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Domaine fr´equentiel

5.3.1 Densit´e modale

Dans le domaine fr´equentiel, la densit´e modale n(f ) correspond au nombre de modes par Hz qu’on trouve dans le syst`eme. Lors de la conception de syst`emes de r´everb´eration artificielle, une densit´e modale ´elev´ee est n´ecessaire pour obtenir un effet de r´everb´eration avec une sonorit´e naturelle. Schroeder pr´econise une valeur de n(f ) d’au moins un quart le temps de r´everb´eration

T60[74].

Pour le cas simple de la la salle parall´el´epip´edique avec des parois parfaitement rigides la densit´e modale est donn´ee par [46] :

nr(f ) = ∂Nm(f ) ∂f ≈ 4πV f2 c3 a . (5.10)

nr(f ) est proportionnelle au carr´e de la fr´equence.

On rappelle l’expression de la densit´e modale d’une plaque mince (3.12) donn´ee au §3.5 :

np(f ) ≈ LxLy − (Lx+ Ly) r 1 8πκf 1 2t0. (5.11)

Quand la fr´equence augmente, le deuxi`eme terme de np(f ) dans (5.11) devient n´egligeable et la densit´e modale est constante. On peut observer que np(f ) est proportionnelle `a t0, ce qui donne une autre interpr´etation du temps caract´eristique, par rapport `a la premi`ere interpr´etation donn´ee au§5.2.2, mais cette fois dans le domaine fr´equentiel. La densit´e modale d’une plaque est ´elev´ee quand sa surface est grande et son ´epaisseur faible (κ est proportionnelle `a l’´epaisseur). Ces consid´erations justifient les param`etres du r´everb´erateur EMT140, pour lequel on obtient

np(f ) = 1.27 modes/Hz `a partir de (5.11). En particulier, il faut des plaques minces et avec une grande surface. Cette valeur num´erique co¨ıncide bien avec la valeur obtenue exp´erimentalement au chapitre 3.

Pour les plaques, (5.11) permet d’´ecrire la r`egle de Schroeder pour avoir une sonorit´e naturelle comme une condition sur le temps de r´everb´eration T60 en fonction du temps caract´eristique de la plaque : T60]max = 2t0. Pour le r´everb´erateur EMT140, la valeur maximale de T60 donn´ee par cette condition est T60]max= 5.1 s.

5.3.2 Champ diffus et fr´equence de Schroeder

Dans l’acoustique des salles, la fr´equence de Schroeder fs est la fr´equence qui s´epare le com- portement modal du comportement r´everb´erant. Pour f > fs, il y a un recouvrement modal important et les contributions individuelles de chaque mode ne peuvent ˆetre s´epar´ees. Cette fr´equence est atteinte quand, en moyenne, on retrouve trois fr´equences propres dans une largeur de bande modale ∆f = α/π Hz [73],[46], o`u le facteur d’amortissement α gouverne la d´ecroissance exponentielle du mode e−α(ω)t.

La fr´equence de Schroeder de la plaque peut ˆetre obtenue `a partir de l’expression de la densit´e modale (5.11). La condition sur le facteur d’amortissement est alors :

α(ω) ≥ np = t0 =⇒ T60< ln(10) t0' 0.37t0[s] . (5.12)

10

1

10

2

10

3

10

4

10

−4

10

−2

10

0

10

2

10

4

10

6

f [Hz]

n

r

[modes / Hz]

S

4

S

3

S

2

S

1

S

5

Fig. 5.8: Densit´e modale du r´everb´erateur EMT140 (- - -) et des salles parall´el´epip´ediques S1, S2, S3, S4,

S5 (— ) dont les dimensions sont donn´ees au tableau 5.1.

Pour le r´everb´erateur EMT140 (t0 = 2.549 s), le facteur d’amortissement minimum pour ˆetre dans le comportement r´everb´erant d’apr`es le crit`ere de Schroeder est α = 7.4 s−1. Les mesures pr´esent´ees au chapitre 3 montrent que cet amortissement est atteint `a environ 10 kHz. La valeur de la fr´equence de Schroeder de la plaque est tr`es sup´erieure `a celle des espaces acoustiques, pour lesquels fs' 2000

p

T60/V [46]. En g´en´eral, on a fs∈ [20; 30] Hz pour les petites salles et

fs∈ [200; 300] Hz pour les grandes salles.

Dans la communaut´e scientifique ´etudiant les vibrations de structures, le crit`ere de transition entre r´egime modal et r´egime vibratoire diffus est donn´e, d’apr`es Skudrzyk [78], par la pr´esence en moyenne d’une fr´equence propre par largeur de bande. La condition de r´egime diffus des vi- brations est alors moins contraignante α(ω) ≥ 2π/t0 ou T60< 1.1t0.

Pour r´esumer, on peut dire que le temps caract´eristique t0 de la plaque est ´etroitement li´e au temps de r´everb´eration. Pour T60< 2t0 on consid`ere que la r´everb´eration a une sonorit´e per¸cue comme naturelle, et pour la condition plus restrictive T60< 0.37t0, les modes sont compl`etement m´elang´es d’apr`es Schroeder.

5.4

Conclusion

Les diff´erences entre la propagation des ondes de pression acoustique dans l’espace en trois dimensions et la propagation des ondes de flexion dans une plaque de deux dimensions sont res- ponsables de la diff´erence de comportement entre la r´everb´eration naturelle et la r´everb´eration `a plaque. La RI d’une salle est compos´ee de trois parties bien diff´erenci´ees : le son direct, les

premi`eres r´eflexions et le r´egime diffus ou r´everb´eration tardive. Pour un r´everb´erateur `a plaque, la dispersion des ondes de flexion produit l’´etalement de l’impulsion initiale, ce qui rend impos- sible l’identification du son direct et des ´echos dans la RI.

