III. La voie de signalisation Notch chez les vertébrés
4. Dysfonctionnement de la voie Notch et maladies chez l’Homme
4.3. Dll1 et Holoprosencéphalie
Récemment, l’équipe a émis l’hypothèse qu’une diminution de l’activité de la voie Notch au cours du développement du cerveau pourrait potentialiser l’apparition de l’Holoprosencéphalie.
En effet, le gène Dll1 codant pour un ligand des récepteurs Notch a été associé à l’Holoprosencéphalie chez plusieurs patients. Ce gène est délété à l’état hétérozygote chez 4 patients présentant un phénotype d’Holoprosencéphalie (2 formes alobaires, 1 forme semilobaire et 1 microforme chez 2 frères). Cependant, cette délétion dans la région 6qter, comporte de nombreux autres gènes. La plus petite région délétée (2,2 MB) comprend 14 gènes. C’est donc par hiérarchisation bioinformatique dans un premier temps que notre équipe a identifié DLL1 comme le meilleur gène candidat (Aerts et al., 2006). L’étude moléculaire du gène DLL1 par séquençage a ensuite été mise au point et une série de 100 proposants a été analysée. Une délétion de 3 nucléotides a été identifiée concernant deux codons impliqués dans le domaine d’ubiquitination. D’autre part, l’expression de Dll1 est compatible avec un rôle au cours du développement précoce du cerveau antérieur.
Par ailleurs, les mutants hétérozygotes pour Dll1 présentent des anomalies de la ligne médiane mais pas de réel phénotype HPE (Przemeck et al., 2003). Cependant, il n’existe pas à ce jour d’études approfondies des structures cérébrales chez ces embryons qui présentent une létalité embryonnaire précoce (E11). Des inactivations conditionnelles et des surexpressions de Dll1 dans le télencéphale ont pu mettre en évidence un rôle dose dépendant dans la neurogenèse de la zone ventriculaire (Kawaguchi et al., 2008). Cela conforte le rôle important de Dll1 au cours du développement du cerveau mais à des stades plus tardifs que ceux impliqués dans l’HPE.
Les études d’invalidation des principaux acteurs de la voie Notch ont mis en évidence son caractère indispensable dans la différenciation et le développement des tissus comme le système nerveux central.
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OBJECTIFS DE LA THESE
Mon travail de thèse s’est inscrit dans le projet de recherche de l’équipe « Génétique des Pathologies Liées au Développement » au sein de l’unité CNRSUMR6290. Le travail mis en place sur la thématique de l’HPE a débuté en 1996 et a pour objectif d’améliorer les connaissances cliniques, moléculaires et physiologiques inhérentes à cette pathologie. Dans ce but, des études sont réalisées sur des cohortes de patients permettant d’identifier des mécanismes moléculaires impliqués qui seront également analysés grâce à de modèles animaux. Ces deux approches sont totalement complémentaires et ont été incluses dans mon travail de thèse. Cela m’a permis d’avoir une vision globale des processus perturbés au cours de l’apparition de l’HPE.
Validation de l’implication de la voie de signalisation Notch dans l’Holoprosencéphalie
Il est ressorti des travaux préalables réalisés par l’équipe que la voie de signalisation Notch pourrait jouer un rôle dans l’apparition d’une anomalie de type HPE. L’un des objectifs de ma thèse a donc été de caractériser l’expression des composants de la voie Notch au cours du développement du cerveau antérieur en conditions normales de développement.
Pour cela j’ai utilisé le modèle d’embryon de poulet. J’ai ainsi pu décrire une activité de la voie Notch spécifiquement restreinte au niveau de l’hypothalamus. Par la suite, j’ai mis en place une technique originale de culture d’embryons pour réaliser des inhibitions pharmacologiques. Cette approche combinée à une analyse transcriptomique m’a permis d’étudier les répercussions d’une inactivation de la voie Notch au cours du développement de l’hypothalamus. Notre étude a permis d’identifier de nouvelles cibles de la voie Notch, tels que Tagln3, Chga ou Chrdl1 au niveau de différents territoires neurogéniques, en particulier au niveau de ceux de l’hypothalamus.
La neurogenèse au niveau de ce territoire est encore mal définie et bien que certaines études y associent la voie Notch, aucune ne fait part de son mode d’action.
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Par ailleurs, l’étude d’expression de Shh, gène majeur de l’HPE, chez des embryons déficients pour la voie Notch, m’a permis de montrer que cette voie contribuait à la régulation de ce gène. Pour la première fois cette étude fonctionnelle permet le lien entre l’HPE et la voie Notch.
Le modèle multihit pour l’Holoprosencéphalie : Etude clinique chez l’homme puis
moléculaire chez l’embryon de poulet
Dans l’hypothèse multihit pour l’Holoprosencéphalie, il a été mis en avant que différents facteurs, d’origine génétique ou environnementale, pourraient retentir sur une ou plusieurs voies de signalisation et en entraîner la dérégulation. La modification des interactions entre ces voies de signalisation qui s’en suit, va agir au niveau spatiotemporel sur la mise en place du cerveau antérieur. De plus, le caractère dosedépendant entre les différents acteurs des voies de signalisation corrèle avec la diversité des phénotypes observés dans l’HPE.
Afin de consolider le modèle multihit, nous avons choisi dans un premier temps de regrouper les données cliniques et moléculaires des patients porteurs d’une HPE. Les données ont été entrées dans une base de données dédiée, accessible en ligne. Sandra Mercier a ensuite réalisé des recherches de corrélations génotypephénotype. Ce travail avait pour but de conforter le modèle multihit chez l’Homme en dégageant des signes cliniques caractéristiques d’une voie de signalisation. Par ailleurs, Sandra Mercier a pu définir un algorithme diagnostique afin de préciser le conseil génétique.
Dans un deuxième temps, nous avons choisi de valider ce modèle multihit en utilisant un modèle animal, l’embryon de poulet. Pour cela, deux voies majeures de l’Holoprosencéphalie, les voies Nodal et Shh, ont été testées.
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