Le techno-push

Dans le modetechno push, ce sont les valeurs technologiques qui guident la création de pro-duits ou de services. Ceux-ci sont décidés par les ingénieurs, sur la base de découvertes scienti-fiques ou d’avancées technologiques. Combinées avec leurs propres analyses, cela permet la mise sur le marché d’innovations. Les chaînes de de création de ces nouveaux produits ou services sont souvent linéaires : la R&D effectue les études préliminaires, puis passe la main à l’ingénierie, qui lui-même transmet à la fabrication. Enfin, le marketing met en avant les qualités du produit qui est mis sur le marché par les ventes.

Ce modèle prend ses racines dans le monde industriel, celui des « grands programmes ». Il est encore massivement présent dans des pans entiers de l’économie, comme l’automobile, la banque, l’assurance ou les télécommunications. La tendance actuelle est de quitter ce mode de conception car il présente l’inconvénient d’être très longs, avec des cycles itératifs parfois pluri-annuels.

Dirigés par des techniciens, les projets menés en suivant cette méthode fait, pour ainsi dire, abstraction du client. Les échecs commerciaux sont souvent imputés aux équipes de ventes, sans se soucier de l’adéquation entre l’offre et la demande.

Ce modèle de développement industriel a été remis en question avec l’avènement de l’écono-mie de services. Comme on le verra infra (2.5, page 21) on passe d’une éconol’écono-mie de la rareté à un monde d’abondance, ce qui renforce le rôle et le pouvoir du client. Il faut donc se mettre à son écoute et lui proposer des produits adaptés.

2.4.1.2 Le market-pull

Dans le monde dumarket-pull, c’est le marketing qui guide la définition des produits et des services. Le client est le centre de l’attention des entreprises : il est étudié, ausculté, analysé sous toutes les coutures. De toute cette masse d’études de marché sont déduites des modes, des tendances, des désirs que les entreprises transforment en produits ou services. Le marketing ayant le pouvoir, les ingénieurs deviennent des exécutants et ne sont là que pour mettre en œuvre des décisions prises par les spécialistes du marché. Cela a une conséquence organisationnelle : la production et la distribution sont décorrélées. L’entreprise adopte un modèle en réseau (de

compétences, de partenaires. . . ). Ce modèle, qui s’appuie sur les médias de masse, est celui sous-jacent de grands pans de l’économie, comme la grande distribution, les services (informatique, banques et assurances, etc.).

Ce modèle présente l’inconvénient d’être assez peu sensible à l’innovation, la technologie passant « après » les études de marché qui ont permis la définition des produits. Les dirigeants sont essentiellement issus du marketing. Les échecs commerciaux sont souvent combattus par de massives campagnes de communication qui font abstraction des innovations d’usages.

❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ ❵ Critère Méthode Techno-push Market-pull Définition des produits par la R&D par le marketing Les exécutants sont les vendeurs les ingénieurs Cycles longs, basés sur la

techno-logie

courts, basés sur les études de marchés Inconvénient insensible à la demande insensible aux usages Le client est en bout de chaîne est au centre

TAB. 2.1 – Techno-push et Market-pull

2.4.1.3 La co-conception

Fruit de l’évolution de la société de consommation, le client cherche aujourd’hui à être acteur du processus de conception des produits et des services. La relation entre une entreprise et ses clients est modifiée : le client est amené à co-travailler avec l’entreprise pour prendre une part active à la naissance de produits qui incorporent des innovations et des savoir-faire mais également des usages extrapolés de situations réelles.

Ces usages sont le fait non pas d’individus mais bien souvent le fait de communautés de pratiques. Ni tout à fait individuelle ni totalement conceptuelle, la communauté est entre ces deux tendances. Dans cette approche les relations inter-individuelles sont la clé, le réseau est une réalité tangible. Sur le web, c’est l’arrivée des approches de type2.0dont la définition précise est ténue mais qui posent comme principe la prise en compte du rôle actif tenu par les clients et les communautés de clients.

C’est ce qui permet à [Soudoplatoff, 2004] de dire que l’important face à un problème n’est plus de le résoudre mais de le dissoudre dans une communauté. Les usages ne sont plus alors les conséquences de la mise à disposition de technologies mais le fruit d’un travail cognitif commun entre un offreur et un demandeur. Ainsi cette dissolution fait naître l’usage. Les lieux où s’opèrent cette alchimie ce snt les communautés.

De même, on peut reprendre le vieil aphorisme qui a permis autrefois de qualifier l’irruption de l’internet :dis-le moi, je l’oublie ; montre-le moi, je le retiens ; implique-moi, je le comprends. L’im-plication est un paramètre-clé, qui permet de toucher du doigt la réalité de la co-conception.

2.4.2 L’émergence de l’ouverture

En toute logique et depuis l’avènement du libéralisme, la valeur s’obtient par la rareté et la rareté par la protection. Or, sur internet, par un effet sans doute corollaire de l’importance du phénomène communautaire, ce principe est inversé : certains projets, issus de communautés, ne cherchent pas à créer de rareté, au contraire, ils favorisent délibérément la copie et visent la diffusion la plus simple.

Le précurseur et le maître à penser de ce mouvement, Richard M. STALLMAN a imaginé un modèle de distribution fondé sur quatre libertés fondamentales5 dans une approche quasi-philosophique. Celui qui est aujourd’hui le gourou de ce mouvement est le fondateur de la FREESOFTWARE FOUNDATION6, organisation de promotion de ce système qui est à l’origine d’un courant qui compte aussi le mouvement OpenSource et des initiatives telles que Creative Com-mons7dont l’objectif est l’organisation du partage d’informations.

Bref, l’ouverture est partout et après avoir été dénigrée par les acteurs traditionnels du sec-teur, les créations Libres sont maintenant des logiciels reconnus dont certains, tels le naviga-teur Firefox8, géré par la fondation Mozilla9sontquasi commerciaux. Ce monde Libre n’est plus anecdotique, c’est une réalité devenue incontournable dans les TIC et un acteurs, atypique, de l’économie du logiciel.

2.5 Une approche par la valeur