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Au risque de se répéter, une présentation de l’historique du logement des personnes âgées en France ne peut débuter sans souligner l’oppo- sition qui longtemps l’a structuré, à savoir l’op- position entre maintien à domicile et entrée en établissements institutionnels.

Dans le cas de la France, cette opposition se re- trouve reconnue publiquement dès la Révolution Française, comme le montre le premier rapport du Comité de Mendicité de la toute nouvelle As- semblée Constituante, en 1791 :

« Il y aura deux espèces de secours pour les vieillards et infi rmes : le secours à domicile, le secours dans les asyles publics. Le secours à domicile sera le secours ordinaire. Le secours dans les asyles publics n’aura lieu que pour les individus qui ne pourront pas les re- cevoir à domicile, à raison de défaut de famille, d’infi rmités graves qui exi- geroient des soins particuliers, ou de toute autre cause pareil. »2

Il est au passage intéressant de constater que l’entrée en établissement apparaît alors comme l’ultime recours : il ne faut dès lors pas s’étonner de la prégnance dans nos représentations per- sonnelles de la maison de retraite comme «re- poussoir»…

Pour autant, diverses politiques publiques ont voulu, au cours des dernières décennies, mettre en avant les établissements pour personnes âgées, en y voyant la solution au logement des personnes âgées (ou plus exactement à leur 2 - In. Vivre plus longtemps, Interrogations sur les défi s de

la longévité et de la dépendance. Rose-Marie Van Lerber-

tat : les Mapa (maison d’accueil pour personne âgée), les Mapad (maison d’accueil pour per- sonnes âgées dépendantes), les cantou3, etc. Ces

structures, dont certaines perdurent encore au- jourd’hui, ne serait-ce que dans certains de leurs principes, initièrent alors une réfl exion sur l’ha- bitat des personnes âgées. En ce sens, on peut dire qu’elles ouvrirent la voie à l’émergence plus récente de structures telles que les Marpa4, bé-

guinages5, etc.

3 - Les Cantou, pour «Centres d’Animation Naturel Tiré d’Occupations Utiles», créés en 1977, sont de petites struc- tures avant tout spécialisées dans l’accueil de patients at- teints de la maladie d’Alzheimer. Les chambres s’organisent autour d’un salon-salle à manger, véritable ‘foyer’, d’où la référence au mot de «cantou», qui signifi e «coin de feu» en occitan.

4 - Marpa : à l’origine «Maison d’accueil rurale pour per- sonnes âgées», aujourd’hui «Maison d’accueil et de rési- dence pour l’autonomie».

5 - Ces structures : Marpa, béguinages, font l’objet d’une pré- sentation spécifi que dans la partie 3.2.

En parallèle, des initiatives plus locales, portées le plus souvent par des particuliers ou des asso- ciations, conduisirent au cours de ces dernières années à l’apparition de formes encore nouvelles d’habitat pour personnes âgées.

L’ensemble de ces réalisations, qu’elles soient héritées de structures passées ou totalement innovantes, qu’elles soient institutionnelles ou le fruit de démarches individuelles, partagent aujourd’hui néanmoins une volonté commune: celle de faire de l’habitat des personnes âgées un élément du bien vieillir, par exemple grâce à l’in- tergénérationnalité.

En complément de ce préambule, l’annexe 2 (Lexique) reprend et explicite succintement les diff érents types d’établissement pour personnes âgées existant en France.

Le préambule précédent a permis -si besoin était- de souligner l’image négative associée aux maisons de retraite. Toutefois, ce terme de «maison de retraite» recouvre en France des réalités très variées et certaines de ces maisons de retraite cherchent aujourd’hui à évoluer, en s’ouvrant sur l’extérieur et en s’appuyant sur l’intergénérationnalité. Néanmoins, à l’instar de ce qui a pu déjà être identifi é à l’étranger, cette ouverture peut se faire de plusieurs façons, qui correspondent à des manières diff érentes d’en- visager l’intergénérationnalité.

En fait, il convient même de reconnaître que dans le cas précis des maisons de retraite, les constats et remarques faits pour l’étranger (par- tie 2.1) peuvent être repris dans leur grande ma- jorité pour la France :

- De même qu’à l’étranger, certaines maisons de retraite françaises cherchent par exemple à s’ouvrir de « l’intérieur vers l’extérieur » : il peut s’agir d’organiser des animations ponctuelles avec des enfants ou avec le quartier, de favori- ser des relations visuelles sur des écoles ou des crèches, de créer des passages ou des percées urbaines... Le constat du caractère louable mais néanmoins limité de ces actions reste bien évi- demment inchangé.

- De même là encore qu’à l’étranger, des mai- sons de retraite font aussi le choix de s’ouvrir grâce à l’intégration d’équipements qui favo- risent la venue de publics extérieurs, âgés ou non. La remarque qui avait été faite dans le 2.1 sur l’importance de la relation architecturale de cet équipement avec la maison de retraite ainsi que sur la nécessité de l’implication des équipes

3.1. Introduire l’intergénérationnalité

dans la maison de retraite

du personnel (soignant et de services) reste aussi tout à fait valable en France.

Par ailleurs, comme pour l’étranger, ce sont sou- vent à des crèches que les maisons de retraite s’associent, même si il convient de noter qu’il a fallu attendre les années 90 pour voir apparaître de tels projets en France6 (débutés dès les années

70 aux Pays-Bas)... L’intergénérationnalité sur laquelle s’appuie ces projets est donc bien sou- vent une intergénérationnalité entre personnes âgées et enfants.

S’attarder sur des exemples d’intégration de crèches en France s’avère toutefois intéressant pour souligner une «spécifi cité» française : le poids de sa réglementation et de ses normes. Ainsi, dans le cas du projet de l’hôpital de Saint- Lô, les personnes âgées doivent sortir en exté- rieur pour se rendre à la crèche, des raisons d’hygiène ayant été invoquées pour justifi er cette séparation lors de la conception.

De fait, dans nombre d’exemples, crèches et hé- bergements des personnes âgées sont dans des espaces distincts : les échanges spontanés sont alors réduits à des relations visuelles et l’impli- cation des personnels des deux établissements s’avère primordiale pour initier des rapports plus réguliers, et donc plus intéressants.7

6 - Avec par exemple la Mapad des Cristallines à Lyon, qui regroupe 90 lits et une halte-garderie au rez-de-chaussée. 7 - C’est par exemple le cas pour les logements-foyer Arepa de la Closeraie à Bessancourt. Les 60 studios construits en 1988, sont en eff et distincts de la halte-garderie, ajoutée en 1993, qui a une entrée distincte. Mais des contacts réguliers ont lieu car ce projet intergénérationnel est porté par le per- sonnel.

Par ailleurs, évoquer les maisons de retraite françaises qui «s’ouvrent à l’extérieur» ne peut pas se faire sans mentionner le cas de la Rési- dence de l’Abbaye de Saint-Maur, qui constitue l’un des exemples les plus aboutis de mutation de maison de retraite.

La Résidence de l’Abbaye