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Données épidémiologiques sur la consommation de cannabis

CHAPITRE II LE CANNABIS

5. Données épidémiologiques sur la consommation de cannabis

La consommation de cannabis est en augmentation dans l’ensemble des pays européens (Choquet, 2004 ; ISPA, 2005 ; OEDT, 2003), ainsi qu’aux USA (Hall et al., 2006 ; Rey et al. 2004). En effet, il s’agit de la substance psychoactive illégale la plus consommée dans les pays occidentaux (Coffey et al., 2002 ; Hall et al., 2006 ; ISPA, 2006 ; Teeson, Lynskey, Manor, & Baillie, 2002 ; Zimmer & Morgan, 2000 ). La littérature montre que, même si la fréquence de cette consommation tend à diminuer à partir de l’âge de 25 ans (Lynskey et al., 2006; Perkonigg et al, 1999), elle débute de plus en plus tôt et touche particulièrement les adolescents (Hall et al., 2006 ; Fergusson et al, 2002 ; Young, Corley, Stallings, Rhee, & Crowley-Hewitt, 2002 ; Swift, Copeland, & Hall, 1998). Aujourd’hui, la consommation de

cannabis constitue une préoccupation grandissante pour les organismes de santé publique de

la plupart des pays occidentaux, notamment en Europe.

Figure 1 : Consommation de cannabis en Europe auprès des 15-34 ans au cours des 12 mois précédant l'enquête. Source : ISPA, 2004 - Brochure "Cannabis - État des lieux en Suisse".

En France, plusieurs enquêtes nationales sur la consommation de substances ont été menées ces dix dernières années7 (Choquet, 2004). Ces enquêtes ont été réalisées auprès de larges

populations comprenant 1000 à 1200 adolescents scolarisés (école secondaire). Elles mettent en évidence le fait que la consommation de cannabis a considérablement augmenté et que son usage s’est banalisé. Parmi les adolescents de 18 ans, le pourcentage correspondant aux sujets ayant consommé au moins une fois du cannabis est passé de 26 % en 1993 à 59 % en 2003. En ce qui concerne les adolescents plus jeunes (14-15 ans), la proportion de ceux qui ont goûté au moins une fois la substance est passée de 7 % en 1993 à 21 % en 2003. La consommation des garçons est dans tous les cas légèrement plus élevée que celle des filles. Le pourcentage des consommateurs réguliers8 chez les 14-15 ans est passé de 0.5% en 1993 à

4,4% en 2003 ; parmi les 16 -17 ans, de 5,5 % au cours du même intervalle.

0% 10% 20% 30% 40% 50% 1993 1999 2003 12-13 ans 14-15 ans 16-17 ans

Figure 2 : Evolution de la consommation de cannabis au cours de la vie en France. Source : INSERM 1993 ; ESPAD 1999 et 2003 - INSERM-OFDT-MJENR.

Pour ce qu’il en est des données épidémiologiques en Suisse, la consommation de cannabis montre également une augmentation importante au cours des deux dernières décennies. En considérant les tendances de l’évolution à long terme, le taux actuel de consommation de cannabis rejoint, après un pic en 2002, celui de 1998. En effet, la tendance continuellement à

7 Une enquête a été réalisée en 1993 par l’INSERM, (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale), une autre réalisée en 1999 par l’ESPAD, (European Study Project on Alcohol and Other Drugs), en collaboration avec l ‘OFDT, (Observatoire Francis des Drogues et Toxicomanies). Ces deux derniers organismes ont réalisé une nouvelle enquête en 2003.

8 Les enquêteurs considèrent une consommation « régulière » lorsque celle-ci dépasse 10 prises au cours des 12 derniers mois (Choquet, 2004).

la hausse à partir de 1986 s’est stabilisée ces 3 dernières années (ISPA, 2006). D’après les données des enquêtes suisses sur la santé (ESS) réalisées en 1992/93 et en 1997, cette augmentation du nombre de consommateurs de cannabis s’accompagne d’une chute de l’âge auquel débute cette consommation, âge qui se situe désormais en-dessous de 16 ans (Müller & Gmel, 2002).

Selon les études réalisées en 2003 par l’Institut Suisse de Prévention de l’Alcoolisme et Autres Toxicomanies, 225 000 personnes consomment actuellement du cannabis, représentant 4.7 % de la population suisse âgée de 15 à 64 ans (ISPA, 2004). La consommation actuelle (12 mois précédents l’enquête) est nettement plus élevée chez les hommes (6.6 %) que chez les femmes (2.9 %). Parmi les jeunes de 15 à 24 ans, 12 % d’entre eux affirment consommer du cannabis régulièrement. Ceux-ci représentent le double des consommateurs recensés en 1992 pour la même tranche d’âge.