Dans le domaine temporel, le temps d’arriv´ee de l’´energie aux points d’observation du r´everb´e- rateur d´epend de la fr´equence en raison de la d´ependance fr´equentielle de la vitesse de groupe. La densit´e de r´eflexions de la plaque d´epend aussi de la fr´equence et sa valeur tr`es ´elev´ee en hautes fr´equences se traduit par un temps de m´elange tmp(f ) inf´erieur `a celui des salles habi- tuelles. Le seul param`etre de la plaque intervenant dans tmp(f ) est le temps caract´eristique t0 issu de l’adimensionnement de l’´equation de Kirchhoff-Love (chapitre 2). Cette faible valeur de

tmp(f ) et la distorsion dans la propagation des ondes ´elastiques expliquent que le r´everb´erateur `a plaque atteigne presque instantan´ement un r´egime diffus ´equivalent `a celui de la r´everb´eration tardive pour les salles. Ce ph´enom`ene a ´et´e valid´e exp´erimentalement `a partir de l’analyse de la distribution d’amplitudes des RI mesur´ees.

Dans le domaine fr´equentiel, une densit´e modale np(f ) ´elev´ee est n´ecessaire pour obtenir une r´everb´eration artificielle avec une sonorit´e naturelle, ce qui impose l’utilisation de plaques avec une faible ´epaisseur et une grande surface. Pour les plaques, np(f ) tend vers une constante d´ependant uniquement du temps caract´eristique t0, tandis que pour les espaces acoustiques, nr(f ) grandit avec le carr´e de la fr´equence. C’est pourquoi, en basses fr´equences, la densit´e modale d’un r´everb´erateur `a plaque peut ˆetre sup´erieure `a celle des salles, alors qu’elle est tr`es probablement inf´erieure en hautes fr´equences. Finalement, on montre que la condition de Schroeder, pour obtenir une r´everb´eration artificielle avec une sonorit´e naturelle, peut s’exprimer par une borne sup´erieure sur le temps de r´everb´eration de la plaque T60< 2t0.

Exploitation du mod`ele

6.1

Introduction

L’objectif de ce chapitre est de montrer la diversit´e de r´everb´erateurs `a plaque que l’on peut obtenir en faisant varier les param`etres du mod`ele. Puisque les r´everb´erateurs existants sont m´etalliques, on se restreint `a cette famille de mat´eriaux. En particulier, on compare l’acier, l’or, l’aluminium, le titane, le fer, le cuivre, l’argent, le platine et le plomb. Le caract`ere isotrope de ce type de mat´eriaux simplifie l’analyse de leur comportement vibratoire. De plus, la mod´elisation fine des principaux m´ecanismes d’amortissement des vibrations pr´edit l’amortissement `a partir de la seule connaissance des param`etres physiques du mat´eriau et des param`etres g´eom´etriques de la plaque, sans avoir recours `a la mesure. Pour le choix des param`etres g´eom´etriques, on s’inspire des r´everb´erateurs `a plaque r´eels sur lesquels ont ´et´e faites les mesures, l’EMT140 et l’EMT240. Leurs param`etres sont pr´esent´es au tableau 6.1. Le r´everb´erateur EMT240 est d´ecrit

Mat´eriau Epaisseur h [mm]´ Surface S [m2]

EMT140 acier 0.5 2

EMT240 or 0.018 0.0719

Tab. 6.1: Mat´eriau, ´epaisseur et surface des r´everb´erateurs r´eels les plus populaires : le r´everb´erateur `a plaque EMT140 et la feuille d’or EMT240.

en d´etail `a l’annexe B. Quand l’´epaisseur de la plaque est de l’ordre du millim`etre (EMT140) on parle de tˆole, tandis que pour des ´epaisseurs de l’ordre de 0.01 mm (EMT240) on parle plutˆot de feuille. Une feuille tr`es fine peut pr´esenter des difficult´es technologiques comme par exemple la difficult´e `a la produire avec une ´epaisseur uniforme, la fragilit´e de la feuille ou la sensibilit´e aux bruits m´ecaniques et acoustiques. Pour des ´epaisseurs de l’ordre de celle de l’EMT140, on peut supposer qu’il n’y a pas de contraintes technologiques importantes lors de la production ou de l’utilisation de la plaque. Pour l’´epaisseur de l’EMT240, le choix de certains m´etaux peut poser des probl`emes car le mat´eriau doit ˆetre capable de r´esister `a la tension appliqu´ee sur les bords de la feuille. D’autre part, la corrosion que subissent certains m´etaux dans des environnements humides, comme le fer ou le plomb, peut avoir comme cons´equence la perte de mati`ere de la feuille, qui devient critique pour ces faibles ´epaisseurs.

Aujourd’hui il est possible de se procurer des feuilles d’or, de cuivre, d’argent ou d’aluminium, dont les usages sont tr`es vari´es : par exemple, la feuille d’aluminium, dont l’´epaisseur est d’envi- ron 20 µm, sert `a emballer et prot´eger des aliments ; la feuille d’or est utilis´ee dans des domaines

aussi vari´es que l’artisanat d’art ou les soins dentaires.

Ces consid´erations technologiques sont `a prendre en compte pour la r´ealisation physique d’un r´everb´erateur `a plaque, mais n’ont aucune incidence pour sa synth`ese sonore.