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Distribution spatiale de la mortalité : entre facteurs de risque de l’incidence et facteurs pronostiques du cancer du sein

LES DISPARITES FACE AU CANCER DU SEIN : ETAT DE L’ART ET PERSPECTIVES DE RECHERCHE

II. ENVIRONNEMENT URBAIN ET CANCER DU SEIN : UNE EQUATION INCERTAINE EQUATION INCERTAINE

2) Distribution spatiale de la mortalité : entre facteurs de risque de l’incidence et facteurs pronostiques du cancer du sein

a) La distribution de la mortalité due au cancer du sein : une conséquence de l’incidence ?

Les disparités spatiales de mortalité par cancer du sein ont tendance à diminuer entre les régions françaises depuis les années 1970 (INCa, 2008). Au début de cette période, la distribution de la mortalité se superposait globalement à celle de l’incidence c’est-à-dire qu’elle était plus élevée dans le nord et l’est de la France. Autrement dit, les régions où se trouvaient les grandes agglomérations françaises correspondaient aux espaces où les femmes mouraient davantage du cancer du sein. Cependant à partir de la fin des années 1980, au moment où la mortalité par cancer a commencé à globalement diminuer en France, certaines régions comme l’Alsace et la région Rhône Alpes ont vu leur taux de mortalité par cancer du sein décliner de façon importante. En revanche, le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie, la Haute Normandie tout comme l’Ile-de-France ont conservé des taux élevés entre 1970 et 2000.

Par ailleurs, selon des estimations plus récentes réalisées par l’INCa à l’échelle des départements français pour la période 2011-2013, les disparités de mortalité étaient plus élevées que les disparités d’incidence estimées en 2008-2010. En effet, le coefficient de variation5 relatif aux taux de mortalité à l’échelle départementale s’élevait à 12 sur la 5 Le coefficient de variation correspond au rapport entre l’écart-type et la moyenne d’une série statistique. Il permet de comparer plusieurs séries dont l’étendue et les valeurs sont différentes. Plus il est élevé, et plus la dispersion autour de la moyenne est importante.

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période étudiée tandis que celui correspondant aux données d’incidence était légèrement supérieur à 7. Ainsi, les différences de mortalité entre les départements français étaient plus marquées, comme nous pouvons l’observer sur la carte n°8 ci-dessous : une nette fracture se dessine entre le sud du pays dont les taux de mortalité sont globalement faibles, et le nord du pays. A l’exception notable du Lot et des Hautes-Alpes, les départements de l’Auvergne, du Rhône-Alpes et du Midi-Pyrénées affichent des taux particulièrement faibles de mortalité par cancer du sein (entre 9 et 13 pour 100 000 femmes).

En revanche, l’ensemble des départements du nord de la France jusqu’à l’Yonne en passant par l’est de Paris, affichent des taux supérieurs à 17 pour 100 000 femmes. Les

Carte n°8 : Taux de mortalité par cancer du sein dans les départements français. Période 2011-2013

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départements localisés dans l’ouest de l’Ile-de-France enregistrent également des taux de mortalité plus élevés que la moyenne française, à l’instar des départements du Cher et de la Vienne. Finalement, le niveau d’urbanisation du département ne correspond plus en rien à la distribution de la mortalité due au cancer du sein. Les départements fortement urbanisés comme par exemple le Rhône ou les Bouches-du-Rhône affichent par exemple, de faibles taux de mortalité par cancer du sein.

Dans le cas de l’Ile-de-France, la région fait partie des zones urbaines françaises qui enregistrent à la fois une forte incidence et une forte mortalité liée au cancer du sein. Mais contrairement aux disparités d’incidence, les niveaux de mortalité entre les départements franciliens n’apparaissent pas significativement différents entre 2007 et 2010 selon l’ORS (ORS IDF, 2015). Nos estimations retrouvent des résultats sensiblement identiques pour la période 2004-2008, bien que la Seine-et-Marne enregistrait une légère surmortalité comparativement à la moyenne régionale (p<0.05).

Un élément important souligné par l’Observatoire régional de santé est le fait que la diminution de la mortalité entre 1996 et 2006 a été beaucoup plus rapide dans les départements de la première couronne que dans les périphéries de la région Ile-de-France (ORS IDF, 2011).