Figure 3 : Pourcentage de consommateurs actuels de cannabis de 15 à 24 ans d'après l'Enquête Suisse sur la Santé, 1992, 1997 et 2002 selon le sexe. Source: Office Fédéral de la Statistique, 2005.

Selon la même enquête, réalisée en 2003, environ 44% des adolescents entre 15 et 18 ans et environ 59% des jeunes adultes de 19 à 24 ans déclarent avoir eu au moins une expérience avec cette drogue. Parmi les individus entre 15 et 18 ans, 12 % se définissent eux-mêmes comme « consommateur de cannabis » (ayant consommée plusieurs fois lors de 12 moins précédent l’enquête) et environ un tiers d’entre eux en consomme encore au moment de l’enquête (ISPA, 2004). Selon une autre enquête réalisée la même année sur les comportements de santé des écolières et des écoliers (Schmid, Delgrande Jordan, Kuntsche, & Kuendig, 2003), comparativement aux années précédentes, les jeunes (de 15-16 ans) ayant

consommé au moins une fois du cannabis sont plus nombreux. De la même manière, le groupe de jeunes consommant actuellement et de manière répétée a fortement augmenté. Cependant, la proportion de jeunes n’en ayant pris qu’une seule fois est demeurée pratiquement constante. 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% 1986 1990 1994 1998 2002 2006

Figure 4 : Consommation de cannabis chez les adolescents de 15 ans en Suisse. Source : ISPA, 2006.

Les données actuelles (ISPA, 2006) montrent que le nombre d’adolescents qui ont goûté au moins une fois à cette substance diminue légèrement. En effet, en 2006, 31,5 % des adolescents de 15 ans déclarent avoir eu au moins une expérience avec le cannabis (34% des garçons et 27% des filles). Pour beaucoup d’entre eux, il s’agit juste d’un essai et ils abandonnent ensuite toute consommation. Les adolescents de 15 ans affirmant avoir consommé 40 fois ou plus au cours des douze mois précédant l’enquête représentent 5% des garçons et 2,6% des filles. En considérant les tendances de l’évolution à long terme, le taux actuel de consommation de cannabis rejoint, après un pic en 2002, celui de 1998. La tendance continuellement à la hausse à partir de 1986 semble reculer. Les auteurs du rapport pensent que différents facteurs expliquent cet effet. La sensibilisation de la population au moyen de campagnes de prévention semble être au centre de ce changement.

Toutefois, malgré cette tendance positive, il y a encore environ 10'000 adolescents de 15 ans qui fument chaque jour en Suisse. Les études montrent que, certains de ces adolescents continueront de fumer à l’âge adulte alors que d’autres parviendront à réduire leur consommation ou à l’arrêter complètement (ISPA, 2006).

Concernant la distribution de la consommation de cette substance selon le sexe, il est intéressant de constater que les garçons ont nettement plus d’expériences avec le cannabis que

les filles. De même, cette différence de consommation entre les genres est observée chez des adolescents plus âgés. Elle est surtout significative dans les extrêmes, comme le révèlent les données suivantes. Selon l’étude sur la santé et les styles de vie des adolescents âgés de 16 à 20 ans en Suisse (SMASH, Narring, Tschumper, Inderwildi Bonivento, Jeannin, Addor, Bütikofer, et al., 2003), 13% des garçons contre 4% des filles en consomment chaque jour et 58% des garçons contre 72% des filles n’ont jamais consommé de cannabis.

Une étude réalisée en Suisse alémanique auprès d’adolescents suisses montre également que les garçons ont nettement plus d’expériences avec le cannabis que les filles. Cette enquête révèle aussi que 81 % de fumeurs réguliers de tabac et 69 % des fumeurs occasionnels (ou ex- fumeurs) ont déjà consommé au moins une fois du cannabis dans leur vie (Keller et al, 2002). Selon l’enquête sur la consommation d’alcool et d’autres drogues (ESPAD- Gmel, Kuntsche, Grichting, & Rehm, 2003) effectuée en Suisse auprès de 8000 écoliers de 14 à 16 ans, 41% des garçons disent avoir expérimenté le cannabis, contre 33 % chez les filles.

Par rapport à l’accessibilité du produit, dans l’étude ESPAD, la moitié des élèves affirme qu’il leur est facile de se procurer du cannabis (Gmel et al., 2003). Seule une minorité (7%) des jeunes consommateurs se procure le produit dans la rue, la plupart dit l’obtenir à partir de leur réseau social et 20% déclare cultiver sa propre consommation.