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Le droit de visite des personnes

Section 1 : Les pouvoirs généraux de contrôle des agents des douanes

A. L'objet du droit de contrôle général

3. Le droit de visite des personnes

1. Cette notion de visite des personnes recouvre plusieurs cas allant du contrôle simple de l'identité déjà évoqué à la véritable fouille à corps.

Dans cette hypothèse du droit de visite, entendu largement, le douanier a la faculté de procéder à une fouille pour découvrir l'infraction, alors que le policier ne peut user de ses

58 Cass. crim. 14 nov. 1996, Dr. pénal 1997, comm. n° 49.

59 L'article 38 alinéa 4 du Code des douanes, complété en 2008, vise notamment les précurseurs de drogues, les matériels de guerre, les produits à double usage, les produits du corps humain, aux tissus ou cellules embryonnaires ou fœtaux, aux sources artificielles et naturelles de radionucléïdes, les substances classées comme stupéfiants ou psychotropes, certaines catégories de médicaments, les marchandises contrefaites, les déchets, les objets comportant l'image d'un mineur à caractère pornographique, les biens culturels.

60 Ce qui a été le cas pour les viandes bovines par arrêté du 24 juillet 2001 portant application de l'article 38alinéa 5 du Code des douanes. Voir également l'arrêté du 1è janvier 2007, JO é » janv. 2007, p. 1291

pouvoirs de contrainte que dans la mesure où il a déjà démontré l'existence d'une flagrance. L'exercice du droit de visite douanier est toujours préventif, c'est à dire, sans nécessité de l'existence d'un indice apparent. Cette caractéristique du droit de visite douanier exorbitant du droit commun n'est pas contestée. De plus, le fait pour le Code des douanes d'évoquer la « visite des personnes » sans autre précision laisse la possibilité de contrôles variés. La pratique douanière a eu tendance à retenir une conception large de l'exercice du droit de visite des personnes conduisant ainsi a jurisprudence à poser certaines limites. Toute la difficulté consiste dans la nature des opérations douanières réalisées au cours de la visite des personnes. La palpation de sécurité est admise, comme en droit commun, afin de garantir la sécurité des fonctionnaires procédant au contrôle. Les agents des douanes peuvent ainsi vérifier également que la personne ne dissimule pas de marchandise de fraude. La question qui a dû alors être précisée par la jurisprudence est celle de « l'étendue de la personne » . Où s'arrête « la personne », en d'autres termes, la visite des personnes s'étend-elle aux accessoires portés sur elle ? La question est celle de la frontière entre droit de visite et acte assimilable à une perquisition, nécessitant une autorisation judiciaire. La jurisprudence autorise ainsi sur le fondement de l'article 60 du Code des douanes la fouille des bagages et sacs à main, attaché- case portés par la personne contrôlée61. Des arrêts concernant la fouille de porte-documents ou d'agenda ont réaffirmé que la procédure de l'article 60 du Code des douanes pouvait s'appliquer à la découverte des éléments permettant de caractériser une infraction, qui sont trouvés lors de la fouille de bagages62. La chambre criminelle avait antérieurement semblé poser une limite au droit de visite en faisant valoir le caractère non volontaire de la remise de documents trouvés dans un portefeuille, ce qui s'apparentait à une perquisition63.

Si l'on admet aisément le droit pour les agents des douanes de procéder à une palpation de sécurité, comme tout agent de la force publique, l'article 60 du Code des douanes autorise les douaniers à pratiquer la fouille à corps pour la recherche de la fraude. Et non pas, là encore, comme le ferait la police judiciaire uniquement dans les cas de flagrance. La personne contrôlée ne peut s'y opposer. Cette dernière en cas de refus, verrait relever à son encontre l'infraction d'opposition à fonction, contravention prévue à l'article 413 bis du Code des