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Même si les départements de Paris et de première couronne enregistraient des taux plus élevés en 1996, la mortalité a baissé d’environ 6% au sein de ces espaces. Toutefois, les Hauts-de-Seine enregistrent une diminution moindre, équivalente au pourcentage régional. La Seine-et-Marne est l’unique département francilien pour lequel la mortalité par cancer du sein est restée quasiment stable en 10 ans. Les disparités d’incidence entre les départements franciliens ainsi que leur évolution depuis les années 1990 pourraient potentiellement expliquer ces différentiels de mortalité. Dans notre travail, nous ne disposons d’aucune donnée nous permettant d’évaluer l’évolution départementale de l’incidence depuis cette période. Cependant, les taux d’incidence estimés à l’échelle des départements pour la période 2010-2014 ne sont pas statistiquement corrélés aux ratios de mortalité d’après nos résultats. En effet, les départements où l’incidence est élevée comme à Paris ou dans les Hauts-de-Seine enregistrent un moindre taux de mortalité que la Seine-et-Marne. Si l’on introduit la part des cancers diagnostiqués tardivement et le niveau de désavantage social dans le modèle statistique, la mortalité n’est pas plus expliquée par ces facteurs de risque connus d’un mauvais pronostic. Dans le cas du département des Hauts-de-Seine par exemple, le taux élevé de stades avancés au diagnostic n’est pas corrélé avec le niveau de mortalité car ce dernier est plus faible que la moyenne régionale. Dans le paragraphe suivant, nous allons voir que la répartition de la mortalité apparaît encore plus disparate à l’échelle des communes et des cantons franciliens.

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b) Une mosaïque des niveaux de mortalité entre les villes et les cantons franciliens D’après la carte n°9 produite à partir des données du CépiDC pour la période 2004-2008, les communes de la Seine-et-Marne enregistrent effectivement des ratios standardisés élevés de mortalité : l’est et la moitié sud du département affichent des chiffres supérieurs à 120 notamment autour de Coulommiers et de Provins. Les communes de l’ouest du département enregistrent également des ratios élevés. Ce phénomène se prolonge dans l’est et le sud de l’Essonne, dont les ratios autour de Yerres, d’Etampes et de Dourdan sont importants.

Certains clusters sont également visibles dans la partie centrale du Val-d’Oise, le quart nord-est des Yvelines avec notamment la ville de Vélizy-Villacoublay qui enregistre le SMR le plus important de la région à l’échelle communale, à hauteur de 176. Le nord des Hauts-de-Seine, notamment Rueil-Malmaison (130) et Colombes (120), enregistre une légère surmortalité par rapport au sud du département. Paris affiche globalement une surmortalité, hormis les arrondissements centraux où les ratios sont sensiblement moins

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élevés. En revanche, la Seine-Saint-Denis présente une sous-mortalité par rapport aux autres départements (mais non significative statistiquement).

Comme à l’échelle des départements, nous avons réalisé une régression linéaire multiple à partir de plusieurs variables pour tenter d’expliquer la distribution communale de la mortalité. Etant donné que les ratios de mortalité et les taux d’incidence ont été calculés à différentes échelles dans les communes peu peuplées de la seconde couronne, nous avons réalisé cette analyse pour les communes de Paris et de la première couronne. D’après les résultats, les taux communaux de stades avancés au diagnostic, une fois le niveau de l’incidence du cancer du sein pris en compte, n’est pas statistiquement corrélé aux ratios de mortalité. De la même façon, le désavantage social n’explique pas non plus les disparités observées de mortalité due au cancer du sein à l’échelle communale.

Encadré n°5 : Méthode d’estimation des taux de mortalité par cancer du sein à l’échelle des communes d’Ile-de-France

Les estimations de mortalité ont été produites à partir des données fournies par le CépiDc pour la période 2004-2008. Les effectifs de décès par cancer du sein ont été agrégés sur 5 ans afin de disposer de suffisamment de cas pour calculer les taux à fine échelle. Comme pour le calcul des taux d’incidence, un seuil de 15 000 habitants a été retenu pour les estimations communales. Pour les communes dont la population était en dessous de ce seuil, l’échelle cantonale a été privilégiée (Rican et al., 2010). Il aurait été judicieux d’utiliser le même lissage que celui employé pour les estimations d’incidence afin de comparer plus précisément ces deux jeux de données. Cependant, l’analyse de la mortalité a été réalisée bien avant la réception des données du SNIIR-AM et la méthodologie employée au départ n’a pas été réajustée.

Le dénominateur utilisé pour le calcul des taux et des ratios de mortalité était la population du recensement INSEE en 2006. Etant donné que les décès par cancer du sein n’étaient rapportés que pour les femmes de plus de 25 ans à l’échelle des cantons, nous avons pris en compte le dénominateur de population pour la même tranche d’âge.

Par ailleurs, nous avons fait le choix de ne pas effectuer de lissage spatial. Cette méthode présente l’avantage d’atténuer les variations aléatoires des effectifs de mortalité en pondérant ces chiffres sur les valeurs observées dans les espaces adjacents. Néanmoins, le lissage spatial annule toute possibilité de repérer les situations extravagantes. Or, il n’est pas exclu et particulièrement dans un environnement urbain, que des communes spatialement proches présentent des profils de mortalité extrêmement différents (ORS IDF, 2016). Enfin, la population de référence utilisée pour la standardisation sur l’âge était la population francilienne, ce qui ne permet pas de comparer nos estimations avec d’autres travaux réalisés en France.

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3) Comparaison entre les variations spatiales de l’incidence et de la mortalité

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