61 Cass. crim. 26 fev. 1990, Bull. crim. n° 93 ; Cass. crim. 27 juin 1988, Bull. crim. n° 290 62 Cass. crim. 18 avr. 1988, Bull. crim. n° 162

Cass. crim. 20 fev. 1990, Bull. n° 93, D. 1991, somm. p. 171 note Pannier, Rev. sc. crim. 1991, p. 96, obs. J. Beaune.

douanes. L'exercice du droit de visite à corps suppose la rétention de la personne, ce qui est doublement attentatoire aux libertés individuelles. Cette rétention ne doit donc pas excéder la durée strictement nécessaire au contrôle, c'est à dire à la réalisation de la visite et à l'établissement du procès-verbal64.

2. Sur le fondement de l'article 60 du Code des douanes, au sein de la notion de « visite des personnes », les agents des douanes peuvent proposer à la personne contrôlée de se soumettre à un test de dépistage de la présence de stupéfiants dans le corps. Les douaniers proposent l'examen médical à la personne suspectée. Le consentement préalable de l'intéresse doit être recueilli. A défaut de l'accord de l'intéresse, la loi prévoit une seconde procédure de fouille in corpore qui permet de passer-outre le refus de la personne suspectée. La personne contrôlée doit être avisée dans une langue qu'elle comprend de la faculté de refuser un tel test. Le refus de se soumettre à un tel test n'est pas sans conséquence, puisqu'il peut constituer « un indice sérieux » permettant la mise en œuvre de l'article 60 bis du Code des douanes. La loi n° 87-1157 du 31 décembre 1987 a en effet intégré dans la législation une procédure propre au droit douanier. Cette loi autorisant la visite in corpore prévoit deux situations en fonction de l'attitude de la personne que les douaniers entendent soumettre au contrôle. L'article 60 bis du Code des douanes suppose « des indices sérieux laissant présumer qu'une personne transporte des produits stupéfiants dissimulés dans son organisme » . Une circulaire du Ministère de la justice définit des indices de nature à susciter l'intérêt des douaniers pour le contrôle d'un voyageur 65. Il s'agit de « l'absence de bagages ; la brièveté de la durée du séjour en France ; le pays de provenance, cas, en particulier, des pays producteurs de substances stupéfiantes ; la date et le lieu de délivrance du passeport ; le mode de paiement du billet d'avion ; le lieu de délivrance du billet par rapport au domicile ; la découverte en quantité importante de certains types de produits pharmaceutiques dans les bagages du voyageur ; son comportement et sa gène pour se déplacer ; la communication par des services tiers, services de police ou de douane étrangers, de renseignements circonstanciés désignant le passager concerné comme étant porteur de stupéfiants » . Ces indices dont certains sont précis, d'autres généraux restent étrangers à toute notion de flagrance, l'infraction n'étant pas encore constatée c'est le résultat positif des examens médicaux qui fait débuter la flagrance et permettra la retenue douanière.

64 Cass. crim. 15 juin 1987, Bull. crim. n° 249

L'article 60 bis du Code des douanes prévoit une première phase non judiciaire. Mais s'agissant d'une mesure particulièrement attentatoire aux libertés individuelles, l'autorisation de l'autorité judiciaire est nécessaire, juge des libertés et de la détention, un juge du siège garant des libertés individuelles. De plus, la circulaire du Ministère de la justice du 1er février 1998 impose aux douaniers de fournir à l'autorité judiciaire suffisamment de renseignements circonstanciés, même si des procédures d'urgence avec un formalisme allégé ont été prévues. La découverte de la marchandise de fraude constituant la flagrance, elle revêt une grande importance dans le déroulement de la procédure douanière puisqu'elle permet le placement en retenue douanière et les opérations de visite domiciliaire.

La jurisprudence a été amenée à préciser les conditions du contrôle opéré sur le fondement de l'article 60 du Code des douanes, en particulier la durée de ce contrôle et les moyens coercitifs à la disposition des agents des douanes lors d'un tel contrôle.